L'été des secrets

Elle était très secrète, non par choix, mais par nécessité. Dans son cas, c'était une question de vie ou de mort. Son existence était faite de mensonges qui ne reposaient sur rien et de secrets qu'elle ne pourrait jamais partager. Chez elle, les seuls détails authentiques résidaient dans le vernis superficiel, un peu comme le personnage qu'on se compose pour aller à un cocktail—façon de parler, d'ailleurs, car on ne l'invitait jamais à un cocktail. Sa véritable personnalité restait enfouie au plus profond d'elle-même, et cela valait sans doute mieux

Pour apprécier les bienfaits de la famille, il lui suffisait d'observer autour d'elle. L'amour était partout : dans le regard d'une femme quand son mari rentrait le soir, dans la main d'une mère sur le front fiévreux de son enfant, dans les rires de sœurs partageant une plaisanterie ou dans l'attitude protectrice d'un frère surveillant ses cadets. Une famille était un filet de protection tendu pour amortir la chute. Un bouclier invisible destiné à atténuer les coups.

Les patients en phase terminale étaient de toutes sortes : il y avait des sages et des imbéciles, des esprits logiques et d'autres simplets, certains étaient remplis de joie, de désespoir ou encore d'effroi... En fait, les mourants ressemblaient beaucoup aux vivants. Simplement, ils avaient une espérance de vie plus courte. Et des épreuves physiques à affronter.

Il y a autant de fins de vie que de parcours de vie—certaines sont empreintes de calme, d'autres de théâtralité et de faste tapageur, d'autres encore sont marquées par un sentiment d'achèvement, mais trop nombreuses, hélas, sont celles dominées par les regrets. Les regrets... ce poison qui tue à petit feu tout ce qui apporte du bonheur à quelqu'un.

Au fil des années, elle avait appris à dire la vérité chaque fois que c'était possible. Cela rendait les mensonges plus faciles à insérer.