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sur 1212 notes
Irvin Yalom fait partie des auteurs dont le lectorat exigeant et habité de questionnements existentiels apprécie le talent de vulgarisation.

L'idée de faire cohabiter dans un même roman Baruch Spinoza, le philosophe du 17ème siècle, et Alfred Rosenberg, l'idéologue du national-socialisme, est pour le moins originale. Irvin Yalom prend visiblement plaisir à relever les défis audacieux et son roman ''Le problème Spinoza'' met en parallèle le parcours de vie de deux hommes à trois siècles d'intervalle, deux hommes que tout sépare hormis peut-être la célébrité posthume.
Deux essais, le premier complexe, le second effrayant, ont servi de base à cette oeuvre romanesque. Psychiatre de formation et féru de philosophie, Irvin Yalom a trouvé tour à tour dans “l'Éthique” de Spinoza et dans “Le Mythe du vingtième siècle” de Rosenberg le terreau inspirateur à ce roman qui restitue alternativement d'un chapitre à l'autre la pensée du philosophe juif et celle du criminel nazi.

Rationaliste par excellence, Spinoza croyait à une religion universelle de la raison dans laquelle Dieu est la Nature. Pour Spinoza il n'y a pas de bonheur éternel dans l'au-delà, parce que l'au-delà n'existe pas. Son excommunication à l'âge de 24 ans par la communauté juive d'Amsterdam l'obligera à adopter une condition de paria jusqu'à la fin de sa vie. Cet inconfort extrême ne l'empêchera pas de poser les bases d'une philosophie novatrice et d'être reconnu comme un précurseur des Lumières. Depuis lors, beaucoup se reconnaissent dans le spinozisme, ainsi l'illustre Goethe vénérait-il la pensée de Spinoza.

C'est bien là que le bât blesse et le théoricien nazi Rosenberg se perd en conjectures : comment le grand Goethe, l'emblème, la fierté du peuple allemand depuis un siècle, a-t-il pu être subjugué par les écrits d'un juif ? Comment a-t-il pu écrire que Spinoza était un être remarquable ?
Adepte depuis l'adolescence des thèses racialistes de l'écrivain Chamberlain selon lequel subsiste à l'état pur en Allemagne une race supérieure, Rosenberg sera obnubilé sa vie durant par la préservation de cette soi-disant pureté de la race aryenne. Il pensait déjà dans les années vingt que la question juive ne serait résolue que le jour où le dernier juif aurait quitté le grand espace allemand.
Le délire paranoïaque de Rosenberg verra son ultime concrétisation deux décennies plus tard dans l'horreur de la “Solution finale”.

Spinoza et Rosenberg épanchent leurs états d'âme respectifs auprès de personnages fictifs tout droit sortis de l'imagination de l'auteur. Des esprits chagrins ne manqueront pas de souligner la grande latitude avec laquelle Irvin Yalom revisite l'Histoire. Qu'importe ! La grande majorité des lecteurs devrait apprécier la construction savamment étudiée de ce roman.
Le Problème Spinoza” semble dépasser les bornes du roman historique mais les fantaisies de l'écrivain ne sont jamais hors du champ du plausible.

Il est rare de trouver un livre à ce point passionnant de bout en bout et la pensée de Spinoza traduite par Irvin Yalom est d'une incroyable limpidité comme en témoigne ce court extrait :
”Il semble paradoxal de dire que les hommes sont plus utiles les uns aux autres quand ils suivent chacun leur propre chemin. Mais il en va ainsi lorsqu'il s'agit d'hommes de raison. Un égoïsme éclairé mène à l'entraide. Nous avons tous en commun cette capacité à raisonner, et le vrai paradis sur terre adviendra le jour où notre engagement à comprendre la Nature, ou Dieu, remplacera toutes les autres attaches, qu'elles soient religieuses, culturelles ou nationales.”

Les espérances utopiques du grand philosophe ne sont malheureusement pas près de se réaliser. L'actualité apporte chaque jour son lot de malheurs et la barbarie des hommes semble sans limite et sans fin comme si les enseignements tirés des périodes les plus sombres de l'Histoire étaient vite oubliés.

Heureusement, quelques artistes arrivent encore de temps à autre à éveiller les consciences par leur faculté à entrevoir la face cachée des choses, à mettre en lumière l'inacceptable.
Un portraitiste du clair-obscur aurait peut-être été le plus à même de saisir l'âme tourmentée de l'idéologue nazi Rosenberg, de transposer sur la toile sa terrifiante noirceur !
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Belle découverte que le Problème Spinoza.

J'y suis rentré à reculons, la philo et moi n'ayant jamais été soudé comme les six doigts de la main. Puis s'installe très rapidement une trame brillante et insolite. le portrait croisé de deux hommes que tout oppose. Spinoza, homme fort de son intégrité intellectuelle en perpétuelle quête de bonheur, du bonheur dans son plus simple appareil, et qui n'hésitera pas à s'opposer aux principes fondateurs de tout un peuple, le sien, au risque de s'aliéner toute la communauté. Parallèlement l'on découvre le Reichleiter Rosenberg totalement déboussolé à l'idée qu'un petit juif ait pu être porté au pinacle par Goethe qu'il admire par-dessus tout, Hitler excepté. Véritable éminence grise du Nazisme, Rosenberg n'aura de cesse de se construire et d'évoluer au sein de l'appareil d'état, quémandant douloureusement la caresse servile d'un führer qui l'utilise plus qu'il ne l'apprécie. Deux portraits forts et complexes tout aussi passionnants qui méritent le détour pour peu qu'on en accepte le postulat de départ...

L'auteur a bossé le sujet et cela se sent d'entrée de jeu. L'évolution sociétale néerlandaise du XVIIe décrite conjointement à celle d'une Allemagne balbutiant encore ses gammes Hitlériennes participe grandement à l'intérêt d'un tel ouvrage pouvant sembler rébarbatif de prime abord. L'intrigue vous happe littéralement. La vulgarisation philosophique passionne au point de vouloir pousser plus avant le sujet ultérieurement.

Original et racé, le Problème Spinoza a tout d'un très grand roman qui interpelle tout en suggérant plusieurs pistes personnelles. Que demander de plus ?

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Un très bon moment de lecture assurément que ce "Problème Spinoza", un récit qui mêle Histoire, philosophie et psychanalyse avec habileté.
Je découvre à cette occasion Irvin Yalom qui, en plus d'écrire de façon remarquable, est également docteur en médecine depuis 1956 et professeur émérite de psychiatrie à Stanford depuis 1994.
De psychanalyse, il en sera fortement question dans cet ouvrage qui nous propose deux biographies mêlant réalité historique et fiction, l'auteur ayant la bonté de nous instruire à la fin du livre dans sa génèse pour démêler le vrai et le romanesque.
Nous suivrons un chapitre sur deux Spinoza le philosophe et l'idéologue nazi Alfred Rosenberg à travers le regard du psychanalyste qu'est Irvin yalom, et c'est tout bonnement passionnant, j'ai rarement vécu une lecture autant stimulante intellectuellement parlant.
La partie historique ne sera pas en reste, l'histoire de Spinoza est assez incroyable si l'on considère qu'il fut excommunié et exclu de la communauté juive avant de devenir un philosophe éminemment respecté et précurseur du siècle des lumières, il inspira également de nombreux philosophes de renom dont Goethe.
Bravo à l'auteur d'avoir essayé et souvent réussi à nous faire entendre la philosophie de Spinoza semble-t-il réputée pour être assez hermétique, il donne de plus de bons conseils pour lire ce qu'a écrit le maître.
Captivant aussi cette plongée dans la culture juive du 17ème siècle et cet éclairage sur la religion.
Il me reste à dire que le style est magnifique, que les dialogues sont captivants et que le livre est remarquablement structuré.
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Le nouveau roman d'Irvin Yalom est dédié à Spinoza, un génie s'il en fut et ça tombe vraiment bien car il est sans doute le philosophe à qui je porte la plus grande admiration. Mais Irvin Yalom ne se contente pas d'un roman biographique car son texte a deux versants et le second est dédié à la vie d'un des hommes les plus terribles du siècle : Alfred Rosenberg qui fut à l'origine de l'idéologie nazie prônant la supériorité de la race aryenne et l'antisémitisme et qui un jour eut à faire avec Spinoza et plus spécialement sa bibliothèque.
Une face lumineuse et une face obscure.

La face lumineuse d'abord : Irvin Yalom nous propulse dans l'Amsterdam du XVII ème siècle dans les boutiques qui jouxtent la Synagogue. Il nous fait faire la connaissance de Bento Spinoza (ou Baruch ou Benedictus) et nous le montre étudiant déjà érudit, promis aux plus hautes fonctions, mais ... il y a un mais de taille, Spinoza est à quelques jours de son excommunicationou Herem, par les rabbins de la Synagogue d'Amsterdam.

Le Herem prononcé le 27 juillet 1956 est infamant et définitif :
« Nous excluons, chassons, maudissons et exécrons Baruch de Spinoza »
Il est non seulement exclu mais les rabbins attirent sur lui les foudres divines
« Qu'il soit maudit pendant son sommeil et pendant qu'il veille. Qu'il soit maudit à son entrée et qu'il soit maudit à sa sortie. Veuille l'Éternel ne jamais lui pardonner. Veuille l'Éternel allumer contre cet homme toute Sa colère et déverser sur lui tous les maux mentionnés dans le livre de la Loi : que son nom soit effacé dans ce monde »
Et pour la mise au ban soit totale :
« Qu'il ne lui soit rendu aucun service et que personne ne l'approche à moins de quatre coudées. Que personne ne demeure sous le même toit que lui et que personne ne lise aucun de ses écrits. »

Baruch Spinoza a bien des tords, il a ouvertement mis en cause le contenu de la Torah, son origine divine, il s'interroge : avec qui les enfants d'Adam et Eve se sont-ils mariés ? Comment Moïse pouvait-il écrire sur sa propre mort ? La Torah ne serait-elle pas un conte à dormir debout et la vérité de Dieu ne serait-elle pas ailleurs ?

La face obscure est celle d'Alfred Rosenberg, étudiant qui vers 1910 se passionne pour les thèses de Houston Chamberlain sur la prétendue supériorité de la race aryenne, ayant tenu un discours antisémite virulent il est sommé de s'expliquer devant la direction et se voit contraint de faire un travail sur les écrits de Goethe et sur l'admiration que le « Génie allemand » porte à Spinoza.
Ce pensum Alfred Rosenberg s'en acquitera mais cela n'aura pas l'effet escompté par ses professeurs. La trajectoire d'Alfred Rosenberg va définitivement s'infléchir vers le mal.

Irvin Yalom tresse un récit passionnant de bout en bout, le portrait de Spinoza et son parcours qui aboutit à une Ethique de la joie se dévore littéralement. La vie et la pensée de Spinoza nourrissent le livre et même s'il s'agit ici d'une simplification de la pensée du philosophe, celle-ci est habile et juste.
Les ruptures occasionnées par le texte sur Rosenberg sont l'occasion de s'interroger sur la nature du mal, sur son inéluctabilité. Quelque chose ou quelqu'un aurait-il pu empêcher cet homme de devenir un des plus grands criminel ?
Cette construction en deux volets est très réussie et les liens entre les deux récits très efficaces.
On retrouve ici le meilleur de Yalom, sens du récit, écriture prenante, originalité du propos, bref un très très bon livre.

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Un livre intelligent et raffiné qui me permettrait de comprendre la pensée de Spinoza (comme beaucoup j'ai abandonné au bout de deux pages son Ethique, j'en ai encore des suées), le tout sous forme de roman pseudo-biographique… oui ça existe vrai de vrai et on le doit à Irvin Yalom. Attention, attendez-vous à un déluge de compliments car j'ai tout aimé, absolument TOUT ! de l'écriture en passant par l'histoire, les personnages, la morale, le rythme… TOUT ! Je mets un 19/20 (oui c'est mon côté tatillon) à ce roman qui a pris le parti d'imaginer (à partir de détails biographiques tout de même), un pan de la vie de Baruch Espinoza, le fameux philosophe Hollandais (et juif) du XVIIe siècle et celle d'Alfred Rosenberg, théoricien de la pensée nazie, farouche antisémite. Deux hommes qu'à priori tout oppose si ce n'est que pour son malheur, Alfred Rosenberg éprouvait une admiration sans bornes pour le philosophe. D'où un épineux problème de conscience : admirer un intellectuel juif et se sentir proche de la pensée d'une race jugée « inférieure » et « nuisible », est-il compatible avec son idéal aryen, celui qu'il incarne et défend avec tant de hargne et de conviction ? Soyons francs, cette idée de départ m'a tout de suite séduite. Alterner le jour et le nuit, la raison pure et la déraison c'était excitant et cela a parfaitement fonctionné du début jusqu'à la fin, sans aucune fausse note ni essoufflement. Les joutes verbales et philosophiques des deux personnages ont été un vrai plaisir de lecture, rythme et fond qui ont fait chauffer ma cervelle peu encline à la philosophie !

Je pourrais donner moult raisons pour lesquelles j'ai adoré ce roman (mais je pourrais écrire un roman alors refrénons-nous pardi !). Je me concentrerai sur certaines. Tout d'abord, Irvin Yalom n'est jamais tombé dans le cliché ou la facilité : d'un côté le gentil Spinoza (qui on l'apprend s'est caractérisé par un égoïsme farouche au nom de ses principes, préférant se couper de sa famille, les « isoler » au sein de la communauté juive plutôt que de renoncer à ses idéaux) ou le très méchant Rosenberg (qui bien que loin d'être un saint, était aussi et avant tout un pauvre type méprisé par les grands dignitaires nazis - Hitler le premier). Il me faut aussi ajouter que grâce à notre auteur, j'ai enfin compris les aspirations de Spinoza (qui l'eut crû) : la religion et ses dogmes tels qu'enseignés par les religions du livre sont irraisonnables et absurdes et de fait sont impossibles. Il ne s'agit que de mythes créés de toutes pièces par des hommes tout ce qu'il y a de plus mortels pour contrôler les peuples et non la véritable parole divine. J'ai enfin pu appréhender la richesse de sa pensée et ses fondements, le tout mis en lumière au moment où rejetant les dogmes du Judaïsme, Spinoza est mis au ban de la société juive d'Amsterdam, frappé d'un Hérem, c'est-à-dire l'excommunication à vie, combat de la raison pure contre le poids de la communauté et de ses croyances superstitieuses. Quant à Alfred Rosenberg, bien qu'ignoble dans sa bêtise et sa haine, Irvin Yalom en fait un personnage tourmenté et peu sûr de lui, recherchant en permanence l'approbation des autres ; l'assentiment et l'amour d'Hitler étant son but et obsession ultimes, un mirage.

Si avec tout ça vous hésitez encore je n'y comprends rien! Et pourtant, un roman intelligent, accessible, original, très bien écrit et enlevé, que demander de plus ?
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Au carrefour du récit historique, du roman policier, de la biographie et de la philosophie, "Le Problème Spinoza" est une introduction captivante à la pensée de ce philosophe et cherche les raisons pour lesquelles l'officier nazi Rosenberg était fasciné par sa personnalité et sa pensée.

Irvin Yalom a certes pris quelques libertés avec L Histoire en inventant des interlocuteurs recueillant les états d'âme de Spinoza et Rosenberg mais il retrace avec habileté le cheminement de l'auteur de L'Éthique, issu d'une famille juive portugaise ayant fui l'Inquisition pour s'installer en Hollande, excommunié en 1656, à 23 ans, par la communauté juive d'Amsterdam et dont l'oeuvre bouscule les convictions antisémites d'Alfred Rosenberg.
Irvin Yalom essaie de démontrer comment Rosenberg, ce farouche anti-juif, se trouve confronté d'une façon obsédante à la pensée de Spinoza grâce à Goethe qu'il vénère et qui admirait le philosophe. L'auteur nous plonge dans le raisonnement réfléchi et audacieux de Spinoza et dans celui perturbé et détestable de Rosenberg.

J'ai apprécié la manière dont l'auteur a construit ce roman en faisant se côtoyer des personnages qui n'ont rien en commun et qui ont deux parcours atypiques. Il utilise avec habileté ses compétences de psychothérapeute pour nous faire découvrir leur vie intérieure, en inventant des interlocuteurs fictifs afin de nous proposer dans un rythme soutenu des dialogues riches et passionnants. On sait peu de choses concernant Spinoza mais Irvin Yalom souligne avec ingéniosité son esprit critique et fait une présentation intéressante et accessible des questions qui fondent sa philosophie et ses réflexion sur la religion, la liberté, la communauté… Rosenberg, quant à lui, individu suffisant, médiocre et entêté, se montre incapable de « penser » au sens où Hannah Arendt employait ce mot, et sa fascination devient rapidement souffrance puis maladie mentale. le contraste est frappant entre celui qui sacrifie sa vie personnelle et se démarque de sa communauté afin de privilégier sa liberté de penser et l'autre qui est désorienté par son sentiment de non appartenance à un peuple et veut appartenir à une communauté qui semble sans cesse le rejeter.

Il faut toutefois garder à l'esprit qu'il s'agit ici d'une sorte de biographie romanesque qui ne peut donc avoir la crédibilité de la biographie historique. Irvin Yalom le rappelle à la fin de son livre. Certains lecteurs, dont des écrivains célèbres, ont certes affirmé qu'ils avaient mieux saisi l'esprit d'une époque dans l'oeuvre d'un grand romancier que dans les ouvrages historiques qu'ils avaient lus. On retrouve dans ce livre le sentiment d'André Gide selon lequel il voyait « le roman comme de l'histoire qui aurait pu être, et l'histoire comme un roman qui avait eu lieu ».
Cet ouvrage constitue une belle introduction à la philosophie de Spinoza ainsi qu'une courte initiation à la psychanalyse et son usage pour comprendre des personnages. Il est très documenté, ce qui permet au lecteur de s'immerger dans deux époques différentes et de se passionner à la lecture des destins si opposés de ces deux hommes.
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dans ce roman où la fiction talonne l'histoire nous chevauchons deux époques et allons à la rencontre de deux personnages que tout oppose.
Baruch Spinoza et Alfred Rosenberg. Spinoza juif precurseur de la laïcité, maître à penser des philosophes des lumières.
L'auteur du traité de la réforme et de l'entendement, de l'éthique sera excommunié en 1656 en raison de son athéisme et de la remise en question des écrits biblique.Cet herem où excommunication veut dire la fin de tout contact avec la famille, les amis,la communauté.
Entre le polissage des verres d'optiques une nouvelle vie s'offre à lui, une vie dédiée à l'étude et à la réflexion.
Alfred Rosenberg quand à lui fait grise mine, remarqué par le proviseur de son lycée pour ses discours anti sémite,cet élève de 16 ans deviendra l'idéologue du parti nazi. ce personnage obsédé par le declin de la race aryenne a des origines juives, lui qui ne jure que par Goethe voit son Idole ne jurer que par Spinoza
" Goethe dit que Spinoza lui a appris à délivrer son esprit de l'influence des autres.
Pauvre Alfred, entre psychotherapie et sa souffrance de ne pas être reconnu pour son mérite,il va partir en quête du graal où comment un juif comme Spinoza a pu attirer cet écrivain génial qu'est Goethe.
J'ai aimé l'écriture de Irvin Yalom, sa façon de passer d'une époque à l'autre, on sent le thérapeute dans sa façon de poser les questions via Friedrich psychanalyste de l'école Freudienne.
On pourrait presque en sourire, " le fameux complot juif ".
Cette façon de découvrir la philosophie de Spinoza m'a séduit.
A la fin du roman on apprend que le herem de Spinoza sera levé grâce à Ben Gourion entre autre, une rue de Tel Aviv porte son nom, quand à Alfred Rosenberg il sera condamné à mort lors du procès de Nuremberg. Pendu et incinéré dans un four crématoire de Dachau.



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Irvin Yalom est un as pour mettre en scène des personnages historiques, en les imaginent dans des dialogues, qui, mine de rien, contiennent un maximum d'informations, et le lecteur progresse ainsi sans douleur dans la connaissance de ces personnages, au delà de la vie quotidienne, jusque dans leur vision du monde.

Il en fut ainsi pour Freud et Nietzsche dans Et Nietzsche a pleuré. C'est à nouveau le cas pour Spinoza et Rosenberg. Certes ces deux là n'ont jamais pu se rencontrer puisque Spinoza exposa ses idées suffisamment clairement pour être mis au ban de la société juive néerlandaise où il vivait au dix-septième siècle, alors que Rosenberg fut rédacteur de l'organe de presse officiel de NSDAP, à l'époque où ce parti dirigé par Hitler mit en place ses funestes plans.

Le lien se crée entre les deux hommes, parce que Rosenberg, dont il fut difficile de dire s'il était crétin ou génie, tant ses écrits étaient confus, Rosenberg était fasciné par le fait qu'un antisémite comme Goethe puisse admirer Spinoza le juif.

Le roman est également un prétexte pour fustiger, via Spinoza, le dogmatisme des religieux qui font autorité, et qui au nom d'une interprétation peu crédible des écritures, qui ne sont pas d'émanation divine, mais bien la transmission de discours anciens éventuellement déformés, peuvent asservir et contrôlés la foule des fidèles.

La philosophie de Spinoza ne fait pas l'objet d'une analyse exhaustive, mais les principes fondateurs, et le contexte social au sein duquel ils ont vu le jour sont clairement exposés. Et la tâche n'a sûrement pas été facile, car les données personnelles sont maigres dans les archives, la correspondance n'ayant pas été publiée.

L'on perçoit également avec précision les mécanismes qui ont abouti en Allemagne à la montée du nazisme et son cortège d'horreurs.

C'est une lecture facile, instructive et très agréable.
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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- Alors, chère Michfred, terminée, cette lecture, si souvent remise aux calendes grecques, mais que vous avez achetée deux fois, de crainte,   sans doute d'y échapper?  J'ai le sentiment que vos tensions à son sujet s'apaisent.. Nous pouvons en parler , si vous voulez...

- Mmmm ...pas fâchée d'avoir bouclé ces 500 pages..

- On dirait que vous redoutiez quelque chose.. serait-ce le titre qui vous effrayait tant? Problème, Spinoza...Associez, allons, vous êtes à présent rompue à cette gymnastique de l'esprit..

- Oui, oui, Dr Yalom, j'associe, j'associe...je ne fais même que ça. ..  Problème..? ma hantise des maths je suppose? ..  et Spinoza...?mon complexe d'infériorité carabiné concernant la philo, qui met souvent des mots si compliqués sur ce qui est sensé nous rendre la vie plus sereine et ses embûches plus surmontables...La philo, oui, c'etait ça, surtout, ma trouille, pas fait de philo, moi, mais une rhétorique, à  17 ans,  j'étais pas encore en France...la philo, c'est le chaînon manquant de ma francité, vous savez bien...

- Nous y voilà...  alors,  ce problème Spinoza?

- Clair comme de l'eau de roche: c'etait limpide, bien expliqué,  vivant...on se serait cru ici, sur le divan, à  vos côtés...Avouez que c'est commode, hein, Dr Yalom, d' être à la fois romancier et psychanalyste! Spinoza a fait supprimer tout ce qui est un tant soit peu personnel dans ses écrits,  on n'a pas sa correspondance, ni sa vraie bibliothèque, pas même un vrai portrait de lui ...et comme ses écrits sont imbitables, vous lui mettez dans les pattes un jeune esprit brillant, Franco, qui se charge, par maieutique, d'interroger le maître,  de lui faire clarifier ses propos et même de le mettre devant ses propres contradictions...C'est vous, tout craché,  ce Franco!

-  Et l'Autre? Je suis étonné de ne pas vous avoir encore entendue tempêter , au nom de la vraisemblance historique, contre ma brillante idée de croiser la bio d'un séfarade génial du XVIIe siècle avec celle d'un antisémite notoire, grand  criminel de guerre du XXe ? 

- Ah, ce pauvre Alfred Rosenberg...son arrière- grand-mère juive doit se retourner dans sa tombe... Vous avez bien fait de lui inventer un psychanalyste,  à celui-là!  Fou comme un lapin, amoureux d'Hitler, parano au dernier degré,  et tellement persuadé d'être un esprit supérieur qu'il ne s'étonne même pas que personne ne comprenne son galimatias mytho-racial!

- Mais vous ne me dites pas ce que vous avez pensé de cet audacieux croisement des deux biographies?

- Ma foi...tout les oppose: un mauvais  juif, un bon  aryen- ah, ah, pardon, Dr Yalom, je sais que vous ne prisez guère ce genre de calembour- un excommunié quasi- volontaire et un courtisan importun, un libre-exaministe annonçant l'esprit des Lumieres et un réactionnaire nébuleux en pleine confusion mentale.. .Et pourtant..

- Ouiiii..?

- Pourtant ils ont des points communs...Tous les deux entendent se passer de l'explication divine,  même si ce n'est pas pour la même raison..Tous deux ont besoin d'un interlocuteur qui les cuisine, l'un pour dépasser ses contradictions et domestiquer vraiment ses passions, l'autre...pour éviter la camisole de force!
Le procès de Nuremberg en condamnant Rosenberg à mort a fait de lui, enfin, le grand homme du Reich! La pendaison a été sa crucifixion, à celui-là ...

- Pas mal vu...

-Sans compter que la bibliothèque de l'un devient l'obsession de l'autre, et qu'elle sauve même, par un petit miracle de la composition littéraire, deux victimes désignées de l'holocauste !

-Mmmm, boooon, alors, au final?

- Un succès !  J'ai tout pigé, même en philo!  -bravo, Dr Yalom, vous êtes un fin pédagogue!- J'ai appris plein de choses, j'ai apprécié  surtout la peinture de ce XVIIe siècle hollandais, véritable âge d'or de la tolérance, du mélange culturel, de l'ouverture d'esprit, de la confrontation des idées, de la libre édition européenne et de la créativité picturale...jusqu'à ce que le grand éteignoir de la maison d'Orange ne mette cette flamme  sous le boisseau..

- Donc, vous avez aimé. Alors, heureuse?

-Dites donc, Dr Yalom, vous ne sortez pas un peu de votre rôle ?  On dirait que votre surmoi parle un peu fort, ou je me trompe? Ma parole, en tout psychanalyste, il y a un auteur avide de compliments qui sommeille!!!
Je vous dois combien pour la séance?
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Vous avez eu votre bac de philo en potassant exclusivement « Le Monde de Sophie »? Amis lecteurs, ce livre pourrait être pour vous: ultra-didactique, ode à la maïeutique (des dialogues, des dialogues et encore des dialogues), tricotant imperturbablement un chapitre à l'endroit sur la vie de Spinoza, un chapitre à l'envers sur l'idéologue du troisième Reich, osant le climax de fin de chapitre entre 2 tartines philosophiques... « Le Problème Spinoza » semble voué à ne trouver d'autres lecteurs que l'étudiant nécessiteux ou le cuistre snobinard. Et bien, pas du tout. Ça se lit, ça se lit même très bien et la rigueur du propos échappe à la platitude démonstrative.
Soit Spinoza, sans doute le premier laïque au monde, incapable de se soumettre aux rituels superstitieux et désireux de vivre selon la Raison, même au risque de la solitude. Soit quelques siècles plus tard l'idéologue nazi Rosenberg, antisémite pédant fasciné par Hitler. Entre eux, le combat de la raison humaniste et de l'idéologie irrationnelle... Mais Yalom a l'intelligence de suggérer que le lumineux Spinoza n'est pas seulement l'adversaire du nazi; il peut aussi en être le lointain parent. le philosophe n'est pas exempté des préjugés de son temps et Rosenberg affuble sa haine des juifs des oripeaux de la raison en dissertant interminablement.
Spinoza l'avoue: « J'ai à ce point transformé la raison qu'on peut en arriver à ne pas la distinguer de la déraison. » le philosophe pensait l'homme aussi lié par la chaîne des causalités que tout objet soumis aux lois de la physique et Yalom le psychanalyste sait combien le passé explique l'individu. Mais l'histoire qu'il nous conte n'est pas une simple ruse pour nous faire ingurgiter de difficiles concepts : elle est une clé. L'art de la fiction est le signe de la liberté humaine. Et Rosenberg comme Spinoza échappent à tous les déterminismes: le premier définitivement coupable, le second définitivement génial.
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