J'ai lu ce roman d'
Irvin Yalom presque en apnée. Voilà ce que j'appelle un bon thriller psychologique ! L'auteur tisse avec brio sa toile d'araignée dans laquelle se trouvent pris au piège de sa plume, trois personnages principaux : deux psychothérapeutes que tout oppose, statut social, convictions professionnelles, caractère. Ernest est fraîchement converti à la thérapie analytique et Marshall son superviseur est au summum de sa carrière et brigue la direction de l'APP. du côté féminin, une avocate de renom, Carolyn Astrid, mais aussi une femme frustrée et bien déterminée à se venger de son mari parti sans crier gare...
Sur quelle ficelles l'auteur va-t-il tirer pour nous tenir en haleine pendant 617 pages . Premier fil rouge, celui du mensonge comme l'indique son titre :
Mensonges sur le divan. Mais il ne s'agit pas que de cela même si les séances de thérapie sont souvent savoureuses parce qu'elles reposent sur un double mensonge celui du patient et du thérapeute. S'en suit un jeu du chat et de la souris remarquablement mis en valeur par le sens de la repartie et l'humour d'
Irvin Yalom. le mensonge est partout dans le roman. Qu'il soit délibéré ou occulté, utilisé comme stratégie ou instrument de manipulation, il arrive un moment dans le récit, où nos trois personnages vont se rencontrer grâce à lui ou contre lui et découvrir qu'il n'est plus question de fuir un réalité qu'ils ne voulaient pas voir. Tout ceci au gré de retournements de situations qui sont fort drôles mais je n'en dirai pas plus de peur de déflorer l'intrigue.
Il est aussi beaucoup question de jeu mais pas seulement du jeu de pocker auquel se livre Shelly, un personnage secondaire sans grande envergure. Bien souvent
Irvin Yalom se plaît à rapprocher tout ce qui dans la psychothérapie peut s'apparenter au jeu et à son corollaire la prise de risques. Et de mettre en scène des personnages iconoclastes, hauts en couleurs comme Seymour Trotter, brillant psychiatre, accusé d'avoir abusé sexuellement d'une de ses patients et qui confie à Ernest dans un dialogue inaugural d'une savoureuse causticité comment et pour quelles raisons il est sorti du droit chemin fixé par les règles déontologiques. Tout aussi en "dehors des clous" est le personnage de Paul, l'ami d'Ernest, pourfendeur des idées reçues en terme de thérapie et qui n'hésite pas non plus à pointer du doigt le côté sclérosant d'un courant psychanalytique orthodoxe.
Il m'a semblé que ces deux personnages étaient d'une certaine façon les porte-paroles d'
Irvin Yalom. Ce qu'il y a d'ailleurs de passionnant dans ce roman, est, que sans jargonner aucunement, l'auteur nous fait part de ses interrogations de psychothérapeute. Même s'il insiste beaucoup sur la relation sexuelle qui peut survenir entre une patiente et son thérapeute, il évoque aussi d'autres notions moins sulfureuses mais non moins intéressantes : Quid de la fameuse neutralité analytique ? Jusqu'où un thérapeute qui joue la carte de la transparence peut-il aller ? Quelle place tout dogme installé laisse-t-il à la dissidence, aux francs-tireurs, surtout lorsque le pouvoir en place est menacé ?
Tous ces questionnements et bien d'autres traversent le roman sans pédantisme et sans aigreur. L'humour est toujours là, à point nommé et c'est ce qui me plaît chez cet auteur !