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Laurent Schuman (Traducteur)David Dean Schulman (Préfacier, etc.)Guillaume Villeneuve (Traducteur)
EAN : 9782351760901
117 pages
Editions Galaade (04/02/2010)
4/5   6 notes
Résumé :

Dans ce récit emblématique, il n'y a pas de phrase qui soit innocente, même si elle paraît s'intéresser à la beauté des terres et au ciel de Palestine. Hirbat-Hiza, écrit en 1949 par S. Yizhar, le plus grand poète en hébreu moderne du paysage palestinien, garde, soixante ans après sa publication, une actualité familière, douloureuse et dérangeante.

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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique

En recevant ce livre par la poste, je me suis vite rendu compte que je l'avais déjà dans ma bibliothèque et lu depuis un bon bout de temps. J'ai été induit en erreur par la traduction du titre de l'Hėbreu ("Sipur Hirbet Hiza") vers d'autres langues. Ce n'est pas bien grave, puisqu'il s'agit d'un ouvrage important publié par un homme important.

S. Yizhar ou Yizhar Smilansky (1916-2006) a poursuivi une double carrière, comme politicien et académicien. Pendant 17 ans, il a été membre de la Knesset, le parlement israélien, ce qu'il a combiné avec un professorat ďe littérature à l'université de Tel Aviv. Il passe pour un des grands innovateurs de la langue hébraïque et est l'auteur d'une trentaine d'oeuvres.
En 1942, Yizhar a épousé Noemi Wollman, avec qui il a eu 3 enfants : Yisrael, Hila et Ze'ev.

Le 14 mai 1948 l'ami de l'auteur, David Ben Gourion (1886-1973), a proclamé l'État d'Israël et un an après, en 1949, Yizhar a sorti ce récit d'une expulsion fictive du village fictif de Chirbet Chiz'a, ou Hirbat-Hiza, des Arabes palestiniens par l'armée israélienne. Cet ouvrage es devenu très vite un best-seller et depuis les années 1960 inscrit au programme scolaire officiel.

Le professeur David Shulman de l'université hébraïque de Jérusalem et auteur de "Ta'ayush, Journal d'un combat pour la paix" (2006) a, dans une postface, merveilleusement bien situé cette oeuvre : "Hirbat-Hiza est un texte canonique, un chef-d'oeuvre de prose en hébreu moderne...." (page 101).

Pendant la première guerre israélo-arabe qui suit la proclamation de l'État d'Israël, des soldats israéliens reçoivent un "ordre de mission" pour déloger "les agents de la mouvance ennemie" ! En clair : chasser les Palestiniens arabes de leurs villages et terres fertiles. Leur ordre de mission, après un long préambule portant sur la nécessité de l'opération, précise qu'il faut de la "fermeté, mais sans débordements ni dérapages" !

Comme si les Palestiniens arabes n'attendent que cette initiative pour devenir, dans la meilleure des hypothèses, des réfugiés, qui ont perdu ferme, terre et maison. Durant la guerre de 1948-1949, 700.000 Palestiniens ont ainsi dû prendre la route de l'exil. Pendant la Guerre des Six-Jours en 1967, 300.000 Palestiniens s'ajouteront à ceux "partis" 19 ans avant.

Le récit est effectué à la première personne du singulier. Au cours de cette guerre, Yizhar était officier de renseignements de l'armée israélienne et savait donc parfaitement bien ce qui se passait. Ainsi, ce récit poignant d'à peine 90 pages, revêt un caractère d'un réalisme ahurissant. Si Hirbat-Hiza est fictif, à des dizaines d'endroits des pauvres fermiers palestiniens avec leurs familles ont été scandaleusement dérobés et chassés de leurs terres, qui assuraient leur survie.

Le narrateur fait donc parti d'un peloton de simples soldats, tels Gabby, Shmulik, Arieh, Yehuda, Shlomo... sous les ordes de leur chef Moïshé, et ne sont nullement des personnages démoniaques, mais des jeunes très ordinaires, qui exécutent les ordres tout en ayant des doutes et certains ressentent de la pitié avec leurs victimes. Pas autant, toutefois, que le narrateur qui estime que rien ne légitime cette expulsion. S'il est le seul à réellement s'émouvoir, il exécute néanmoins les ordres comme les autres conscrits.

Je ne vais pas résumer le déroulement de cette opération honteuse, car cela reviendrait à causer du tort à la qualité littéraire exceptionnelle du texte, qu'il faut avoir lu. Il y a ce contraste colossal entre cette opération horrible et la beauté poétique et lyrique des descriptions de la nature par l'auteur. Plusieurs phrases j'ai lu et relu, certaines d'ailleurs à haute voix, ce qui ne m'arrive que rarement.

Ce qui est frustrant et triste c'est que des opérations comparables ont lieu encore aujourd'hui. David Shulman, dans sa contribution, évoque des exemples inacceptables par des colons israéliens à l'égard des Palestiniens dans une région à une bonne quarantaine de kilomètres au sud de la ville d'Hébron, dans les territoires occupés.

Je vais terminer cette critique d'un ouvrage extraordinaire, paru il y a 70 ans, en citant le professeur Shulman qui, en faisant référence à la triste réalité où dans maints villages la menace d'expulsion brutale demeure, note : "... le texte implacable de Yizhar garde une actualité déplaisante".
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1948 indépendance d'Israël un écrivain s'interroge
Un jeune soldat israélien participe aux opérations de regroupement et d'expulsion des populations qui jusqu'alors vivaient sur ces terres, cultivaient le sol et il commence ainsi son récit : « Il est temps de rompre le silence et d'exposer les faits ». Les jeunes soldats se sont vus fixer une mission, tout d'abord « se méfier de la perfidie des habitants » et aussi « isoler l'ennemi sur une colline » , ils combattent depuis des jours, certains sont épuisés, d'autres appréhendent les événements à venir.
Lorsque le peloton entre dans les villages ils trouvent des maisons abandonnées « la rumeur et la peur avaient porté leurs fruits » , les quelques arabes encore présents sont terrifiés.

Le peloton détruit les biens des villageois, expulse femmes et enfants « avec fermeté mais sans débordement ni dérapages » du moins ce sont les ordres reçus. Car en fait moqueries, humiliations, coups rien n'est épargné aux derniers occupants composés essentiellement de vieillards, de femmes, de bébés. Des hommes et des femmes qui passeront des années dans de camps de fortune.

Et S.Yizhar nous fait entrer dans la tête des membres de ce peloton, ceux qui sont effrayés par les ordres, qui éprouvent remords et culpabilité et ceux qui aveuglés par la haine sont près à invectiver, terroriser, tuer sans s'interroger.
Après son passage dans le village d'Hirbat Hiza l'armée laisse un village déserté où pourront venir s'installer dans quelques jours des colons israélien

Et pourtant la terre palestinienne et la terre israélienne se ressemble, c'est toute la beauté des paysages de cette terre que l'auteur parvient à nous restituer « la vallée se dévoila soudainement à nous. Elle était baignée de la lumière limpide de ces matins hivernaux aux reflets bleutés qui deviennent presque dorés à mesure que le soleil inonde la terre et révèle une palette infinie de teintes, entre le vert et l'ocre, autant de taches riantes et généreuses, de bandes formant les champs, de sinuosités que décrivent des sentiers : tout un riche tapis subtilement tissé par des générations de paysans. »

En 1949 350 000 Palestiniens prennent la route de l'exode, fuyant les combats ou expulsés des zones contrôlées ou conquises par Israël. Exode, diaspora, un vocabulaire qui sonne d'étrange façon lorsqu'il s'agit d'un peuple victime lui même et qui l'impose à un autre peuple.
Ecrit en 1949 ce texte n'a rien perdu de sa force, de sa vérité et bien que l'auteur ait été qualifié de traitre à l'époque, on peut estimer qu' « Il y a un lien direct entre Hirbat-Hiza et les mouvements pacifistes d'aujourd'hui, constitués d'êtres humains ordinaires qui refusent, quelles que soient les circonstances, de prêter la main à l'injustice. » Voici les paroles de David Shulman qui écrit la postface à cette édition et qui milite lui aussi dans les mouvements pacifistes.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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HIRBAT-HIZA de S. Yizhar (Yizhar Smilansky

En 1948, l'expulsion par l'armée israélienne de villageois palestiniens de chez eux et notamment du village d'Hirbat-Hiza.
L'auteur est mal à l'aise devant ces paysages bien ordonnés, la beauté et ce qu'on lui intime de faire dans les villages et particulièrement dans celui-ci, curieusement ce malaise m'a aussitôt imprégnée, comme une injustice, devant ces populations qui vivent de leur terre, qui la cultive dans de bonnes conditions, qui vivent simplement, mais noblement.
Les scènes d'acharnement sur les plus fragiles, mais l'auteur dans un état qu'il n'arrive même pas à décrire.
Par moment, c'est une ode à la nature, par d'autres c'est l'horreur absolue et tout cela se confond, ce livre est percutant avec malgré tout cette envie que cela s'arrête.
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Très beau et bref roman sur la Naqba, la catastrophe de 1948, lorsque les Israéliens délogèrent les Arabes et prirent possession de la Palestine. Un regard sur les pauvres soldats de base dépassés et farcis de slogans, sûrs de leur bon droit, relaté par un narrateur effrayé, dégoûté par les moeurs, la violence de l'armée et l'injustice faite aux vaincus. Bien que situé et daté, ce texte est universel, et on peut y voir n'importe quels soldats de n'importe quelle guerre dans n'importe quelle opération contre des civils. Un beau récit-réquisitoire qui, publié dès 1949, n'a pas empêché les colonies de se développer, étranglant toujours aujourd'hui les Palestiniens.
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C'est un classique de la littérature israélienne. Les lycéens en étudient le style. Ils feraient bien d'en méditer le sens : l'auteur raconte comment les villageois ont été déportés pendant la guerre d'Indépendance en 1948. les soldats chargés de la mission obéissent aux ordres. Puis l'un d'eux, le narrateur se met à réfléchir... Cinquante ans plus tard cet ouvrage garde son actrualité
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
la vallée se dévoila soudainement à nous. Elle était baignée de la lumière limpide de ces matins hivernaux aux reflets bleutés qui deviennent presque dorés à mesure que le soleil inonde la terre et révèle une palette infinie de teintes, entre le vert et l’ocre, autant de taches riantes et généreuses, de bandes formant les champs, de sinuosités que décrivent des sentiers : tout un riche tapis subtilement tissé par des générations de paysans.
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Percevant confusément que ces pensées m'entraînaient sur un terrain glissant, je me ressaisis aussitôt. Je sentis un cri monter en moi, une voix qui martelait ces mots : "Colonisation, mensonge, spoliation"
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Alors, comme si elle avait brusquement compris que tout était perdu, que personne parmi les habitants du village ne rentrerait chez soi, que rien n'était à espérer des juifs, elle s’immobilisa, vaincue par cette révélation terrible, inimaginable et néanmoins bien réelle qui s'était abattue d'un seul coup, et gémit de douleur.
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(...) Bref, nettoyer le terrain. Voici comment nous allions exécuter ce "brûler-dynamiter-capturer-expulser" dans les règles de l'art (...)
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En bref, c'est triste à dire, mais ce qui a commencé en 1948 dans un contexte différent se poursuit aujourd'hui sans qu'il y ait la moindre guerre pour fournir ne serait-ce qu'un semblant de justification à ces actes.
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