Après avoir savouré sa petite madeleine, Marcel Proust avait entrepris de partir à la recherche du temps passé. Telle n’était point l’intention de Havers ce matin-là. Quand la bizarre porte apparut devant lui, il sut immédiatement qu’elle donnait accès aux années révolues ; mais en la franchissant, il n’était poussé que par la seule curiosité. Malgré la richesse, la plénitude de son existence, il n’éprouvait nul besoin d’en revivre une période quelconque, ni sur le papier ni dans un transfert physique. Il s’était toujours targué de prendre les choses comme elles arrivaient. Eh bien, il en serait de même pour son passé.
Ils jouaient à cache-cache parmi les lunes de la géante gazeuse la plus extérieure quand le lieutenant revint, les yeux vitreux, les traits tirés, mais courageux, pour se présenter à son supérieur. « Navré, mon colonel. Un virus, je pense… »
« Peu importe, lieutenant. Reprenez votre poste. » Il feignait l’indifférence, caressant Diable d’une main, le regard fixé sur l’écran-maître. Le chat clignait les paupières en examinant le lieutenant de ses yeux verts solennels.
« Oui, mon colonel. »