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EAN : 9782246862550
162 pages
Grasset (01/02/2017)
3.98/5   33 notes
Résumé :
« Ici tout le monde est captif. Marie est captive de son ravisseur, Édouard ; Édouard est captif de son propre visage dévasté et du scénario amoureux délirant qu'il a tissé avec cette petite fille croisée dans la rue. Les parents de Marie sont prisonniers du vide laissé par leur enfant disparu. Et les femmes, partout et de tout temps, sont en butte à la violence des hommes.
De cet enfermement, pourtant, naît une force : celle des victoires infimes et précieus... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Elle dansait, oui elle dansait.
Marie dansait, depuis qu'elle était toute petite, elle illuminait la maison de ses pas, elle tournait, tourbillonnait, tournicotait, dans toutes les pièces, d'une chambre à l'autre, elle ne marchait pas, elle dansait.

Elle aimait la vie.
Elle était belle, avec ses grands yeux, elle était intelligente, elle avait ses amis à l'école, son amoureux à qui elle donnait la main, innocemment, et puis d'un coup elle la lâchait et elle courait, elle riait. Oui, elle riait.

Elle dansait.

Et il a suffit d'un regard. Son monde onirique, sa vie paisible, ses rêves, son innocence, tout s'est envolé, tout s'est transformé, hop ! parti en fumée... La Bête s'est emparée de son autoproclamée Belle, la sienne, rien qu'à lui, tout ça parce qu'elle n'avait pas détourné le regard ? Tout ça parce que, enfant qu'elle était, elle a vu au-delà de l'apparence ? Mais n'est-ce pas ce qu'on apprend à l'école à tous les enfants ; "ne jugez jamais les apparences" !? Et c'est cette bonté là qui l'a condamnée ! Pourquoi ?!

Dans un roman d'une incroyable justesse, Carole Zalberg narre l'enlèvement de la petite Marie par son ravisseur Edouard, défiguré depuis un accident. Brûlé, ravagé, bousillé. En donnant tour à tour la voix à Marie puis à Edouard, elle confronte les pensées des deux protagonistes, vivant tantôt cet enlèvement et la séquestration qui s'ensuivit comme le premier jour d'une vie libre qui peut enfin commencer, où l'amour peut enfin exister, tantôt comme la fin d'une vie, le début du malheur, le gouffre qui s'installe.

Carole Zalberg donne corps à l'ignominie en la personne d'Edouard, persuadé d'avoir trouvé son âme soeur (une petite fille de 13 ans !), assoiffé de son corps et de son âme, en demande permanente d'attention, d'affection, de romantisme, d'amour ! ...
Marie, elle, se meurt peu à peu, elle tente coûte que coûte de maintenir à l'esprit les derniers éléments qui lui rappellent sa vie d'avant, elle cite le nom de tous ses amis, elle pense aux visages, elle parle, elle lit, avant que le mutisme s'empare d'elle, en proie à un dépérissement inévitable.
Isolée dans sa prison, Marie est coupée du monde extérieur, elle ne connait plus que ces quatre murs gris qui l'entourent et cette fenêtre haute, par laquelle elle aperçoit parfois les rayons du soleil, comme la promesse d'un avenir meilleur, le signal que l'espoir existe car dehors, ses parents l'attendent, ils espèrent, ils savent qu'elle vit encore, qu'elle est là.

Un très beau roman de Carole Zalberg dont j'adore la plume !

"Je remue le ciel, le jour, la nuit
Je danse avec le vent, la pluie
Un peu d'amour, un brin de miel
Et je danse, danse, danse, danse
Danse, danse, danse..."

(Dernière danse - Indila)
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Carole Zalberg, je la découvre à travers son dernier roman "Je dansais", gagné lors d'un concours. Je remercie très chaleureusement la maison d'édition Grasset pour ce moment de lecture absolument fabuleux.

Edouard et Marie… Edouard, brûlé, défiguré, fait de hurlements intérieurs, blessé par les regards portés sur lui, regards de peur, de dégoût, d'horreur. Marie, petite fille d'à peine 10 ans dansante, virevoltante, chantante… Ils se croisent et les yeux de Marie portés sur Edouard se teintent d'un sourire… il n'en fallait pas plus pour que l'amour naisse chez cet homme anéanti, un amour malade, un amour fou au sens premier du terme.

A partir de là l'auteur va nous emmener dans un tourbillon d'horreurs car oui, pour magnifique qu'il soit grâce à une écriture vive et d'une grande poésie, où les mots tapent, se cognent, ce roman m'a bouleversée et parfois obligée à fermer les yeux, à cesser ma lecture pour reprendre mon souffle.
Le roman est magnifiquement construit qui alterne les propos de Marie et ceux d'Edouard, puis des parents de Marie, le tout parsemé des commentaires de jeunes filles enlevées par les hommes de Boko Haram ou encore des femmes yézidies séquestrées et violées par les membres de l'Etat Islamique en Irak. Ce roman est un cri de souffrance qui émane de toutes ces femmes violentées, captives, et qui pourtant, toutes, trouvent en elles une forme de survie, acceptent même l'éventuelle ambivalence de sentiments éprouvés envers leurs geôliers.

J'ai aimé cette universalité dans le récit qui fait toute la place à la douleur une et plurielle, qui rassemble ces femmes de tous horizons. Leur cri intérieur s'entend au-delà de leurs propres frontières et nous traverse "Quelle divinité mettons-nous en colère pour qu'elle s'acharne ainsi ? de quels rouages sommes-nous le grain de sable ? Quelle faute nous fait-on payer depuis la nuit des temps ?". J'ai aimé cette force, cette capacité à tirer le meilleur d'elle-même, à déposer les armes pour mieux se retrouver. J'ai aimé le talent de l'auteur capable de me transporter à l'intérieur de la chambre isolée ou Marie ne trouve pour seul refuge que les livres apportés par son ravisseur, d'avoir peur, mais aussi de combattre et d'espérer…. Même si l'espoir…

A partir d'un fait unique, Carole Zalberg a réalisé un plaidoyer brillant en faveur des femmes qui subissent des violences. Ses propos résonneront longtemps en moi et je ne sais quand je me remettrai de ces coups de mots reçus en plein coeur.
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Marie danse, chante, Marie va à l'école, aime sa famille et ses amis, elle a un beau sourire, des yeux qui illuminent son visage. Mais un jour, Marie disparait. Marie a huit ans, puis treize, l'âge de l'enfance, puis de l'entrée dans l'adolescence qui bouleverse les corps et le coeur, mais tout cela lui sera volé par son kidnappeur
Édouard a été victime d'un terrible accident, gravement brulé, le visage détruit, crève de solitude et fait peur à tous ceux qui le rencontrent. Mais le jour où il croise la route de Marie, elle ne baisse pas les yeux, ne le juge pas et lui restitue cette part d'humanité que lui dénient tous les autres. Instant fugace qui scellera le destin de Marie.
Enlevée et séquestrée par Édouard, elle répond par le silence à la passion d'Édouard, et par des mots violents et crus qui expriment une rage froide et désespérée à son violeur. L'enfant volée et violée trouve refuge dans la lecture et l'oubli des jours, des années qui passent enfermée dans une cave.
L'auteur nous entraine, par le « je » de la narration, tantôt dans la tête d'Édouard, tantôt dans celle de Marie, de ses parents dans l'incertitude du sort de leur enfant. Mais également et avec beaucoup d'intelligence dans celle de ces jeunes filles nigérianes ou yézidies enlevées, vendues, violées, détruites par Boko Haram ou par Daesh. Ce même cri, cet appel de celles à qui on a volé une vie.
L'écriture est belle, sobre et élégante, le texte est fort et le sujet douloureux et difficile à appréhender stoïquement sans se poser de nombreuses questions.

Lire ma chronique complète sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2020/07/19/je-dansais-carole-zalberg/
Lien : https://domiclire.wordpress...
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Le lecteur entre véritablement dans les livres de Carole Zalberg, ce n'est pas une métaphore.
Depuis "Feu pour feu", je trouve dans cette lecture une qualité d'épure qui me bouleverse mais immergée dans une musique hypnotique, c'est à dire circulaire.
Trois voix, celle de la petite fille enlevée, celle du ravisseur et celle des parents.
Edouard avec son visage dévasté par le feu est habitué à ce que le fil qui devrait le relier aux autres soit rompu.
Un jour il croise une petite fille avec sa maman, sur le chemin de l'école, et cette petite fille riante et volubile, ne baisse pas les yeux en le croisant, bien au contraire. Dans la tête d'Edouard, le fil n'est plus rompu, au contraire il s'est construit, solide, incassable c'est elle sa beauté, sa déesse, sa princesse, elle est à lui.
L'irréparable est commis, il l'enlève et en fait sa chose.
Mais la petite fille violée, pense "Tête de vulve puante! Me dis-je quand la colère à force de couver implose et répand sa boue. Trou public! Pauvre décharge! Voilà comme je réponds à ses compliments : mots d'ordure pour mots de miel."
La voix de Marie vous pénètre, vous fait prisonnier,vous met en rage et vous tient par le coeur et les tripes, sans faillir jusqu'au bout comme une force qui vous ligote.
Edouard est cet être détruit, celui qu'on examine mais que l'on ne regarde plus. Cela ne lui donne aucune excuse pour détruire à son tour. Rien ne le justifie.
Il est passé de l'invisibilité à l'écoeurante visibilité, dont il n'a pas su ou pu faire sa résilience.

Quant aux parents, qui avaient imaginé une si belle vie pour leur fille solaire, ils vivent en marge du monde qui fut le leur, ils font de leur douleur une entrée en résistance.
Marie se bat, s'accroche grâce aux livres qu' Edouard lui procure et qui lui apporte un souffle.
Elle survit, jusqu'à l'inévitable erreur de son bourreau.

Marie magnifique papillon, vibrant d'un rire cristalin ne pensait pas se brûler les ailes en pénétrant le regard d'Edouard.
Marie n'est pas aussi fragile que le papillon; mais Marie est libre et vibrante de cette sève qui l'a sauvé, mais Marie est en miettes...

Marie est le symbole de toutes ses femmes, bafouées, niées, violentées.
Et Carole Zalberg, pour partir de l'unique et passer à l'universel a construit son livre comme un arbre branchu.
L'arbre est symbole de vie, en perpétuel évolution, se dressant vers le ciel.
Sa verticalité s'appuie sur ses racines, sa partie visible est le tronc, son évolution, ses branches s'élevant vers la lumière.
La femme papillon virevoltant devient un arbre, qui laisse lire toutes les traces de vie sur son écorce.

L'auteur une fois de plus, m'a happé dans une lecture sans interruption, lecture vibrante et à la limite du soutenable émotionnellement.

©Chantal Lafon - Litteratum Amor 28 janvier 2017
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J'avais beaucoup entendu parler de Carole Zalberg mais jusqu'à présent je n'avais encore jamais eu l'occasion de la lire. J'ai découvert la profondeur de sa réflexion et la qualité de son écriture grâce à ce terrible et magnifique roman et je la classe désormais dans mes indispensables !

* Edouard, un homme au visage monstrueux, dévasté par un accident par le feu qui ne subit que des regards de gêne, de dégoût
* Marie, une gamine joyeuse de 8-9 ans, qui dansait du matin au soir
* Dans la rue un regard innocent de Marie sur ce visage monstrueux
* La construction d'un délire amoureux à partir de ce regard

Edouard, hanté par le souvenir de ce regard, épie celle qu'il voit comme sa promise puis l'enlève et la séquestre dans une cave, Marie a alors 13 ans.
Enfermée, attachée à un lit, violentée et violée, Marie va passer de la révolte à une forme de résistance passive, une immobilité, elle choisit "d'attendre au fond d'elle", réfugiée dans un monde qui fait étrangement écho au monde dans lequel Édouard se terre depuis son accident.

"Il dit qu'il m'honore et je suis violée. Je ne lutte plus depuis longtemps mais je suis violée. Je ne dois pas oublier que je suis violée."

Elle résiste en égrenant à l'infini la litanie des noms de ses amis et connaissances et trouve refuge dans les livres que son bourreau lui apporte.

"Les livres me sont un ailleurs toujours plus étendu et riche où il n'existe pas, où je peux respirer, m'inventer en dépit de lui."

Elle pense à ses parents et leur en veut de continuer à vivre comme avant car l'homme lui répète qu'ils se passent très bien d'elle, qu'elle n'a plus que lui. Elle doit aussi lutter contre l'ambivalence de ses sentiments et vivre avec la honte de sa soumission et du plaisir qu'elle ressent parfois.

L'homme est tout aussi captif, enfermé que Marie, malheureux de sa résistance, de son silence et de ses cris, "c'est si loin de ce que j'ai rêver pour nous". C'est un être détruit qui parle du lieu de leur enfermement en terme de "chez nous", de "notre nid".

J'ai aimé l'originalité et la richesse de la construction de ce roman où Carole Zalberg fait alterner les deux voix de Marie et d'Edouard, insère les propos d'un narrateur extérieur qui évoque leur enfance et leur histoire familiale puis donne la parole aux parents de Marie dans une dernière partie.

Carole Zalberg donne une dimension universelle à cette question de l'enfermement et de la violence faite aux femmes avec des chapitres où elle fait parler avec des "nous" terribles les lycéennes nigérianes enlevées par Boko Haram, les femmes yazidies esclaves sexuelles de l'état islamique...

J'ai été bouleversée par ce livre court mais très dense, très fort, fait de phrases courtes et très percutantes et écrit d'une plume magnifiquement poétique. La lecture en a été parfois éprouvante, à la limite du soutenable, des pauses m'ont parfois été nécessaires. Un livre coup de coeur-coup de poing que je ne suis pas prête d'oublier.
Il me reste maintenant à découvrir le reste de l'oeuvre de Carole Zalberg.





Lien : http://leslivresdejoelle.blo..
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critiques presse (2)
Actualitte
13 mars 2017
Un livre pétri d'angoisse, de souffrances et de tragédies éprouvantes mais qu'une langue sensible et belle, très condensée soutient sans défaillance ni débordement.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LaCroix
03 mars 2017
Dans ce texte court et puissant, Carole Zalberg donne au récit de la séquestration d’une adolescente une dimension universelle en évoquant la violence faite aux femmes.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Qui avons-nous offensé, nous, femmes et filles yézidies que le monde a découvertes en même temps que notre calvaire ?
Les combattants de l'EI nous ont dit d'oublier les membres de notre famille. Nous sommes leur butin de guerre. Partout où ils ont triomphé, nous avons été triées. Ils nous ont séparées des hommes et des vieillards.
Parfois ils nous vendent et parfois ils nous offrent en cadeau.
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Nous sommes les légères, les douces et les parfumées, les gracieuses au rire de perle offertes aux seigneurs par leur propre père, contre protection ou fortune, parce que nous ne valons que par notre peau de soie, nos orifices étroits, et surtout par notre terreur à l'heure d'être pénétrées.
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Tête de vulve puante! Me dis-je quand la colère à force de couver implose et répand sa boue. Trou public! Pauvre décharge! Voilà comme je réponds à ses compliments : mots d'ordure pour mots de miel.
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Quelle divinité mettons-nous en colère pour qu'elle s'acharne ainsi? De quels rouages sommes-nous le grain de sable ? Quelle faute nous fait-on payer depuis la nuit des temps ?
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Il dit qu'il m'honore et je suis violée. Je ne lutte plus depuis longtemps mais je suis violée. Je ne dois pas oublier que je suis violée.
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Vidéo de Carole Zalberg
L'édition 2022 du Grand prix Sofia de l'Action littéraire a eu lieu le 18 et 19 mai, à Chambéry. Elle a proposée une table-ronde intitulée « Les festivals littéraires à la croisée des arts » en présence de Daniela Farail (festival du Premier Roman de Chambéry), Sébastien Planas (Festival international du livre d'art et du film) et Dominique Rouet (festival le Goût des autres), Carole Zalberg (autrice et membre de la commission attribution des aides de la Sofia) et Hugo Boris (auteur et membre de la commission attribution des aides de la Sofia) et animée par Cécile Deniard, Présidente de la Sofia.
+ Lire la suite
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