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EAN : 9782369560364
141 pages
Editions Intervalles (17/06/2016)
3.72/5   9 notes
Résumé :
Dans une Alger à la dérive, Amina ne peut compter que sur elle-même pour s'en sortir et subvenir aux besoins de ses deux frères et de son fils. Elle trouve dans le monde de la nuit une échappatoire qui, si elle lui permet de subsister et d'envisager un avenir meilleur, l'amène également à se heurter aux réalités souvent cruelles des sphères d'influence de la société algéroise. En prenant le risque d'y perdre son âme.
D'Alger à la Kabylie, de Béjaïa et sa fame... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
"La porte de la mer" s'ouvre sur un viol incestueux, acte fondateur d'une trame dramatique bien menée et bluffante de réalisme. Amina Rachedi est une jeune femme que rien ne prédisposait à une vie houleuse, jusqu'au jour fatidique où son père, ancien instituteur converti à l'islamisme puis devenu émir dans les maquis terroristes, commet sur elle le geste irréparable. Il la viole au mépris de toute morale, sans état d'âme ! Elle se retrouve enceinte. Par défi et contre vents et marées, elle décide de garder l'enfant, le sceau du crime, en poursuivant malgré tous ses études à l'université d'Alger. Afin de subvenir à ses besoins et aux besoins de ses petits frères dont elle a désormais la charge, elle se fait prostituée de luxe. Elle entre alors, dans l'univers pervers du gotha d'Alger où diplomates des pays du Golfe et privilégiés du régime, s'adonnent à la satisfaction de leurs plus bas instincts sur des jeunes étudiantes que la pauvreté et le manque de perspectives a jeté dans leur bras.
A travers ses tribulations, Amina nous fait découvrir, avec un sentiment patriotique outragé, la décadence de la société algérienne et de son élite, prises dans les rets d'un système politico-policier érigé sur le viol d'une nation qui peine à se relever sous le poids de la corruption et de la gabegie. Sous la toile de fond des jours ensanglantés par les crimes islamistes, elle voit l'ombre du pouvoir, étaler sur les esprits, les ténèbres de l'obscurantisme et préparer l'Algérie à de sombres horizons. le père d'Amina en est l'un des symptômes de ce mauvais augure. Sanguinaires revenus des maquis, lui et ses acolytes deviennent par la grâce de «la charte de réconciliation nationale» des notables qui trônent sur des fortunes constituées sur le crime des civiles désarmés et briguent des postes électoraux en toute légalité, sans rendre compte de leurs méfaits à toute forme de justice .
Comme nombre de jeunes algériens que le désarroi a pris dans ses serres, Amina rêve de franchir la porte de la mer vers un ailleurs qui libère et fait prospérer. Elle croit avoir trouvé la clé dans l'argent qu'elle gagne en vendant son corps ou dans l'amour d'un jeune attaché de l'ambassade de France qui lui promet de l'épouser et de l'emmener vivre avec lui à Paris. Elle va jusqu'au bout de son rêve, mais elle déchante très vite. Sa déception se confond avec un éclair de conscience qui lui ouvre la porte de la mer vers un autre destin moins illusoire : "En me quittant, Michel avait ouvert, sans le savoir, la porte de la mer de ma vie intérieure, il m'avait rendu définitivement à moi-même, à ces multiples combats que j'avais encore à mener, dans mon pays. J'avais désormais toutes les forces pour mener ces batailles en espérant, un jour, changer les esprits". Amina est un personnage à la fois plausible et symbolique, elle a mal au pays, car elle est le pays.
L'oeuvre de Youcef Zirem est une dissection sur le corps malade de l'Algérie et un roman d'amour. Fin observateur, sa plume, tel un scalpel fignole le détail qui dévoile l'ampleur du désastre et raconte l'histoire des amours impossibles dans un pays lacéré par d'incestueuses violences. Son écriture passe de la sociologie à l'histoire, de la psychologie à la poésie sans transfigurer la cohérence d'un récit éclairant et captivant.
Ecrit sur un rythme soutenu, dans un style sobre, limpide et sans artifices, le roman de Youcef Zirem se lit d'une traite pour le plaisir du lecteur.

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Tout en économie de mots et de moyens, Youcef Zirem dresse le portrait d'un pays en régression, totalement muselé par ses élites qui préfèrent profiter du pouvoir plutôt que de se mettre au service du peuple et du pays. Ce n'est pas nouveau, et l'Algérie n'est pas la seule à fonctionner comme cela, mais en tant qu'Algérien, il n'est pas facile ni sécurisant de le crier fort, la liberté d'expression y étant une notion peu développée. le langage est sec, direct, parfois violent (le premier chapitre l'est incontestablement), l'auteur n'éludant pas les questions, ne passant pas outre la violence de la société de son pays. Les phrases sont courtes, les chapitres aussi et le livre également (140 pages). Malgré cette relative brièveté et la volonté du romancier d'aller droit au but, il ne fait pas l'impasse sur les belles descriptions d'Alger ou de la Kabylie et même des rues et des monuments parisiens.

Rien ne va dans la société algérienne, et pourtant, Youcef Zirem parle d'initiatives portées souvent par des jeunes gens qui cherchent à la faire bouger, de jeunes femmes belles qu'il décrit rapidement, à peine une silhouette parfois, mais qu'on imagine très vite et qui ne peuvent que jouer de leurs charmes pour s'en sortir. Son roman n'est pas manichéen, il y a des bons et des méchants dans les deux camps, tout cela est une question de personne et de force de caractère. de cela Amina et ses amies sont particulièrement bien dotées, des jeunes femmes a priori comme les autres qui révèleront leurs forces dans l'adversité, et pourtant elles restent "normales", absolument pas exceptionnelles et veulent le demeurer.

Grâce à sa brièveté ce roman est dense, bourré de références à la littérature française (Camus, Hugo, Char, Bobin,...) avec Pessoa (portugais) en prime. Beaucoup de dénonciations des connivences, des collusions et accointances entres les militaires et les barbus amnistiés qui s'achètent une seconde vie -ou qui la vendent très cher-, tout cela pour le pouvoir et l'argent. Certains n'hésitent pas à se lancer dans le commerce de l'alcool alors qu'ils sont censés ne pas en boire... Youcef Zirem parle aussi beaucoup des paradoxes des religieux qui ne boivent pas d'alcool, qui ne regardent pas les femmes et qui ne veulent pas qu'on regarde les leurs, mais qui dans le même temps, ne se privent pas de soirées arrosées et accompagnées d'escort girls qu'ils paient cher. Tous ces hommes de pouvoir clament haut et fort leurs préceptes religieux -qui ne sont évidemment qu'interprétation des textes en leur faveur- qu'ils s'empressent de bafouer en privé.

Youcef Zirem prône le respect de tous, de la femme en particulier qui, en Algérie, est considérée comme mineure toute sa vie. Son roman est très féminin, féministe, ses personnages de femmes sont très beaux, forts, sans doute inoubliables. Son écriture qui va à l'essentiel laisse passer tout le respect et l'admiration qu'il a pour elles, et même l'espoir qu'il place dans les femmes pour sortir son pays du marasme dans lequel il est plongé depuis longtemps, à la condition que celles-ci ne s'arrêtent pas de lutter dès lors qu'elles ont obtenu un poste pour elles.

Je n'ai pas pu dire la moitié de ce que contient ce très beau roman, je me suis sans doute répété et j'ai tourné autour du pot, mais le meilleur moyen pour vous en rendre compte, c'est de lire La porte de la mer (en plus le titre est magnifique, comme j'imagine, le coin du pays qu'il désigne). Je suis persuadé d'avoir découvert un grand auteur humaniste.
Lien : http://www.lyvres.fr
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La porte de la mer … ou la porte de l'amer. Car oui, c'est un goût un peu amer que cette lecture m'a laissé en bouche.

Pourtant la découverte du menu m'avait fait saliver : à la lecture du synopsis de la maison d'édition, il me semblait qu'il y avait dans ce roman tous les ingrédients d'un mets réussi aux saveurs subtiles, sucrées, épicées : un enracinement historique fort dans l'Algérie du 20ème siècle, un ancrage important dans des lieux que je rêve de découvrir, un personnage de femme intéressant et touchant que l'on suit tout au long de son parcours initiatique. Malheureusement, cette la recette s'est avérée légèrement fade, le dosage des éléments étant mal équilibré et frustrant mes papilles exigeantes.

Je dois concéder que l'auteur excelle à raconter et expliquer les rouages complexes d'une société algérienne en pleine mutation, évoluant au fil du siècle entre guerres et corruption, crimes et impunité, extrémisme religieux et dépravation. de façon brève, claire et précise Youcef Zirem parvient à nous faire découvrir et comprendre les enjeux importants du 20ème siècle algérien : le talent d'historien et de journaliste de l'auteur est incontestable !

Mais une question reste en suspend alors que je referme le livre : Pourquoi un roman ? Pourquoi une fiction ? Car l'Histoire politique et celle des lieux ne cessent de prendre le pas sur la fiction. Tout au long du roman la narration passe sans cesse de la petite histoire à la grande Histoire mais bien souvent le lien sonne faux, la transition semble forcée. L'imbrication ne fonctionne pas, l'histoire d'Amina m'est apparue comme un simple prétexte à l'explication du contexte socio-politique ou de la genèse des lieux.

Les longues parenthèses historiques qui entrecoupent l'action, bien loin d'apporter de la profondeur à celle-ci, ou même de créer du suspense et de l'attente chez le lecteur, empêchent au contraire ce dernier de « plonger » véritablement dans le récit, de s'attacher aux personnages, de ressentir avec eux bonheur et tensions. le récit n'est pas parvenu à susciter chez moi des émotions alors même que les faits qu'il raconte auraient pourtant dû choquer, réjouir, révolter, attendrir, ou attrister.

Une découverte en demi-teinte mais intéressante qui donne tout de même envie d'aller voir plus loin dans les publications de Youcef Zirem et dans l'histoire de l'Algérie, peut-être en lisant un jour « L'homme qui n'avait rien compris ».
Lien : http://lesepicurieuses.fr/la..
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Je remercie Masse Critique de m'avoir fait découvrir ce roman du journaliste Youcef Zirem.Nous découvrons Amina,fille-mère,jeune étudiante en littérature française,appréciant particulièrement René Char qui pour faire vivre ses frères et son fils se livre à la prostitution de luxe.En Algérie,la femme est considérée dans les textes comme mineure à vie et Amina se bat pour l'émancipation féminine.Au travers des rencontres d'Amina,Karima,le journaliste Yugurten,Samah et de ses histoires sentimentales avec Kamel et ensuite Michel,nous voyons défiler l'histoire contemporaine de ce pays.La Décennie noire et les exactions des islamistes,la Concorde Civile et le règne de l'impunité qui permet au père d'Amina,ancien chef terroriste traqué par l'armée,de s'enrichir en traitant des affaires avec les dirigeants,le Printemps Noir de Kabylie et sa répression sanglante.Youcef Zirem nous conte l'histoire de l'Algérie actuelle,du parti unique,de la corruption des élites et de la misère des algériens au travers de l'histoire d'Amina.L'Algérie souffre d'un passé pesant,d'un présent tout aussi lourd et nous espérons que son avenir est entre les mains de femmes lucides et battantes à l'image d'Amina et ds ses amies.
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Tout d'abord merci à Babelio et aux éditions Intervalles pour ce roman reçu dans le cadre d'une masse critique.
C'est un petit roman, d'à peine 141 pages, qui se lit assez rapidement, même si le sujet, le cadre, est un peu lourd. J'ai d'ailleurs été un peu déçue sur ce point ; on parle de l'Algérie, du contexte de l'avant et de l'après guerre d'Algérie, de la condition des femmes à cette époque, de l'hypocrisie de la société algérienne etc .. mais toujours un peu rapidement, un peu de loin, à travers ce "vase clos" de l'entourage d'Amina. Je trouve que cela aurait mérité d'être un peu plus creusé.
Malgré tout, l'auteur arrive à faire passer beaucoup de chose, comme sa croyance en les femmes de son pays au travers de personnages féminins forts et admirables, leur amour et attachement pour ce pays, leur désir de paix et de liberté.
Du coup, j'ai apprécié ce roman assez agréable à lire grâce notamment à son écriture fluide et surtout l'humanisme de l'auteur qui transcende tout le reste.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Un pays qui mange ses propres enfants court droit à sa perte.
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Videos de Youcef Zirem (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Youcef Zirem
27 juin 2022 Sanhadja Akrouf , Militante Féministe , politique , syndicaliste, invitée de l'écrivain Youcef Zirem au café littéraire parisien de l'Impondérable au 320 rue des Pyrénées a Paris, autour de son livre : Algérie, la seconde révolution.
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