Les livres du moment #139 – jeudi 24 novembre 2022
Quelles sont les recommandations des lecteurs cette semaine ?
Article publié le 24/11/2022 par Nicolas Hecht, Camille Jobert et Pierre Krause
Connaissez-vous les pages de recommandations par genre sur Babelio ? Chaque jour, l'équipe du site trie et sélectionne les livres les plus appréciés des Babelionautes pour vous faire découvrir des parutions récentes, agrémentées d'une critique de lecteur. Et chaque semaine nous vous proposons désormais de retrouver une liste de dix ouvrages, soit un par catégorie, afin de suivre l'actualité littéraire au plus près.
Littérature française : Philippe Dumont, Fortunes et infortunes de la belle Ielena Sergeïevna, dite Léna
Le Dilettante, 224 pages, 18 €
S’il ne faut pas juger un livre à sa couverture, celle de ce roman donne tout de même de beaux indices sur l’histoire qu’elle renferme. Ce sont en effet les grandes lignes du destin de Léna qui sont résumées noir sur blanc, deux « couleurs » qui résument assez bien la vie de cette fille de l’Est, née à Moscou mais rêvant de Paris et obligée de survivre en vendant son corps. C’est tout un portrait de l’URSS ainsi qu’une certaine illustration de l’âme russe que brosse l’auteur dans son premier roman.
Liv75 a été touchée par ce roman : « Un roman humble. À l’image de son héroïne. Pas de phrases grandiloquentes ni de grands discours. L’écriture est juste. Les détournements d’expressions font sourire et apportent du charme au tout. Pas de doute, on touche ici à la vraie vie, sans filtre. Au vrai roman aussi. (...) À lire ! »
Littérature étrangère : Cristian Fulas, Iochka
La Peuplade, traduit du roumain par F. et J.-L. Courriol, 568 pages, 23 €
L'automne, l'hiver sont des saisons propices à l'intériorité, à l'exploration de soi, et bien sûr à la lecture. Alors pourquoi ne pas en faire aussi un temps pour se pencher sur d'autres vies, comme celle d'Iochka, ce presque centenaire vivant dans les Carpates et qui donne son titre à ce roman de l'auteur roumain Cristian Fulas ?! Iochka a traversé le XXe siècle et ses folies (guerres, camps soviétiques, gouvernement Ceausescu), mais a vécu aussi dans la joie, et aimé une femme : Ilona. Alcool, amitié, amour : et si le bonheur se cachait dans les petites choses et les grandes émotions, dans une existence solitaire et solaire, contre les vents et marées de l'Histoire ?
Un livre qui a beaucoup plu à viduite : « Avec une grande simplicité, Cristian Fulas tend un récit métaphysique sur les silences de l’âme, les folies de l’esprit, sur tout ce qui maladroitement exprime notre rapport aux autres, au monde. »
Polar & thriller : Sébastien Vidal, Où reposent nos ombres
Le Mot et le Reste, 360 pages, 21 €
Les années 1980, un groupe d’amis qui quittent peu à peu l’adolescence, voilà quelques ingrédients qui ont irrigué la pop culture ces dernières années mais dont Sébastien Vidal s’empare pour un polar situé en Haute-Corrèze. Aux couleurs vives des années 1980 et à l’insousciance de Johanna, Franck, Vincent et Christophe, quatre ados venus faire du vélo en pleine nature, l’auteur oppose un noir profond, celui de deux amis qui viennent de braquer des convoyeurs de fonds et qui sont désormais en cavale. Les deux trajectoires vont se rejoindre et n’épargner personne.
Une vraie plongée réussie en Haute-Corrèze pour Unemultitudedelivres : « Et que dire de l’écriture ! Elle est tellement riche et pas uniquement factuelle. Son but n’est pas de simplement faire progresser l’action mais de créer une ambiance. Pour autant, les descriptions sont savamment dosées pour permettre au lecteur de s’imprégner de cette ambiance sans alourdir le récit. Une vraie réussite et un roman que je ne peux que conseiller (...) ! »
BD : Jean-Christophe Brisard (scénario) et Alberto Pagliaro (dessins), Hitler est mort, tome 3 : Dossier mythe
Glénat, 72 pages, 15,95 €
Et si Hitler ne s’était finalement pas donné la mort dans son bunker comme on l’affirme à la radio, dans la presse et de la bouche même des vainqueurs ? Ces doutes ne sont pas (seulement) les délires de conspirationnistes bien contemporains mais aussi ceux de l’Armée rouge au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Se lance alors une autre guerre, plus souterraine, entre deux services secrets russes : la police politique du NKVD (Commissariat du peuple aux Affaires intérieures) d’un côté, et le Smersh de l’autre, le terrifiant service de contre-espionnage dont le fonctionnement dépendait directement de Staline. Ce sont ces luttes intestines que relate le journaliste Jean-Christophe Brisard dans cette BD dessinée par Alberto Pagliaro.
Une BD-enquête fascinante pour gyselinck_dominique : « Excellente BD qui illustre bien la lutte d'influence que se livrent les plus hauts pontes des deux services de renseignement soviétiques. Jusqu'à la fin, le doute règne en maître sur les circonstances exactes de la mort du leader nazi, et le dossier présent en fin d'album vient à point pour confirmer et démonter certaines idées reçues. »
Manga : Sora, Sorcière d'un autre monde, tome 1
Delcourt, avec la contribution de Tail Yuzuhara, 192 pages, 7,99 €
Auteure du Le jeu de la mort, Sora revient avec une nouvelle série : Sorcière d’un autre monde. Victime d’un accident de la route, le jour de ses 18 ans, Sena se réincarne dans un univers où considérée comme une sorcière, elle doit vivre recluse dans la forêt de Roodfarah. Cependant, Keith, un prince, se présente à elle et l’histoire commence dans un monde rempli de magie.
Lesvoyagesdely a été transportée dans un autre monde : « Voir ce que fait Sena, voir la magie de Keith, cela happe nos yeux et nous transporte. A partir de leur rencontre, beaucoup d'éléments jusqu'au final vont s'enchaîner, ainsi ce fut une lecture belle, fluide, intrigante, intéressante qui nous donne envie de découvrir et dévorer la suite. »
Jeunesse : Cécile Alix, Loudmila et la montagne volante
Poulpe Fictions, illustré par Anna Griot, 168 pages, 11,95 €
Ce roman à l’ambiance envoûtante retrace le voyage de Loudmila jusqu’à la montagne volante pour y déposer l’âme de la vieille chamane Chilali. Son voyage s’annonce périlleux, entre dunes de glace, terres magiques et créatures inquiétantes. Heureusement, la jeune fille peut compter sur le renne Ishka pour l’aider à affronter tous les dangers qui sillonnent son chemin.
Madelinette aime la plume de l’auteure : « Ce que j'aime dans l'écriture de Cécile Alix, c'est que dans ses histoires pour la jeunesse comme dans ses romans ado, on rentre à fond dans l'univers, on s'identifie aux personnages, on ressent beaucoup d'émotions et on n'a jamais envie que l'histoire se termine. »
Jeune adulte : Cédric Fabre, Spoil !
In8, 96 pages, 8,90 €
Dans un futur presque palpable, les jeunes fuient la réalité déprimante (les soucis avec le climat se sont « étonnamment » légèrement aggravés) en se plongeant corps et âme dans des séries de fiction plus addictives les unes que les autres. La fiction est prise tellement au sérieux que toute personne surprise en train de divulgâcher un élément d’une série est mise à l’isolement. C’est ce nouveau régime totalitaire que combat Max depuis que son ami a été enlevé par les forces de l’ordre. Ne serait-il pas temps de quitter la fiction pour regarder de plus près ce qu’il se passe dans le monde réel ?
Mithra93 a lu ce livre avec son ado et les deux ont aimé : « Génial livre pour ados (mais pas que !), une histoire surprenante dans un avenir (pas si lointain) qui apporte une vraie réflexion sur le culte des jeunes pour les mondes imaginaires des séries mais aussi, et sans contradiction, sur leur possible et nécessaire engagement dans le monde "réel" et politique. Mon ado de 14 ans a adoré et, pour les parents, presque un "outil" pour appréhender les questions actuelles d'un monde qui bascule, change et se transforme aussi, avec et par les jeunes... »
Imaginaire : François Baranger, L'Abomination de Dunwich illustré
Bragelonne, 64 pages, 32,95 €
Depuis 2017, François Baranger s'est attelé à un projet fou et nécessaire : illustrer les célèbres nouvelles de Howard Phillips Lovecraft, l'un des grands maîtres de l'imaginaire. Inutile de dire qu'il était attendu au tournant, et à en croire les nombreux retours positifs sur les précédents albums (L'Appel de Cthulhu et Les Montagnes hallucinées), le projet est réussi haut la main. Publiée pour la première fois en 1929, cette nouvelle raconte la vie de l'étrange Wilbur Whateley, fils de fermiers obsédé par le Necronomicon, un grimoire blasphématoire unique, à l'aura redoutable. Encore une fois, c'est tout l'art de François Baranger qui s'exprime dans cette adaptation graphique reprenant également le texte. Un album à vous faire frissonner d'effroi, qui ferait pourtant un très beau cadeau sous le sapin cette année…
blogconstellations est conquis : « Au final, Baranger nous livre à nouveau un "Lovecraft Collector". S’il change complètement d’ambiance par rapport à ses "adaptations" précédentes, le talent et le travail acharné de l’artiste font à nouveau merveille. Les ambiances sont incroyables. Le niveau de détail est parfois hallucinant. »
Roman d’amour : Emilia Robinst, My lovely neighbor
Butterfly Editions, 522 pages, 5,99 €
Dans les romances, les voisins sont souvent beaux, mais avec un caractère de cochon. L'expatrié écossais du quatrième étage semble être de cette trempe-là et risque de mettre plus de piment dans la vie de Alix Deroy. Celle-ci, le cœur brisé et fauchée, essaie de reprendre du poil de la bête. Heureusement, sa meilleure amie obstinée va l’aider à arrêter de se morfondre, en plus de la pousser dans les bras de son voisin écossais.
karol_et_ses_lectures a adoré dès les premières pages : « Dès que j'ai vu la couverture, j'ai été conquise alors j'ai lu le résumé qui m'a encore plus donné envie de lire ce roman et je me suis enfin lancée dans ma lecture. Dès les premières pages, j'ai été transportée par la plume de l'auteure qui m'a captivée du début à la fin. »
Non-fiction : Olivier Mannoni, Traduire Hitler
Héloïse d'Ormesson, 128 pages, 15 €
Voilà une entreprise qui aura fait couler beaucoup, beaucoup d'encre : la réédition de Mein Kampf d'Adolf Hitler n'aura pas été qu'un événement éditorial, mais a donné lieu à un véritable débat de société. Le traducteur Olivier Mannoni a consacré 10 ans de sa vie à cette nouvelle version critique, finalement parue en 2021 chez Fayard sous le titre Historiciser le mal. Dans l'essai Traduire Hitler, il revient sur cette expérience, ce qu'elle suppose de souffrances et de labeur, en élargissant les questionnements sur le langage en général, et sur notre monde contemporain.
Pulul_la_libellule se souviendra longtemps de cette lecture : « Je n'ai jamais pensé à ce que le traducteur pouvait vivre. Et pendant cette lecture, on se rend compte que ce n'est pas seulement un travail de traduction, mais une analyse, un décodage, des recherches qui vont nous permettre à nous lecteurs de comprendre, analyser à notre tour et malheureusement comparer avec notre époque. Je ne peux que vous pousser, conseiller, et si je pouvais vous obliger à le lire ! Il est d'une grande intelligence d'analyse, et très intéressant ; ce livre m'a fait longuement réfléchir. »
Vous avez vous aussi des livres récents à recommander ? N'hésitez pas à partager vos lectures en commentaire de cet article !