Entretien entre Samira Negrouche et le directeur adjoint du Palais de Chaillot le 16 novembre 2023 autour de STATIONS.
Il y a des arbres dans ma tête…
Il y a des arbres dans ma tête
autour de ma baignoire
parce que le cosmos c’est bien trop grand
loin de ma flaque d’eau
J'oberve mon propre massacre avec le tranquille
courage du savant. j'ai l'air
d'éprouver de la haine, et j'écris en fait
des vers pleins de ponctuel amour.
Pier Paolo Pasolini, in "Poesia in forma di rosa"
EXTRAIT
dans le jardin de rocaille
un homme muet danse
on ne sait l’oraison funèbre
un homme sourd dit-ton
sème des pas d’abondance
et des cercles solaires
il n’est pas né pour entendre
la déflagration du monde
y a-t-il un lieu échoué
sur une crête oubliée
où les nouvelles ne parviendraient pas
où les nouvelles ne se supposeraient pas
où les nouvelles ne se sentiraient pas
y a-t-il une brèche de temps
qui n’attende pas
de figer nos regards
sur les écrans asphyxiés ?
y a-t-il des yeux en ce monde
des oreilles en ce monde
qui soient nés
pour accueillir
en leurs âmes
l’obscénité
l’obscénité
l’obscénité
l’obscénité
l’obscénité
et s’en détourner
et ne pas s’en détourner ?
Dans le jaillissement de ton image
mon rire a des remords
Djamal Amrani
Partir c'est
escalader son désarroi
sur la corde
de l'oubli
partir c'est
encore la vie
derrière soi
Ce qui reste
commencer chaque matin
à heure précise
comme
reprendre à zéro
répondre à l'oubli du temps
à la dérive des âges
à ta mère qui tremble
à la généalogie du pire
au désastre des dieux.
Samira Negrouche
"Celui qui a l'habitude de marcher
Comme toi
Sait...
Qu'un jour il reprendra la marche
Même s'il devait s'arrêter
Il partira
Sur ces chemins
Qui s'étendent à perte de vue
Au bout desquels aucune marche ne parvient
Pour longue qu'elle soit
Celui qui a l'habitude de dire son mot
Personne ne peut entraver sa parole
Tranchante comme une lame
Coupe dans le vif des rameaux
Auxquels il donne des formes
Que tu aimes scruter
Celui qui a l'habitude de se relever
Quand il lui arrive de chuter
Son aigle volera très haut
Dans les cieux déployés
Profonds comme l'essence des rosées
Sur la peau des grenades mûres
Qui craquelle sous la poussée des grains
Celui qui sait le sens de la vie
Ne peut pas retenir le sourire
Devant les prairies fleuries
Où palpite le coeur de la beauté.
Brahim Tazaghart
traduit par Mourad Slimani.
suite a/rythmique
délité
palmes à angle ouvert
je raccommode mes bords
les attache au cercle
à la serrure
rassemble les pièces
désaligne la taille
au point de hauteur
stries
là où ça joint
ça lâche
le mouvement
est distance
est tension.
TES VAGUES…
Tes vagues
voudront-elles de moi
lorsque mes larmes
dociles
s’offriront à la mer
Ton horizon
s’ouvrira-t-il à mon regard
comme à ta lumière
mes mains.
TU NE TE RÉSIGNES PAS…
Tu ne te résignes pas
à relâcher le bord du ciel
à neuf heures
ce matin
tu tiens le souffle du voilier
aller vers le chemin le plus étroit
redessiner le mirage
Tu te demandes ce qu’est
un lieu à soi
si tu dois te délaver
t’alléger de tes promesses
hier tu voulais savoir si
et voilà que tu ne sais plus pourquoi
Il eut fallu s’y jeter sans prévisions
Le verbe
ce devrait être une patère
pour y suspendre
le silence
Les mots
des poteries fragiles
pour contenir durablement
le calme
effacés les mots du tableau noir
effacés du même coup
désirs attentes
ambitions
Taisez vous mais taisez vous donc, extrait de Rien, de Hamid Tibouchi