Jeanne n’avait jamais fréquenté l’école. Les filles de paysans n’y allaient pas. C’était du temps perdu. Il n’y avait pas besoin d’un maître pour apprendre à tenir le ménage et à seconder les hommes, les mères suffisaient à cela. En hiver, profitant du répit accordé par la nature endormie, quelques rares garçons allaient en classe, si le père avait les moyens de payer et si pour une curieuse raison, il trouvait de l’intérêt à des savoirs lointains et sans le moindre rapport avec la terre.
Incapable d’écrire son prénom, Jeanne ne savait rien. Alors elle écoutait les hommes qui avaient un avis sur tout, même quand leur ignorance égalait la sienne.
Si l’arrivée de l’électricité avait apportée une incontestable amélioration du confort, elle n’avait pas raccourci la durée des jours de travail, mais les avaient plutôt allongées durant l’hiver.