Boulevard Tintin - Hergé intime
Brigitte est une pythie sympathique, parfois sans pitié, qui déclame vérités et absurdités avec la majesté d’une diva lointaine, l’innocence d’une gamine babillant dans un torrent de roses ou la fragilité d’une vieille agonisant dans les flammes d’un bûcher.
S'il complique à l'évidence la tâche des biographes, ce silence appuyé relève surtout un trait de caractère qui hantera Jacobs jusqu'à la fin de sa vie : la crainte obsessionnelle de trahir sa propre nature. « J'estime qu'un auteur ou un acteur doit être connu par ce qu'il écrit, par ce qu'il évoque ou par ce qu'il représente quand il est sur scène, expliquait le dessinateur. Il y a souvent une déception du lecteur ou du spectateur, quand il connait le personnage en chair et en os. »
Première partie. Un esthète contrarié (1904-1943), p. 15
"Aussi paradoxal que cela puisse paraitre, Brigitte Fontaine est célèbre pour de mauvaises raisons, et une grande partie du public connait ses frasques médiatiques sans avoir entendu d'autres chansons que Ya des zaous ou le Nougat. Aux yeux du plus grand nombre, Birigitte Fontaine reste donc l'allumée de service qu'on invite sur les plateaux pour le pittoresque et la provoc. Comment ne pas songer à l'albatros en la voyant débattre dans ses filets tendus par certains animateurs, qui, faussement impertinents, se contentent de la réduire à un monstre de foire, sans aucun égard pour ce qui est le sens même de sa vie d'artiste : son oeuvre"
La charge émotionnelle du Lotus Bleu est inédite dans l'oeuvre d'Hergé. Sa relation avec Tchang Tchong-Jen en est le moteur affectif. La contribution du jeune Chinois porte évidemment sur l'authenticité de l'urbanisme, des costumes, du mobilier et des objets usuels qui excitent la curiosité du lecteur. En arrière-plan des cases, Tchang calligraphie aussi des idéogrammes poliltiquement engagés, que l'on peut traduire par "À bas l'impérialisme !" ou "Abolissons les traités inégaux !...
Comme la plupart des Occidentaux, Hergé ignore sans aucun doute que ces slogans servent la propagande du Parti communiste chinois.
Edgar P. Jacobs n'estima jamais opportun de parler de sa vie privée. Parvenu au sommet de sa notoriété d'auteur de bandes dessinées, il ne s'abandonna que très rarement à l'évocation des liens affectifs ayant ponctué sa vie de petit garçon, de jeune homme, d'amant ou d'époux. De son enfance, par exemple, nous ne savons que peu de choses relevant de la sphère intime. Ainsi, les prénoms de ses parents ne sont-ils même jamais mentionnés dans ses mémoires, Un Opéra de papier.
Première partie. Un esthète contrarié (1904-1943), p. 15
J'avoue que je n'ai pas d'opinion politique.. vraiment. Affirmera Hergé avec un sourire gêné à l'occasion d'un reportage télévisé du journal de TF1 diffusé le 2 mai 1976. En refusant de s'engager, RG croit s'évader des querelles idéologiques auquel il prétend n 'avoir jamais vraiment accordé d'importance. Il se considère à l'évidence comme un non conformiste non subversif . dans de nombreux entretiens, il ne cessera de citer un aphorisme de Nietzsche que lui a soufflé l'écrivain Gabriel matzneff:" toute conviction est une prison".
Depuis que Georges est sous les drapeaux, l'homme de presse s'est pris d'intérêt pour les dessins que le jeune scout a publié dans des revues catholiques. Hergé est très heureux d'apprendre que l'abbé souhaite l'engager au service du journal "en qualité de reporter photographique et dessinateur".
Georges [Hergé]est en manque d'affection et se réfugie dans un royaume qu'il se construit et qu'il ne cessera jamais d'élargir aux dimensions de la planète. Il échappera ainsi au contour d'un monde qui lui déplaît en inventant des formes nouvelles. Pour l'heure, le dessin canalise son ennui tout autant qu'il sublime son énergie destructrice en acte créateur. Seule cette occupation solitaire et silencieuse parvient à endiguer la bouillonnante énergie de cet enfant hyperactif. Le petit Georges peut ainsi valoriser l'acuité ironique qu'il porte sur ce qui l' entoure. En cernant du trait de son crayon les êtres et les choses, il éprouve sans doute inconsciemment le sentiment de maîtriser le désordre du dehors, en le rendant lisible, c'est-à-dire moins effrayant.
" C’est clair, tous les chemins mènent à ma nuit et je ne peux être sauvée que par moi, mais je ne m’appartiens pas car on m’a donnée. Je suis une flaque. » « Madelon », le monologue poignant d’une femme maltraitée, tyrannisée, qu’elle a écrit par Brigitte Fontaine en 1978
La nouvelle de la mort du dessinateur vient de tomber. Le jour même, Spielberg et sa productrice Kathleen Kennedy envoient un message de condoléances et réaffirment plus que jamais leur souhait de mener à terme la réalisation d'un film adapté de Tintin.