L'odeur lui arracha un soupir
d'aise. La senteur particulière des livres lui procurait toujours cet effet.
Certains pensaient qu'il ne s'agissait que de moisissures et de poussière et
trouvaient donc cette fragrance incommodante. Pour Alan, c'était le plus
merveilleux des parfums.
Il passa la moitié du livre en
feuilletant les pages avant d'arriver enfin à celle qu'il cherchait. Il lut en
haut centré : « Le désir de peindre ». Il sourit devant le
titre, car malgré la douleur de rester éveillé, comment rester insensible aux
vers de Baudelaire ? Oui, certains poèmes avaient la faculté de l'apaiser
comme aucun verre de whisky ne le faisait.
Voilà qui était Alan Ravenskie. Un
être intelligent qui savait observer le monde, mais que le monde ennuyait. Un
homme sensible aux arts et aux sentiments, bien qu'il détestât cela. Une personne
qui recherche dans la solitude, le moyen d'être entouré
Oui, le capitaine Ravenskie
excellait en de nombreux domaines, doué d'une capacité d'adaptation et
d'apprentissage sans faille. Cela le rendait à la fois irrésistible et répugnant.
Répugnant, car Alan était un homme
de savoir que l’humilité ne touchait pas. Il pensait pour sa part que ce trait
de caractère, que certains se vantaient d’avoir, était pour mieux cacher leur
médiocrité. Impatient et toujours insatisfait, il cherchait sans cesse un
nouveau terrain de jeu, ce que lui permettaient les aventures de Jack Donegan.