La chronique de Gérard Collard - Chibani
Vous la ramenez en permanence, alors que vous n'avez rien à dire. Wallou, à part la tchatche. Les Français vous ont vus venir de loin, avec vos grandes gueules. Maintenant, les hommes politiques font du ball-trap avec vos conneries.
Le vieux n'avait aucune illusion sur l'avenir de cette génération, qui avait baissé les bras avant de combattre. Malgré sa solidarité envers la Oumma, son jugement était sans appel. Il était aussi pessimiste sur l'immigration que sur la jeunesse tout court, et son acuité commençait à m'impressionner.
Mais la vie dans les années 1960 était quand même plus facile. Il suffisait d'être vaillant pour prendre un bon départ. Aujourd'hui la bonne volonté te permet tout juste de supporter ta frustration.
Les anges qui traînaient triomphalement le traineau du temps ont fini par s'essouffler, empoisonnés par l'air suffoquant de l'époque, qui les remplaça aussitôt par quelques chiens de l'enfer.
- Tu sais, Chibani, aujourd'hui, tout le monde est dans la même merde. Musulmans, koffars (athées) ou juifs ont déjà tellement de difficultés pour survivre ! Partout, c'est sauve-qui peut. Notre humanité est en train de foutre le camp. C'est peut-être juste ça la fin du monde ? Tu n'as pas idée à quel point la misère a fini par raboter les grands principes de ton époque.
On n'escalade pas une montagne comme on joue à saute-mouton sans y laisser quelques plumes.
Le coq gaulois, fier et orgueilleux, n'a pas toujours été un mouton tondu.
L'émotion est un fluide qui n'irrigue jamais longtemps l'esprit humain.
- Alors, 5 que je multiplie par 7. Que je multiplie par 52. ça nous fait 1820 prosternations devant Allah en une seule année. Admettons que tu aies commencé à 12 ans, ça te fait au moins six décennies de pratique. Ce qui va nous donner : 1820 que je multiplie par 60. Ce qui fait un total stratosphérique de 109 200 rendez-vous directs avec le créateur. Mois je dis que si c'est pour en arriver à un tel degré d'indifférence, tu aurais mieux fait de te mettre au yoga, sermonnai-je.
Les vieilles civilisations sont toutes mortes de leurs morts naturelles, dans le lit douillet de la décadence. Notre époque emprunte complaisamment ce même chemin, qui mène à la perdition (p.17).