"L’homme ressemble à une valise. Pendant son voyage à travers la Vie, il recueille comme elle des étiquettes colorées. Mais c’est l’intérieur qui compte."
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" ...mais si vous avez passé votre temps à nourrir votre âme d'espoirs, la réalité risque fort d'être décevante. "
Les Néerlandais propriétaires de plantations de caoutchouc se trouvaient dans une situation quasi désespérée. Ils n'étaient pas autorisés à hypothéquer ou à vendre leur exploitation, sauf au gouvernement qui leur versait la somme convenue sur un compte bloqué, rendant impossible toute exportation de capitaux. S'ils continuaient à exploiter la plantation, ils étaient tenus de vendre leur production au gouvernement, au prix fixé par celui-ci. Par ailleurs, on leur imposait de verser aux ouvriers agricoles le salaire minimum garanti ; dans ces conditions, il leur était pratiquement impossible de rester solvables. S'ils voulaient survivre, leur seule chance était de dissimuler une partie de leur production aux inspecteurs gouvernementaux et de la céder, en échange de dollars Hong Kong, à des colporteurs chinois qui faisaient des affaires en or en achetant du caoutchouc au marché noir en Sunda et en le revendant à Singapour.
A Selampang, le marché noir sévissais dans tous les domaines. Dans les sanatoriums installés par l'Organisation mondiale de la santé, les "mantris" faisaient des piqûres d'eau à leurs malades pour conserver le BCG et le revendre au marché noir.
Les traits d’un homme, la structure des os et des muscles qui les recouvrent sont le résultat d’un processus biologique ; mais son visage, c’est lui qui le crée. C’est une image de son état émotionnel habituel ; la projection de ses désirs et des craintes qu’il cache aux yeux d’autrui. Il le porte comme un masque, un masque diabolique, un instrument pour produire chez les autres des émotions qui reflètent les siennes. S’il a peur, il doit inspirer la crainte ; s’il désire, il cherche à se faire désirable. C’est un vêtement posé sur sa nudité psychologique. Seulement quelques hommes, des peintres, ont su dévoiler l’esprit qui se dissimule derrière le camouflage de chair. Les autres ont besoin d’interpréter les paroles et les actes pour comprendre la signification du masque qui leur fait face. Et, bien qu’ils sachent d’instinct que la réalité d’un être coïncide rarement avec son apparence, ils sont choqués par une démonstration de ce fait si commun. La duplicité d’autrui est toujours choquante pour celui qui n’a aucune conscience de la sienne propre.
La pièce tirait sans discontinuer, tressaillant dans le trou exigu qui lui servait d'abri, soulevant des nuages de poussière jaunâtre et ajoutant au vacarme des rafales de mitrailleuses. Puis un bref silence se fit et je crus entendre le grincement des chenilles d'un char.
Il apparut prudemment au bout de la rue. Une fois là, il parut hésiter, tel un taureau qui cligne bêtement des yeux en débouchant dans la clarté aveuglante de l'arène. Il y avait une tache noire sur ses flancs qui semblait être due à un cocktail Molotov.
Le poste ne possédait pas de cellule; on me plaça donc dans les W.-C. sous bonne garde, tandis que le commandant envoyait un rapport sur mon arrestation au quartier général et attendait des instructions. Les toilettes se trouvaient à quelques mètres de son bureau et pendant les vingt minutes qui suivirent le téléphone sonna quatre fois. Le son de sa voix me parvenait. Je notais que le ton se faisait de plus en plus respectueux à mesure que les communications se succédaient.
Je me demandais si je devais m'en réjouir ou non.
Dans une civilisation mourante, le prestige politique n'appartient pas au profond diagnosticien mais à l'habile charlatan . C'est la distinction accordée à la médiocrité par l'ignorance .
J'ai toujours aimé regarder l'intérieur des tiroirs et des placards chez les autres. On y fait quelquefois d'étranges découvertes. Je me souviens qu'un jour, du temps où j'étais à Coram ma tante eut une pleurésie et l'infirmière dit qu'il fallait que je prenne pension ailleurs, un mois. Ce sont des gens qui habitaient une vieille villa du côté de Lewisham High Road qui me recueillirent. La maison était tout entourée de grands massifs de lauriers et d'énormes noyers qui l'assombrissaient beaucoup. Je détestais passer devant les buissons de lauriers le soir, parce qu'à cette époque je croyais (comme seul un enfant peut imaginer) qu'un fou armé d'une baïonnette allemande s'y tenait à l'affût, prêt à bondir sur moi pour me tuer. Mais l'intérieur de la maison me plaisait. Cela sentait le savon désinfectant et la cire à parquet. Les propriétaires avaient eu un fils tué sur la Somme et me donnèrent sa chambre. Je découvris de tout dans la commode. Un album de timbres, par exemple. Je n'avais jamais fait de collection de timbres, mes beaucoup de mes copains de classe en faisaient une, je pris donc un ou deux spécimens et les leur vendis. Après tout, le fils était mort et n'en avait plus besoin.
Il me demanda de lui prêter de l'argent. Il devint pressant et jura de me rembourser. La vie est difficile n'est-ce-pas ? Sur le moment, une personne est sincère. Vous savez pourtant que, demain, elle se dira avec une sincérité égale que vous n'avez pas besoin de cet argent et que la magnanimité se paie. Vous perdez à la fois votre argent et un ami.