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Critiques de Bartabas (53)
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D'un cheval l'autre

« Celui qui fut le gardien du nom, la mémoire vivante de ce théâtre équestre, ne revit jamais Aubervilliers. Du New Jersey ne revint que ce bocal de faïence noire. Il est là, sur mon bureau, devant le dessin à l’encre de Chine d’Ernest Pignon-Ernest, le montant assis, antérieurs tendus, l’encolure en arc-en-ciel, l’air pensif. Le couvercle est entouré d’une tresse de ses crins. Il contient des petits éclats d’os et des cendres….. Elles attendent patiemment de rejoindre les miennes. »



Il s’appelait Zingaro et il fut celui qui inspira ce théâtre équestre !



Quel bonheur que cette lecture ! Complètement assommée par un rhume et de la fièvre, il me fallait trouver un récit facile, fluide, qui ne demandait aucun effort intellectuel ! Dans la famille, la condition animale nous tient à cœur, nous ne pouvons nous passer de nos amis à quatre pattes, chien ou chat. Je ne pratique pas l’équitation, j’aime la beauté du cheval qu’il soit pure sang ou de trait. Je suis entourée de passionnés d’équitation, de ma fille à ma nièce en passant par ma belle-fille, ma petite fille, le cheval tient une grande place dans notre milieu familial. Si moi je pleure d’émotions devant le Lac des Cygnes ou Carmen, ma fille et ma mère se disputent un mouchoir devant les prestations du Cadre de Saumur.



Alors qu’elle ne fut pas mon coup de foudre devant l’écriture poétique de Clément Marty, nom de scène Bartabas. Cet homme qui fuit ses semblables pour se réfugier auprès de ses chevaux où il se sent à sa place, s’exprime, selon moi, beaucoup plus facilement à l’écrit qu’à l’oral. C’est un amoureux des mots qui nous offre une magnifique découverte de ses rencontres passionnées et passionnantes avec ses partenaires équins. C’est tellement beau ce qu’il évoque, sa manière de décrire ses chevaux, ses rencontres, ses coups de cœur. Il écrit avec son cœur et c'est contagieux. Il raconte ses compagnons chacun avec son tempérament, ses blessures, son histoire, son nom. Ce sont souvent des chevaux sauvés des mains d’un maquignon peu sympathique, d’un abattoir. J’ai démarré la lecture les larmes aux yeux et je l’ai terminé de la même façon tant l’écriture de cet homme m’a touchée. J’étais sans filtre devant ce sondeur d’âme, devant ce chant d’amour aux équidés, cet homme qui sait si bien disparaître pour laisser s’exprimer l’animal, lui donner toute sa place.



Il y a des moments émouvants, des moments plein de tendresse. Il sait nous dessiner ses chevaux avec poésie, faire partager sa vision de l’œuvre d’art que deviendra le cheval dès qu’il sera en confiance avec l’homme et il tisse sous nos yeux l’œuvre artistique. Il y a aussi une grande sensualité qui se dégage de ces descriptions, je sentais sous mes mains les muscles du cheval, la texture et l’odeur de sa robe. Je ressentais la relation charnelle entre l’homme et l’animal, cette fusion entre les deux animalités.



Ce fut vraiment un enchantement, c’est un très bel hommage que rend l’auteur à tous ses compagnons de route. Un véritable chant d’amour avec l’animal ! Bravo l’artiste ! Et merci Kawane pour son billet !



« Zingaro, mon sang, ma chair, ensemble nous nous sommes appris, nous éduquant l’un l’autre, jusqu’à inventer un langage seulement connu de nous. Ce fut long et laborieux parfois. Tant de maladresse d’abord, de tâtonnements, de vaines tentatives pour se chercher, se comprendre, acquérir tous les gestes qui me fondent aujourd’hui. Nous nous sommes construits petit à petit en marge du voyage, par tous les temps, par tous les lieux, jamais loin des arènes qu’elles soient de Nîmes ou de Madrid. A toute heure du jour et même de la nuit, nous nous sommes donnés sans nous préserver, comme un premier amour. »

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D'un cheval l'autre

J'avais prévu de ne jamais lire ce livre. Parce que je suis cavalière, et que je ne retrouve jamais totalement mes sensations dans les mots des autres, qui ne sont au demeurant que des mots, peinant d'être à la hauteur de tout ce que la relation humain-cheval peut nous apporter. Parce qu'un accident m'a interdit de continuer d'exercer ce qui aurait dû finir par devenir mon métier, et que tout ce qui me rappelle ce que je ne pourrai plus jamais avoir et ressentir ne me rend pas particulièrement joyeuse. Mais pour m'occuper et me remonter le moral cet été après une blessure, j'ai assisté à un cabaret équestre. Vous me voyez venir : je n'aurais jamais dû assister à ce spectacle. Parce que forcément j'en suis ressortie éblouie ; Parce que forcément, et même si c'est un peu douloureux, ça m'a fait replonger dans un tas de souvenirs et sensations. Et que j'en ai voulu plus. Mais que je ne pouvais pas avoir plus… Sauf par la littérature. Alors, je me suis résolue à prolonger mes sensations par la lecture de ce centaure, qui me paraissait le seul à pouvoir me faire toucher du doigt ce que j'avais envie de vivre. Bartabas comprend assez bien les chevaux pour pratiquer une équitation plus naturelle, où le spectacle s'adapte aux chevaux et non l'inverse. Restait à savoir s'il saurait l'exprimer de manière à me le faire vivre : « Je suis un passeur d'expériences », nous annonce-t-il. Ça tombait à pic !





De son côté, c'est aussi pour fixer et prolonger ses souvenirs que Bartabas a écrit ce livre : « Les aventures de théâtre ne sont-elles pas les premières à disparaître de la mémoire des hommes ? Restent nos sensations, plus prégnantes ; je les porte encore d'un cheval l'autre. » C'est donc après avoir accompagné un énième compagnon cheval dans sa belle mort, que Bartabas éprouve le besoin d'écrire ce livre : « Je dois les faire revivre en moi, revivre seul à seul, pas à pas ce que nous avons vécu, pour qu'ils se dressent à nouveau, qu'ils dansent encore un peu. Un carrousel de morts-vivants… le dernier tour de piste. » Hommage.





Une danse des souvenirs où le contact - charnel, visuel, mental - prend toute la place. A raison d'un cheval par chapitre, Bartabas nous donne un aperçu de ce qu'est la relation humain-cheval. Vécu et philosophie s'entremêlent, offrant un contenu riche en émotions. A condition de s'y intéresser, ce livre est abordable par tous : Peu de technique (quelques allures que vous pourrez googliser pour visualiser), juste des mots simples, poétiques mais imagés qui vous offrent instantanément la vision des tableaux qu'il décrit ; et des anecdotes ciblées qui permettent, en très peu de pages à chaque fois, de présenter sa première rencontre avec chaque cheval, et ce que chacun d'eux lui a apporté de plus précieux. Car s'il enseigne à ses chevaux, il apprend tout autant d'eux, de la même manière que l'on apprend de chacune de nos rencontres humaines. Alors il conclut chaque chapitre par une phrase qui s'adresse au partenaire dont il parle :





« Vinaigre, tu m'as appris à fermer les yeux et à devenir l'instrument de ton désir. Chaque soir j'ai joui de ton onde, perché sur un nuage ondulant entre mes cuisses. Grâce à toi, j'ai goûté à la plénitude du centaure ».





A travers ces portraits frôlant l'oraison funèbre, on voit bien que c'est la personnalité de chaque cheval et sa relation avec lui qui lui inspire les mises en scène de ses spectacles : Il n'essaie pas de les plier à une idée préconçue, ni de les façonner pour entrer dans une case qu'il aurait préfabriquée. Et la magie opère à la lecture, car son écriture ciselée permet de visualiser immédiatement ses explications ou descriptions. le fait de procéder par chapitres courts en passant d'un cheval à l'autre évite de se lasser ; d'un autre côté, pour prendre la mesure de l'évolution de la relation homme cheval, ça m'a contrainte à revenir sur les chapitres précédents d'un même cheval pour ne pas me tromper, parce qu'il y en a une tripotée. Ensemble, ils forment la caravane de ses nuits : un long chapelet de noms qu'il égraine durant ses insomnies.





Un peu à fleur de peau en ce moment, j'ai refermé ce livre avec les larmes aux yeux. D'abord parce qu'il me rappelle des souvenir inatteignables. Mais surtout parce qu'après nous avoir, pour chaque cheval cité, évoqué leur rencontre, puis ce que chacun lui a appris, Bartabas ne peut éluder leur séparation. Retraite, mort, blessure… Rien ne dure toujours. Même pas les souvenirs. C'est sur cette note mélancolique que l'auteur refermera ce livre, en évoquant son âge propre qui dépasse désormais la soixantaine. Lui qui dit ne pas savoir communiquer avec les humains sait en tous cas les toucher et les chatouiller de sa plume charnelle et sensuelle - comme l'est la pratique de l'équitation pour tout amoureux du cheval - mais aussi extrêmement poétique, et légère comme sa main de cavalier. Sa sensibilité vient de me faire changer d'avis : J'ai finalement envie de renouer un peu avec ce milieu, à commencer par aller voir les spectacles qu'il nous offre, sûrement féériques, que je m'interdisais jusqu'alors. J'espère y croiser la fameuse oie, Monsieur Marty… ;-) La fin m'a fait prendre conscience que la roue continue de tourner pour tout le monde, alors il faut que je me dépêche avant qu'il ne s'arrête à son tour… Un livre aussi humain qu'animal ; Parfois triste, mais toujours d'une beauté inouïe. Mention spécial au dialogue imaginé entre plusieurs chevaux qui l'observent !





« Après tant d'années de pratique, je ne sais plus grand chose. Tout mon savoir, les chevaux l'ont emporté avec eux. »
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D'un cheval l'autre

Je ne connais pas suffisamment les chevaux pour savoir bien en parler, mais ils me fascinent. Ma pratique équestre est relativement limitée, mais j'en garde des souvenirs enthousiastes et parfois cocasses. Ainsi, il y a très longtemps, avec quelques amis tout aussi aguerris que moi à l'exercice, nous étions partis galoper dans le Bois du Névet tout près de Locronan, accompagnés d'un guide. Un moment donné, ma jument s'emballa ayant pris peur, je crois me rappeler que la personne devant moi avait perdu son foulard qui ondula au sol tel un serpent. La jument affolée m'emporta à l'intérieur de la forêt aux arbres serrés, nous éloignant du chemin sur lequel nous étions.

Le guide me cria : « Bernard, accroche-toi au plus vite à une branche sinon tu vas avoir les genoux broyés ! » C'est vrai, les chevaux savent bien évaluer la distance entre deux arbres où ils peuvent se frayer un chemin, mais j'ai découvert ainsi qu'ils ne savent pas forcément apprécier le passage nécessaire pour tenir compte de la présence du cavalier... J'ai donc obtempéré jusqu'à ce qu'une âme charitable vienne me décrocher de ma branche. J'ai peut-être raté une carrière d'écuyer acrobatique qui aurait pu commencer dès ce jour-là...

D'un cheval l'autre, j'ai aimé entendre ici des chevaux cavaler, ruer, péter, s'ébrouer, hennir... J'ai aimé leurs odeurs, leurs écumes, leurs regards aussi, j'ai caressé leurs crinières, leurs flancs, leurs croupes. J'ai vu la brume du matin sortir de leurs naseaux... Bartabas m'a simplement appris à les contempler avec humanité, c'est bête, non ?

Bartabas, poète des compagnons sabotés, nous invite à découvrir ici tour à tour un bestiaire, une fresque épique, un carrousel, un opéra équestre, à entrer dans la danse, à venir dans le cercle de sable, sous la grande cathédrale de toile, la piste aux étoiles balayée par les lumières des projecteurs à moins que ce ne soient déjà nos yeux émerveillés qui courent sur les pages comme des lucioles.

D'un cheval l'autre, j'ai ressenti la beauté et les tourments que peut susciter un tel amour pour les chevaux. D'un cheval l'autre, Bartabas nous invite à découvrir l'histoire des Zingaros, ses chevaux splendides, mais c'est son histoire aussi que Bartabas nous délivre ici, sa passion, ses chagrins, ses rêves.

« J'ai vu parfois, dans le regard du cheval, la beauté inhumaine du monde avant le passage des hommes. »

Bartabas est un taiseux qui se confie à nous. Il se fait intime pour nous, tandis qu'il veut mesurer le monde avec ses chevaux. Et il le fera, avec grâce, simplicité et générosité.

« Cette nuit-là, nous avons fait un pacte, un pacte pour la vie : j'allais contaminer son animalité et il allait me permettre d'exister parmi les hommes. Aux humains de mon espèce, nous allions nous révéler. Pour la vie. »

D'un cheval l'autre, Bartabas nous fait entrer dans son humanité. Son coeur est immense, c'est un cirque à lui tout seul.

Il nous parle de Zingaro comme d'un frère, cet ange saboté qui inspira ce magnifique théâtre équestre et lui donna son nom.

Souvent, les chevaux de Bartabas s'appelleront Zingaro.

Il nous fait rencontrer ses autres frères : Hidalgo, Chapparo, Vinaigre, Quixote, Lautrec, Felix, Dolaci, Micha Figa, Horizonte...

C'est un livre d'une beauté solaire.

« Comme Don Quichotte,

je veux que l'imaginaire soit vrai. »

Vivre avec les chevaux, ce sont des heures inlassables de dressage, d'éducation... C'est inventer des mots que l'animal sera seul à comprendre, c'est tâtonner dans cet apprentissage à la fois grandiose et parfois décourageant, espérer, trébucher, se relever, il faut s'apprivoiser, grandir ensemble avant d'entrer dans la lumière des autres...

Aimer les chevaux, c'est se donner à chaque instant comme dans un premier amour.

« Il est présomptueux de croire que les chevaux sont nés pour les hommes, et vain de chercher celui que l'on voudrait parfait. Il me faudra toujours les accepter tels qu'ils sont, les adopter, m'appliquer à faire éclore les trésors qu'ils recèlent et parfois même célébrer leurs défauts. Cette philosophie guidera désormais mon approche des chevaux… et des hommes. »

J'ai aimé ainsi la philosophie de Bartabas.

Bartabas a parcouru le monde, mais ses voyages les plus fabuleux sont les histoires qu'il a écrites avec ses chevaux, des histoires intimes faites de longs apprentissages, de tendresse, de douleurs aussi lorsque le cheval fourbu par les âges tremble dans le cercle de sable, puis tire sa révérence un soir dans la pénombre du jour. Qui de l'homme ou de la bête apprend le plus de l'autre ?

« Je me suis immergé jusqu'au plus profond de toi-même, j'ai récupéré ton animalité et l'ai faite mienne. de cela nous avons fait sens, nous étions prêts à affronter le monde. »

J'ai aimé ce chant d'amour, fraternel, sensuel, charnel, animal, touchant d'émotions.

« Et parce que nous fûmes deux amants se devinant du regard, les yeux dans les yeux à hauteur d'homme, je me suis toujours interdit de l'enfourcher comme un cheval. »

J'ai découvert un écrivain, un vrai, qui nous entraîne à folle allure dans un imaginaire débridé.

Ce livre m'a fait prendre conscience de la finitude de la vie, mais aussi de ses magnifiques vertiges.

Je referme le livre et j'entends encore quelques hennissements, ceux de Zingaro, ceux de ses frères entrés dans la lumière, qui l'ont quittée parfois aussi tandis que le chagrin de Bartabas nous étreignait.

J'ai juste envie de me retourner, revenir là-bas encore un peu, perdre mes pas dans ce cercle de sable désormais vide et me pincer les lèvres pour ne pas pleurer.

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D'un cheval l'autre

C'est un livre que je conseille à tous ceux et toutes celles qui ont l'amour du cheval avec un grand A. Les passionnés de cet animal vont se régaler.

J'ai vu, il y a fort longtemps un des spectacles de Bartabas "Tryptik". J'avais vraiment beaucoup aimé et c'est avec ce souvenir que j'ai eu envie de lire un de ses bouquins.

Il relate sa vie et son grand amour avec ses chevaux. Chaque chapitre est consacré à un cheval, tous aussi différents les uns des autres par leur caractère mais aussi par leur origine.

Dans l'ensemble j'ai bien aimé son récit. J'ai beaucoup appris de mots concernant le vocabulaire équestre. Certains chapitres étaient difficiles pour moi quand il raconte l'abattage des chevaux ou la maltraitance de leurs anciens propriétaires qui n'avaient pas de respect pour eux. Heureusement que ces chapitres ne sont pas nombreux. On ressent bien l'amour passionné et respectueux à la fois de ses amis équins. J'ai beaucoup aimé également son écriture : poétique et apaisante.

Les amoureux des chevaux vont se régaler avec ce livre.
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D'un cheval l'autre

Petite, j'aimais aller chez mon oncle qui possédait des chevaux de course. J'aimais les voir courir dans le pré, et curieux, venir à ma rencontre. J'aimais leur souffle chaud sur ma main posée sur leurs naseaux. J'aimais la douceur et la profondeur de leur regard.

Qu'ils étaient beaux, eux immenses et moi si petite.



Après la magnifique critique d'Onee que je vous invite à découvrir, j'ai eu envie de retrouver ces souvenirs d'enfance que je pensais perdus. Ils sont revenus avec une force émouvante. Et à ces images qui ne peuvent s'effacer, se sont mélangées celles de Bartabas.

Instants d'intimité et de bonheur.

Tristesse d'une vie qui n'est plus.

Les chevaux de mon oncle ont quitté le pré depuis bien longtemps maintenant.



Les mots de Bartabas ont résonné en moi, par leur douceur, leur peine, et par cette douce nostalgie qui se glisse entre les pages.



*

Je n'ai jamais vu de spectacles de Bartabas, j'aimerais beaucoup. En prenant ce livre dans mes mains, je me posais des questions quant au bien-être et au respect animal.



« Il est présomptueux de croire que les chevaux sont nés pour les hommes, et vain de chercher celui que l'on voudrait parfait. Il me faudra toujours les accepter tels qu'ils sont, les adopter, m'appliquer à faire éclore les trésors qu'ils recèlent et parfois même célébrer leurs défauts. Cette philosophie guidera désormais mon approche des chevaux… et des hommes. »



Les mots de Bartabas me rassurent.

Les mots de l'auteur m'ont touchée, m'ont bouleversée. Plusieurs fois, mes larmes ont coulé sans que je puisse les retenir.

L'amour que j'ai ressenti entre Bartabas et ses chevaux ne peut être feint.

C'est beau, c'est douloureux.



« À cheval je n'ai pas besoin de mots.

C'est une étreinte charnelle qui alimente mes rêves. »



*

Ils sont tous là, prêts à entrer sur la piste

Encore dans l'ombre

Ils attendent que j'ouvre le livre à la première page.

Chevaux artistes,

Chevaux danseurs.



« Ici, pas de rôles ni de romances,

personne ne se déguise

en autre chose que lui-même.

Ce sont de vraies gens et de vraies bêtes

qui se jouent de la vie. »



Lorsque le rideau se lève enfin,

un à un, ils viennent à moi,



« Pour éteindre l'insomnie, je les épelle un à un. Longue caravane, sans tambours ni musique, ils défilent lentement dans ma nuit et m'emmènent vers le sommeil, enfin. »

Chaparro, Pantruche, Horizonte, Micha Figa, Lautrec, Quixote, Vinaigre, le Caravage, Zingaro

et tant d'autres.



Dans leur robe d'apparat, d'ébène ou de lune,

chacun porte dans son regard et ses mouvements

le poids de son histoire personnelle.

Certains avancent confiants, majestueux, princiers,

Alors que d'autres, inquiets, s'approchent

avec timidité.

D'autres encore, la peur ancrée

dans leurs yeux immenses,

me fixent sans se dérober.



Sous la lumière des projecteurs

Un à un, ils entrent dans la danse.

Accord parfait entre l'homme et le cheval



« Jouer à se faire peur, jouer avec la peur des autres, jouer à se défier violemment puis me lover dans son corps assis en signe de soumission pour qu'enfin le public entrevoie tout l'amour qu'il avait fallu partager pour en arriver là. »



Force et fluidité

Patience et douceur

Grâce et sensualité

Complicité et amour

Respect et confiance

Se livrer et se libérer

Se comprendre et les comprendre



« Tu te nommes Dolaci et tu m'as appris à faire mes gammes.

Avec toi, j'ai compris que dresser un cheval ne peut se résumer à la compréhension de sa locomotion et à la résolution de ses résistances physiques. Je dois aussi sonder son âme. »



Le cheval et son cavalier se rejoignent,

s'enlacent dans une valse sensuelle

Un contact d'une infinie douceur

Deux êtres en parfaite communion

Bartabas murmure à l'oreille de ses chevaux.



« Zingaro, mon sang, ma chair, ensemble nous nous sommes appris, nous éduquant l'un l'autre, jusqu'à inventer un langage seulement connu de nous. »



Caresser, regarder, écouter, se chercher, se trouver, rassurer, soigner, partager, apprendre,

un lien se crée.

Instant magique.



*

J'aimerais m'approcher doucement, sans gestes brusques,

Une main tendue, je les laisserais m'effleurer,

Je les laisserais m'apprivoiser.



« J'approche mes lèvres du bout de ton nez, il est doux comme la chair d'un coquelicot. Tu sens l'âtre et l'automne, la feuille brûlée et la réglisse aussi. de tes naseaux s'échappe un soupir qui m'invite au voyage. »



Et puis, le spectacle s'achève,

Les lumières des projecteurs s'éteignent, le rideau tombe.

La nuit s'avance ne laissant qu'un vide endeuillé,

une douleur profonde, un sentiment d'inachevé.

Mes yeux s'emplissent de larmes.



« J'avance au hasard.

J'ai du mal à me suivre.

Je suis attelé à un cheval mort. »



*

« D'un cheval l'autre » n'est pas un roman, mais plutôt des tranches de vie, des instants privilégiés, des moments d'intimité entre l'homme et ses chevaux. Après avoir fait la connaissance avec chacun d'eux, le lecteur découvre leur passé, souvent triste, leur personnalité. On les voit devenir des artistes accomplis, guidés sans brusquerie, chacun à leur rythme, avec respect.



Ce lien invisible qui lie Bartabas à ses compagnons de route est magnifique. Son écriture est belle, poétique, sensible, sensuelle. J'aime beaucoup sa façon de s'effacer pour laisser l'animal maître des lieux.



« Toujours à l'écoute, il assoit son galop, en cadence je l'accueille au creux de mes reins, j'instruis mes vertèbres. Nous sommes faits l'un pour l'autre. »



Que dire de plus ?

J'ai aimé ce livre.

Un coup de coeur ?

Oui.
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D'un cheval l'autre

BARTABAS..un nom qui claque comme un mot magique pour un homme reconnu dans le monde équestre, aux pouvoirs exceptionnels ...en parfaite symbiose avec ses chevaux, ayant parcouru avec eux des millions de kilomètres et leur consacrant toute sa vie.

Bartabas par cette présentation intime nous fait découvrir tour à tour sa garde rapprochée...la rencontre avec son fabuleux frison, Zingaro;

l 'incroyable Quixote, Horizonte , le reste de la famille ainsi que la genèse de ses spectacles.

Ayant eu la chance d'assister à quelques fabuleuses représentations au Festival d'Avignon, inoubliables!! je me suis plongée au coeur de cette autobiographie avec bonheur.

Bartabas, un homme au caractère trempé, tout en vibration et instinct, sait comme personne approcher ce mystérieux animal, il nous dépeint sa vision fusionnelle et sa passion quasi charnelle pour ses chevaux.



Il nous livre son aventure comme un parcours initiatique, lève le rideau sur sa quête perfectionniste pour vivre quelques instants de grâce sur cette terre; avec lucidité, Bartabas nous fait des confidences : il aborde son questionnement personnel et profond sur des sujets qui le hantent et qui transpirent dans ses créations; mais aussi de la patience, de d'amour et tant de voyages !.. son regard sur le monde des hommes où il se sent "pas à sa place" et préférant la compagnie de sa troupe.. ..puis ce coup d'oeil aguerri détectant en une fraction de seconde le potentiel de l'animal..



Beaucoup de subtilité, de sensibilité dans ce portrait, de l'intelligence certes pour un homme qui a mené sa barque contre vents et marées, invoquant la mort et la vie comme un tango espagnol et qui les convoquent à cheval, en musique, lors de toutes ses créations ..

Tous les défis qu'il a su relevés, impliqué dans sa vie de nomade, cette trajectoire comme philosophie, un homme au parcours atypique.



Passionnée de chevaux ou pas, je vous recommande ce magnifique ouvrage, un homme pétri de vie, par la passion qui l'anime et l'amour de ses chevaux, l'adn de son parcours.



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D'un cheval l'autre

Un grand merci à Babelio pour cette masse critique et aux éditions Gallimard pour l'envoi de ce livre majestueux.



Bartabas reste pour moi un personnage emblématique, impressionnant, du monde équin. Je pense que chacun a déjà entendu ce nom du moins les amoureux des chevaux, il a fait son chemin accompagné de ses "mille" chevaux au pas cadencé de poésie, il nous livre ses rencontres, ses histoires, la fusion, l'écoute et le respect, d'homme à cheval, de cheval à homme pour ne faire plus qu'un. Savoir écouter, comprendre cheval, sentir, effleurer, pour mieux accompagner sur la piste cet animal humble, généreux, puissant et intelligent, qui restera un mystère sur terre.

D'un cheval autre, Bartabas nous conte tout le livre de sa vie équestre, chapitre après chapitre, c'est l'histoire d'un cheval, puis d'un autre, puis des autres, et encore un autre, ainsi s'en va la vie d'un homme-cheval.

Si vous aimez les chevaux dans le sens le plus humble et respectueux, si vous admirez plus son allure que son pedigree, si prenez plus de plaisir à le panser qu'à le monter, et parcourir sa robe, vous perdre dans la chaleur de sa crinière, si la douceur de ses naseaux vous émeut plus que tout , alors oui, vous pouvez lire ce livre car vous vous y retrouverez, dans le silence, la solitude, la communion des âmes, quelques notes de musique parfois, de la poésie sous chaque sabot, oui laissez vous emporter par tous ces chevaux qui ont fait cet homme : Bartabas, ou Bartabas qui a fait de ces chevaux tout un monde singulier, magique, poétique, qui n'existe nulle part ailleurs si ce n'est sa volonté d'être tout pour le cheval.



Comme toute passion, elle est dévorante, de bonheur, de souffrance, elle vous bouffe la vie, votre vie, mais c'est votre choix, votre vie, votre bonheur, et combien Bartabas a su par ce livre nous murmurer cela, vivez votre passion pleinement, sans compter, sans se retourner.



Une lecture qui m'a enchantée, bien même que j'ai déjà effleuré le monde de Bartabas, c'est un réel plaisir de le lire, sa plume est gracieuse comme ses chevaux, poétique, légère et harmonieuse à l'image de son art.

Savoir dire avec parcimonie, l'essentiel, un juste équilibre, pour laisser toute la lumière cet animal, le compagnon de tous les instants : le cheval.



Chapeau bas Monsieur Bartabas, et grand merci pour ce que vous nous offrez, merci aussi pour tous les chevaux que vous avez sauvé d'un destin tragique, vous pouvez comme vous le dites vous nommer l'abbé Pierre des chevaux.



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D'un cheval l'autre





On connait tous Bartabas, écuyer de génie, qui aura créé quantités de spectacles plus grandioses les uns que les autres glorifiant les animaux, des spectacles souvent joués d'ailleurs aux Nuits de Fourvière.



Aspirant jockey devenu cavalier punk, puis poète écuyer, Bartabas a fondé le Théâtre Zingaro et l'Académie équestre de Versailles et une oeuvre assez unique en son genre.



Dans ce qui est sa toute première expérience littéraire, Bartabas nous fait partager ses plus belles histoires d’amour avec ces chevaux qu'il aime et qui lui ressemblent tant, ces chevaux qui auront construit l'homme qu'il est devenu.



Bartabas qui a toujours ressenti dans sa vie et son oeuvre, le besoin de célébrer le cheval sous toutes ses formes le fait ici dans cette épopée équestre sensible et poétique, une ode sensuelle et entre gravité et légereté .



250 pages consacrées à l’art équestre, mais que les néophytes ne prennent pas peur, tant cette belle ode aux chevaux qui auront compté dans la vie



On a évidemment de longues et belles pages consacré à Zingaro bien sûr, le cheval qui a donné son nom au théâtre équestre fondé en 1984 et d'autres longs chapitres qui réussit à expliquer l' alliance aussi miraculeuse que fragile qui relie l'homme et l'animal.



Pour mieux tenter d'approcher la fascinante intimité pouvant naître entre l'homme et ces créatures quasi divines que sont les chevaux , ce récit de Bartabas est fortement à conseiller..
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Un geste vers le bas

Une amitié sincère semble avoir uni Bartabas et la danseuse Pina Bausch. Une sensibilité artistique de la danse, avec ou sans cheval les as rapprochés. Leurs rencontres épisodiques, entre deux verres de vins, quelques clopes et à bord de voitures prestigieuses sont racontées avec une grande sensibilité par l’auteur. Une évocation, centrée sur la fascination de la danseuse pour un cheval « Micha Figa ».
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Les chevaux de Sauvat

" Je pense que le cheval est notre dernier lien palpable avec nos origines primitives enfouies " J.L Sauvat.

Ce livre est la rencontre de 2 artistes exceptionnels, animés par une passion commune : le cheval ! Il se présente en 4 parties : chevaux libres; chevaux et cavaliers; fresques et une post face de Jean-Louis Gouraud (écrivain, historien encyclopédique des chevaux et de l'équitation ).

Jean-Louis Sauvat est un sculpteur, professeur d'Arts Plastiques mais aussi un cavalier de dressage émérite ! Il a fréquenté l'écuyer célébrissime Nûno Oliveira, portugais passionné d'opéras et de Verdi, qui a aussi beaucoup inspiré les cavaliers du Cadre Noir de Saumur !

Il déploie dans cet ouvrage : ses ébauches, ses croquis, ses esquisses, ses dessins et fresques devenus célèbres car il est surnommé à juste titre " Géricault "..

D'autre part, Bartabas né Clément Marty est le "chamane " qui a crée en 1986 au fort d'Aubervilliers le théatre Zingaro du nom de son premier cheval frison, il est célèbre dans le monde entier, "le centaure" Bartabas est écuyer, metteur en scène, chorégraphe et, en 2003, il devient le directeur de la Grande Ecurie du Château de Versailles et, il fait appel à son ami Sauvat pour les fresques. La danse, le chant, l'escrime et le kyudo sont enseignés en supplément de l'Art équestre...

L'Art Plastique et l'Art Equestre sont dans ce livre : la quintessence de la beauté, de la passion ( que je leur porte depuis toujours ! ) Un refuge paradisiaque quand j'ai du vague à l'âme !

L.C thématique de Mai 2022 : un animal dans le titre.
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D'un cheval l'autre

Cher lecteur,



Bartabas, emblématique homme de cheval, m'a pourtant, toujours inspirée du respect. Je l'ai découvert, il y a fort longtemps, grâce à "Bartabas, roman" de Jérôme Garcin puis à travers ses spectacles équestres.





Si vous espérez qu'il se livre (enfin), oubliez. Une nouvelle fois, il s'efface au profit de ses chevaux passésetprésents. En toute humilité. Comme pour s'excuser de ne pas toujours avoir su être à la hauteur. Nos chevaux nous donnent tout, dès qu'on sait leur parler. Nous ne savons jamais assez les remercier.





Les spectacles de Bartabas sont, souvent, singuliers. Et ils l'étaient encore plus, quand il a commencé, en 1984. Ces spectacles paraissent toujours dirigés par les chevaux. On comprend pourquoi quand on sait comment ils sont choisis. Pas de choix sur des papiers, un dressage ou une aptitude particulière. Non. L'homme préfère choisir sur une histoire, une expression, une attitude, une rencontre. Tant pis si les origines sont bancales, si le physique, dans un premier temps, ne fait pas rêver.



Si Bartabas, réputé pour être caractériel, reconnaît aisément ne pas savoir faire avec les hommes et gueuler facilement, il fait preuve d'une abnégation sans failles pour ses compagnons sabotés.



"J'ai vu parfois, dans le regard du cheval, la beauté inhumaine du monde avant le passage des hommes."


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Les cantiques du corbeau

Il m’a fallu du temps pour comprendre ce que je lisais. Puis j’ai lâché prise et je me suis laissé bercer par la plume hautement poétique de Bartabas. Il s’agit d’un recueil bien particulier qui rassemble des chants d’inspiration chamaniques inventés par l’auteur. Ce texte presque initiatique questionne notre rapport à la nature, l’éloignement de l’homme et de l’animal, il essaie de faire écho à notre plus ancienne mémoire et nous rappelle notre condition d’animal terrestre. C’est une lecture intense, complexe mais puissante et superbement écrite.
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D'un cheval l'autre

En 1957 était publié « D'un château l'autre » de Louis-Ferdinand Céline. Dans « D'un cheval l'autre », on est bien loin de Sigmaringen. Le grand écuyer Bartabas nous invite en effet à partager ses rencontres avec les chevaux qui ont le plus compté dans sa vie d'artiste et d'homme.

Il y a Hidalgo, « le cheval de la préhistoire » qui a « vu naître Bartabas le Furieux ».

Il y a Zingaro bien sûr, l'imposant frison à « la grâce de ceux qui n'ont pas encore la parole » et celui qui a donné son nom au théâtre équestre fondé en 1984.

Il y a Chaparro et son « enthousiasme communicatif de ceux qui ont côtoyé la mort et sont reconnaissants à la vie ».

Il y Dolaci, celui qu'il attendait, dont le galop est « limpide comme un choral de Bach ».

Il y a Quixote qui galope en arrière.

Il y a Félix, « une petite frappe pleine de morgue », un « hooligan en blouson noir ».

Il y a Horizonte qui porte encore beau à trente ans.

Et puis il y a tous ceux qui sont cités à la fin du livre dont certains ont été tirés des mains de maquignons sans scrupule.

Jérôme Garcin, auteur de « Bartabas, roman » publié en 2004, disait récemment de son ami qu'il était un cheval. Cette affirmation est assez proche de la réalité. Je dirais que ce taiseux solitaire un brin misanthrope et insomniaque comme ses compagnons qui ne dorment que quatre à cinq heures par jour a communié avec tous ceux qui ont partagé sa vie. « J'allais contaminer son animalité et il allait me permettre d'exister parmi les hommes » confie-t-il à propos de Zingaro.

Avec pudeur, émotion, sensualité et lyrisme, Bartabas nous fait partager ses plus belles histoires d'amour avec ces chevaux qui lui ressemblent tant. Une très belle lecture qui nous fait toucher la grâce.



EXTRAITS

- Les chevaux sont mes yeux pour regarder le monde.

- Pour éteindre l'insomnie, je les épelle un à un. Longue caravane, sans tambours ni musique, ils défilent lentement dans ma nuit et m'emmènent vers le sommeil, enfin.
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Les cantiques du corbeau

Après son hommage à ses chevaux, Bartabas change de registre et se lance dans des chants à l'animalité crue, où la violence, la mort et la sexualité entremêlent homme bestial et animaux.



Une lecture étonnante donc, mais qui rend hommage à la nature telle qu'elle est : sauvage et sans pitié, mue par des lois immortelles où les sentiments humains n'ont pas leur place.
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D'un cheval l'autre

Fascinée depuis toujours par l'incroyable beauté équestre, par l'univers des spectacles et films de Bartabas, j'ai lu ce livre très vite, passionnément et sans retenue.

Et puis, comme sortant d'une relation passionnelle, je termine éblouie, mais aussi un peu écoeurée et avec la nausée de qui a tutoyé l'oubli de la sagesse et de la sérénité au profit de l'excitation et des joies purement ventrales, si profondes soient-elles...

Bartabas aborde quelques chevaux qui ont fait son histoire, en chapitres courts et intenses. Tous j'ai eu envie de les approcher de la main, monter sur leur dos, humer leurs âmes. La langue de l'auteur est sublime de poésie et de vitalité.

Le titre évoque le roman de Céline "D'un chateau l'autre"... Et comme Céline, Bartabas aborde aussi, avec une franchise qui oscille entre cynisme et contrition, sa mysanthropie et sa lâcheté devant la vieillesse et la mort de ses chevaux. Il décrit parfois quelques séances à cheval comme des scènes de passions complusives. Il oscille entre grâces et enfers, magnifie l'amplitude entre les deux... Il fait de ce livre, de sa vie, de celle des chevaux une figure de haute école bien loin des vertes prairies heureuses...
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Un geste vers le bas

En 1990, Bartabas rencontre Pina Bausch la danseuse et chorégraphe et lui présente Micha Figa, à la robe de soleil et de lune et entre ces deux-là va se nouer un lien très fort, une intimité va se créer par la médiation des corps, celui de la danseuse, celui de l'animal ; de ces deux solitudes, de ces deux sensibilités devait naître un spectacle à Avignon, qui n'aura pas lieu.



Avec Un geste vers le bas, Bartabas nous offre le récit de cette rencontre émouvante, de ce lien puissant,sans concession, de cette compréhension immédiate entre deux êtres, humain et animal, une connexion magique, qu'il nous restitue avec délicatesse et poésie.



Appréciant Pina Bausch et fascinée par les chevaux, une lecture qui m'a emportée et remuée.



"La nuit s'enfonce entre leurs deux solitudes, et je me dis qu'une fois de plus l'aube emportera leur confidence.

C'est alors que surgit un éclair de danse ; l'espace d'un regard, je l'ai vue s'envoler comme un enfant s'envole, par la grâce de l'innocence.

Elle se déplie et s'étire avec l'aisance d'un courant d'air. Micha Figa, tendu jusqu'au bout des oreilles, ne la quitte pas des yeux. Un très léger tremblement de peau parcourt son corps en apnée. La danse doit naître sans vanité, elle n'a pour fin que de créer un état. Tout son être semble se mouvoir par lui-même avec une acuité, une vivacité, une violence qui évoquent la transe. On ne peut plus dire si elle est encore là ou bien ailleurs. Elle suit le trajet de ses membres d'une articulation à l'autre comme si ses bras, ses coudes, ses épaules et ses hanches ne lui appartenaient pas. Ses yeux mi-clos observent son propre corps dansant, des gestes sans rature qui me mettent un frisson.

Et d'un coup elle s'effondre plus qu'elle s'accroupit, assise sur ses talons, le visage incliné, les bras repliés et ses deux mains sur la nuque. La nuit s'est figée.

Micha Figa s'est approché. Il attend, car il a la patience des bêtes. Il veut veiller sur elle.

Son regard la traverse comme s'il pouvait voir son coeur en transparence. Il se passe tellement de choses en elle. Un récit se révèle ici sans qu'un mot soit prononcé."



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D'un cheval l'autre

A travers les petites touches impressionnistes des courts chapitres en hommage à chaque cheval de sa vie se dessine l'autobiographie de celui que nous connaissions comme "l'homme centaure", dont j'ignorais pour ma part le talent d'écrivain et la culture autre que celle de l'art de faire danser les chevaux.

J'ai toujours admiré cette capacité à créer du rêve en faisant exister les siens propres, sa détermination inflexible en toute décontraction, j'ai toujours su ce qu'il fallait d'amour, de fidélité, de compassion, de besoin de protection, d'immense respect, pour transformer un cheval ordinaire en concentré d'harmonie au service d'un spectacle, et ce malgré toutes les polémiques entourant cette personnalité peu douée pour les compromis.

Ce petit livre est une découverte : celle de la poésie d'une destinée tracée par des désirs originaux et une hyper présence à chaque réalité à modeler à la forme de ses rêves.
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D'un cheval l'autre

Il y a quelques semaines, j’avais découvert « l’homme cheval » dans le roman de Jérôme Garcin « Bartabas » qui brossait le portrait d’un homme aux multiples talents. J’avais déjà mesuré la force des liens qui unissaient Bartabas et ses chevaux. Il disait, s’agissant d’un nouveau venu, Zingaro, du nom de son théâtre équestre, « J’allais contaminer son animalité et il allait me permettre d’exister parmi les hommes… ».

Sous sa propre plume, l’écuyer, chorégraphe, metteur en scène, réalisateur Bartabas présente les chevaux qui ont été acteurs, comédiens au sein du théâtre équestre Zingaro et de ses différents spectacles à travers le monde, les uns après les autres, singuliers, différents mais tous de fidèles compagnons de route et compagnons d’art d’une troupe et véritables compagnons de vie d’un homme. Ils s’appelaient Quixote, Horizonte, Caravage…

Pas de casting pour recruter les artistes, un regard, un comportement, un physique d’ex vedette reléguée des champs de courses, ou bien, quatre poulains criollos trop jeunes pour le dressage certes, mais qui occuperont la scène selon leur propre chorégraphie improvisée, comme un signe de reconnaissance à celui qui les a sans doute sauvé d’un destin improbable.



On imagine cet homme, aux apparences plutôt rustres et au regard sombre, taiseux, solitaire, qui tombe le voile de la sensibilité face à Zingaro silencieusement euphorique, « tel un danseur improvisant devant son chorégraphe, il vient de m’offrir le canevas de ce qui sera son solo ».

On imagine aussi une scène où l’homme ne tient pas toute la place, une scène offerte aux chevaux nommés de noms d’artistes évoluant sur l’andante du Concert en si mineur de Bach qui s’échappe du piano d’Alexandre Tharaud. Comme les petits rats de l’Opéra accompagnent les étoiles, d’autres espèces animales, oiseaux ou autres volatiles, subliment les ballets de l’Opéra équestre.

A travers un grand hommage à ses chevaux , Bartabas signe également le portrait d’un homme qui, se confesse-t-il, dès potron-minet, en attendant le soleil, écoutait ses chevaux et qui appréhende maintenant d’avoir à parler aux hommes.



Subjuguée par les mots, émue par la force des sentiments, la sincérité qui se dégage de ce récit, portée par la poésie, je peux dire que ce livre m’a réellement touchée. Chapeau bas M. Bartabas!

Un grand merci à Babelio et à l’équipe de « masse critique », ainsi qu’aux Editions Gallimard.




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Les cantiques du corbeau

Dans ces vingt-deux courts textes Bartabas le Centaure récapitule l’histoire humaine à travers notre rapport à l’animalité :celle dont nous sommes issus ,de l’amibe au primate , notre évolution de proie à prédateur ,la place des animaux dans nos rêves nos désirs, et nos cultes .Ces textes poétiques violents et sensuels m’ont ,par moments , rappelé le drame des bergers dans le « Serpent d’étoiles » de Giono avec qui Bartabas partage la perception « panique » du monde. Une autre facette du talent de ce fantastique créateur d’images.
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D'un cheval l'autre

Un livre magnifique !



Une écriture poétique, où l'homme s'efface derrière ses chevaux et retrace sa vie et son oeuvre à travers eux.



De belles rencontres avec ces noms, ces frisons, criollos, lusitaniens, akhal teke...

On ressent toute la timidité, le respect, et l'amour que Bartabas porte à ses protégés.

Souvent des blessés de la vie, du voyage, ou des sauvetages, où l'homme et l'animal avancent ensemble, et s'adaptent, mais ne sont jamais soumis.

Les spectacles racontent leur vie, leur caractère. On peut presque les voir bouger dans les chapitres.



Bartabas, Homme-centaure, plus à l'aise parmi ses chevaux que parmi les Hommes... Et tous ces chapitres leur rendent hommage.
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