Cicéron

Il ne faut jamais désespérer d'atteindre à la perfection : dans les grandes choses, ce qui s'en approche le plus est déjà remarquable.
L'orateur parfait dont je vais dresser ici le portrait n'a peut-être jamais existé et je ne cherche pas à savoir qui a pu l'être. Je me demande plutôt quelle est cette éloquence insurpassable qu'on ne rencontre jamais, ou rarement, dans un discours entier mais qui brille parfois çà et là, plus ou moins souvent selon l'orateur. Pour ma part, j'affirme que tout ce qui est beau émane d'une beauté qui le transcende (comme c'est le cas pour le portrait et son modèle), une beauté que ni la vue, ni l'ouïe, ni les autres sens ne peuvent percevoir, mais que nous pouvons tout de même appréhender par l'esprit et la pensée. Ainsi, nous n'avons jamais rien vu d'aussi parfait dans leur genre que les statues de Phidias. Toutefois, à l'instar de ces tableaux dont je viens de parler, nous pouvons en imaginer de plus belles. Ce grand sculpteur n'avait aucun modèle tangible lorsqu'il façonnait la statue de Jupiter ou celle de Minerve ; c'est dans son propre esprit que se trouvait le type d'une beauté supérieure. Absorbé dans sa contemplation, il appliquait son art et sa main à le reproduire.