Citations de Dossier de l`art (237)
La critique des errements humains se fait plus générale avec "Le concert dans l'oeuf" qui dénonce tout à la fois la crédulité, l'inconduite, le goût de la ripaille et plus généralement la déraison [remarquable permanence de l'entonnoir renversé sur la tête...] d'un groupe "générique" d'individus parmi lesquels nombre de religieux, ce qui ajoute au propos critique l'habituelle charge anticléricale. La meilleure version connue est celle du musée de Lille. S'agit-il de la copie fidèle d'un original perdu ou d'une adaptation libre (jusqu'à quel point) ? L'oeuvre s'éloigne cette fois du prosaïsme d'une scène de genre pour s'inscrire dans une fantasmagorie satirique proche de "La Nef des fous" du Louvre, à cela près que le groupe des fêtards est embarqué à bord d'un oeuf. Celui-ci a suscité nombre de commentaires. La tradition alchimique associe, en effet, le monde et l'oeuf générateur de vie. D'autres exégètes moins férus d'occultisme se sont contentés d'observer qu'en néerlendais "door" désigne à la fois le sot et le jaune d'oeuf... (p. 51)
La part du diable. Affreux, sales et méchants
Alexis Merle du Bourg
L’art de Michel-Ange apparaît à Moreau comme l’expression la plus élevée de cet état de sommeil apparent, de ce « somnambulisme idéal » de l’âme.
Tournant ses regards vers la tradition classique, Picasso se libère de la doxa cubiste et s'autorise un dialogue avec l'antique, la Renaissance et la grande peinture. Il soumet la figure à des outrances formelles qui frisent parfois l'intolérable, révélant à travers la convulsion des corps la terrible parenté entre désir et peinture.
Les védutistes vénitiens devaient être reconnaissants aux voyageurs étrangers, surtout anglais, qui envahissaient Venise, de leur demande croissante de tableaux souvenirs, destinés à leur remémorer, une fois de retour dans le Nord, la lumière et les couleurs de la lagune. En effet, la fonction de la vue vénitienne était, à l'origine, d'alimenter le souvenir d'un lieu merveilleux, à l'instar, en quelque sorte, de nos cartes postales.
Hopper met en place le contexte d'une histoire possible, plus qu'il ne raconte une histoire.
Hopper a utilisé la couleur de façon étonnante, souvent de façon non naturaliste.
Par les dessins, il passait du monde réel, observable, à son imagination et c'est elle en définitive que l'on voit sur ses toiles.
Je garde dans le coeur et dans les yeux la copie de tous mes ouvrages.
Compagnon de route de Monet, Renoir, Sisley à l'atelier Gleyre, membre de la jeune avant-garde aux côtés de Manet, Degas et Pissarro, Bazille n'aura eu, somme toute, que huit années pour peindre. C'était trop peu pour affirmer la maturité d'un style, mais ce fut assez pour compter parmi les figures les plus prometteuses de la modernité des années 1860. (p.15)
Le nom de Charles Le Brun est indissociable du grand décor français dans la seconde moitié du XVIIe siècle. C'est dans ce domaine que l'apport de l'artiste s'avère le plus original et le plus marquant.
"M. Le Brun était si universel que tous les arts travaillaient sous lui, et qu'il donnait jusqu'aux dessins de serrurerie".
Génie du lieu, présence du divin dans la solitude, évocation de la destinée humaine soumise aux lois de la Providence : le paysage chez Poussin permet de dire tout cela.
Salomé appartient encore à la tradition de la peinture d’histoire, privilégiant la représentation de la réalité extérieure, tandis que L’Apparition annonce le symbolisme en ce qu’elle juxtapose deux espaces de représentation, objectif et subjectif, le monde vu à travers les yeux du corps et les visions produites par les yeux de l’âme.
Squarcione a joué un rôle déterminant dans la formation du jeune Mantegna, mais la grande et véritable illumination survient avec Donatello, présent à Padoue de 1443 à 1454 pour réaliser, notamment le monument équestre du "Gattamelata" - Erasmo Da Nanni (v. 1370-1443) - et l'autel en bronze de la basilique Sant'Antonio. Son arrivée bouleverse définitivement le langage artistique de la ville, voire de toute l'Italie du Nord. Mantegna reconnaît immédiatement en Donatello son vrai modèle, son véritable maître d'élection, celui dont il faut garder l'enseignement pour toute la vie. (p. 27)
Donatello : quand un sculpteur bouleverse la peinture
Après s'être éloigné d'Ozenfant, Le Corbusier développe à partir de 1925 sa peinture élaborée au sein du purisme, tout en intégrant de nouveaux sujets dans des natures-mortes de plus en plus lumineuses et aérées. Aux objets manufacturés s'ajoutent désormais des figures féminines, le plus souvent isolées et figées dans l'espace, tandis que la notion d' "objets à réaction poétique" se précisent dans les oeuvres et dans les écrits de l'artiste. Ces objets naturels et organiques (pierres, écorces, racines, fossiles, os) que Le Corbusier introduit dans ses peintures de la deuxième moitié des années 1920 ne sont pas choisis uniquement pour leurs qualités plastiques, comme l'étaient les ustensiles manufacturés de l'époque puriste. Par leur déformation et leur capacité à évoquer souvenirs, sensations et imageries, ils ont le pouvoir de provoquer une "émotion poétique" chez le spectateur.
Le Corbusier peintre, vers une perception totale, (p. 34).
Je n'ai cessé de peindre tous les jours, arrachant où je pouvais les trouver, les secrets de la forme développant l'esprit d'invention, au même titre que l'acrobate, chaque jour, entraîne ses muscles et sa maîtrise. Je pense que si l'on accorde quelque chose à mon oeuvre d'architecte, c'est à ce labeur secret qu'il faut en attribuer la vertu profonde.
Le Corbusier peintre, (p. 30).
Le château d'Ecouen fait partie de ces édifices bâtis autour de 1540 qui ont bouleversé l'architecture française, en particulier par la conception de sa distribution intérieure. Il offre l'une des plus remarquables illustrations de la méditation de l'antique à la Renaissance [...].
La chapelle abrite aujourd'hui encore une passionnante copie de La Cène de Léonard de Vinci. La fresque achevée en 1498 pour le réfectoire du couvent de Santa Maria delle Grazie à Milan, avait à ce point fasciné les Français que le roi Louis XII aurait demandé s'il était possible de la détacher du mur pour la transporter en France. A défaut, de nombreuses copies ont été exécutées. L'une des plus anciennes, commandée en 1506 par le doyen de la cathédrale de Sens, Gabriel Gouffier, au peintre Marco d'Oggiono, se trouvait à Ecouen depuis le début du XVIIe siècle au moins. On ignore par quel chemin elle a pu entrer dans les collections du connétable ou de son fils. Compte tenu de la dégradation de l'original milanais, dont la technique a eu du mal à résister au passage du temps et qui a par ailleurs été gravement endommagé lors de la Seconde Guerre mondiale, la Cène d'Ecouen est un témoignage précieux sur le dessein de Léonard [...].
Ecouen et l'architecture de la Renaissance, Guillaume Fonkenel, (p.15).
Picasso retrouve dans le Sud la joie de créer, explorant la céramique à Vallauris, sculptant à partir de rien des pièces qui semblent nées des décombres de la guerre. En peinture, il noue un dialogue au sommet avec les grands maîtres, revisitant les classiques à la lumière de son génie et de ses obsessions.
Avec les Demoiselles d'Avignon s'ouvre le travail de déconstruction de la forme, qui vise à déplacer la réalité, à la faire glisser de l'objet à la peinture. Méditant les arts premiers et la leçon de Cézanne, Picasso se lie à Braque dans l'aventure cubiste, convoquant tout pour contourner l'illusionnisme : collage, papiers collés, sculpture ou assemblage.
Sous le double signe de l'Espagne et de la France, les premières années de Picasso révèlent un talent précoce et une maîtrise rapidement développée par l'étude et la copie des maîtres. Entre Barcelone et Montmartre, le jeune artiste mûrit peu à peu son langage en explorant des thèmes austères ou mélancoliques, et en expérimentant une peinture monochrome.