Jean de la Croix

Le Cantique spirituel a été composé par Saint Jean de la Croix jeté au cachot pendant huit mois par des carmélites modérés qui n’appréciaient pas démesurément la radicalité de sa réforme du Carmel. Sans plume, sans papier, il composa là, en esprit et en le cœur, les quarante strophes de ce poème qui, sous une forme allégorique, narrent le désir qui tient la créature dans sa recherche de la parole de Dieu – désir de désir que rien de terrestre ne peut combler et qu’au contraire, toute chose de la terre manque.





Une page est consacrée à chaque strophe dans le texte original en espagnol et dans la traduction de Jean-Marc Sourdillon, auteur de l’intéressante postface qui suit le texte. Ce format éthéré invite à la méditation que mérite chaque strophe puisque chacune figure un poème en soi illustrant avant l’heure le contraste des sentiments de l’homme : misère sans Dieu dans des images frappantes et blessantes, & joie avec Dieu au-delà des siècles.

On dit que l’amour des mystiques, c’est la figure du pur amour (cf. Jacques Lebrun). C’était même une polémique qui a fait trembler l’Eglise catholique. Elle a décidé de mettre fin à tous ces épanchements fous d’amour avec la goutte d’eau publiée par Fénelon en 1697 (L’Explication des maximes des saints). L’amour fou faisait flipper l’Eglise catholique, remettant en cause son édifice théologique bâti entre autres par la puissance raisonnante de Thomas d’Aquin, inspiré d’Aristote.





Lacan disait : « C’est un amour inconditionnel dont l’ultime critère serait le refus de toute récompense, un amour qui trouverait sa jouissance dans la ruine de toute jouissance et entraînerait avec la perte de soi, la perte de l’amour et même celle de Dieu ».





Jean de la Croix, c’est un peu pareil avec son hiéragamos qui unit l’âme cherchant Dieu à l’Epoux (le Bien-Aimé, le Fils, le Verbe). Il écrit un poème en 40 strophes et l’accompagne d’une explication, ce qui n’est pas mal barré pour les bœufs actuels que nous sommes. Il se réfère souvent à la Bible canonique mais aussi à certains de ses textes apocryphes (le Cantique des Cantiques), donc on se fera pas trop chier à écouter un sermon, on y trouvera au contraire des éléments détonnants. Enfin, c’est pas du NTM non plus. C’est plutôt du genre : il suffit que l’âme veuille trouver pour trouver (à la grâce initiale s’ajoute la grâce divine octroyée aux authentiques quêteurs). Elle passera par des étapes difficiles (la solitude, la tentation) qui lui permettront finalement de mieux goûter à la quiétude et aux délices procurés par l’état de connaissance qui se dévoile dans l’union d’amour. Voici ce qu’est la véritable foi, le véritable amour : « Pour être parfait, l’amour doit avoir deux propriétés : consumer et transformer l’âme en Dieu, et cette opération doit s’accomplir sans souffrance ». Ce qui est fou, c’est de voir à quel point ce genre de texte mystique peut trouver des résonnances avec des théories un peu plus contemporaines, genre psychanalyse ou physique quantique, en tout cas dans l’état d’esprit du truc. Il y a là une forme de dissidence qui a toujours fait chier les défenseurs d’une institution réglée et rationalisée. La mystique, ça n’a rien de bandant, à part ça.

Devant un tel monument, on ne peut que rester modeste en matière de critique.

Les oeuvres complètes de Jean de la Croix sont la traduction littéraire d'une pensée et d'une pratique de la rencontre de l'âme avec Dieu. L'ambition du grand mystique, fondateur de plusieurs monastères de l'ordre du Carmel, et par ailleurs confesseur de Thérèse d'Avila, est de conduire chacun dans cette voie au travers d'une série de poèmes et de commentaires, écrits majoritairement au cours des années 1582 à 1584.

Quatre oeuvres majeures reflètent la progression de l'âme vers Dieu.

Les deux premières, La Montée du Mont Carmel et La Nuit obscure, décrivent comment les âmes s'engagent sur le chemin de l'union divine, et comment leur progression exige d'elles l'abandon total des attachements (les "préhensions") au monde, ceux des sens et même ceux de l'esprit. Le début du parcours vient d'abord d'une initiative de l'âme qui souhaite s'élever et comprend qu'il faut se détacher (c'est la nuit obscure des sens). Mais le travail de l'âme seule ne peut suffire. Un moment arrive où c'est Dieu qui agit et la plonge dans une souffrance infinie, que Jean de la Croix appelle "nuit obscure de l'esprit". Dans cette nuit, l'âme perd tout repère et abandonne tout ce à quoi elle a tenu jusque là.

Le cantique spirituel et La vive flamme d'amour sont les deux oeuvres suivantes. A ce stade, la nuit obscure a purgé l'âme de tous ce qui lui restait d'attachements. Alors, l'union avec Dieu s'opère, cette fois dans le bonheur et non plus dans la souffrance. Dieu ("L'époux") se répand en l'âme ("L'épouse"), et réciproquement, dans une relation d'amour symbolisée par la flamme, une flamme vivante qui se consume elle-même, mais sans détruire ce qu'elle touche, au contraire.

L'oeuvre de Jean de la Croix, son ampleur, la subtilité de sa poésie, la profondeur de ses commentaires, est un sommet de la littérature mondiale. Elle est plus que cela, car l'auteur, aussi grand que modeste, n'ambitionnait pas de produire une oeuvre littétraire mais un guide à l'usage des âmes désireuses de s'unir à Dieu.

Je remercie tout d'abord Babelio et les éditions Illador pour cette découverte à l'occasion de l'opération Masse Critique. Que de trésors vous nous faites découvrir !



Voici un très beau livre dans une présentation originale. Le papier est granuleux, épais. Déjà, son contact est une invitation à connecter ses sens à la beauté.

Le format est un petit A5 relié sur le petit côté. Ce qui en fait un ouvrage léger, agréable en prise en main.



Après juste deux citations d'auteurs en guise d'introduction, nous sommes directement plongé dans le texte de Jean de la Croix.

Sur chaque page, une strophe des 40 que composent le Cantique Spirituel, avec la traduction française et le texte original espagnol. C'est donc le manuscrit A' qui a été choisit, sans les commentaires que l'auteur a fait par la suite.

Nous avons donc simplement la beauté du poème. Et cette forme sobre et élégante nous emporte dans l'élégance des mots.

En utilisant la même forme que le livre biblique du Cantique des Cantiques, Jean de la Croix fait dialoguer l'Epouse (notre âme) avec l'Epoux (Dieu) dans son chemin spirituel et amoureux.



Le texte est entrecoupé de quelques toiles abstraites en aquarelle. Eclats de couleurs au milieu de l'éclats des mots. Le tout se marie bien, même si j'ai été moins touchée par ces oeuvres. Mais ce n'est qu'une question de goût.



Ce Cantique se lit vite mais c'est une oeuvre qui se savoure, vers qui on vient et revient pour en puiser toute sa richesse.



A la suite du Poème, le traducteur nous livre une explication historique et littéraire pour ancrer le Cantique dans toute sa réalité.



Pour conclure, ce petit livre est vraiment beau. On a plaisir à l'ouvrir, à y revenir. C'est un bel ouvrage à offrir ou s'offrir, qui réjouit les yeux, le cœur et l'âme.

Jean de la Croix (San Juan de la Cruz) est un profond puits de lumière et de sagesse. Avec ses écrits poétiques Jean de la Croix hisse la poésie vers la théologie. Mais pas une théologie sèche, trop savante, trop cérébrale.

La lecture des poèmes de "La Nuit obscure" me permet de toucher du doigt, de ressentir sans vraiment la comprendre la théologie de l'amour, amour qui lutte contre la "nuit obscure de l'âme" (l'expression, si usitée par la suite, a été forgée par Jean de la Croix).

Une suite de poèmes très beaux, très mystiques, qui sont comme des charbons ardents devenus diamants.



NB : La vie de Jean de la Croix, futur saint, nous montre que l'on peut être un mystique détaché des contingences terrestres et connaître une vie parfois rocambolesque. En effet pour avoir fondé l'Ordre religieux du Carmel, qui déplaît à la hiérarchie catholique de son temps, Jean de la Croix est arrêté en 1577 et emprisonné neuf mois à Tolède pendant lesquels il vit une "nuit de la foi", au cours de laquelle il ne ressent plus la présence de Dieu et compose son Cantique spirituel. En outre il est fouetté chaque semaine par ses geôliers, avant de parvenir à s'évader dans des conditions mystérieuses, jamais élucidées...

Dans la tradition du Carmel, le degré ultime de l'abandon à Dieu consiste à traverser une nuit de la foi. Là où tout semblait évident auparavant, la présence de Dieu presque tangible, l'amour était facile. S'il se cache aux sens et à l'intelligence dans une profonde nuit, l'amour devient un véritable challenge, une traversée du désert.



"ô fontaine cristalline, si dans le miroir de tes eaux argentées, tu me laissais voir soudain, les yeux que sans fin je cherche, et que je garde à l'ébauche dans mon coeur".



Ces poèmes chantent la nuit, et ils sont souvent à double sens : la nuit de l'intimité où l'âme se joint à Dieu dans une forme d'extase qui est invisible aux autres, qui est un pur don intérieur ; et la nuit de la foi, où tout semble stérile et muet et où l'amour peut totalement déployer ses ailes dans une totale gratuité.



"Tous ceux qui s'occupent en vous, me vont racontant mille grâces, et tant plus me blessent de coups..."



Chaque poème est donc une leçon spirituelle sur la recherche de Dieu, sous la forme d'une parole de l'épouse (l'âme) et d'une réponse de l'époux (Dieu, /le Christ). On y trouve la recherche du silence, la contemplation, l'érrance, la confiance, l'abandon, de nombreuses leçons de vie cachées dans des poèmes.

Tous les textes sont en deux versions : une en langage original, qui est extraordinaire à lire, et une en langage moderne qui facilite la compréhension.

L'oeuvre poétique et mystique du moine Juan de Yepes écrite durant son emprisonnement dans un cellule de l'inquisition. Chacun des poèmes est commenté et l'ensemble est une variation sur le thème du cantique des cantiques. D'une beauté rare.....

Déception à la lecture du Cantique spirituel de saint Jean de la Croix, dont on dit pourtant tant de bien. Mièvrerie suave et trop sucrée, ce côté doucereux-douceâtre, comme les écrits de saint François de Sales. Ce qui me déplaît le plus, c'est que c'est une réécriture vertueuse du Cantique de Salomon, ce poème d'amour brûlant, sauvage et pas du tout "convenable" ni vertueux, un cantique voyou, en somme. Mais tellement plus puissant et plus beau. Peut-être est-ce que cela vient de la traduction, mais quand on compare : (…)
Lien : http://vitanova.blogspot.com..

Le chemin de Thérèse est à la fois exubérant et patiemment construit comme oeuvre de l'esprit, rapporté dans une langue aussi précise que métaphorique. Les images envahissent le discours jusqu'à devenir les sujets mêmes de l'expérience.
Lien : http://www.lemonde.fr/livres..

Poèmes qui nous parlent essentiellement d'amour mais également de communion avec Dieu, et c'est là où j'ai eu un peu plus de mal à comprendre toute l'ampleur du message que l'auteur voulait faire passer. Très court ouvrage publié dans la collection "Mille et une nuits", ce dernier se laisse tout de même lire facilement même si je reconnais qu'en terme de poésie et de théologie, il faut être un peu initié pour pouvoir accéder à toute la beauté du texte. A découvrir néanmoins !

Par une poésie envoûtante et mystique, Jean de la Croix nous parle de l’âme qui se transforme, qui s’unit à Dieu de degré en degré. Elle se fait vive flamme d’amour, elle brûle d’amour pour son Bien aimé, elle fond au contact du divin. Ambiance d’amour, d’exaltation, de joie, de transport, ce poème en est imprégné.



La Vive flamme d’amour, peut être considérée comme une fête de l’âme, pleine de joie et de jubilation ; elle reçoit les fiançailles qui la lie à Dieu sur terre, mais son Époux ne lui est pas encore donné. Cette fête est une prémisse à la fête éternelle qui l’attend, dans l’au delà. En effet, la béatitude, l’union complète avec Dieu n’est possible qu’au terme de son séjour terrestre.



La métaphore de l’âme aimante et de son bien aimé parcourt les lignes, jusqu’au réveil de Dieu dans le coeur. Jean de la Croix, tout au long de son explication, ne peut s’empêcher de signaler l’ineffable sensation que Dieu donne. Sa poésie tente d’en saisir les nuances : « Ce réveil que le Verbe produit dans la substance de l’âme est un mouvement de telle grandeur, d’une telle majesté, et d’une telle gloire, et d’une suavité si intime, qu’il semble à l’âme que tous les baumes, toutes les essences aromatiques et toutes les fleurs du monde se mêlent et s’agitent pour répandre leurs parfums ».



En somme, la spiritualité ne se communique pas aisément, elle nous parle au cœur, dans la langue du sentiment plus qu’à la raison. Jean de la Croix a réussi, par la beauté de son langage, a communiquer une expérience incommensurable. Cette oeuvre ne se comprend pas, ne se pense pas, elle se ressent.

Une poésie qui cherche à communiquer une expérience vitale pour St Jean de la Croix, celle de l'Union spirituelle à Dieu, et aussi son absence. Du coup le désespoir y sourd parfois, et nous rapproche de cet être qui peut nous paraître si lointain. Une lecture toujours vivante.

J'ai découvert l'oeuvre de Jean de la Croix, grand réformateur religieux du XVIème siècle espagnol. Son zèle religieux lui valut quelques ennuis, mais aussi lui inspira des poésies mystiques qui passent pour être les plus belles de la littérature ibérique.



Le recueil dont je dispose semble contenir toute l'oeuvre de Jean de la Croix. Le texte le plus célèbre est "Dans la nuit obscure" - à ne pas confondre avec le traité (en prose) portant presque le même titre - qui est très court et facilement lisible. Il étonne par son langage symbolique. Si on veut comprendre ce texte à la lettre, il évoque seulement… une fugue amoureuse. Alternativement, on pourrait imaginer qu'il renvoie au désir d'évasion de l'auteur, qui était alors emprisonné par ses "frères" dans une cellule de Tolède ! En fait, ce poème évoque de manière métamorphique l'envolée de l'âme vers Dieu. C'est assez surprenant pour moi, mais il semble qu'il s'agissait d'un procédé rhétorique usuel à l'époque; c'est étrange et beau. J'ai lu aussi d'autres poésies du même genre que "Dans la nuit obscure", notamment "Gloses", et j'ai aussi mis en citation une poésie qui en est tirée.



D'une façon générale, la poésie de Jean de la Croix peut être rapprochées d'un texte encore plus célèbre, qu'on lit dans l'Ancien Testament: le Cantique des Cantiques. Lui aussi utilise le même procédé allégorique: l'amour (mystique) pour Dieu y est représenté par l'amour et le désir humains.

Premièrement, merci à Babelio et aux éditions Illidor pour l’envoi du livre dans le cadre de la Masse Critique. Ça a été une très belle lecture qui m’a fait sortir de la réalité pendant quelques instants. J’ai trouvé le poème très beau, je ne connaissais pas du tout Jean de La Croix. On a l’impression d’être plongé dans un rêve. De plus, à la fin du livre, on a quelques explications sur lui et le contexte dans lequel il a écrit ce poème. J’ai aussi apprécié que le traducteur laisse le texte original en dessous de la traduction. Le poème est aussi accompagné de jolies illustrations qui ajoute une touche artistique plus visuelle au texte. Et j’ai trouvé le papier de ce petit livre très original, un peu granuleux, très agréable.

trés beau poémes