Dans la pensée politique du MLF, la libération sexuelle était au cœur d'un projet de transformation radicale de la societé. Il fallait que les femmes se réapproprient leur corps, brisent les tabous, combattent les rapports de domination dans les aspects les plus intimes de leur vie. Cette politisation de la sphère personnelle, et plus particulièrement de la sexualité, a été le moteur du MLF. Force est de constater que cet enjeu est devenu pour le moins marginal pour le féminisme le plus "officiel" d'aujourd'hui. Lorsqu'il est évoqué, le thème de la sexualité n'est pas vu sous l'angle d'une libération active, menée par les femmes, mais plutôt sous l'angle de la violence subie par les victimes (viols, harcèlements, etc.). Les normes en matière de sexualité, et les rôles assignés aux hommes et aux femmes qui en découlent, sont pourtant sensiblement les mêmes qu'il y a trente ans. Le discours sur la libération sexuelle n'a pas été évincé parce qu'il n'est plus d'actualité, mais parce qu'un volet plus intégré et "respectable" du féminisme a pris aujourd'hui sa place.
Les actions du MLF s'inscrivent effectivement dans la culture de contestation des années 68 et portent ainsi la marque d'un certain goût du scandale et de la provocation. Les militantes voulaient alors défier l'ordre social et ont de loin préféré l'action directe aux voies conventionnelles, marquant ainsi une rupture avec les pratiques des organisations féministes suisses traditionnelles qui s'étaient battues pour le droit de vote. Dans leurs témoignages, les femmes du MLF insistent sur cette joie libératoire, ce plaisir de transgresser les règles associées à ces années de lutte. Bien plus qu'une stratégie médiatique, le mode d'action du MLF s'articulait de manière cohérente avec son contenu politique radical.