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Critiques de L`Ajar (40)
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Vivre près des tilleuls

Non seulement " Une femme qui n'a jamais existé peut être l'auteure d'un livre qu'elle n'a pas écrit ", mais surtout dix-huit jeunes auteur-e-s suisses peuvent réussir le pari d'écrire ensemble un récit de pure fiction sur un thème qu'ils n'ont pas vécu eux-mêmes, la perte d'un enfant, à une époque, les années soixante, qu'ils n'ont pas connue étant tous nés entre 1982 et 1992.

« Vivre près des tilleuls » ou comment faire magistralement la preuve que l'écriture n'a pour limite que celle de l'imagination et de l'audace des écrivains.



Pari gagné grâce à un récit court et sobre, d'une vérité, d'une justesse et d'une unité de ton tout à fait impressionnantes pour le collectif L'Ajar, association de jeunes auteur-e-s romandes et romands créé en 2012 pour explorer la création littéraire en groupe. Toute référence à Emile Ajar, célèbre pseudo de Romain Gary, semble donc fortuite puisque le sigle a sa propre signification…Je ne peux m'empêcher cependant de voir ici malgré tout un astucieux clin d'oeil à leur illustre homonyme dans leur façon d'écrire ensemble pour le compte d'un auteur de leur invention, Esther Montandon, poussant même le raffinement jusqu'à lui créer une page Wikipédia.

Evidemment, on ne manquera pas de s'interroger sur leurs procédés d'écriture, et j'avoue être curieuse de leurs éventuels interviews en cette rentrée littéraire - j'imagine ( et j'espère ) déjà les 18 sur le plateau de la Grande Librairie par exemple.



Originalité donc de la forme, mais le fond, puissant, a une qualité littéraire indéniable qui m'a plue, c'est bien l'essentiel.

Revenons au livre. L'avant-propos avertit du contenu de l'ouvrage : « Un recueil d'impressions, de faits, de pensées et de souvenirs. Une petite sociologie du deuil », il trace un rapide portrait d'une femme écrivain, Esther Montandon, auteur réelle - mais bien fictive - de ce parcours douloureux de mère.

De courts et denses chapitres égrènent ensuite à la première personne du singulier ses réflexions intimes, chagrin, incompréhension, douleur, bêtise involontaire de l'entourage, éloignement…bien sûr, mais aussi les petites lucarnes de souvenirs heureux, les sursauts de vie qui accompagnent toute tragédie. L'ensemble aboutit à un témoignage très maitrisé, peut-être un peu trop par moment, mon seul petit bémol pour ce parcours de deuil.



« Le temps s'épaissit…L'espace se réduit. »

« C'est à la façon d'une libellule qui frôle les eaux dormantes que je me déplace dans le quotidien. Je reste à la surface des choses pour ne pas souffrir, je ne m'approche de rien. »



Vous l'aurez compris, j'ai beaucoup apprécié ce « premier roman » de L'Ajar et j'espère qu'ils ne s'arrêteront pas en si bon chemin, près des tilleuls…

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Vivre près des tilleuls

Tout d'abord un grand merci à Babelio et aux éditions Flammarion pour l'envoi de ce petit livre touchant et émouvant...

Esther Montandon a perdu sa fille de 3 ans lors d'un terrible accident domestique. Ecrivain, elle n'a jamais écrit un mot sur sa douleur et sur son difficile travail de deuil. Vincent König est en charge d'archiver l'ensemble des ses documents et il va retrouver le récit des jours et des années qui suivront cet instant où tout bascule...

Ce roman est l'œuvre d'un collectif de jeunes auteurs et il est plutôt réussi. Sur un thème si dur que la perte d'un enfant, ils mettent des mots sur l'avant, les souvenirs, les instants de bonheur et sur l'après, le vide, la solitude et la vie qui s'arrête. Il n'y a pas de larmes versées, le pathos n'alourdit pas les pages mais on est touché par cette mère, ce couple, cette famille qui partent en morceaux...
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Vivre près des tilleuls

Voilà un texte d'une grande beauté , au style épuré, pudique et saisissant, criant de vérité, lu d'une traite, sur le sujet douloureux du deuil , écrit par un collectif de très jeunes auteurs : l'AJAR .

L'écriture très touchante, succession de courts chapitres rythment la lecture et accentuent l'intensité émotionnelle .

Sur le fil sensible, ténu d'une intense douleur mesurée, c'est aussi un vibrant hommage au travail d'écriture : une véritable prouesse.

Tout en délicatesse et finesse, depuis les prémices de l'enfantement, la joie d'être mère à l'inénarrable arrachement du deuil d'un enfant et le ressenti de sa mère écrivaine !

Une femme brisée dans l'incapacité à vivre après l'inimaginable ......

Un texte original écrit à plusieurs voix au charme fou, nostalgique et ciselé , troublant de sensibilité, qui chavire le cœur et laisse son empreinte en nous !

Une ode à la littérature !

Merci à Marylin, mon amie de la Médiathéque .
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Vivre près des tilleuls

" La fiction n'est absolument pas le contraire du réel". C'est ce qu'affirme très justement le collectif d'auteurs , L'Ajar (pour rendre hommage aux différentes identités de Romain Gary), ayant écrit ce livre. Initiative originale et enthousiasmante, le résultat est fort positif.



Ce court roman se joue des codes habituels. Outre le fait qu'il est écrit à mains multiples, il mêle le vrai et le faux, puisqu'il présente le faux journal fragmenté d'une fausse romancière, exhumé des archives par un faux dépositaire, le tout écrit par de vrais auteurs...



Cela donne un texte très émouvant, authentique par son intensité, sa justesse. Car les notes retrouvées d'Esther, l'auteure, touchent à un drame terrible: la perte d'un jeune enfant, le deuil impossible, celui de la petite Louise.Les mots pour dire ou ne pas savoir dire le chagrin, le manque, sont rendus avec beaucoup de pudeur et de profondeur." Petit à petit, Louise se cache dans un coin de ma chambre, derrière des voiles blancs,loin de la vue de tous.Là, elle pourra continuer d'être ma fille."



Ce roman fait vibrer, on entre en résonance avec les pensées, la souffrance , d'Esther.Et on trouve magnifique l'osmose des auteurs, pour transcrire son ressenti.



Une bien belle expérience, qui prouve qu'il est possible d'associer des talents, de croire en " l'infiniment plus que moi, le tellement plus que nous"...
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Vivre près des tilleuls

Ils ont tout inventé. Le personnage, son drame, ses sensations. Ils ont écrit son autobiographie fictive. Jusqu'ici, rien de très nouveau, certains auteurs se sont livrés à l'exercice du journal fictif (Valéry Larbaud, William Boyd... par exemple). Non, la nouveauté c'est qu'ils sont 18 qui se cachent derrière les lettres de l'Ajar. Et qu'ils ont commis ce livre en une nuit, comme ils l'expliquent dans une postface qui éclaire d'un jour nouveau la lecture que l'on vient de terminer. Pourtant, tout sonne juste dans l'expression du chagrin d'Esther Montendon qui s'exprime d'après des textes retrouvés dans ses archives longtemps après sa mort. Des fragments écrits sur plusieurs années, après le drame, le décès accidentel de sa fille de 3 ans. Une enfant arrivée sur le tard alors qu'Esther Montendon, à 40 ans était au faîte de sa carrière d'écrivain en suisse. Au fil de ces écrits se révèlent les sentiments d'une mère inconsolable, meurtrie dans sa chair, son errance vers un futur ayant perdu tout intérêt et puis son lent retour à la vie.

Un exercice assez époustouflant, un peu comme un atelier d'écriture grandeur nature dont les membres arrivent à se mettre à l'unisson au service d'un seul et même texte. Lorsque l'on sait la difficulté d'écrire, on ne peut qu'admirer.
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Vivre près des tilleuls

Il m’est des livres difficiles à commencer, des livres dont je relis les premières pages pour m’imprégner du sens. Il en est d’autres dans lesquels je plonge la tête la première pour n’en ressortir, essoufflée, qu’au point final. ″Vivre près des tilleuls″ fait partie de ces derniers.

La lecture du prologue m’a happée et je suis allée au bout d’une traite, sans respirer, avec avidité. Ce petit opus, 119 pages et 63 chapitres – très courts, donc, entre trois mots et trois pages – raconte l’histoire d’un deuil.

Mais pourquoi ai-je tant aimé cet ouvrage ? Les qualités d’écriture n’y sont pas étrangères : petites phrases harmonieuses d’une simplicité presque enfantine, dignes d’une rédaction en école élémentaire, jolis mots entrelacés, ″chapitre 41 : Le pain lève sur le rebord de la fenêtre. L’eau bout dans la grande casserole pour le sirop de sureau. La porte du balcon est entrouverte sur le soir, l’attrape-mouche bouge dans la brise, on entend les engoulevents et les voitures″. C’est pur, clair, léger et tellement beau. Et je ne parle pas du plaisir de découvrir au détour d’une réflexion des mots tirés du vocabulaire suisse – des catelles de la cuisine aux courses à la ″Migros″ - appris au fil du temps grâce à un fils travailleur frontalier.

J’ai beaucoup aimé également le sujet : le douloureux deuil d’une mère, Esther Montandon écrivain, évoquant la mort de sa fille Louise et la difficulté à vivre les jours d’après. La manière dont il est traité, avec une sensibilité hors du commun, une retenue émouvante, un grand sens du respect de soi et des autres en fait un récit à la fois émouvant, poignant mais aussi empli d’amour. Ce n’est jamais larmoyant, toujours empreint de douceur et du rire des souvenirs joyeux.

Et la postface est arrivée, qui m’a complètement ébaubie. Sans vouloir divulguer quoi que ce soit à ceux qui, comme moi, refusent toute information sur un livre avant d’en prendre connaissance, je dirai que j’ai été ″bluffée″ par les circonstances dans lesquelles a été écrit ce roman. C’est une aventure fabuleuse, curieuse, inouïe, une histoire d’amitié, un défi incroyable, une idée brillante qui m’a laissée bouche bée, éberluée, fascinée. Découvrir cet ouvrage c’est entrer dans un monde particulier où la fiction ne s’avère pas obligatoirement le contraire du réel. En un mot… ou plusieurs, c’est une incroyable réussite, un véritable coup de cœur pour ce qui me concerne.

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Vivre près des tilleuls

Oeuvre collective de l'Association des Jeunes Auteur(e)s Romand(e)s, Vivre près des tilleuls est construit comme une fausse vraie chronique d'une fausse vraie romancière, Esther Montandon.



Le roman traite d'un thème dramatique : la perte brutale d'une petite fille de trois ans, suite à un accident. Esther et son époux avaient mis longtemps avant de devenir enfin parents. Le récit à la première personne du singulier emprunte la vision de cette mère face aux tragiques aléas de la vie.



Pour autant, ni complaisance ni pathos. Le but n'est pas de faire pleurer dans les chaumières mais de dépeindre avec le plus de justesse ce deuil et le lourd travail qu'il sous-entend, le manque terrible.

Mission réussie pour ce collectif. Le ton sonne juste et l'ensemble forme un récit tout en délicatesse. Les émotions se diffusent avec finesse et sobriété, serties dans une écriture à la simplicité éloquente.  En dépit du drame, tout n'est pas d'une noirceur insondable. Et comme le dit elle-même Esther, on a encore le droit de rire même si l'on est figé dans la pierre.



Une très belle découverte que ce premier roman de l'association.
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Vivre près des tilleuls

On retiendra tout d’abord la genèse de ce roman né à l’initiative du groupe de jeunes Suisses associés sous L’AJAR – Association de jeunes auteur-e-s romandes et romands. Depuis 2012 ses membres «partagent un même désir : celui d’explorer les potentialités de la création littéraire en groupe. Les activités de l’AJAR se situent sur la scène, le papier ou l’écran. Vivre près des tilleuls est son premier roman.

En préface ainsi qu’en postface, on nous explique comment l’idée a germé d’écrire un roman en une belle nuit d’été. Le chois d’une histoire, d’un personnage, d’un prénom…

« Nous avons d’abord dessiné la vie d’Esther Montandon. Une vie qui commence le 8 mai 1923, à La Chaux-de-Fonds et qui va conduire cette femme à embrasser une carrière d’écrivain. Mais, à quarante ans, devenue mère, Esther Montandon a la douleur de perdre sa fille. « Ce deuil était, pour nous, l’un des seuls événements capables de briser son parcours d’écrivaine – et de ménager, ainsi, une place pour ces fragments. »

Un scénario très habile qui donne à chacun des auteurs un cadre assez précis pour pouvoir participer à cette belle aventure, d’autant que le personnage de Vincent König permet de structurer le tout. C’est à lui que l’on confie le soin de gérer le fonds

Esther-Montandon, c’est-à-dire ce qui reste de « l’autodafé qu’elle a commis à la suite de la mort accidentelle de sa fille Louise, le 3 avril 1960. De cette tragédie, inaugurant dix ans de silence éditorial dans la vie de l’auteure, on ne trouve trace ni dans Trois grands singes ni dans Les Imperdables. Jamais Esther Montandon n’a écrit sur la perte de sa fille. C’est du moins ce que l’on a longtemps cru. »

Or voici qu’en mettant de l’ordre dans les cartons, on découvre des fragments de journal intime qui s’échelonnent de 1956, année de naissance de sa fille Louise aux deux ans qui suivent son décès, le 3 avril 1960.

Quelques pages magnifiques sur ce drame absolu que représente la perte d’un enfant vont suivre, comme nous le confirme Vincent König : « Rien n’a été épargné à l’auteure. Il ne faudrait pas pour autant en conclure que la joie est absente de ces pages. Fidèle à elle-même et malgré la blessure, Esther Montandon module patiemment, et avec obstination, une douleur qui n’appartient qu’à elle. Définitivement tragique et éternellement heureux, transfiguré par l’écriture, le souvenir de Louise s’inscrit désormais pleinement dans la littérature. »

La force de la littérature explose tout ai long de ces pages. L’imagination vient suppléer le vécu, la compassion nous faire partager la douloureuse épreuve que traverse Esther, racontant les jours heureux avec Louise, « Le corps d’une fillette, c’est ce que j’ai pu voir de plus beau. Et de plus intolérable. Ses boucles châtaigne, où j’aimais passer la main. Son nez minuscule, qu’elle avait en commun avec tous les enfants de son âge. Sa tête indolente, qu’elle balançait, légèrement penchée vers l’avant, pour dire non. Un non devant lequel on ne pouvait que céder. Ses bras dodus, ses jambes boudinées qui pendaient du haut tabouret. » puis les jours, les semaines, les mois qui suivent la mort de cet enfant.

«Le téléphone sur les genoux, je prépare mon texte. Maman, Louise a eu un accident cet après-midi. Elle est morte. Maman, j’ai une terrible nouvelle. C’est Louise, elle a eu un accident. Maman, Louise est tombée. On n’a rien pu faire. Écoute maman, ta petite-fille a fait une grave chute. Elle est morte. Louise est morte. Morte. Morte. Je répète le mot vingt fois dans ma tête. Je veux lui faire perdre son sens, le réduire à une syllabe creuse. Morte. Louise est morte. Je prends le combiné. Je compose le numéro. Je tombe sur mon père et réalise qu’il y a longtemps qu’on a incinéré maman.»

Puis, plus loin… « Ce soir, Louise dort en terre. Ce sera le cas pour tous les soirs à venir. Toutes les nuits du monde. (…) Ici repose Louise Montandon (1956-1960), notre fille bien-aimée. Jamais ma vue n’a porté si loin. À travers les allées, à travers les branches des tilleuls.

« Le chagrin est moins un état qu’une action. Les heures d’insomnie, puis le sommeil en plomb fondu sur les paupières, la prostration dans le noir, la faim qui distrait la douleur, les larmes qu’on ne sent plus couler : le chagrin est un engagement de tout l’être, et je m’y suis jetée. On me dit de me reprendre, de faire des choses pour me changer les idées. Personne ne comprend que j’agis déjà, tout le temps. Le chagrin est tout ce que je suis capable de faire. »

On pourrait dès lors recopier toutes les pages de ce trop court roman qui, comme l’écrivent ses auteurs multiples est aussi une puissante déclaration d’amour à la littérature : « Oui, nous avons mené cette aventure avec sérieux, travaillant avec acharnement à la justesse du texte, l’asséchant sans relâche, traquant toute complaisance. Au début, tout le monde y allait de son commentaire sur la mort, tout le monde prouvait le caractère définitif de son sentiment. C’était répétitif et lourd. Nous avions huilé ce qui devait être sec, poli ce qui devait être tranchant. »

On attend avec impatience la nouvelle production de L’AJAR !


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Vivre près des tilleuls

Vivre près des tilleuls est le premier roman d'un jeune collectif d'auteurs romands crée en Janvier 2012. Comme précisé sur la 4ème de couverture, ses membres partagent un même désir: celui d'explorer les potentialités de la création littéraire en groupe. Les activités de l'AJAR se situent sur la scène, le papier ou l'écran. Il faut partie de la sélection des 68 premières fois.



"Ce soir, Louise dort en terre. Ce sera le cas pour tous les soirs à venir. Toutes les nuits du monde. Je le consigne ici. Cela ne change rien. Il le faut".



Ce court roman, qui s'apparente à un récit intimiste du deuil d'une mère, se lit d'une traite et ne vous prendra guère plus d'une heure et demi. Il renferme 127 pages pour 63 brefs à très brefs chapitres et vous coûtera 13€. Mais détrompez-vous, le rapport qualité/prix est très fort! Cette intrigue va vous nouer le cœur, vous prendre aux tripes et surtout sacrément vous surprendre.



Je ne déflorerai rien de l'histoire, car elle mérite vraiment d'être découverte sans à priori. Ce que je dirai, c'est que j'ai été littéralement bluffé et totalement convaincu. Je suis admiratif par la puissance et la maîtrise des auteurs.



"Le sang de ma fille en étoile sur le trottoir palpitait dans le printemps, les tulipes sans doute en nourrissaient leur bulbe. Le sang de ma fille s'est éteint lorsque, de guerre lasse, je l'ai regardé droit dans les yeux"



Réduit le plus souvent à l'essentiel, les chapitres se dégustent sans modération.L'écriture est superbe, si belle, si fluide, si talentueuse. Alternant le présent et le passé, elle nous permet de nous immiscer à l'intérieur de la vie d'un couple de parents qui passent du bonheur ultime au drame le plus abject. Tout a l'air si simple: pas de fioriture, pas de pathos, pas de larmoiement, ni de complaintes ou lamentations... et pourtant un style touchant, émouvant et qui marque profondément. Les mots sont justes, subtilement choisis, les phrases sont expressives et visuelles.



"Le chagrin est moins un état qu'une action. Les heures d'insomnie, puis le sommeil en plomb fondu sur les paupières, la prostration dans le noir, la faim qui distrait la douleur, les larmes qu'on ne sent plus couler : le chagrin est un engagement de tout l'être, et je m'y suis jetée. On me dit de me reprendre, de faire des choses pour me changer les idées. Personne ne comprend que j'agis déjà, tout le temps. Le chagrin est tout ce que je suis capable de faire."



On referme ce livre troublé, bouleversé. Tout semble si réaliste, si vrai: on vit au côté de la petite Louise, on la voit, on la touche, on ressent les émotions de sa mère (que cela soit la joie ou l'infini tristesse, le deuil...), on souffre avec elle, on voit les paysages. C'est un merveilleux exercice de style quelque part dans lequel tout est parfaitement bien décrit.



"Avec le temps, peut-être, j'obtiendrai une petite victoire contre ce 3 avril qui a taché, comme une perle d'encre s'écrasant sur un buvard, toutes les autres dates de mon calendrier. Ce 2 août où tu m'as dit maman pour la première fois. Ce 8 mai où tu m'as offert pour mon anniversaire un dessin de la famille-je dépassais Jacques de deux bonnes têtes. Ce 14 décembre sans neige, l'année de tes deux ans, qui a commencé par un effroi terrible-j'ai cru, pendant quelques minutes, qu'on t'avait enlevée dans la foule du marché de Noël à Saint-François- mais s'est terminé par des chatouilles et des rires interminables dans le lit. Ta première dent de lait. Le jour où tu as mangé un litchi. La nuit sous les étoiles au Creux du Van. et puis aujourd'hui, ce 4 octobre. Ces dates anniversaires me sont insupportables. Elles ne célèbrent plus que ton absence. Avec hargne, avec défi, ou dans ce calme qui ressemble à la lassitude, je déchire chaque matin un feuillet du calendrier. Avec le temps, peut-être, je trouverai le moyen de rendre à la joie le jour de ta naissance."



Même s'il ne plaira pas à tout le monde (pour certain(e)s, prévoyez la boite de mouchoirs à proximité), je ne peux que vous conseiller ce petit roman si émouvant et d'une grande justesse. Je tire mon chapeau au collectif d'auteurs pour cette superbe performance.



"La fiction n'est absolument pas le contraire du réel".



4,5/5




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Vivre près des tilleuls

Si très souvent le lecteur s’interroge - à tort d’ailleurs, car après tout qu’importe - pour savoir qu’elle est la proportion de vécu qu’un auteur met dans ses écrits, voilà la preuve qu’il n’est pas nécessaire d’avoir vécu pour dire et écrire avec talent. Car du talent ils en ont ces 18 auteurs qui produisent un roman à l’unité stylistique et littéraire évidente.

J’ai donc plongé dans les mémoires d’Esther Montandon, cette femme qui a laissé, et caché, des écrits retrouvés par hasard par le dépositaire de ses archives, Vincent König. Vincent qui décide de produire ce roman, ces mots de souffrance, de deuil, ces souvenirs de l’absente, cette petite fille qu’Esther avait tant attendue, elle qui ne sera mère qu’à quarante ans. Cette enfant qu’Esther va perdre prématurément puisque Louise meurt d’un accident domestique à trois ans. Courte vie, qui laisse un vide tel qu’il ne pourra plus jamais être comblé, perte irremplaçable de celle qui sera éternellement cette magnifique enfant de trois ans.

Quel exercice de style, criant de vérité, d’émotion, de tendresse et de souffrance. Voix unique pour dire les mots, les souvenirs, le cheminement des perdants, ceux qui restent au bord du gouffre de l’absence irremplaçable. Difficile, réaliste, sensible et juste !

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Vivre près des tilleuls

Vivre près des tilleuls, petit bijou de littérature, signé par L'AJAR (Association de jeunes auteur-e-s romandes et romands) offre une sociologie du deuil basée sur un recueil d'impressions, de pensées et de souvenirs écrit par Esther Montandon dont la fille, Louise, est morte accidentellement en 1980. Elle allait avoir quatre ans.



Soixante-trois chapitres ou plutôt fragments se succèdent alors, pouvant faire une ligne ou aller jusqu'à deux ou trois pages. Esther confie ses états d'âme mais aussi la préparation concrète de la chambre de l'enfant à venir, un enfant désiré depuis dix ans : « une existence encore insoupçonnée occuperait cet espace. »

Le souvenir de son ventre rond qui attirait les regards, les mots des autres femmes puis l'accouchement : « Je l'ai expulsée, la douleur comme un ami intime me soufflant l'importance de l'instant… J'ai vu l'amour faire son apparition. »

Le temps passe trop vite. L'enfant grandit… Louise devient Louise et découvre l'espace puis les premiers mots arrivent et c'est Jacques qu'elle réussit à dire d'abord ce qui rend le père très fier. Dès sept mois, elle imitait les animaux.

De temps à autre, est noté qu'il manque un feuillet ou que le feuillet a été déchiré.

Louise veut une poupée noire qu'elle nomme Alice. Cela lui permet d'imiter sa mère, se montrant tendre et dure. « Petit être bien en chair », elle progresse vite mais le malheur arrive.

« L'enfance, c'est croire que la vie ne s'arrêtera jamais », cette phrase est très belle et traduit bien le malaise ressenti par le lecteur qui souffre avec la mère comprenant tout ce qu'elle éprouve, ce qu'elle ressent devant l'avis de décès, les amis trop prévenants, le choix des fleurs, la cérémonie donnant le chapitre le plus bref : « le pasteur chuinte. »

Les questions sur la foi, la religion sont inévitables et le temps pour émerger est long : « le chagrin est moins un état qu'une action… le chagrin est un engagement de tout l'être. »

Je suis très impressionné par la délicatesse, la précision de ces pages qui se suivent, s'enchaînent. Sur un sujet aussi délicat, aussi difficile, le travail collectif de ces dix-huit jeunes auteur-e-s de Suisse romande (photo ci-dessous) est admirable. En effet, il faut le dire car rien n'est caché, les dernières pages l'annoncent : « La fiction n'est pas le contraire du réel. »



Dans Vivre près des tilleuls, tout est inventé et pourtant tout est si vrai, si juste. Comme il est écrit, c'est « une déclaration d'amour à la littérature », une preuve, s'il en fallait, que le roman est absolument nécessaire pour comprendre le réel. L'AJAR l'a complètement réussi.
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Vivre près des tilleuls

Voilà un roman qui finalement demande plusieurs strates de lecture et, du coup, rend un peu compliquée mon opinion finale. Une première lecture est induite par l'avertissement d'usage, destiné à authentifier récit et personnages, à impulser en quelque sorte l'effet de réel, qui nous explique la publication posthume de ces feuillets rédigés par Esther Montaudon, écrivain disparue en 1998. Munie de cette orientation de lecture, je suis partie à la découverte de ce texte fragmenté, sorte de journal sans repères temporels autres que les évènements évoqués. La maternité tardive d'Esther, les premières années de Louise sa fille sont abordées à travers le prisme d'un bonheur que l'on sait irrémédiablement révolu et le récit entier est baigné de ce vide, de ce manque qui rend le monde tout à coup inhabité après la mort accidentelle de l'enfant. Le chagrin, le deuil se matérialisent dans des notations factuelles, organisées en phrases simples, donnant l'impression d'une vie désertique et asséchée. L'émotion du lecteur est finalement davantage sollicitée par sa connaissance de la situation de la narratrice que par le texte lui-même. La seconde strate de lecture intervient à la toute fin, lorsque l'on apprend le contexte et la démarche qui ont présidé à l'écriture de ce roman. Cette information nous amène à revisiter le texte sous le nouvel éclairage qui lui est donné. J'ai mieux compris, dès lors, cette impression de sècheresse qui m'avait marquée lors de ma lecture "innocente". On ne peut réellement parler de mystification littéraire puisque L'Ajar (clin d'oeil à un véritable mystificateur) se dévoile dès la quatrième de couverture. Il s'agit plutôt d'un exercice de style, issu d'une démarche d'écriture intéressante mais dont les enjeux me laissent assez dubitative. Fallait-il vraiment en passer par ce projet pour montrer que "la fiction n'est pas le contraire du réel" ? Que "Vivre près des tilleuls" soit un jeu d'écriture, une façon de se donner des contraintes stimulantes et inspirantes, j'en conviens volontiers. Mais qu'on lui donne pour but une manière de vérification des liens entre fiction et réel, cela me paraît relever de "l'enfoncement de portes ouvertes". Sans doute suis-je passée à côté de quelque chose que je n'ai pas compris... Quoi qu'il en soit, ma lecture "naïve" de ce premier roman ne m'a pas particulièrement fait vibrer. C'est joli, c'est bien écrit, c'est sans effets larmoyants, c'est bien vu. What else ?
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Vivre près des tilleuls

Très réussi, ce livre écrit en collectif est étonnement d'un style très homogène, fluide et cohérent.



Pourtant, et probablement à cause d'un découpage en courts chapitres, l'écriture reste en surface, peinant à descendre dans les tréfonds de la douleur de la mère endeuillée.
Lien : http://noid.ch/vivre-pres-de..
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Vivre près des tilleuls

« La fiction n’est absolument pas le contraire du réel. »



A partir de ce postulat, ces jeunes auteurs se sont emparés du sujet périlleux de la perte d’un enfant pour créer les « notes » d’une écrivaine totalement fictive. Et ils prouvent qu’on peut écrire, inventer des personnages, rendre compte d’émotions et de sentiments sans jamais les avoir vécus. Mais n’est-ce pas le propre d’un romancier ? Un romancier qui n’écrit pas d’autofiction (un vrai romancier ! Il en existe encore… surtout à l’étranger…) le démontre dans chacun de ses romans. N’enfoncent-ils pas une porte ouverte ?



Ceci dit, leur texte est une réussite, il est épuré à l’extrême, travaillé pour ne jamais laisser libre cours au pathos. Il ne verse jamais dans la lourdeur des mots emprunts de chagrin. Il est juste. Chaque mot est pesé, calculé. C’est un texte à la fois sobre et pudique. Pas de débordements excessifs, pas de facilité d’écriture. Il ne joue pas sur la corde sensible du deuil.



Les chapitres sont courts, voire très courts. Ils sont un épisode de vie, une impression, un sentiment.



C’est un bel exercice littéraire. Cependant, je ne suis pas certaine qu’il laisse dans mon souvenir une empreinte durable. Et il n’a évidemment pas la densité d’un roman qui entre dans le vif du sujet et le développe. Ce texte ne fait qu’effleurer le sujet et même s’il est juste, il est bref ! Il faut le lire comme on lit un poème. C’est une fulgurance.
Lien : https://krolfranca.wordpress..
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Vivre près des tilleuls

Un petit livre original et qui fait mouche!



Le thème est dur (la perte d'un enfant, vue du côté de la mère) , mais traité de belle manière, dans une langue épurée, aérée, qui laisse flotter de belles images.

Sobre, touchant, sans pathos.



On se laisse manipuler avec plaisir par ce groupe de jeunes écrivains de talent, le concept est bien mené, de petites touches en souvenirs, on se laisse happer par leur prose et l'on en vient à souhaiter pouvoir lire d'autres oeuvres de "Esther Montandon"!

On imagine volontiers les textes que leur héroïne aurait pu écrire, on rêve avec eux, embarqué dans ce "nous" efficace.



Un bel exemple de littérature collective réussie!


Lien : http://lecture-spectacle.blo..
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Vivre près des tilleuls

Sélectionnée pour ma première participation à masse critique, j’étais ravie de recevoir mon livre et remercie les éditions Flammarion.

Le livre est fin, 120 pages, très aéré avec de nombreux chapitres de quelques lignes ou quelques pages.

J’ai été happée par ce livre qui vous tient grâce à sa remarquable écriture, précise, ciselée, lumineuse. Vivre près des tilleuls est un recueil de notes de l’écrivain Esther Montandon écrites suite à la perte de sa petite fille.

Or pour aller plus loin dans cette critique. Je suis face à un dilemme. Expliquer ce qu’est l’Ajar et l’exercice sublime qui a accouché de ce livre au risque de divulgâcher la fin (comme disent les canadiens ) ou laisser le suspense. ..

Il me semble que ce livre prend une dimension exceptionnelle quand on sait qu’il a été écrit en une nuit par 18 jeunes écrivains romands qui n’ont jamais expérimenté l’enfantement ou la perte d’un enfant.

Les descriptions font preuve de sensibilité, virtuosité, maturité … d’expérience … Le débat et la démonstration sont là. Une œuvre littéraire n’a pas besoin d’avoir été vécue pour être sublime et … vérité :

Citation page 121 :

Alors que le débat sur les frontières – poreuses – entre le réel et la fiction continue d’occuper l’espace littéraire, ce livre tout en empruntant la forme de notes qui jalonnent un cheminement personnel, se revendique comme une totale fiction.

Témoignage des auteurs à Julien Burri, journaliste à l’Hebdo : « nous nous sommes rendu compte à quel point la littérature n’avait pas nécessairement besoin d’autobiographie, ni de solitude.»

Le thème du livre, soit la mort d’un enfant vécue par sa mère, alors qu’elle n’avait pas été expérimentée par l’auteur a suscité des discussions avec Flammarion. «La controverse violente entre Camille Laurens et Marie Darrieussecq, la première déniant à la seconde le droit d’écrire sur la perte d’un enfant sans l’avoir vécu, est toujours présente dans le milieu littéraire, raconte Daniel Vuataz. Seul, aucun de nous, qui n’avons perdu d’enfant, n’aurait écrit ce livre. Mais la somme de nos expériences nous a donné l’élan nécessaire. »

Outre l’enfantement et la perte d’un enfant les thèmes sont là : l’écriture par un groupe, la dimension entre le réel et la fiction et l’écriture d’événements non autobiographiques.



L’AJAR (petit clin d’œil à Emile) nous a concocté un merveilleux petit livre que je recommande chaudement.
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Vivre près des tilleuls

L'ajar, un bien curieux nom d'auteur ! Oublions ce nom, l'auteur est Esther Montandon, dans ses archives, ce texte a été retrouvé. Esther a perdu sa fille quand celle ci avait trois ans. Trois ans pour toujours. Un drame sans nom.

Tout au long du livre, on pleure avec Esther, grande auteur qui a aujourd'hui rejoint sa fille.

Mais l'Ajar alors ? C'est les parents d'Esther si on peut dire. Esther est fictive, seulement un personnage de roman, comme Louise sa fille.

Et c'est du génie ce livre, parce que l'ajar, c'est pas un auteur mais 18 et pendant tout le livre on ne s'en doute pas. J'ai cherché un rythme de phrases différent, un façon d'écrire différente et j'ai pas trouvé. C'est beau, c'est prenant. J'adore !!
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Vivre près des tilleuls

Vivre près des tilleuls est un très beau texte composé de fragments qui semblent issus de carnets intimes. Le sujet est grave : la mort d'un jeune enfant vécue par sa mère. Il se dégage de la lecture une forte impression d'authenticité, de sincérité totale. L'émotion est présente dans chaque ligne.



Et pourtant, le personnage, Esther Montandon, est le fruit de l'imagination d'un collectif littéraire, l'Ajar. 18 auteur∙e∙s de Suisse romande se sont mis au défi d'écrire un roman en une nuit. Les courts chapitres sont tous rédigés à la première personne. Chacun s'est mis dans la peau d' Esther Montandon. Le résultat est d'une cohérence bluffante.



Il y a beaucoup de poésie dans les scènes décrites. Ce sont différents moments de la vie d' Esther Montandon, de son quotidien. Avec une grande sensibilité, et une intensité d'émotion, sa maternité est évoquée, avec ses joies, et la vie débordante de la petite famille. L'accident est relaté sobrement. On sent la stupéfaction qui saisit la mère, la sorte d'irréalité de l'évènement, puis son intégration au quotidien. Il y a aussi de la révolte. Esther Montandon sombre dans l'alcool, tant la mort de son enfant lui est inacceptable. Elle va déménager, puis voyager, pour tenter d'échapper à la dépression.



L'ensemble est très crédible et d'une grande beauté. La musique ajoute du pathétique à la détresse du personnage, avec l'évocation de Summertime, du pianocktail de Vian et du jazz New Orleans.



L'Ajar a magnifiquement relevé le défi. Il prouve là que la littérature n'a pas besoin de vécu. L'émotion est au cœur de l'humain. L'écrivain a le pouvoir de la convoquer et de l'exprimer dans la fiction, même en collectif. Vivre près des tilleuls est un superbe roman, en soi, doublé d'une prouesse d'écriture inédite.

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Vivre près des tilleuls

Ce roman est une sorte d'Ovni littéraire, une expérience littéraire très particulière car il a été écrit par 18 jeunes écrivains de Suisse romande formant le collectif l'AJAR (Association de jeunes auteur-e-s romandes et romands), un nom choisi en forme de clin d’œil à Romain Gary.



Ce roman nous est présenté comme la publication d'écrits retrouvés dans les archives de la romancière Esther Montandon.



Suite au décès accidentel de sa fille Louise le 3 avril 1960, Esther brûle ses manuscrits et n'a plus jamais écrit ensuite sur la perte de sa fille. Les carnets retrouvés dans les archives contiennent ses impressions, ses pensées et ses réactions après ce deuil.



Après avoir connu des difficultés pour enfanter pendant 10 ans, Esther vit intensément sa grossesse et définit la naissance comme "une rencontre entre deux animaux. L'un, sans défense, devant tout apprendre à l'autre. J'étais celle qui ne savait rien, elle était celle qui savait tout, mais nous ne parlions pas le même langage."

Mais à l'âge de trois ans Louise décède suite à un accident dont les détails ne sont que suggérés.



Dans de courts chapitres qui racontent les sentiments par lesquels elle passe, Esther explore toutes les facettes du deuil que son médecin compare à une mer à traverser.

Elle nous parle de son premier réflexe qui est de prévenir sa mère alors qu'elle est décédée depuis longtemps, du choix des fleurs pour le cercueil avec son envie de fleurs de toutes les couleurs pour la "gribouiller " comme elle gribouillait le papier, du besoin de se maquiller pour l'enterrement pour "tout juste avoir l'air vivante.", des journées enfermées chez elle, de la première sortie pour faire des courses, de la première incursion dans la chambre de Louise, du réconfort recherché dans une bouteille de vin, de l'impossibilité d'imaginer avoir un autre enfant et de sa colère quand son mari lui dit "refaisons un enfant".



Elle évoque son besoin de trouver refuge dans une maison où "Les murs ne suintent ni le chagrin ni le souvenir.", son impossibilité d'évoquer Louise en public pour ne pas provoquer de malaise, elle parle des dates anniversaire qui "ne célèbrent que ton absence" et de son incapacité à écrire un nouveau roman.



Des relations de couple qui se distendent, chacun restant muré dans son silence, des tentations de se noyer dans le lac...



"Le chagrin est un engagement de tout l'être, et je m'y suis jetée. On me dit de me reprendre, de faire des choses pour me changer les idées. Personne ne comprend que j'agis déjà, tout le temps. Le chagrin est tout ce que je suis capable de "faire"."

"Qu'on me rende la fille quelques années, quelques jours. Elle me manque."



Jusqu'à la postface où le pot aux roses est révélé on pense que cette romancière a existé alors que ce texte a été écrit par 18 personnes en une nuit. « Écrire un roman en une nuit, l'idée nous amusait et nous effrayait. Une auteur allait prendre vie sous nos yeux »



Ce carnet de deuil présente une qualité d'écriture égale malgré les changements d'auteurs. La perte de l'enfant unique est évoquée sans aucun larmoiement, aucune lamentation. Un texte très émouvant d'une grande justesse.



Avec cette expérience le collectif l'AJAR a pour objectif de contribuer au débat sur les frontières entre réel et fiction et montrer le pouvoir de la littérature sur le réel. "Nous avons pris conscience qu'un récit, pour s'incarner, n'a pas toujours besoin d'être en adéquation avec le vécu", "La fiction n'est absolument pas le contraire du réel" affirment les jeunes écrivains.






Lien : http://leslivresdejoelle.blo..
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Vivre près des tilleuls

très touchant, on ne sent pas 18 pattes mais bien une seule qui nous fait partagé de beau sentiment. Le sujet est bien emmené, merveilleusement traité. Bravo, j'ai eu plein d'émotion lors de cet lecture.
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