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Critiques de Lucrèce (27)
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La nature des choses : De rerum natura

De natura rerum... Ier siècle avant JC ... qu'on y songe...



Si, comme moi, vous étiez trop médiocre en version latine pour lire dans le texte la poésie de Lucrèce, vous pourrez au moins, dans la traduction française, en apprécier la justesse et l'efficacité démonstrative. Par ailleurs, il persiste, même en français, un souffle poétique, qui rappelle Homère. La lecture est donc plutôt agréable et compréhensible, malgré les archaïsmes.



Incroyable pre-science que celle de ce disciple d'Epicure, qui, observant la nature, pourfend - des siècles avant que l'expérimentation scientifique ne prenne le relais- les superstitions et nous introduit au règne de la raison et de la liberté individuelle. Certains concepts nous conduisent même aux découvertes scientifique les plus contemporaines, observant les effets du hasard sur l'atome !



Mais Lucrèce se fait avant tout notre guide dans la découverte de la philosophie de son maître ; et c'est bien par l'observation de la nature des choses qu'il tente d'en démontrer la justesse. Dans un monde en continuel mouvement, constitué à la fois de corps et de non-être (de vide), l'homme, en rapport avec une nature totalement dépourvue de finalité particulière ou de volonté divine, est absolument libre et responsable.



Ce traité, lu très tôt ado tout en poursuivant un bac scientifique, , fut pour moi la source d'une réflexion métaphysique conduisant tout naturellement à désinvestir la religion chrétienne et adhérer à une vision plus "énergétique" du monde, plus en adéquation avec son observation. D'autres lectures m'ont amené plus tard à retrouver un sens au coeur même de ce monde fait de corps chaotiques et de vides.



Au delà de mon expérience personnelle, le de Natura Rerum, reprenant Démocrite et Epicure, me semble avoir préfiguré le grand courant matérialiste ayant donné naissance à la pensée moderne. Lecture incontournable donc, injustement peu commentée, sans doute parce que, pendant des siècles, les religions y ont veillé...



La partie relative à l'éthique, qui découle pourtant des conceptions cosmologiques, m'a beaucoup moins marqué : elle me semble pouvoir se résumer à Candide cultivant son jardin loin des agitations du monde, et à une recherche d'ataraxie, mêlant plaisir mesuré et l'utile à l'agréable. Une quête de douceur et d'un juste milieu dans les comportements s'en suit, qui rapproche Lucrèce d'Aristote, et l'oppose d'une certaine manière à l'idéalisme platonicien.

Plusieurs points communs aussi avec les maîtres bouddhistes : c'est en levant l'ignorance que les peurs disparaissent, laissant ainsi espérer à l'humain qu'il pourra un jour cesser ses souffrances et atteindre l'ataraxie (l'éveil...). Et , si la démarche épicurienne est individuelle, elle n'exclut pas l'amitié "philosophique" entre les hommes, et n'est donc pas sans rappeler le concept de compassion.



Vraiment, un grand ouvrage scientifique et philosophique, doublé d'un style éloquent, que les humanistes de la Renaissance ont relayé jusqu'à nous, notamment Montaigne et Thomas More.





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La nature des choses : De rerum natura

Écrire une chronique sur Lucrèce n'est pas une chose simple pour moi. Pourtant j'y pense depuis que ce blogue existe. Mon édition en Livre de poche a commencé à jaunir (cela marque le temps comme les cernes du bois...). Et je ne compte pas faire une copie du livre, comme devaient le faire les moines à cette époque... Copies qui ont permis de sauver l'oeuvre, l'original ayant été perdu. le récit ne cadrant pas avec l'idéologie dominante, peu d'efforts semblent avoir été déployés pour le conserver. Il faut dire que les thèses avancées par ce poète philosophe ou philosophe poète, – difficile de donner une priorité à l'un ou à l'autre tellement le personnage est inclassable et mystérieux –, sont en totale rupture avec les croyances officielles.



Tout a commencé avec Épicure (philosophe grec ayant vécu de 342 av. J.-C. et mort en 270 av. J.-C). Pour la première fois un penseur avait osé regarder la nature pour l'affronter d'une autre manière que par la « pensée magique », trouver les principes de toutes choses en dehors de l'explication religieuse, se libérer de la peur pour atteindre une forme de vie heureuse en tenant la crainte à distance... Au passage, n'est-ce pas toujours d'actualité ?



En le traduisant à sa manière plusieurs siècles après, du grec au latin, Lucrèce est le passeur essentiel et habile de la pensée d'Épicure, les écrits de celui-ci ayant presque totalement disparus....



Je ne conseille pas de lire l'introduction que j'ai trouvée curieusement bien moins abordable que le texte... Ainsi nous parvenons d'emblée à la page 79. Pourquoi cette mise à distance philosophique savante alors que le poème se lit facilement, expliquant implicitement qu'on a tous besoin – pas seulement les étudiants – de philosophie, de beauté par l'art, de culture pour atteindre une forme de sérénité et de bonheur ?



Quelques-uns des thèmes principaux parcourant ces six chants :



L'intuition scientifique.

Dans la pensée épicurienne et la forme particulière qu'elle revêt chez Lucrèce, l'intuition précède la connaissance, intuition émergeant à partir de l'observation. Plusieurs siècles avant notre ère, des hommes avaient appréhendé l'univers, que le grand tout était, en dépit des apparences, fait en grande partie de vide. Ils avaient imaginé les petites briques spécifiques de matières, leurs combinaisons communes aux hommes, aux animaux (mis sur le même plan que l'homme), aux objets et à toute la nature. Ils les avaient nommés atomes, termes qu'ils nous ont légués ! Et tout cela en observant les grains de poussières dans les rayons du soleil (repris au premier atomiste, Démocrite, 4ème s. av. J.-C). Bien d'autres observations passionnantes sur les nuages, le tonnerre, les tremblements de terre sont présentes sous une belle forme poétique.



Je ne développe pas la notion de clinamen, celle-ci ayant fait couler beaucoup d'encre. Des débats qui m'ont toujours étonné car que dit Lucrèce sinon qu'il n'y a pas prédestination au mouvement. Avec le clinamen il introduit une variation à laquelle j'associe les mutations de la vie, la non répétition des choses à l'identique, jamais...



La poésie.

Différents chants commencent par Vénus, par l'amour que le poète présente dès le chant I, avant les atomes, avant l'univers et en cela je lui donne raison car que serait la science pour l'homme sans l'amour... – voilà pourquoi ce titre sera classé en poésie sur ce blogue. Cette forme poétique de philosophie a peut-être sauvé l'oeuvre et l'homme ? Giodarno Bruno aura moins de chance, reprenant les thèses de Lucrèce, il sera brûlé à la fin du XVIe siècle. Pas facile la vie de précurseur ou d'artiste sincère !



La philosophie.

Est mis en avant l'importance de la nature, le refus de l'éthique de la souffrance rédemptrice et éducative, l'art de penser par l'imagination. C'est l'homme rationnel réunissant la science cosmique et la sensibilité artistique. Lucrèce indique l'utilité de penser de concert la science, la philosophie et l'art sous toutes ses formes. L'art de vivre est aussi abordé de belle manière :



Le chant III est consacré au corps, à la mortalité de l'âme et à la peur de la mort. La charge contre les excès de la religion est forte et n'a pas d'égale dans toute l'Antiquité. N'oublions pas que Lucrèce vit à une époque de guerres civiles féroces tout comme un fervent admirateur lointain, Michel de Montaigne.



L'humour.

Lucrèce pratique l'art de la réfutation par l'absurde et j'ai trouvé souvent cela très drôle. Ce n'est pas usurpé de parler d’œuvre totale !



Influences.

Cette oeuvre a permis de diffuser la pensée d'Épicure dont les écrits ont en grande partie disparu. Elle a influencé nombre d'écrivains et de philosophes dont Michel de Montaigne. On en retrouve les vibrations sensibles chez Jean de la Fontaine, Molière et bien d'autres que je ne peux pas tous citer ici et qui s'en sont inspirés. Montaigne le cite abondamment dans Les Essais. Molière aurait traduit Lucrèce ? Des thèses argumentées, sérieuses, ont retrouvé le poète latin à travers la dénonciation de l'hypocrisie et de la superstition (Le Tartuffe, le Misanthrope...). Je pense pour ma part au phrasé chantant particulier d'André Comte-Sponville, dont la philosophie puise abondamment dans Épicure, Lucrèce, Montaigne.



Biographie en quelques mots. Consigne très facile à respecter : on ne sait pratiquement rien de sa vie ! Il serait né en 98 av. J.-C. et mort en 55 av. J.-C. Les informations nous sont parvenues par saint Gérôme (fin IVe – début Ve siècle) affirmant que Lucrèce aurait été précipité dans la folie par un philtre d'amour, après avoir écrit quelques livres dans des périodes de lucidité – livres que Cicéron corrigea --, qu'il se serait tué de sa propre main à l'âge de 43 ans. C'est bien peu et très dévalorisant pour un auteur qui n'était pas, malgré sa valeur artistique et scientifique, en odeur de sainteté.



Cette chronique sur un livre placé tout en haut de ma PLE (pile des livres essentiels...) est terminée. J'espère qu'elle donnera à quelques lecteurs, qui ne connaissent pas ce chef-d'oeuvre, l'envie de le découvrir, ne serait-ce que par bribes, ce qui est tout à fait possible, chaque chant étant précédé d'une page de présentation des sujets abordés ainsi que les numéros des vers concernés. Les six chants de Lucrèce sont plus courts qu'il n'y paraît lorsqu'on enlève l'introduction et en ne lisant que les pages de droites... sauf les férus de latin qui ne sont plus aussi nombreux que les légions romaines !



Certains avis m'étonnent en voyant un texte pessimiste... Il est vrai que la fin du sixième et dernier chant Origine et causes des épidémies est uniquement descriptif, on y sent un désarroi quant à des explications impossibles à imaginer à cette époque. L'atome a été pensé, nommé, alors qu'il faudra encore des siècles pour faire de même avec les virus et bactéries. Texte pessimiste alors qu'il développe une pensée permettant de dépasser les peurs vaines ? Ce n'est pas ma lecture, bien au contraire, et je serais curieux d'avoir votre avis si vous avez lu ou comptez lire ces poèmes philosophiques ou cette philosophie poétique...

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Retrouvez cette chronique avec les illustrations sur Bibliofeel, lien ci-dessous


Lien : https://clesbibliofeel.blog
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La nature des choses : De rerum natura

Comment expliquer ce qui nous inquiète ou nous terrifie? Comment parvenir à cette ataraxie du sage qui est le souverain bien?Qu'est-ce que la nature? la matière? Les dieux ont-ils une part dans ces mystères de l'univers qui nous dépassent ou la raison seule peut-elle permettre de les appréhender?



Avec patience, intuition, méthode Lucrèce s'emploie à répondre à toutes ces vastes questions, en s'adressant presque familièrement à son ami Memmius, dont le lecteur devient l'avatar.



Avec souffle, imagination, fulgurance des images aussi, et surtout. Car ce philosophe matérialiste, ce rationaliste convaincu est avant tout un poète.Il nous donne à voir le mouvement des atomes dans la matière en apparence inerte, la couleur dans les ténèbres aveugles. Il nous fait voyants par un intense et raisonné dérèglement de notre imagination.



Oui, voyants....et chaque fois que je relis ou retraduis Lucrèce - c'est particulièrement ardu, plein d'archaïsmes, mais beau... comme l'antique!- je pense à celui qui me l'a fait découvrir.



Il arrivait en cours, appuyé sur l'épaule de sa femme, une petite dame toute timide, pleine d'admiration pour son grand savant de mari- posait sur le bureau un énorme volume relié plein cuir, l'ouvrait et faisait courir ses doigts sur les pages écrites ....en braille. Les yeux aveugles, les mains agiles, la voix sûre, il lisait le texte, le traduisait, le commentait avec la même aisance inspirée.



Était-ce la cécité de ce professeur qui donnait une telle force aux images du vieux poète latin? Il me suffit de fermer les yeux pour les sentir affleurer sous mes paupières: Ah les cygnes noirs et les corbeaux blancs de Lucrèce que n'eût point reniés Nerval...
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La nature des choses : De rerum natura

Dans le « De Natura Rerum » Lucrèce expose à un ami, Memmius, la philosophie d’Epicure dont il fait l’éloge, en un vaste poème composé d’hexamètres, lequel s’apparente davantage cependant à un livre de physique, où il est question de la formation du monde et des différents phénomènes naturels, tels que la foudre, les tremblements de terre, les éruptions volcaniques ou bien encore la diffusion des maladies, autant de phénomènes auxquels les anciens attribuaient le plus souvent des causes surnaturelles. Mais Lucrèce, en disciple d’Epicure, entend dépasser les superstitions et découvrir les véritables causes de ces phénomènes. Ce qui n’est pas sans implication morale, puisque c’est de la connaissance de la nature que dépendent la tranquillité de l’âme et le bonheur qui constituaient la recherche d’Epicure, lequel pouvait passer pour un thérapeute, en chassant les craintes et les passions excessives.
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De la nature, tome 3 : L'esprit et l'âme se t..

Ouuuuuuuuuuuuuh, mais ça, ça m'intéresse !

D'ailleurs, je pense que cela devrait intéresser tout le monde : savez ce qu'est le corps ?

Mais oui, gros bêta !

L'esprit ?

Ben...l'intelligence..

L'âme ?

Ben... comme l'esprit !

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Lucrèce, philosophe latin, essaye, au temps de JC, de comprendre l'Homme. Il vit dans une époque troublée par les guerres civiles et les proscriptions (massacres de Marius, proscriptions de Sylla, révolte de Spartacus, conjuration de Catilina).

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L'écriture est belle, les démonstrations moins limpides, mais c'est normal, en ces temps reculés.

Il parle brièvement et confusément de l'Esprit. Mais il s'acharne sur l'âme qui, dit-il, est liée à l'esprit et au corps.

Il s'efforce de démontrer que l'âme, conçue d'atomes plus fluides que l'eau, souffle, sensibilité vitale, périt avec le corps.

Il pense que l'âme fait partie du corps et meurt avec lui. Il assimile l'âme aux souffrances physiques et morales, et aux joies.

Il place l'âme au centre de la poitrine ( qu'on appelle maintenant le plexus, et je pense que c'est effectivement là, ou dans le coeur, ou derrière le cerveau, qu'on reçoit les émotions )

Pour moi, il confond l'âme avec le système nerveux. Mais à cette époque, on n'avait pas étudié les neurosciences.

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De plus, il est persuadé que les dieux romains ne s'occupent pas des hommes, et qu'il est absurde de se faire du mal pour une vie si courte ( je suis d'accord ), qu'il est absurde d'avoir peur des "sanctions" du Styx, des enfers et de l'Achéron, puisque après la mort, dit-il, on ne souffre pas, c'est comme un éternel sommeil.

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C'est de la métaphysique. Il est pire que Nietzsche, qui dit que Dieu est mort. Lui dit que les dieux ne servent à rien, il les ignore. C'est un athée avant l'heure.

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Personnellement, je pense que l'âme s'échappe du corps à la mort physique, qui n'est qu'un passage. Certains "messagers" ont photographié des âmes blanches.

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Si l'âme survivait au corps, elle pourrait réintégrer un autre corps. Or Lucrèce pense que la métempsychose est impossible, sinon, l'âme intégrée dans un autre corps aurait la mémoire du vécu du corps précédent.

Mais les "messagers" actuels savent que les âmes des morts gardent la mémoire, puisqu'elles demandent aux messagers de transmettre des messages aux proches vivants.

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Si vous avez l'occasion, regardez le film "Le Jaguar". Par des circonstances abracadabrantesques, Patrick Bruel-Perrin, vrai cartésien, se trouve mêlé à l'histoire d'un chef amazonien, Wanu, qui est de passage à Paris. Celui-ci lui délivre un message, comme quoi il est un élu chargé de récupérer en Amazonie son âme car, sinon, il va mourir. Il lui donne un collier reliant Perrin à Wanu-le-jaguar, lui donnant, à 8000 km, une force de jaguar, dans les moments périlleux de sa mission.

Même si le film est un peu caricatural, je pense que des phénomènes non cartésiens existent : )
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La nature des choses : De rerum natura

De la nature est présenté comme un grand poème, une ode à la nature, mais les sujets qu'il aborde et les questions qu'il soulève sont essentiellement de nature philosophique et scientifique.

Les raisonnements présentés sont parfaitement stupéfiants quand on se rappelle qu'il a été rédigé il y a plus de 2000 ans, un siècle avant les débuts du christianisme. L'existence des atomes est déduit de l'observation, observation qui ne sera confirmé par la science (et accepté) que vers la fin du 19e siècle! D'ailleurs les Anciens avaient observés de nombreux phénomènes étranges comme la rame plongée dans l'eau et dont la hampe semble remonter vers la surface à cause d'un phénomène de diffraction des rayons.

Ce « poème » déduit que l'espace n'a pas de limites (ce que la science actuelle ne contredit pas), que les dieux n'interviennent pas dans les affaires humaines car « quels si grands avantages pourraient-il espéré de notre reconnaissance qu'ils en prennent envie de tenter quoi que ce soit en notre faveur? », que la terre et le ciel connaîtront une fin (ce que la science actuelle confirme), que l'âme et la pensée sont mortelles.



Que 2000 ans après de telles constatations, les religions soient encore aussi florissantes et en santé est proprement stupéfiant à première vue. Comment des mythes aussi loufoques et invraisemblables peuvent-il perdurer si longtemps? Seraient-ils porteurs d'une quelconque vérité? Évidemment brûler, pendre, écarteler et torturer tous les hérétiques pendant des siècles comme le fit la Sainte Inquisition catholique explique en partie la longévité de cette religion: vaut mieux croire ou faire semblant de croire que de mourir brûlé.



Cependant, on peut tirer d'autres conclusions: de un, la plupart des humains préfèrent croire ce qui leur plaît et ce qui les flattent plutôt que de savoir ce qui se passe vraiment dans la réalité. Plus important encore, la religion a une fonction sociale liée à la survie de l'espèce (Darwin), à la vie ordonnée en société par l'inversion de nos passions positives à l'état de nature (meurtre et destruction) en valeurs négatives (pitié et compassion), mais qui rend possible à vie en société (Généalogie de la morale, Nietzsche). La religion ne détient pas la Vérité, mais elle a une fonction fondamentale, voilà la raison de sa longévité. Il est même aisé de prédire qu'on ne peut pas la déraciner et que, toujours, la plupart des humains croiront en un mythe quelconque. Il le faut d'ailleurs pour éviter l'anarchie.



Lucrèce se fourvoie dans le chapitre sur les simulacres. La nature de la lumière échappe aux Anciens. Ce n'est d'ailleurs qu'avec Newton et ses expérience de diffraction que nous allons commencer à comprendre un peu. La voûte céleste, la nature des étoiles de la lune, du soleil et les éclipses sont des phénomènes sujet à débat à son époque. La foudre, les tremblements de terre, le magnétisme et la peste sont autant de sujets qu'il tente tant bien que mal de rendre compte. Une lecture recommandée que tout le monde devrait faire une fois dans sa vie même si pour nous, modernes, certains passages sont un peu long et fastidieux.
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La nature des choses : De rerum natura

Contrairement aux croyances populaires,l'epicurisme n'a rien a voir avec l'absence de religion.Il faut simplement envisager la non intervention divine dans les affaires humaines,ce qui n'implique en rien la non existence des dieux,bien au contraire.Je trouve en autre formidable que la seule reflexion ait pu demontrer avec 2500 ans d'avance la physique atomique moderne.Il faut savoir que c'est le seul traite epicurien qui nous soit parvenu quasi complet

Tout amateur de la vie devrait posseder ce livre dans sa bibliotheque
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La nature des choses : De rerum natura

De la nature est un -très- long poème destiné à exposer la doctrine épicurienne à "Memmius, gouverneur de Bithynie" et grand ami de son auteur, Lucrèce. Il est évident que ce dernier cherche à convertir cet être cher à l'épicurisme, l'emploi de la deuxième personne du singulier durant tout le livre en est une preuve assez évidente.

Mais ce livre, les poèmes qui le composent, ont beau avoir été destinés originellement à un seul homme, c'est à l'humanité entière que Lucrèce aura légué cette œuvre d'art ayant été la principale source d'information au sujet de l'épicurisme, les ouvrages de son créateur -Épicure- ayant été pour la plupart détruits ou perdus.





L'emploi de la forme versifiée, -qu'Épicure reniait pourtant- permet à Lucrèce de faciliter l'assimilation des idées qu'il expose. La forme poétique est l'excipient permettant d'avaler ces idées abstraites qui ont pour objectif une application concrète, l'auteur aime à dire qu'il "enduit de miel", et rend de fait délicieuse et agréable à ingérer la philosophie épicurienne.

Cette philosophie, quelle est-elle ? Ces poèmes ont justement pour but de nous l'exposer dans le détail, de prétendre au bonheur ici et maintenant, de se contenter des plaisirs naturels, de fuir une gloire éphémère et exténuante, pour se contenter du nécessaire. Il est évident que Lucrèce cherche à discréditer toutes les religions pour convertir un maximum de personnes à la sienne, ainsi, il tape à coups de marteau sur l'idée de dieux vengeurs ou préméditant la destinée des hommes, selon lui, les dieux ne sont que des hommes, dont la constitution atomique diffère certainement de la nôtre, mais qui n'ont que faire de nos vies.

Mais alors, s'il n'y a pas de dieux, comment expliquer les phénomènes naturels ? Comment expliquer le tonnerre ? Comment expliquer les tremblements de terre ? Lucrèce s'y emploie d'une façon rationnelle et toujours très atomique, et même si la plupart de ses justifications sont aujourd'hui rendues caduques par la science, il est impressionnant de constater cette capacité à justifier l'incroyable pour permettre à ses contemporains d'être heureux. Il s'affaire à dénoncer la bêtise de certains qui croient que la vie n'est qu'un prélude à un outre-monde. La connaissance pour vaincre la peur, voilà l'un des grands édifices permettant de bâtir le château du souverain bien, de l'ataraxie.

L'atome est la base et la fierté de la doctrine épicurienne, et pour cause, quel incroyable pari sur la science que de prétendre -bien que Leucippe et Démocrite, réels découvreurs de ce minuscule organisme, aient précédé l'épicurisme- à une telle constitution du monde plusieurs dizaines de siècles avant que celle-ci soit prouvée !

Malgré tout ce génie, les justifications lucréciennes perdent un peu de leur intérêt lorsque l'on découvre cet ouvrage avec les yeux du lecteur du XXIème siècle, pour autant, quelques superbes images permettent d'apprécier la lecture.





Si vous avez déjà une bonne connaissance de l'épicurisme par la lecture d'ouvrages le résumant, vous n'apprendrez sans doute pas grand chose à son sujet, mais vous apprécierez la poésie de Lucrèce qui, bien qu'ayant forcément perdu de sa puissance évocatrice par l'intermédiaire de la traduction, n'en reste pas moins magnifique et agréable à lire. Ce poème est également une excellente introduction à cette philosophie de la vie, bien que, non équipé d'informations préalables, le travail d'interprétation des quelques unes disséminées çà et là -entre la poésie pure- quant à la philosophie exposée devra être fait de manière plus concentrée.
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De la nature des choses

La perception de l'infiniment petit selon Lucrèce n'est qu'un rai de lumière permettant aux particules élémentaires de se réunir et de se repousser sans aucune affinité originelle.



Les particules se meuvent, s'entrechoquent, s'unissent et se séparent uniquement formatées par le hasard de rencontres ne possédant aucune signification.



L'infiniment petit, nombre Pi aléatoire n'étant qu'un agrégat de formes disparaissant et renaissant en fonction de leurs parcours et impacts aussi absurdes qu'imprévisibles.



Inutile d'analyser chaque résultat, ils ne veulent rien dire et ne sont la conséquence que d'un vent quantique regroupant un tout venant corpusculaire sans esprit, dont chaque élément semblable à une boule de flipper révèle dans chacune de ses projections contingentes une imagerie différente.



Aucun plan, pas de jardin d'Eden, ni de terre promise.



Pas de vie après la mort. Quand le corps s'éteint, l'âme s'éteint également.



Rien à conquérir, à gérer ni à défendre dans un infiniment petit uniquement sous l'emprise de ses carambolages inconsistants.



Une lecture s'avérant un vrai calvaire pour un croyant dont les piliers s'effondrent page après page.



Au feu, missels, Bibles et évangiles puisque tout selon Lucrèce n'est qu'un monde désordonné sans dieux élaborant un ordre incompréhensible.



Comment accepter de disparaître en fumée sans l'espoir d'un au delà? De ne donner aucun sens à son existence? De supprimer la cause à effet?



Selon Lucrèce, Il ne reste plus que la vie est rien d'autre en maintenant le cap de ses valeurs au milieu de l'impondérable dérive des éléments.

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La nature des choses : De rerum natura

« De la nature » est une formidable révélation et constitue pour moi un parfait prolongement aux rares textes connus au final assez austères d’Epicure.



J’ai trouvé la matérialisme radical de Lucrèce et son refus des religions particulièrement actuel et en phase avec le monde occidental moderne même si celui-ci n’est pas encore parvenu à se débarrasser de la peur de la mort.



Outre le fond, souvent captivant, on se laisse bercer par la beauté poétique d’un style exceptionnel à la fois clair et élégant.



« De la nature » a constitué une magnifique bouffée d’oxygène et il n’est pas étonnant que Lucrèce par l’audace de ses positions fut longtemps banni par les autorités religieuses des diverses époques d’où son relatif anonymat.
Lien : https://lediscoursdharnois.b..
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La nature des choses : De rerum natura

Lucrèce rend hommage à son maître spirituel Epicure.

Naïvement je m'attendais à une apologie hédoniste à la sauce grecque, vantant les plaisirs, la joie de vivre la volupté, la bonne chère...L'épicurisme quoi!

J'avais bien tort.

En premier lieu, il s'agit de poésie, d'un chant lyrique au parfum de myrte et d'olivier...Le premier chant s'ouvre sur un hymne à Vénus et à la Nature pour vous situer un peu le ton du propos. On a l'impression de nager dans l'ode la plus pure, et puis au fil de la prose on s'aperçoit vite qu'il s'agit plutôt d'un exposer défendant la thèse atomiste du très cher épicure!

C'est la tout le génie de Lucrèce, un tour de force, puisque son poème est à la fois philosophique et scientifique.

Certaines intuitions en matière d'astronomie ou de physique ont fait long feu ( on en est encore au géocentrisme évidemment)

Mais il reste incroyable de constater qu'un siècle avant notre bon vieux JC, certains penseurs s'attaquaient déjà à la religion et ses dogmes en lui opposant une rationalité toute scientifique.

Lucrèce s'attache à nous rassurer quant à nos superstitions. Les Dieux nous demeurent parfaitement étrangers, "La mort n'est rien pour nous", "quand nous ne serons plus, absolument rien ne pourra nous atteindre ou nous émouvoir" le corps et l'esprit étant indissociables, donc rien à craindre!

"qui n'existe plus ne peut pas être malheureux" Amen!

La matière est faite d'atomes dont la rencontre et l'agencement sont purement fortuits. Il y est presque évoqué le Big-Bang dans une partie intitulée la Naissance du monde, impensable!

Lucrèce n'a peut-être pas tout compris, mais il connait les travers de ses contemporains "l'ignorance de la cause assaille notre esprit de doutes".

Alors en bon matérialiste il nous explique la création et nous dit qu'il n'y a rien d'autre dans la nature que des atomes et du vide.

La lutte entre l'esprit rationnel et le religieux ne date pas d'hier! En cela, Lucrèce est un des grands démystificateur de la Nature. On l'imagine bien figurer à un tribunal, lui aussi, accusé d'impiété ou de corruption de la jeunesse, à une époque où les Dieux avaient encore pignon sur rue...
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La nature des choses : De rerum natura

La description faite de l'année 2014 par Isaac Azomov est troublante de réalité. Mais que dire de la description de la nature de la matière par Lucrèce. On touche au mystique, au paranormal. A mettre entre toutes les mains.
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La nature des choses : De rerum natura

Ce livre a été beaucoup plus facile et agréable à lire que je le pensais. Bien que ce soit un pavé écris en vers, je l'ai dévoré.



Ce traité de philosophie épicurienne ne s'intéresse qu'à la physique de cette doctrine. Le seul enseignement pratique qui en découle est l'absence de dieux et qu'il ne sert donc à rien de les craindre ou de les flatter.



Concernant la mécanique du monde qui y est décrite, il y a à la fois des descriptions étonnamment proches de la réalité (atomes, astres, matière) et d'autres complétement ridicules au regard de nos connaissances actuelles (terre plate, explication des 5 sens).



La logique et la rigueur de réflexion sont impressionnante pour l'époque.



Cet ouvrage dégage un certain fatalisme avec sa vision du monde matérialiste dans lequel il n'y a pas de divin, tout s'étiole et se décompose, la mort est inéluctable et éternelle, le monde est fini et périssable.



C'est froid mais c'est beau, propre et cohérent.
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La nature des choses : De rerum natura

Lucrèce, en un long poème philosophique, explique le monde, la physique, les dieux et les phénomènes naturels. Écrit en vers latins à l’époque de Cicéron, « de la nature » ou plus exactement « De Rerum Natura » c’est-à-dire, « de la nature des choses », le poème passe au crible la théorie atomiste d’Épicure, reprenant à son compte sa philosophie, ainsi qu’il décrit les réactions des hommes sur la vie, la mort et les dieux qui ne s’occupent pas–toujours selon les épicuriens–des affaires humaines, vivant dans une sorte de monde parallèle.

Lucrèce pose des théories sur le mouvement des astres, la place du soleil, de la Lune par rapport à la terre etc. Ce sont six livres avec chacun un développement. On commence par la création du monde : des atomes qui se sont associés (les fameux « atomes crochus ») puis on continue sur le mouvement de ses atomes, l’existence humaine, les sens et les plaisirs de la vie, la mort qu’on ne doit pas craindre, l’âme qui ne peut subsister sans le corps (anima : souffle de vie) et enfin sur les phénomènes naturels tels que les orages, les pluies et les tremblements de terre. Le poète finit sur les épidémies et la peste d’Athènes.

Il est intéressant de voir ce que pensaient nos anciens de notre condition, de nos origines. L’observation seule permet cette somme de connaissances et, si l’on sourit quand Lucrèce parle des planètes, on salue cette vision apaisée de la mort.

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La nature des choses : De rerum natura

La traduction en alexandrin non rimés d'Oliviers Sers (aux Belles Lettres) rend certes gracieux les passages poétiques, mais les trois-quarts du livre consistent en des explications rhétoriques sur la conception épicurienne de la physique atomiste. C'est plus rébarbatif à lire qu'autre chose car ces passages là auraient gagné à être retranscrit en prose, comme Molière en eut le projet.

Autre problème : la ponctuation. le texte latin en vis-à-vis contient plus de points et de point-virgules que la version française qui se contente de virgule induisant parfois des confusions sur le sens : difficile de savoir si un bout de complément se rapporte au groupe verbal précédent ou au suivant. Et le choix de débuter chaque vers par une majuscule, au lieu de les réserver aux débuts de phrase, ajoute à la difficulté de lire fluidement, obligé de revenir en arrière pour chercher le discret point final et le début de phrase qu'on a loupé.

Finalement, en suivant sans raison des règles de versification françaises classiques, cette traduction cherche à forcer des ronds dans des carrés. le sens y est, sans doute, et certains vers n'ont pas été écrits sans talent, mais on sent bien une inadaptation de la forme au fond, et la lecture se transforme vite en corvée.
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La nature des choses : De rerum natura

Dialogue, entretien ? Avec qui, exactement ? Memmius ou bien un autre, ou l'autre; tout simplement.

Celui qui parcours ces lignes et qui se demande finalement si toutes ces interrogations sans réelles réponses ne se retrouveraient pas au travers de tous ces mystères et ces Dieux, si âprement défendus?
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La nature des choses : De rerum natura

Leucippe et son élève Démocrite puis Épicure et son lointain disciple Lucrèce, ces atomistes avaient déjà compris que l'homme faisait parti d'un tout.

Et non que le tout avait été créé pour l'homme.



Ils ne pensaient pas encore la terre ronde, pour eux le haut et le bas était centré sur les lieux qu'ils connaissaient à l'époque.

Mais, sans renier les dieux, ils s'étaient affranchi de leur tutelle. Les dieux vivent leur vie sans interférer sur les humains.

Et puis sont venus les livres "révélés" avec leur péché originel (goûter à l'arbre de la connaissance).

Enfin, soyons clairs, prôner l'ignorance pour mieux dominer les "brebis de dieu".

Que de temps perdu (plus de 20 siècles) dans la pensée philosophique et scientifique !

Et pourtant elle tourne....



Bonne lecture ;-)

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La nature des choses : De rerum natura

Le poème romain de la philosophie épicurienne.

Lucrèce brosse un tableau du monde entièrement matérialiste et sensualiste dans lequel les dieux n'ont plus vraiment de rôle. Les dieux sont encore là mais ils n'agissent plus. Tout ce qui arrive dans le monde est le résultat de l'activité du monde lui-même, sans l'action de la providence. L'homme lui-même est partie intégrante de la nature.

Cette vision du monde doit conduire à l'absence de peur, de la mort notamment, car celle-ci n'est rien d'autre que le passage d'un état à un autre d'un être vivant, dans la grande boucle de la vie.

Si ce texte garde encore sa puissance aujourd'hui (alors que beaucoup de ses affirmations ont été dépassées par les apports des sciences naturelles) c'est sans doute parce qu'il constitue un bel exemple de l'exercice de la pensée à l'état pur, exercice qui reste encore aujourd'hui une des composantes essentielles de la vie de l'esprit.

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La nature des choses : De rerum natura

Si traduction est trahison, le puriste préférera la langue originale. Oui mais voilà pas toujours simple de maîtriser le latin.... Ce livre fort bien fait, avec une superbe introduction a la bonne idée de mettre face à face latin et français. Les puristes apprécieront.

Pour ceux qui comme moi n'ont pas la maîtrise du latin, la traduction de ce texte fondateur est semble t'il superbe.

Le grand poème est bien restitué dans sa dimension ce qui permet au lecteur de se plonger dans la doctrine d'Epicure si souvent mal interprétée aujourd'hui par méconnaissance.

La forme peut rebuter, mais l'exercice vaut car les apports philosophiques sont majeurs.

Sur le fond, on connait la leçon: il convient pour l'Homme de « briser les forts verrous des portes de la nature », c’est-à-dire de se libérer des superstitions, des religions et autres carcans moraux qui l’empêchent de comprendre la leçon donnée par la nature et au delà de pouvoir espérer ce qu'il nomme "ataraxie", la paix de l'esprit ou de l'âme débarrassée de croyances erronées.

Je recommande chaudement cette édition fort bien présentée.
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La nature des choses : De rerum natura

Lucrèce semble plus épais que son maître pour le lecteur moderne biaisé par les archives. Ce même lecteur qui devrait aimer ce mélange entre poésie et ce qu'on nomme aujourd'hui essai philosophique, tout en n'étant point de la pensée magique et rationnellement inexploitable. Un classique, de toute manière.
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