Citations de Épicure (172)
Il est impossible de vivre agréablement sans la prudence, sans l’honnêteté et sans la justice. La vie de celui qui pratique l𠆞xcellence de ces vertus se passe toujours dans le plaisir, de sorte que l’homme qui est assez malheureux pour n’être ni prudent, ni honnête, ni juste, est privé de tout ce qui pouvait faire la félicité de ses jours.
En effet, une étude rigoureuse des désirs permet de rapporter tout choix et tout refus à la santé du corps et à l'absence de trouble dans l'âme, puisque c'est cela la fin de la vie bienheureuse. C'est en effet en vue de cela que nous faisons tout, afin de ne pas souffrir et de ne pas éprouver de craintes. Mais une fois que cet état s'est réalisé en nous, toute la tempête de l'âme se dissipe, le vivant n'ayant pas besoin de se mettre en marche vers quelque chose qui lui manquerait, ni à rechercher quelque autre chose, grâce à laquelle le bien de l'âme et du corps trouverait conjointement sa plénitude.
Mais la plupart des hommes, tantôt fuient la mort comme si elle était le plus grand des maux, tantôt la choisissent comme manière de se délivrer des maux de la vie. Le sage, pour sa part, ne rejette pas la vie et il ne craint pas non plus de ne pas vivre, car vivre ne l'accable pas et il ne juge pas non plus que ne pas vivre soit un mal. Et de même qu'il ne choisit nullement la nourriture la plus abondante mais la plus agréable, il ne cherche pas non plus à jouir du moment le plus long, mais du plus agréable.
C'est en effet quand nous souffrons de l'absence de plaisir que nous avons besoin du plaisir. Mais quand nous ne souffrons pas, nous n'avons plus besoin du plaisir. Voilà pourquoi nous disons que le plaisir est principe et fin de la vie bienheureuse.
...
Quand donc nous disons que le plaisir est la fin, nous ne parlons pas des plaisirs de débauchés ni de ceux qui consistent dans les jouissances, mais du fait, pour le corps, de ne pas souffrir et, pour l'âme, de ne pas être troublée.
Car ni les beuveries, ni les festins continuels, ni les jeunes garçons ou les femmes dont on jouit, ni la délectation des poissons et de tout ce que peut porter une table fastueuse ne sont à la source d'une vie heureuse : c'est ce qui fait la différence avec le raisonnement sobre, lucide, recherchant minutieusement les motifs sur lesquels fonder tout choix et tout rejet, et chassant les croyances à la faveur desquelles la plus grande confusion s'empare de l'âme.
Le sage, pour sa part, ne rejette pas la vie et il ne craint pas non plus de ne pas vivre, car vivre ne l'accable pas et il ne juge pas non plus que ne pas vivre soit un mal. Et de même qu'il ne choisit nullement la nourriture la plus abondante mais la plus agréable, il ne cherche pas non plus à jouir du moment le plus long mais du plus agréable.
La perfection de l'âme quant au plaisir est l'extinction de toute opinion capable de lui inspirer de la crainte.
De tous les biens que peut procurer la sagesse, le plus précieux est l'amitié.
Il faut en outre retenir que l’âme est la cause principale de la sensibilité. Mais elle ne pourrait pas l’être si elle n’était pas en quelque sorte abritée par l’organisme. Celui-ci, en permettant à l’âme de produire la sensibilité, en reçoit sa part, pas cependant de toutes les propriétés qu’elle possède. C’est pourquoi il perd la sensibilité sitôt que l’âme se retire. Car le corps n’a pas acquis de lui-même cette faculté, mais c’est l’âme, née avec lui, qui la lui a procurée. Quand elle a, grâce à l’excitation, pleinement développé sa puissance, elle acquiert la sensibilité que, par suite de leur contiguïté et conformité, elle communique au corps, comme je l’ai déjà dit.
Quand nous sommes, la mort n’est pas là, et quand la mort est là, c’est nous qui ne sommes pas !
il vaut mieux échouer par mauvaise fortune, après avoir bien raisonné, que réussir par heureuse fortune, après avoir mal raisonné.
De tous les biens que la sagesse procure à l'homme pour le rendre heureux, il n'en est point de plus grand que l'amitié. C'est en elle que l'homme, borné comme il l'est par sa nature, trouve la sûreté et son appui.
L'homme noble devient véritablement tel en s'attachant à la sagesse et à l'amitié ; en elles, il y a d'une par un bien de la pensée, de l'autre, un bien immortel. in "Sentences Vaticanes" - 219 -
Et il est encore bien pire, celui qui dit que c’est une belle chose que de ne pas être né, et une fois né de franchir au plus vite les portes de l’Hadès. En effet, s’il est convaincu de ce qu’il affirme ainsi, comment se fait-il qu’il ne quitte pas la vie ? De fait, c’est à sa portée, pourvu qu’il y soit fermement déterminé.
"Il faut donc consacrer ses soins à ce qui produit le bonheur, tant il est vrai que, lorsqu'il est présent, nous avons tout, et que, lorsqu'il est absent, nous faisons tout pour l'avoir."
Chacun de nous quitte la vie avec le sentiment qu’il vient à peine de naître.
Quand on est jeune, il ne faut pas attendre pour philosopher et quand on est vieux, on ne doit pas se lasser de la philosophie, car personne n'est trop jeune ni trop vieux pour prendre soin de son âme. Dire qu'il est trop tôt ou trop tard pour faire de la philosophie, cela revient à dire que l'heure d'être heureux n'est pas venue encore ou qu'elle a déjà passé.
Ainsi le jeune homme comme l'homme âgé doivent philosopher. L'homme d'âgé afin de rajeunir au souvenir des bonnes choses qu'il a vécues dans le passé, le jeune homme afin d'être, malgré sa jeunesse, aussi serein et exempt de craintes devant l'avenir qu'un homme plus âgé.
[...] Songe que l'avenir n'est ni tout à fait à nous, ni tout à fait hors de nos prises, afin de ne pas l'attendre, comme s'il devait se réaliser à coup sûr et cependant ne pas désespérer, comme s'il était assuré qu'il dût ne pas arriver.
Quand on est frappé des craintes qu'inspirent les fables du vulgaire, on ne peut s'en délivrer que par l'étude de la nature : sans cette étude, point de plaisirs purs.
Le sage laisse peu de chose au pouvoir de la fortune.
La raison et la prudence ont toujours gouverné et gouvernent ce qu'il y a de plus essentiel dans la vie.