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3.73/5 (sur 20 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Claude Addas est diplômée des Langues orientales.

Auteur d'une thèse sur Ibn Arabî, elle poursuit actuellement ses recherches sur ce grand soufi andalou.

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Claude Addas, symposium à Istanbul


Citations et extraits (6) Ajouter une citation
La science du philosophe n'est pas totalement vaine. (...)
Je rejette la réflexion car elle engendre chez celui qui l'utilise la confusion et l'absence de véracité. Par ailleurs, il n'est pas une chose qu'on ne puisse connaitre par le dévoilement ou l'expérience spirituelle. En outre, s'adonner à la réflexion (spéculative) est un voile. Certains contestent cela, mais nul parmi les homme de la Voie ne le nie, seul les gens de la réflexion spéculative et du raisonnement par induction prétendent le contraire. Et si certain d'entre eux (les philosophes) expérimentent les états spirituels, tel Platon le Sage, cela est extrêmement rare, ceux-là sont semblables aux hommes du dévoilement et de la contemplation.
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À son degré extrême, la « générosité héroïque » n’est qu’un autre nom de la ubûdiyya, la « servitude », en tant qu’elle est pleinement assumée et actualisée par l’homme.

Il ne s’agit pas en effet d’acquérir la « servitude » ; elle est le statut imprescriptible de toutes les créatures. Ce qui distingue foncièrement le « héros » du commun des croyants, c’est qu’il a en permanence conscience de son indigence ontologique, que plus rien en lui ne tend à masquer : « Rien n’est plus éloigné du seigneur que son esclave ; la condition servile n’est pas en soi un état de proximité ; mais la connaissance qu’il a de sa servitude rapproche l’esclave de son seigneur. » (...) dans l’aveu de sa servitude, dans l’éradication de toute prétention à l’autonomie, l’homme atteint la walâya, terme que l’on traduit communément par « sainteté » mais qui signifie littéralement la proximité avec Dieu. Ayant brisé l’idole de l'ego, il découvre qu’il n’agit que par Dieu, ainsi que l’énonce un hadîth qudsî (un « propos divin » transmis par le Prophète mais qui n’appartient pas à la révélation coranique) qu’Ibn Arabî affectionne : « Mon serviteur ne s’approche pas de Moi par quelque chose que J’aime davantage que par les œuvres que Je lui ai prescrites. Et il ne cesse de s’approcher de Moi par les œuvres surérogatoires jusqu’à ce que Je l’aime. Et lorsque Je l’aime, Je suis son ouïe par laquelle il entend, sa vue par laquelle il voit, sa main par laquelle il saisit, son pied avec lequel il marche... » La seule métamorphose qui se soit produite, constate Ibn Arabî, est celle de la perception du serviteur, qui, grâce à la pratique des actes surérogatoires, a désormais conscience que Dieu est - et n’a jamais cessé d’être - son ouïe, sa vue... (...) chez le « serviteur pur », la possibilité d’un choix a disparu. Il s’en tient par conséquent aux œuvres que Dieu lui impose, au moment où Il les lui impose. L’« abandon du gouvernement de soi-même » (pour reprendre le titre d’un admirable traité mystique d’un saint égyptien du XIVe siècle, Ibn Atâ Allâh) est son état permanent (...) définitivement éteint à lui-même dans l’éblouissante Présence divine, éperdu dans la contemplation de Ses noms, il ne sait plus qu’il est : « Lorsque le serviteur s’est dépouillé de tous ses noms, ceux que lui confère sa servitude ontologique et ceux que lui octroie son théomorphisme originel, il ne lui reste plus que son essence sans qualité et sans nom. Alors il est d’entre les Rapprochés [...]. Rien ne se manifeste en lui, par lui, qui ne soit Dieu. » (...) on n’est guère surpris dans ces conditions qu’Ibn Arabî assimile les « héros » aux malâmiyya, les « hommes du blâme » qui, selon lui, « ont revêtu le plus haut degré spirituel » (...) contrairement aux ascètes, dont le renoncement, par les efforts qu’il leur coûte, révèle que le monde a encore du prix à leurs yeux, contrairement à certains soufis dont les charismes sont trop visibles, les malâmiyya s’effacent dans l’anonymat le plus obscur, celui qui constitue l’épitaphe de tout homme : « serviteur de Dieu ».(pp. 40-43)
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La raison qui m’a conduit à proférer de la poésie (shi’r) est que j’ai vu en songe un ange qui m’apportait un morceau de lumière blanche ; on eût dit qu’il provenait du soleil. « Qu’est-ce que cela ? », demandai-je. « C’est la sourate al-sh'u’arâ (Les Poètes) » me fut-il répondu. Je l’avalai et je sentis un cheveu (sha’ra) qui remontait de ma poitrine à ma gorge, puis à ma bouche. C’était un animal avec une tête, une langue, des yeux et des lèvres. Il s’étendit jusqu’à ce que sa tête atteigne les deux horizons, celui d’Orient et celui d’Occident. Puis il se contracta et revint dans ma poitrine ; je sus alors que ma parole atteindrait l’Orient et l’Occident. Quand je revins à moi, je déclamai des vers qui ne procédaient d’aucune réflexion ni d’aucune intellection. Depuis lors cette inspiration n’a jamais cessé.
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J’ai déjà eu l’occasion, dans un chapitre précédent, d’évoquer longuement la doctrine du salut universel chez Ibn Arabî et ses fondements scripturaires. Nombreux sont les écrits où ils examine cette question, décisive à ses yeux, et si tous convergent vers l’affirmation d’une certaine forme de félicité, à plus ou moins long terme, pour tous les hommes sans exception – l’idée essentielle commune à tous ces textes étant que la miséricorde de Dieu l’emportera, en définitive, sur Sa juste colère –, l’argumentation qui les sous-tend n’est rien moins que répétitive. Chacun d’eux envisage en effet ce triomphe final de la rahma, la « miséricorde divine », selon une perspective différente et qui, toujours, se déploie à la lumière de tel verset ou, comme c’est le cas ici, de tel hadîth et dans la méditation desquels Ibn Arabî puise cette certitude que « Dieu fera miséricorde à tous » (...) Ibn Arabî le dit à maintes reprises et le répète encore dans ce passage, la « Communauté » du Prophète c’est, d’un certain point de vue, l’humanité toute entière, dans la mesure où le Prophète a été envoyé vers « tous les hommes », conformément à ce que proclame la Révélation ; il a exercé son mandat de manière invisible dans un premier temps, par l’intermédiaire des prophètes qui l’ont précédé et qui étaient des « substituts » (nuwwâb), et de manière manifeste ensuite, à partir du moment où il fut suscité parmi les hommes. Ainsi, « la umma de Muhammad s’étend depuis Adam jusqu’au dernier homme qui sera ; tous sont inclus, de ce point de vue, dans le Communauté de Muhammad. Tous obtiendront donc la bénédiction des ahl al-bayt et tous seront heureux ».

Celui qui aime Dieu en toute sincérité, affirme Ibn Arabî dans le long chapitre des Futûhât consacré à l’amour, celui-là est maqtûl, « tué », anéanti. Ainsi en va-t-il des saints muhammadiens, ceux qui appartiennent de plein droit à la « Maison prophétique » et marchent dans les pas de l’Envoyé. « Purs serviteurs », ils se sont départis, par amour pour Dieu, et de leur ego et de toute chose jusqu’à devenir « sans nom et sans qualité ». Une mort volontaire offerte en holocauste au « Seigneur des mondes » et en échange de laquelle ces « âmes simples et anéanties » ne réclament rien, mais en vertu de laquelle Dieu s’engage à leur verser le « prix du sang » (al-diya) : la promesse qu’en récompense de leur exemplaire sainteté nul n’encourra éternellement la colère divine. (pp. 159-160)
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Dans la perspective qui est celle de la tradition mystique musulmane, ce n’est qu’en assumant pleinement sa condition de « serviteur de Dieu » (‘abd), qui est sienne de toute éternité, que l’homme est à même d’actualiser ce théomorphisme que lui confère, à l’état virtuel, son statut originel d’imago Dei et, partant, de réaliser le plus haut degré de sainteté, celui où il est véritablement le miroir sans tache en lequel Dieu contemple Ses Noms. La palingénésie, autrement dit la restauration de l’Homme Primordial, impose en effet le renoncement le plus radical à toute volonté propre, à toute prétendue autonomie jusqu’à dissiper toute trace de l’ego qui, en l’homme déchu, fait écran au « Je » divin.

C’est donc dans l’obéissance la plus nue aux prescriptions divines qu’éclôt la théomorphose. Asservi de tout son être à la Loi divine qui, à chaque instant et en toutes circonstances, lui dicte sa conduite, le saint assume en acte les « nobles caractères », lesquels ne sont rien de moins que les caractères divins que tout homme a reçus en partage à l’aube de la Création et dont le Prophète est, selon les maîtres du tassawuf, l’épiphanisation pleine et entière. « Son caractère, c’était le Coran », affirmait à son propos son épouse A’isha. D’où Ibn Arabî conclut : « Celui qui, n’ayant pas vécu à l’époque du Prophète, désire le voir, qu’il contemple donc le Coran, car il n’y a aucune différence entre le fait de le contempler le fait de contempler l’Envoyé de Dieu. C’est comme si le Coran avait pris une forme corporelle sous le nom de Muhammad b. Abd Allâh. » En d’autres termes, ce que le Coran, parole de Dieu, exprime sous forme de Livre, le Prophète le signifie en sa personne, l’incarne dans son exemple, celui de la servitude la plus absolue en vertu de laquelle il est khayr al-anâm, « la meilleure des créatures ». (pp. 93-94)
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Que la fonction sotériologique du Prophète embrasse indistinctement tous les hommes, musulmans ou non, croyants ou non, Ibn Arabî en voit, par ailleurs, la preuve scripturaire dans le verset qui proclame : « Et Nous ne t’avons envoyé si ce n’est comme une miséricorde pour les mondes(1) » :

Dieu a envoyé le plus parfait des envoyés, celui dont l’autorité est la plus illustre, dont la mission est la plus globale, « comme une miséricorde pour les mondes », sans spécifier tel ou tel monde. Ainsi, celui qui obéit comme celui qui désobéit, celui qui croit comme celui qui mécroit, celui qui affirme l’unicité de Dieu comme celui qui Lui associe [d’autres dieux] sont inclus dans cette parole qui est désignée comme le monde.

[…] Sa miséricorde englobe le monde, car c’est par elle qu’il a été envoyé parce que Dieu a dit : « Et nous ne t’avons envoyé si ce n’est comme une miséricorde pour les mondes. » Dieu a donc informé qu’Il l’avait envoyé afin qu’il soit miséricorde pour le monde, sans spécifier tel monde plutôt que tel autre.

L’auteur des Futûhât n’est d’ailleurs pas le premier à relever la portée générale que recouvre l’expression « pour les mondes ». Sulamî, dans son tafsîr, cite un propos d’Abû l-Husayn al-Fârisî (ob. 370/981) qui va dans le même sens, ainsi qu’une sentence d’Abû Bakr al-Abharî (ob. 330/941) déclarant que tout l’être du Prophète est une miséricorde pour les créatures. Pareillement, Abû l’Abbâs al-Mursî (ob. 686/1287) affirmait, quelques décennies après Ibn Arabî : « Tous les prophètes ont été créés à partir de la miséricorde. Notre Prophète, lui, est l’essence même de la miséricorde [‘ayn al-rahma]. »

(1) Cor. 21:107 (pp. 79-80)
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