Je fais partie de ceux qui avaient aimé « I.R.L. ». Certes, cet ouvrage avait comporté des défauts cependant, j’avais été conquise par les idées soulevées et j’avais passé un très bon moment de lecture. Alors, lorsque j’ai vu aux Imaginales que l’auteure venait de sortir un nouveau roman dans la même veine que son prédécesseur, je n’ai pas hésité à l’acheter… D’autant plus que j’ai été immédiatement charmée par le design du livre objet : les pages sont violettes tandis que la couverture a des effets en surbrillance. « Erreur 404 » a été une chouette découverte, à la fois atypique, dynamique, surprenante et avec de bonnes idées… Mais je ne vous cacherais pas le fait que c’est un véritable ovni qui ne plaira pas à tout le monde ! Honnêtement, à deux ou trois reprises, je me suis vu interrompre ma lecture en me disant « Hein ?! Mais que suis-je en train de lire ?… ». Je n’avais encore jamais lu un scénario de ce genre. C’est très novateur et original ! Néanmoins, c’est également déstabilisant. Je devine aisément que cet ouvrage peut aussi bien rebuter les lecteurs que leur plaire…
L’histoire se concentre autour d’un tandem de joueurs en ligne du nom de Moon et Orion. Leur vie est quasiment concentrée uniquement sur le jeu auquel ils s’adonnent quotidiennement. En tant que joueuse aguerrie avec mon conjoint, je peux parfaitement comprendre cette addiction toutefois, j’ignore s’il en sera de même pour les lecteurs non-joueurs… En effet, l’ouvrage est truffé des références à d’autres jeux (Beyond : Two Souls, Assassin’s Creed, etc.) et comporte énormément de scènes dans le jeu avec un tournoi, un escape game virtuel, du tower defense en équipe et des duels 1VS1, … Ça y est ? J’ai déjà perdu la moitié des internautes avec plusieurs termes ?… La plupart de ces éléments sont assez bien expliqués néanmoins, je pense que les lecteurs qui ne jouent pas à des MMORPG ou sur une console seront peut-être perdus ou lassés par l’ambiance de la première partie qui se concentre uniquement sur le grand tournoi devant servir de tremplin pour la carrière de Moon… Pour ma part, j’ai beaucoup aimé l’atmosphère, car cela m’a rappelé plusieurs jeux sur lesquels j’ai passé quelques heures/mois/années. D’ailleurs, je me suis pas mal identifiée à l’idée de duo, car Moon et Orion sont complémentaires et à la fois très différents… Ce que nous sommes avec mon chéri dans nos sessions gaming…
Même si j’ai adhéré au couple, je ne me suis pas beaucoup attachée aux héros. Moon, dont j’ai vite compris le secret (Dommage… Cela m’a sauté aux yeux dès les premiers chapitres…) est un personnage m’a vite exaspéré. Je comprends son combat néanmoins, je n’ai pas été touchée par son comportement souvent vulgaire, grossier et impulsif. Bien que ce soit un joueur vif, meneur et intelligent, ses propos ou ses crises à répétitions m’ont fait serrer les dents… Moon a été blessé par le passé : suite à un événement sur le jeu et à des réflexions liées à son physique, il est tombé dans une profonde dépression… L’idée de « haters » est d’ailleurs assez bien développée… Sous l’anonymat, beaucoup déversent leur rage au quotidien sans penser aux conséquences… C’est finalement Orion, mon personnage favori en raison de son caractère réfléchi et posé, qui a pris le temps de remettre son compagnon en confiance et qui lui a redonné peu à peu le sourire. Reboosté, Moon fait donc son grand retour, bien déterminé à prouver aux autres qu’il est capable de devenir pro-gamer et l’égérie de plusieurs firmes dédiées au jeu ou à la technologie.
Homosexualité, place de la Femme, âge, physique différent… La thématique de la tolérance dans le jeu est bien abordée grâce à Moon. Cela sonne juste… En tant que joueuse, j’ai souvent eu affaire à des personnes idiotes faisant soit du rentre-dedans pour se faire remarquer, soit me rabaissant en tant que Femme. En outre, même si on joue avec son aimé, cela ne change pas forcément le comportement des autres… Bien sûr, la plupart des joueurs sont matures et se fichent de savoir s’ils ont affaire à une demoiselle ou à un confrère cependant, l’identité de la personne derrière est parfois un frein, c’est clair ! Il faut dire que dans les jeux, la Femme est souvent réduite à un avatar suave, désirable, avec des rondeurs où il faut et une tenue affriolante… D’ailleurs, même les armures de guerrières/tank, censées protéger contre les coups, sont sexy ! Le problème, ce ne sont pas uniquement les joueurs qui considèrent les femmes comme une paire de seins ou un accessoire devant uniquement rester en cuisine ou auprès des enfants (Ne levez pas les yeux aux ciels, j’ai eu le droit à ces propos !), c’est le système et plus globalement la société qui prône parfois cela… Heureusement, il existe des personnes engagées qui se battent pour que les mentalités changent et pour que les disparités s’amenuisent. Heureusement, il existe également des œuvres comme celle-ci pour pointer du doigt des injustices liées au sexe. Dans une période où les combats féministes sont de plus en plus nombreux, « Erreur 404 » prouve qu’il s’intègre parfaitement à l’actualité.
Les personnages secondaires ne m’ont pas spécialement marquée. Hormis Orion et Moon, les autres ne vont être que de passage et ne seront pas développés… Il faut dire qu’il y a déjà bien à faire avec le couple et avec un troisième personnage dont je n’avais pas soupçonné l’importance ! Les deux héros possèdent Loop, un Beasties. Pour les joueurs, cela s’apparente à un pet/un familier dont les capacités sont variées. Pour les non-joueurs, voyez cela comme un pokemon qui combat contre d’autres joueurs et qui évolue selon les propriétaires. Loop est une créature virtuelle à poils oranges capable de changer de forme et de prendre l’apparence de n’importe quoi, que ce soit vivant (animal), fictif (Disney, « Ça » de Stephen King, Pirates des Caraïbes) ou utilitaire (casserole, boîte de TNT). Autant dire que les possibilités sont infinies et qu’Agnès Marot a fait énormément de clins d’œil à notre culture ! Au départ, Loop m’a donné l’impression d’être un Smourbiff (saga « Noob ») évolutif. Ses petits cris incessants et ses danses du popotin ont vite fait par me lasser… Personnellement, un truc qui fait « Pouic » toutes les deux pages, cela finit par me taper sur le système… Alors, lorsque j’ai vu l’importance qu’avait cette bestiole dans l’intrigue, j’ai commencé par maugréer toute seule devant mon livre… Puis, au fil des révélations, j’ai peu à peu revu mon jugement. Grâce à Loop, le récit a pris une tournure complètement diverse ! On a l’impression de lire deux histoires différentes ! L’idée du réel et du virtuel abordée par l’auteure en seconde partie est vraiment très intéressante. Comme Moon, j’ai commencé à me perdre : je me demandais si ce qu’elle vivait était vrai ou non. La frontière était si fine que c’était difficile à suivre ! C’est dans le dernier tiers que je me suis demandée à plusieurs reprises ce que je lisais… Honnêtement, c’était très « WTF !? »… Durant cette seconde partie, Agnès Marot a vraiment réussi son coup en perdant le lecteur et son héroïne. L’idée est vraiment bonne et m’a agréablement étonnée à bien des reprises, toutefois je comprends que cette idée de démence, d’addiction qui prend le dessus sur la raison et de perte de contrôle puisse déplaire…
L’auteure n’a pas proposé qu’une seconde partie surprenante ! Il y a également l’utilisation d’un narrateur inconnu qui va intervenir plusieurs fois. Il utilise la seconde personne en décrivant ses actions et en commentant celles de Moon, comme s’il s’adressait directement au lecteur ou cherchais à le faire s’identifier. On devine que c’est une personne qui suit les lives du couple, mais il faudra attendre la fin de la moitié du livre pour connaître son identité. J’ai mis un temps à me faire à cette étrange narration… Sur ce point, j’avoue être assez mitigée… En revanche, j’ai adoré la conclusion ! L’idée est géniale et atypique…
Des thématiques importantes, des personnages plus ou moins attachant, un univers complexe, une ambiance gaming, un monde mélangeant fiction et réalité, plusieurs clins d’œil à « I.R.L. » (Je recommande d’ailleurs cette lecture AVANT celle-ci…), « Erreur 404 » a le mérite d’être original et d’entrer dans la catégorie « Ovni littéraire ». À vous de voir si vous souhaitez vous y frotter ou non. Dans tous les cas, vous ne serez pas indifférent ! Pour ma part, je ne regrette pas le voyage.
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