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Après l'amour de Agnès Vannouvong
On fait l'amour dans un creux, en liberté conditionnelle. Dans quelques heures, tu entreras dans le temps des aéroports. Tu arriveras à JFK. Après la douane, Samuel t'ouvrira ses bras. Il hèlera un taxi, claquera la portière, t'embrassera, I love you New York. Tu retrouveras ta vie. Notre parenthèse se refermera. Nous disparaîtrons dans l'odeur de pancake, de bacon et d’œufs brouillés. En prévision de cette disparition, je m'abreuve du parfum qui vient du creux de ton cou. Si je connais très bien les effets du manque, j'ai peur, car j'ignore le remède contre la puissance de l'étreinte. Jusqu'aux derniers instants, avant la douche, avant le taxi qui t'emmène à Roissy, on jouit en se regardant. On ne jouit qu'en se regardant. Je sais que nous n'allons plus nous revoir. Je refuse la mélancolie, j'exècre les larmes qui troublent pourtant mon regard. Tu vois un sanglot monter dans ma gorge. Tu me demandes de te regarder. Je continue de te baiser sans soutenir ton regard. J'avale l'océan qui me sépare déjà de toi. Je hais le romantisme, les dépressifs, les sentiments dégoulinants. Je veux garder un souvenir net de toi. La force de ton sourire, la blancheur de tes dents, la douceur dans tes yeux. Pour me consoler, je garde en mémoire ton appartement dont les murs secrets portent encore notre souffle.
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