Mediapart reçoit les journalistes algériens Akram Belkaïd et Farid Alilat en ce 53e vendredi de manifestation qui marque le premier anniversaire du Hirak algérien, l'un des plus puissants mouvements populaires de l'histoire moderne. Un débat animé par Rachida El Azzouzi.
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Même le vieux gardien des ruines de Qamirnah (« la cité de la lune », nom arabe de la ville antique sumérienne d’Ur), qui tue des pilleurs pour que soit préservée la mémoire et l’âme des ancêtres, se récite à lui-même des vers de Zouhayr Ibn Abi-Soulma. À Damas, quatre amis se disputent pour elle tout en invoquant Al-Lout, déesse de la lune (« La lune est aux Arabes ! »)
Jeudi 20 septembre. Pas un souffle, pas un bruit. Même le piaillement des oiseaux semble s’être soudainement suspendu ou peut-être mes oreilles bourdonnent-elles, m’empêchant d’entendre cette nature qui se manifeste toujours dans les cimetières. Nous sommes en contrebas du monastère de Tibhirine, à près de cent kilomètres au sud-ouest d’Alger, en plein cœur des montagnes de Médéa. C’est une petite clairière où flottent les odeurs mêlées de pin, de mûriers, de sauge et de menthe sauvage. Nous nous recueillons, gorge serrée et poitrine battante, devant sept tombes, avec pour chacune d’elles, un petit bloc de marbre blanc.
Juillet 2009. La voiture s’extirpe enfin de l’embouteillage provoqué par un barrage de police et débouche sur le front de mer. La baie est là, majestueuse, baignant dans une lumière éclatante. La montagne à laquelle s’accroche la Ville blanche semble flotter au-dessus d’un grand tapis de marbre bleu. Il se dégage d’elle une puissance tranquille, indifférente au fourmillement des hommes et des machines. J’ai la gorge nouée et le cœur qui bat la chamade. Que pourrais-je dire ? C’est la première fois que je reviens à Alger depuis juin 1995.
L’heure approche et la lune s’est fendue ;
Mais les infidèles, à la vue des prodiges, détournent la tête, et disent : C’est un enchantement puissant.
Entraînés par le torrent de leurs passions, ils nient le miracle ; mais tout sera gravé en caractères ineffaçables.
Akram Belkaïd signe ici un recueil de quatorze nouvelles, forcément, de force et d'émotions différentes. J'ai eu pour ma part un peu de mal à rentrer dans ces univers.
Sur fond d'invasion de l'Irak, l'auteur nous convie à suivre la course de la lune en s'arrêtant dans chaque pays arabe traversé. La lune, personnage commun à chacun de ces textes, prétexte pour mettre en musique les misères des hommes, leurs mesquineries, leurs rêves de grandeur, leurs folies parfois, que scandent les poètes. La poésie est en effet le deuxième fil rouge de ce recueil et je sais gré à l'auteur (et à Babelio) de m'y avoir initié.
Au fil de la lecture, j'ai été touché par l'acuité et la lucidité avec lesquelles l'auteur dépeint ses sociétés arabes qui hésitent entrent la modernité et la tradition.
Si c’est ce qui est écrit alors que ce qui doit arriver arrive. Mais nous resterons dans ce pays malgré les vipères qui vont déferler. Nous devons rester car, comme tu l’as écrit, seule…
Gamra l’interrompt d’un geste brutal. Cette phrase, c’est la sienne. C’est à elle, et à elle seule, de la prononcer comme on psalmodie une prière sacrée :
— Car seule la poésie vainc les vipères, murmure-t-elle en regardant le bébé qui dort.