Un cheval noir dans les ténèbres
à Pierre Soulages
Court il court chevauche court vole vrille échauffe court
Long vif il souffle crache crisse il secoue ses os ses vertèbres
La ruine sombre de sa peau l'immense nuit des eaux funèbres
Il est plus grand que la douleur plus beau que l'or des yeux
Il court sur tous les chemins les montagnes les gouffres
Les vallées de vagues il rafle les pigeons et les aigles
Dévaste les plaines se rue fou dans les désirs sans fond
L'affreuse haleine autour de lui se frotte aux murs griffés
Il est le rythme il est le monde affolé l'ardente flamme
Il file nuit à perdre lune il appelle il avale il ébène :
Je suis comme ce cheval noir qui s'épuise et se brise et
Souffle sur ses lèvres pour oublier les ténèbres de l'âge
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