MON VAMPIRE
C'est celle [la nuit] qui de jour en jour m'habite,
Ronge ma vie et boit le sang de mes heures,
Comme un très sombre et très funèbre rite,
Elle revient, la nuit surtout, nourrir mes peurs.
Gourmande et jeune et qui m'endort,
Sans que jamais s'assouvisse son cœur ;
Tout près de moi s'étend la présence d'un corps
Qui me dévore en perçant ma torpeur.
Qu'elle ait changé de masque bien souvent,
Sa lèvre est plus humide et plus vermeille encore,
Pour étancher sa soif, et qu'elle ne fut avant,
Brûlante et savourant le douloureux accord.
Mes forces vont sans cesse animer son courage
Quand elle me quitte à l'aube, pour courir
Par les rues, dans la foule, où, se laissant mourir,
Elle abandonne un temps le candide carnage.