Elle qui aimait tellement la vie regardait la mort en face. Jamais elle n'a ignoré l'enjeu de la lutte qu'elle a menée. Malgré l'amour qu'elle avait pour les siens, pour son mari, pour son fils, il n'entrait aucune amertume dans cette affirmation si simple qui a été une des dernières phrases qu'elle m'a dites. "Je sais qu'ils me fusilleront".
Tout pays qui s'ouvre au tourisme abdique sa dignité.
On sentait véritablement chez cette jeune femme brune toutes les choses magnifiquement inexprimables qui émanent de la grande Passionaria. Bref elle était notre conscience même.

On s'attarde aujourd'hui sur le Loti fantasque, inattendu, désinvolte, révolté, sur son horreur du bienséant, du tiède, sur ses côtés "facteur Cheval" et androgyne universel que mille vies n'auraient jamais pu assouvir. C'est un homme qui marche au sol, sur mer, dans sa tête, dans ses rêves, qui a peur mais qui avance et revient en arrière, repart, même lorsque rien d'autre ne l'y oblige que la nécessité de vivre ailleurs ou autrement, d'être autre sinon l'autre (c'est un leurre), de construire chaque jour sa jeunesse éternelle, autre leurre. Son écriture pleine de nuances sonores et de rythmes subtils, est toute maritime : le roulis des mots y joue une sorte de météorologie, jolie brise force 4. Leur ingénuité, leur transparence, leur calme sont pour rappeler l'averse récente, l'orage à peine dissimulé, l'angoisse sous-jacente. La phrase indolente et diaphane, grise comme un ciel pluvieux d'Aunis, exhale une flagrance puissante, ...
Le nom de Tombouctou (Tin-Buktu, le puits de la vieille Bouctou) est connu à travers des récits arabes médiévaux, souvent flous {...}. La ville, fondée au XIIe siècle, à une dizaine de kilomètres au sommet de la grande courbure septentrionale du fleuve Niger, au cœur du Sahel, entre Sahara et zone tropicale humide, au contact des peuples arabo-berbères et noir-africains, de l'islam et du paganisme, du dromadaire et du bateau, est vite devenue un centre prospère où se croisaient caravanes et marchandises, or et esclaves. De là à l'avoir prise pour un Eldorado fabuleux, il n'y eut qu'un rêve que l'occupation marocaine (XVIe-XVIIIe) ne démentit point, ni quelques récits de marchands européens.
Julien Viaud et Pierre Loti, le marin et l'écrivain, ont beau être désormais jumeaux solidaires dans cette vie faite d'existences humaines multiples, l'Extrême-Orient colonial va rapidement leur rappeler qu'ils peuvent devenir frères ennemis ...