Camille ou le désenchantement.
Camille au carrefour de sa vie professionnelle et personnelle.
Le journal culturel dans lequel elle travaille se restructure et qui dit nouveaux modes de management dit licenciements pour plus de productivité. Camille ne se retrouve plus dans cette course à la compétitivité et à l’arrogance de son entreprise. Ses collègues dont les bureaux sont tout près l’un de l’autre ne se parlent plus mais s’envoient des mails plutôt discourtois presque violents.
Camille annonce qu’elle quitte le journal.
Une rupture qui se couple avec une autre décision brutale , elle a annoncé abruptement à son amant Stelios qu’elle le quitte pour rester avec Thomas, un homme divorcé qui ne la voit que par intermittence quand il n’a pas ses enfants. Malgré tout le bien-être qu’elle peut trouver auprès de Stelios, elle tranche pour une vie rangée avec Thomas ne supportant plus les mensonges et une vie affective instable.
Le roman de Alain Sevestre m’a d’abord décontenancée, et franchement déstabilisée par sa forme, son style d’écriture et la narration. Il m’a fallu un peu de recul après sa lecture pour l’apprécier parce que ce roman est audacieux, subtil et déroutant.
Par le biais d’une fausse superficialité, l’auteur pointe du doigt une société qui balise uniquement sa richesse à sa valeur économique, le fameux produit intérieur brut et balaie les autres indices de bien être, de bonheur individuel de ceux qui composent cette société, la construisent, l’enrichissent et qui sont mis à rude épreuve pour vivre simplement et dignement.
L’écriture ramassée où les dialogues et la narration s’enchâssent et s’emmêlent, sans ponctuation me fait penser au langage digitalisé, difficilement compréhensible et distant.
Camille apparaît comme une marionnette virtuelle, elle pleure souvent, scotchée à son smartphone.
Elle cherche tout simplement une réponse à son mal être, allant jusqu’à parler d’elle-même au lieu d’interviewer les artistes, elle cherche l’amour, être aimée et aimer. Un besoin essentiel et vital.
Camille subit pour le moment mais j’ai trouvé en elle un souffle de résistance comme le geste d’écrire ses mots sur le papier avant de les envoyer sur son téléphone, elle prend le temps de la réflexion et avec lui donne tout son sens à l’altérité. Comment le destinataire va-t-il réagir aux mots affichés sur son écran ? Comme un simple OK mais OK à quoi, quand le sens du dialogue perd justement toute sa profondeur et sa signification.
Comme le personnage de Camille dans ce roman, malmenée par la vie mais aimé par celui qui lui donne vie dans ce roman, l’auteur. Sous la couche de rudesse et de distance, il y a de la tendresse et de la compassion. Qui disent encore plus le manque quand la douceur et le vivant disparaissent.
Je remercie Babelio et les éditions Phébus pour la lecture de ce livre dans le cadre de l'opération Masse Critique.
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Le titre de ce livre l'Immense Regret, est comme le signal prémonitoire de ce que le lecteur va ressentir, un immense regret, car ce livre est passé à côté du sujet, et les ambitions littéraires qui l'animaient font un flop.
Un pari osé cependant, celui d'introduire le smartphone comme un vrai personnage, ensuite, construire la tessiture du texte dans un langage parlé approximatif, celui du Web.
Le smartphone n'est plus seulement le moyen de communiquer avec des amis éloignés, il est présent en permanence et s'impose comme une présence, qui exige, qui discute, qui conteste, qui dit oui ou non comment savoir, « non, écrit Thomas, non, quoi ? Écrit elle ». Ainsi sur une double page nous pouvons avoir uniquement des échanges par SMS !
La deuxième originalité, saute aux yeux et à l'oreille à travers cette locution, ça va ? Prononcée sur tous les tons, et ses quelques variantes ça me, ça a, ou ça suffit...On peut aussi côtoyer le, on va, ou on s'en va...
Quand l’ambition d'innover galvanise Camille, la journaliste, on l'écoute page 108," c'est que ça à l'air net, et ça, j'adore", ces mots heurtent le lecteur, même le moins Proustien. Et l'experte de conclure " rien ici de vous servira, c'est un jeu, un travail. Les quasi cristaux de Penrose."
Lassée de cette exposition contemporaine, voilà Camille emportée par l'indéboulonnable présentateur de télévision Alexis leségur, que l'on retrouve complètement bourré (Pas jean-Claude), pour lequel on a du mal à percevoir sa mise sur la touche, ses escarmouches dans les rues de Paris, sa présence rue Poisson ( mon ami Jean-Baptiste Harang appréciera, il y habitait au N° 6).
Faute de reconnaître quelqu'un de connu, on se lasse vite de cette longue traversée de Paris sans queue ni tête.
On regrettera même les cris de Gabin, « Janvier ! » en plein marché noir.
Au final on ne peut mésestimer le souhait de Alain Sevestre, d'être un précurseur dans le monde du Web, après Ne poussez pas Mémé dans les Orties, un roman d'amour bousculant la versatilité du smartphone, aurait pu s'installer et trouver son public. Sauf que l'amoureux transi aperçu entre deux appels, revient par un SMS à la ponctualité diabolique pour, » en fait ( autre locution enfantine )», juste clore cet immense regret.
Je salue ce roman expérimental, qui a su aiguiser ma curiosité dans le choix de Masse Critique, merci Babelio.
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En lisant ce livre, j'espérais une analyse un peu profonde, sociologique, psychologique, artistique, d'un art pratiqué par des non professionnels, non initiés, pour eux mêmes et uniquement exposé dans leur salon.
Et je lis un témoignage à charge sur la peinture amateur, assez méchant, parfois gratuit, avec peu d'information objective et aucun recul.
Je ne sais pas quels comptes l'auteur avait à régler, ni avec qui mais on peut classer ce livre, apparemment échappé du pilon, dans ceux qu'il est possible d'oublier, malgré quelques éléments pour lesquels on n'avait pas besoin de ce livre.
Bizarrement trouvé à la librairie de la Halle Saint-Pierre, plus orientée vers la mise en valeur de l'art brut ou naïf.
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Commencé parce qu'il me souvenait que quelqu'un, ne savais plus qui, l'avait beaucoup aimé – entre petite déception devant une assez banale quoique compliquée histoire de filature, ou de recouvrement de dettes – accrochée par de petites obscurités, pour moi du mois, par des bonheurs d'écriture, des notations – définitivement ne suis pas certaine d'avoir compris tout ce que cette fable signifie – définitivement heureuse de l'avoir lue.
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