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Citation de VACHARDTUAPIED


L'année même où Alexandre Grine s'attaquait enfin à la rédaction de son " récit autobiographique " - Sur Terre et sur Mer-, paraissait ce qui devait être soin ultime roman.
Et si quelqu'un doutait encore que la littérature d'aventures fût avant tout littérature de conflit, La Route pour nulle part suffirait à en fournir l'éclatante démonstration : car rarement un auteur n'aura usé si habilement de son talent pour régler ses comptes avec le monde autant qu'avec son propre passé. Ainsi les lecteurs de Sur Terre et sur Mer retrouveront-ils ici presque tous les épisodes clefs de la vie du romancier, transfigurés en scènes d'une violence d'autant plus cruelle et singulière qu'elles se trouvent enchâssées dans une intrigue paraissant au premier abord obéir aux règles les plus convenues du genre qui mêle dans une même aventure mouvementée un jeune orphelin rêveur, lui joueur professionnel, un original fortuné et ses deux filles espiègles, un épicier en mal de sensations fortes, un père miraculeusement retrouvé, un gouverneur corrompu à la progéniture dévoyée, des intrigants de toute sorte, de faux marchands, de louches contrebandiers, des soldats acharnés, et une prostituée au grand coeur habile à tourner la tête au plus honnête gardien de prison, tous protagonistes de fêtes joyeuses, de marches épuisantes, de combats acharnés ou d'impossibles projets d'évasion.
Seulement, à y regarder de plus près, l'on s'apercevra bien vite que la route qu'emprunte le jeune Tirrey Davenant pour fuir les ignobles desseins de son père ne le conduira guère plus loin qu'à une méchante auberge de bord de route, et que tous les rêves qu'il aura caressés ne serviront jamais qu'à précipiter sa perte. Dans son dernier ouvrage, L'Energie de l'Erreur, Viktor Chklovski écrivait : " Les fins heureuses [...] rassurent le lecteur et permettent, en quelque sorte, à l'auteur de la vie, puisque tout est bien, mêmes lui [...
]. Elles sont l'affirmation que le monde n'a besoin ni d'être repensé ni d'être transformé. " Si La Route pour nulle part commence comme un récit de Dickens, à la fois gai, léger, ironique et sournoisement assombri par d'obscures menaces, au pays du Grineland les justes ne trouvent pas le bonheur et les méchants sont rarement punis : comme si même le monde du rêve avait besoin, constamment de furieuses révolutions.
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