Citations de Alexandre Seurat (132)
Quand j'ai vu l'avis de recherche, j'ai su qu'il était trop tard. Ce visage gonflé je l'aurais reconnu même sans son nom -ces yeux plissés, et ce sourire étrange- visage fatigué, qui essayait de dire que tout va bien, quand il allait de soi que tout n'allait pas bien, visage me regardant sans animosité, mais sans espoir, retranché dans un lieu inaccessible, un regard qui disait, tu ne pourras rien, et ce jour-là j'ai su que je n'avais rien pu.
LE FRÈRE
....Alors Je me pose des questions bizarres,je me demande si,dans le cas où on aurait été dans une autre famille, et dans un autre monde,si elle avait pu être elle et si j'avais pu être moi,est-ce qu'on aurait été comme un frère et une soeur--je veux dire ,si elle n'avait pas ėtė elle et si je n'avais pas été moi,ceux que nous avons été--est-ce que les autres que nous aurions été auraient pu être frère et soeur?(Page 122).
Au fond, une immense barre d'immeubles, massive, surplombe la rue, les lumières de ses hautes fenêtres minuscules, de différentes couleurs, me semblent clignoter en jaune, en bleu, pour moi. Je voudrais me fondre à la nuit lumineuse, pour arrêter de penser, je voudrais bien trouver le sens des lumières qui clignotent.
LE POLICIER
Et puis, ce qui était plus grave, et plus probant aussi, il y a eu le coup de téléphone d'une gendarme, autrefois à la protection des mineurs, et qui avait interrogé la petite l'année d'avant, pour des soupçons de maltraitance parentale, et dans les fichiers de la gendarmerie on a retrouvé le dossier, il n'y avait pas eu de suite, mais ce n'était pas bon.
Alors je me pose des questions bizarres, je me demande si, dans le cas où on aurait été dans une autre famille, et dans un autre monde, si elle avait pu être elle et si j’avais pu être moi, est-ce qu’on aurait été comme un frère et une sœur – je veux dire, si elle n’avait pas été elle et si je n’avais pas été moi, ceux que nous avons été – est-ce que les autres que nous aurions été auraient pu être frère et sœur ? (p. 122.)
Quand elle m'a annoncé qu'elle était à nouveau enceinte, je n'ai rien dit mais je me suis dit, une connerie de plus.
Un nom à la va-vite lui a été donné. Diana. Un nom de princesse - mais de princesse brûlée vive. Comme si c'était aider l'enfant qui partait déjà mal dans la vie.
Ma collègue a insisté, Personne ne te fais du mal vraiment ? A ce moment-là, la petite a dit
DIANA
Sauf maman et mon papa
Un nom à la va-vite lui a été donné. Diana. Un nom de princesse - mais de princesse brûlée vive.
Une famille bricolée, oui, une famille rapiécée, une famille où rien ne se dit, mais où les drames se passent au vu de tous, et en silence, sans que personne ne s'interpose.
"...et je me souviens que je me suis dit, Diana aura quand même eu droit à ce que maman pleure pour elle."
Alors je me pose des questions bizarres, je me demande si, dans le cas où on aurait été dans une autre famille, et dans un autre monde, si elle avait pu être elle et si j'avais pu être moi, est-ce qu'on aurait été comme un frère et une sœur- je veux dire, si elle n'avait pas été elle et si je n'avais pas été moi, ceux que nous avons été- est-ce que les autres que nous aurions été auraient pu être frère et sœur?
Ce sont des images insurmontables : je le revoie assis seul dans sa chambre. Il ne fait rien, il est penché en avant. A l'étage du dessous, nous sommes en train de déjeuner avec nos grands mères, notre tante, sans lui - et personne ne monte. Il est seul dans sa chambre, et personne ne l'attend.
(P 115)
La cour étroite de l'immeuble est vide à présent, l'hiver le soleil suit une courte ellipse au-dessus. Plus aucun bruit, la porte de l'atelier est fermée. Juste l'image d'un homme sévère, raide, en costume sombre, sur le seuil d'une cour vide.
Les lampes disposées au-dessus des tables diffusent une lumière pâle sous les abat-jour verts devant les corps disséminés à d'autres tables, plus loin, continuant leur travail, au calme, lents, silencieux.
Sous les lampes alignées, quelques silhouettes assises aux tables en bois ciré, tournent lentement de longues pages, prenant consciencieusement des notes au crayon, très posément.
C'est la nuit : un petit appartement, au premier étage d'un immeuble haussmannien. Dans la pièce qui donne sur la rue, se distinguent des masses sombres, un bureau. Parfois, dans un grondement lointain, un halo blanc passe à travers la fenêtre, et projette la silhouette mouvante des croisillons contre les murs, les meubles, l'ombre circule très vite, puis s'efface, furtive. Sur le bureau sont apparus une grosse loupe, des poinçons, des ciseaux. Un atelier. Il y a des étagères, pleines d'objets en vrac, une armoire, des cartons entassés dans un coin.
Mes parents disaient toujours, MAIS IL REFUSE DE SE SOIGNER,et ils levaient les bras dans l'impuissance.Une fois, ma mère a ajouté, MAIS LE PLUS IMPORTANT C'EST DE TENIR,C'EST NOTRE DEVOIR,POUR LUI AUSSI: QUE LA FAMILLE N'EXPLOSE PAS ,NE PAS LUI FAIRE SENTIR QUE NOUS SOMMES MALHEUREUX,QU'IL GÂCHE TOUT.Mais ce n'était pas ça ! J'étais horrifié. Moi non plus ça n'allait pas,si les autres s'étaient remit en question ,peut-être que mon frère serait allé un peu mieux . Mais ma mère s'est tournée vers moi avec compassion Ça ne va pas? Qu'est-ce qui ne va pas? Je me suis mis à hurler.( page 83)....
Enfant, je lis et relis cette histoire qui me parle d'un monde où chacun aurait sa part, où chacun trouverait sa place.
LE FRERE
Alors je me pose des questions bizarres, je me demande si, dans le cas où on aurait été dans une autre famille, et dans un autre monde, si elle avait pu être elle et si j'avais pu être moi, Est-ce qu'on aurait été comme un frère et une sœur - je veux dire, si elle n'avait pas été elle et si je n'avais pas été moi, ceux que nous avons été - est-ce que les autres que nous aurions été auraient pu être frère et sœur ?