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Critiques de Alice Ferney (1075)
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Les Bourgeois

Conteuse hors-pair, Alice Ferney nous revient dans son dernier roman, avec la saga d'une famille, Les Bourgeois, des bourgeois et l'entame avec un décès, le décès de Jérôme Bourgeois, quatre-vingt ans, qui "fut résolument français et provincial", "né chez les nantis et soignant les pauvres". Donc pas "méchant bourgeois".

Né en 1933, il était le fils d'Henri et Mathilde et frère de sept garçons et deux filles: Jules, Jean, Nicolas, André, Joseph, Louise, Claude, Guy, Marie, "Être dix, c'était avancer dans la vie comme une étrave avec derrière soi le tonnage d'une énorme famille".

Sous forme d'un journal, dont les nombreux feuillets auraient été dispersés, et regroupés sans chronologie, Ferney ( probablement la narratrice, une Zelig qui nous interpelle directement dans le récit) suit la trajectoire de cette famille conservatrice de la droite chrétienne, embrassant tout un siècle d'histoire de France et celle européenne. Je dis conteuse hors pair car raconter sur un siècle, aussi clairement, sans ordre chronologique, l'histoire intime dans la grande histoire, relevée d'une multitude de réflexions intelligentes et profondes sur les liens entre les évènements et les émotions, avec un regard critique déroutant, c'est indéniablement du talent.

La famille, le couple étant ses sujets de prédilection, elle nous décortique ici l'évolution des rapports sur trois générations; rien de nouveau mais romancé par Ferney c'est toujours innovative. Elle a presque l'air d'avoir la nostalgie du temps où le mariage était l'unique solution pour une vie commune entre les deux sexes; apparemment il avait plus de valeur et de poids qu'aujourd'hui (".....mariage, qui n'était pas –comme il arrive que le ressentent aujourd'hui les jeunes mariés –la fin de quelque chose, l'aboutissement ou le point final du temps de la passion libre, mais son commencement et celui de la vie commune, la découverte de la sensualité partagée et la création de sa propre existence."). Aussi une certaine nostalgie de l'éducation bourgeoise d'antan, mais l'écrivaine, coquine, après l'avoir vantée, ajoute : "On n'était pas malheureux ! dit Claude aujourd'hui, sans songer une seconde que cette affirmation pourrait bien signifier le contraire de ce qu'elle prétend dire". Elle titille d'autres sujets, comme les droits des femmes, ont-ils vraiment avancé, ou juste changé de perspective ? ou les privilèges acquis de la bourgeoisie du début du siècle, que d'autres classes sociales ne pourront y accéder que tardivement, comme les vacances payés (1936).

Deux autres thèmes récurants,

Le thème de la guerre, toutes ces vies perdus pour rien avec des slogans du genre du général Lattre en Indochine, "Je vous apporte la guerre et la fierté de cette guerre. Notre combat est désintéressé. Nous ne combattons pas pour la domination mais pour la libération".....révoltants,

Le thème de la mort, la fin inévitable pour tous sans aucun échappatoire qui semble beaucoup l'occuper,vu le nombre de fois qu'elle y revient avec des réflexions nuancées, "une abstraction.....un souvenir. Voilà ce que fait de nous la mort."



J'ai trouvé les personnages peu attachants, figés dans leur cadre bourgeois et catho, une rigidité, une perfection ( celle des hommes presque tous vertueux, et surtout celle des femmes, avec au moins un contingent de 9 à 10 mômes, toujours impeccables, super serviables au mari ...., les maris qui les aiment follement après 9 enfants, un conte d'Andersen ....) qui m'a un peu exaspérée. Une rigueur morale qui bien qu'étant leur force fut aussi leur faiblesse. D'autre part la vie d'une famille bourgeoise, de surplus profondément catho sur fond d'histoire de France et d'Europe n'est pas un sujet qui me passionne vraiment, surtout qu'ici c'est un peu long. Donc si ce n'était la plume grandiose d'Alice Ferney et son faux regard impartial qui donne encore plus de pep à son sens critique, je ne l'aurais probablement pas lu.





"L'esprit occidental aime tant les causalités, les explications rationnelles, les fondements."









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L'Intimité

Le dernier livre d'Alice Ferney débute fort, avec un accouchement qui va mal tourner....

À partir de cet accident fatal, l'écrivaine nous ouvre les portes d'une large réflexion sur la condition de la femme mais aussi celle de l'homme et le rapport homme-femme dans nos sociétés occidentales. La féministe, le féminisme puritain, l'homme veuf que la société veut recaser, l'enfant "le must " d'un couple ou d'une femme mariée ou non, l'investissement futur pour le vieil âge, l'importance du contrat de mariage sans lequel à la mort d'un des conjoints celui qui reste est un total inconnu pour les autorités ou les proches...... racontée dans le cadre d'une histoire d'amitié et une autre « d'amour » entre un homme et une femme. Un fort rappel à nous les femmes, que nous sommes encore à la merci d'une société macho, à moins qu'on s'y batte. Ici l'une des battantes est Sandra, une libraire célibataire de trente huit ans qui refuse toute subordination à l'homme et aux conventions de la société. Une femme apparemment libre dans sa tête, libre dans son corps, qui d'une amitié désintéressée va soutenir son voisin Alexandre qui vient de perdre sa compagne en couche, et se retrouve seul avec un bébé et le fils de la défunte. Alors qu'on est ébahi devant la force militante de cette femme, débarque dans l'histoire une autre d'un autre gabarit, et là je ne sais vraiment pas quoi dire........



Ferney comme toujours nous plonge à vingt mille lieux sous les tréfonds de “l'intimité “des relations homme-femme dans nos sociétés occidentales, à l'heure actuelle où le virtuel gère superficiellement les besoins, vite et facilement. Elle décortique à travers de fines analyses sans jamais ennuyer, ni lasser. Dur, dur d'être femme et même homme de nos jours, vu les choix interminables, qui finalement n'en sont pas des vrais......

Un livre dans l'air du temps à la sauce Ferney . En refermant le livre vous n'aurez pas avancé sur le sujet, vous aurez même fortement des doutes sur l'éthique de certains choix qui repoussent les limites de la nature 😁 (“Le sperme pouvait venir directement chez vous, par courrier UPS, accompagné d'un kit “), et vous aurez peut-être aussi la nostalgie des temps anciens où «  on pouvait s'émerveiller de l'ancestral intimité des grossesses », mais en aucun cas vous vous serez ennuyés en compagnie de ces personnages légèrement ou gravement empêtrés dans leurs propres doutes existentielles et leurs contradictions. Je n'avais pas aimé son avant dernier livre Les Bourgeois, mais avec ce livre je retrouve Ferney une de mes écrivaines françaises préférées. L'ironie discrète, impassible, avec laquelle elle nous raconte la dernière partie de l'histoire, et le portrait d'avocate manipulatrice qu'elle nous en esquisse sont vraiment un tour de force. Pour terminer, pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué 😁 et surtout un conseil, ne pas dégoter de conjoint sur des sites de rencontre 😁😁!



« ....tel le vent sur un feu, internet tantalisait ses visiteurs. »



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Deux innocents

“Claire Bodin n'imagine pas que ces parents brûlés, cette directrice vipérine, ces collègues lassés pourraient ensemble lui faire du mal. Comment l'imaginer quand on est sûr de ne pas le mériter ?”

L'Embellie, établissement médico-professionnel accueille des ados en difficulté, trisomiques, entre quatorze et vingt ans. Et c'est là qu'arrive le jeune Gabriel Noblet , un lundi 13 septembre dans la classe de Claire Bodin, enseignante en secrétariat et bureaucratique, qu'il rencontre pour la première fois….À l'Embellie les priorités sont accueillir, aider, ne pas juger, inclure, dans lesquelles s'y retrouve Claire. Pourtant ces priorités disparaissent dans le maelström de parents et enseignants qui sont loin de comprendre ces ados, ne vivant pas dans le même monde qu'eux. Alors que pour Claire ces ados élargissent la perspective sur la condition d'homme, pour les parents ils sont source de souffrance, une souffrance qu'ici va inévitablement engendrer la méchanceté, l'inimaginable ….



Ferney attaque ici un sujet compliqué et douloureux partant de faits réels. Claire est-elle responsable des faits ? Difficile de prendre parti tant les angles de vus sur le sujet peuvent être différents tout en ne se contredisant pas. En faites elle n'a pas de compétences pour enseigner à des enfants trisomiques à part une formation de six mois à l'initiative de l'établissement, ce qui est à mon avis insuffisant. Mais son bon sens, son intelligence et son grand coeur, la rend soucieuse de la liberté et du bonheur de ces enfants sous le joug de notre société standardisée et normative, bureaucratique et oppressante. Pourtant son approche si humain va la mettre dans le pétrin, justement à cause de son incompétence concernant les enfants handicapés, surtout qu'ici il s'agit d'un ado de dix-sept ans. Et franchement , je n'ai pas été vraiment surpris par l'accusation de la mère de l'ado, « on ne les touche ni physiquement, ni sentimentalement. », surtout que par la suite il s'avère qu'effectivement il aurait mieux valu qu'on ne le touche pas. Car l'affection , l'amour ces enfants devraient le recevoir dans la famille, l'école pourrait être éventuellement complémentaire mais dans un cadre plus compétent je suppose. D'un autre côté les réactions de la direction de l'établissement et ce qu'elle exigera de Claire sont aussi exagérés voir ridicules et insensés, comme la condamner à une expertise psychiatrique de quelques séances qui n'a aucune valeur juridique ,n'étant qu'un avis non une preuve.

Le portrait robotique de Claire que dresse Ferney complique encore plus l'approche du lecteur , lectrice à l'événement. Mère parfaite, épouse parfaite, enseignante parfaite, personnage civile parfait, “Elle a toujours eu un bon contact, en général les gens l'adorent,”, ….trouvez l'intrus 😁, puisque malgré cette perfection surestimant le pouvoir de son innocence elle ne tiendra pas la route pour finalement n'attirant ni empathie ni sympathie , du moins pour moi. Comme couple aussi ,Claire et son mari sont parfait , « La confiance est la base du fonctionnement de toute société, ils ne le formulent pas, mais sans y penser, le pratiquent : ils sont spontanément en confiance…… Puisqu'ils ne font rien de mal, ils se sentent absolument en sécurité. ». Ils semblent vivre dans une bulle, un idéalisme naïf vu que la confiance se perd vite en route dans l'état actuel de nos sociétés qui fait rage sur les réseaux sociaux. Car dans notre monde actuel, ni chercher la vérité , ni l'honnêteté ,ni la confiance n'ont d'importance , accuser , agresser, trouver un coupable et le lancer en pâture dans la horde est souvent le but.

Et il y a la Loi, qui souvent transgresse notre logique . Un bon avocat avec un bon plaidoyer et en absence de preuves tangibles peut sauver le pire des criminels, alors qu'un innocent peut être condamné faute de plaidoyer convaincant et de preuves tangibles, et hélas c'en est le cas ici ! Et Claire fera la difficile pour finalement s'en rendre compte….



Le dernier Ferney est intéressant, elle dissèque chaque fait à chaque étape, le choix des mots ici d'une importance primordiale est scrupuleusement faites. Son point de vue concernant La Vérité qui se perd au détriment de ce qu'exigent et convient aux différents protagonistes concernés de l'histoire à part Claire est extrêmement bien développé, argumenté , donnant une idée peu glorieuse de nos sociétés occidentales soi disant civilisées, et basée sur l'Etat de Droit, “Mais que vaut sa vérité ? Dans cette affaire, tout le monde ment, …”.

Mon seul bémol est qu' ici encore l'auteure a utilisé le même style un brin didactique , froid, clinique que celui de son avant dernier livre “l'intimité” , où le sujet s'y prêtait bien. Or ici il est beaucoup plus délicat, la protagoniste est très émotionnelle et nécessite une sensibilité à fleur de peau, que le style tue, rendant les personnages peu attachants,le sujet moins émouvant et donnant à l'ensemble un brin de parfum de thriller américain sans âme, dommage. le style soft de facture classique de Grâce et Dénuement ou de la conversation amoureuse aurait été beaucoup plus adéquat pour nous raconter cette histoire douloureuse. Que mon avis bien sûr.



« Seul est le mot-clef de l'existence…..La vie offre une panoplie de situations, en voilà une, pas la plus marrante, pas la plus légère, mais peut-être la plus profonde pour mesurer son attachement à l'existence. »









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Le Règne du vivant

Ce roman est intéressant à triple titre. C’est d’abord une navigation océanique qui dévoile les beautés de la faune et de la flore, mais aussi les menaces qui pèsent sur leur avenir et donc sur le notre.



C’est un reportage, très journalistique, sur deux associations écologiques. L’une dénonce les crimes contre la nature. L’autre mêne des actions spectaculaires, et parfois offensives, contre les prédateurs, en éperonnant les baleiniers ou en freinant leurs hélices. Eternel débat sur violence et non violence… Alice Ferney présente les arguments des deux parties.



C’est une analyse sur les moyens de communication sociale et la puissance des vidéos. Le XIX fut le siècle de la presse écrite. Le XX celui de la radio puis de la télévision avec leurs multiples « chaines ». Le XXI débute avec internet, les réseaux sociaux, les smartphones qui font de chacun un reporter, un photographe, un cameraman et surtout offrent à tous la possibilité de diffuser instantanément, sans analyse ni recul, sur les réseaux sociaux qui peuvent rendre une vidéo « virale ». Et un virus, comme chacun sait peut être mortel. L’IA (Intelligence Artificielle) commet aujourd’hui des vidéos ayant l’apparence du vrai… chacun a vu le Pape François affublé d’une doudoune ou le Président de la République promu éboueur. Demain offrira bien pire, hélas.



Le règne du vivant scénarise la course médiatique entre les associations écologiques et les dérives de leurs sur enchères … la mort départage les concurrents !



Un récit qui interpelle, qui mobilise, qui alerte et mérite d’être lu largement.



Comme toujours avec Alice Ferney, cette intrigue, fort bien écrite, campe des héros aussi variés qu’attachants, des êtres avec leurs passions, leurs incohérences, animés par une immense générosité. Une lecture inoubliable.



PS : du même auteur : Passé sou silence
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Grâce et dénuement

♫La caravane du sédentaire est la malédiction du voyageur

Ne jure-t-on pas sur les morts, lorsque le vivant exhume sa noirceur ?

Avec le passé qui prédit l’avenir

Si l'enfant savait, voudrait-il encore grandir ?

Mais on a tous les âges, quand on est un enfant des gens du voyage♫

-Abd Al Malik-2019- son Livre-CD "le jeune noir à l'épée "-



https://www.youtube.com/watch?v=F0DfE9laJ5U



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C'est passé dans la Grande Librairie

Quand on a les enfants,

On se demande comment on aime le mari

L'avenir qui leur est échu c'est le présent des parents

Un livre ouvert sur les bouffeurs d'hérissons

Les gens du voyage , les voleurs de poules

Tourner la page, contre-façons, retenez la leçon

Qui vole un œuf à la coq, finira au billard à coup de queue de pool !

Si tu les crois pas tu vas te prendre une torgnole

L'amour vache, effet bœuf, pour revenir au cas décolle

"C'est de la douleur d'aimer, ça c'est bien sûr, mais c'est tout pire de ne pas aimer"

Et c'est comme ça qu'on s'aime

L'amour est enfant de Bohème

Comme ça consomme

On peut compter sur personne

Pour le plaisir des yeux

Un plissé extatique et douloureux

Comme le sourire des saintes

En clair-obscur ou en demi-teinte

Un sourire plus poignant que n'importe quel sanglot

Les enfants se berçaient dans le flux des mots

La grâce des innocents

sans morale et dans le dénuement .....
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Dans la guerre

L’expression « une vie de chien » est souvent employée quand on évoque le sort des poilus durant la Grande Guerre, et Alice Ferney lui fait écho dans ce roman bouleversant qui débute comme « Les Gardiennes » d’Ernest Pérochon, reprend la légende de Rintintin et se conclut comme « un long dimanche de fiançailles ».



Le 2 aout 1914, Jules Chabredoux, paysan landais, est mobilisé et rejoint le front vers l’est. Il laisse derrière lui son épouse Félicité, leur fils Antoine âgé de deux ans, sa mère Julia et son frère Louis trop jeune pour être appelé. Prince, le chien, garde la ferme familiale. Nous sommes loin, très loin de l’invasion, Julia, belle mère caricaturale et acariâtre, harcèle sa bru, et transforme progressivement ce havre de paix en enfer.



Jules subit le premier choc, particulièrement meurtrier, bat en retraite et participe à la victoire de la Marne avant de s’enterrer dans les tranchées où … Prince, son Colley le rejoint, est engagé par le Lieutenant Bourgeois et devient aide infirmier, patrouilleur, sentinelle et surtout le confident de toute la section. Adopté par Brêle, Joseph, et leurs compagnons, Prince court héroïquement d’exploit en exploit et finit par être décoré devant tout le régiment !



Débute 1917, la bataille de Verdun, fatale à Jules.

Puis Le Chemin des Dames, les mutineries, les fusillés. Prince sauve Brêle qui rejoint les Landes, en route vers l’Espagne, et croise Félicité, Antoine et Marie née en avril 1915.

L’armistice en novembre 1918 ouvre une page blanche pour Félicité qui devra refaire sa vie et élever ses deux jeunes orphelins …



En quatre cent pages, compactes car l’auteur ne distingue pas les dialogues du texte, le lecteur participe aux combats et aux doutes de Jules et des hommes de son régiment, tout en vivant dans la ferme des Landes au milieu des femmes et des enfants. Contraste saisissant entre deux univers qui ont parfois du mal à se comprendre mais qui s’écrivent chaque jour ou presque. L’amour et l’incompréhension (nourrie par la presse qui cache la réalité brute à ceux de l’arrière), le deuil et la souffrance des familles apprenant au fil des jours les blessures, les morts, les disparitions sont magnifiquement décrites par Alice Ferney.



Mais son trait de génie, est d’incarner en Prince un observateur avisé qui analyse finement, plus finement que bien des humains, la réalité (particulièrement féroce pour les animaux) et contribue au moral des troupes et à la victoire finale.



Véritable ange gardien, ce quadrupède se révèle être un acteur essentiel et attachant de cet ouvrage original et passionnant qui rappelle que dans la guerre, et pas seulement, l’homme est souvent un loup pour l’homme.
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Grâce et dénuement

Voici un bien joli roman tout aussi beau que profond promettant en toile de fond un grand message de tolérance.

Esther est une bibliothécaire pour qui, le savoir et les livres sont aussi importants qu’un morceau de pain. C’est ainsi qu’elle brave le froid et la misère pour quelques heures de lecture auprès d’une tribu de gitans.

Au-delà des nombreux visages entre ces deux mondes, il y a surtout le visage du cœur qui réconcilie les deux mondes, il y a dans Esther le visage de l’amour, des lettres, de l’ouverture d’esprit, et quand elle commence à lire, c’est un seul et même monde qui enveloppe la rue froide.

Il y a un goût de liberté dans cette histoire, malgré les difficultés, les vols, l'illettrisme, il y a beaucoup de solidarité, et il y a des mots qui bout à bout amènent des phrases, puis des histoires, puis des rêves, puis de l’espoir.

Beaucoup de grâce dans la plume d’Alice Ferney pour qui l’impossibie n’existe pas.

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Passé sous silence

Semblable aux mythes antiques (comment ne pas songer à Electre ?), « Passé sous silence » évoque la tragédie qui opposa le Général de Gaulle au Lieutenant Colonel Bastien-Thiry lors de l’indépendance algérienne.



Drame qui a inspiré nombres d’historiens et de témoignages … au fil des années trois ouvrages m’avaient passionné :

• Un attentat. Petit-Clamart, 22 août 1962, de Jean-Noël Jeanneney, oeuvre récente d’un historien (gaulliste)

• Bastien-Thiry : Jusqu'au bout de l'Algérie française, de Jean-Pax Méfret, hommage d’un militant de l’Algérie française

• Mon père, le dernier des fusillés, témoignage d’Agnès Bastien-Thiry, fille du colonel et pshychogénéalogiste qui lie l’attentat à l’exécution du Duc d’Enghien, le 21 mars 1804.



L’ouvrage d’Alice Ferney s’inscrit dans un autre registre et ne prétend pas être oeuvre d’historien. C’est un roman, qui analyse finement la psychologie des deux héros, le contexte dans lequel ils évoluent, l’évolution des plaques tectoniques qui éloigne progressivement les populations des deux rives méditerranéennes, dévoile les forces et les faiblesses des personnages, rappelle leurs héritages culturels et civiques. Sans prendre partie, la romancière précise les enjeux du conflit, rappelle le drame des pieds noirs et le malaise des algériens.



La romancière imagine les jeux de pouvoir et les intrigues qui animent les entourages du Général et du Colonel. Elle peint leurs couples, leurs familles et leurs amis et les révèle dans leur intimité domestique. Elle rappelle, et dénonce, ce que furent les juridictions spéciales et l’exécution du condamné.



Superbement écrit, « Passé sous silence » m’a bouleversé en remémorant ce drame qui, au delà d’une tragédie vieille de plus de cinquante ans, marque le début véritable de la cinquième république avec l’élection de son président au suffrage universel qui en fut la conséquence immédiate.
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L'élégance des veuves

Valentine, Mathilde, Gabrielle, Clotilde et la petite dernière, la timide arrière-petite-fille de Valentine, qui se rapproche à petits pas de notre époque… Tout le vingtième siècle à travers le regard de ces cinq femmes… Tout change, tout bouge, les technologies, les paysages, les bruits, les mœurs, mais une chose demeure immuable : ce désir inébranlable, opiniâtre de donner la vie, de transmettre avant de tirer sa révérence.

« L’élégance des veuves » est un « livre de filles » qui parle de la magie vitale des enfants, de ce lien charnel, de ce fil invisible qui unit les mères à leurs enfants et qui parfois rend les pères jaloux ; un livre qui parle de ces hommes et de ces maris si forts, si résolus, si énergiques, qu’elles observent amusées, aimantes, vaguement désabusées… « Que les hommes peuvent être bêtes, parfois ! […] les femmes n’ont pas cette inconscience stupide, ou cet égoïsme. Elles savent que l’on a besoin d’elles ». D’ailleurs, les histoires d’hommes sont rarement évoquées. La guerre, par exemple, qui éloigne et tue les enfants, apparaît au détour d’un évènement.

En ce début du vingtième siècle, les gens bien nés (ceux qui le sont moins aussi d’ailleurs), ne se mariaient pas par amour, mais par devoir. Le fameux coup de foudre n’était pas de mise… Valentine, Mathilde, Gabrielle et leurs maris apprirent à se connaître, à s’apprivoiser chaque jour un peu plus. On était alors marié « jusqu’à ce que la mort nous sépare ». L’omniprésent Dieu accompagnait le foyer dans la joie ou dans l’affliction.

Les femmes avaient cette triste habitude de finir leurs vies seules : le mari parti trop tôt, les enfants morts ou ceux qui ont pris un chemin qu’elles ne parviendront jamais à comprendre... Toutes chargées de chagrin et de regrets, mais avec encore tant d’amour à donner, elles continuaient malgré tout, vaille que vaille, leur route. Avec élégance. Beaucoup d’élégance.

Un livre sensuel, plein de respect et de pudeur pour nos aïeules dont les photos couleur sépia traînent encore dans nos tiroirs ou sur nos coins d’étagères.

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L'Intimité

Alexandre et Ada sont sur le point d'avoir un second enfant, mais ce qui devait être un bonheur absolu se transforme en drame dont Alexandre va tenter de se remettre aux côtés d'Alda (je me demande qui dans la vraie vie s'appelle Ada ou Alda, comme le papier aluminium du même nom, enfin presque), mais la jeune femme a une exigence singulière qui perturbe beaucoup Alexandre...



l'intimité homme-femme, la maternité, le mariage, le célibat, l'asexualité, le refus d'enfants, l'homoparentalité, la parentalité et les nouveaux moyens d'y accéder : PMA, GPA, fécondation in vitro et autres sont passés au crible par Alice Ferney qui creuse analyse les sujets sous toutes les coutures (que c'en est assez impressionnant). Il est aussi question de féminisme, de sociologie, d'éthique, de philosophie, et surtout de ce que pense Alice Ferney de ces nouveaux modes de procréation. Une vision par trop conservatrice qui m'a quelque peu gênée même si j'ai apprécié la présentation claire des problématiques, génératrice d'une vraie réflexion.

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Grâce et dénuement

Angéline, ses quatre fils, ses trois brus et leurs enfants, toujours menacés d'expulsion parce qu'ils sont gitans, occupent un terrain abandonné. Esther, ancienne infirmière reconvertie en bibliothécaire, a un projet : lire des histoires aux enfants gitans. Tous les mercredis, par tous les temps, Esther arrive au volant de sa voiture, sort des livres, raconte, montre les images aux enfants de plus en plus attentifs au point qu'ils l'attendent avec impatience jusqu'à essayer de prolonger ces instants de lecture. Les mois passent, grâce à la fidélité dont fait montre Esther, si les gitans la nomment encore gadjé c'est gentiment et avec respect.

Alice Ferney, de sa belle écriture, raconte les conditions de vie et le mépris que doivent supporter les gitans. Grâce et dénuement, un beau roman à lire.
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L'élégance des veuves

Petit par la taille, grand par le talent…



Dans la collection « Un endroit où aller » aux éditions Actes Sud, le roman d’Alice Ferney tutoie effectivement les sommets de la littérature. Comme on le devine en lisant le titre « L’élégance des veuves », certains personnages masculins du roman empruntent une voie trop directe menant tout là-haut vers le repos éternel, laissant sur le bord du chemin des femmes sans repère seules avec leurs enfants.



Ne connaissant pas cette auteure, je dois avouer que durant la première partie du roman, j’ai été plus subjugué par l’élégance de l’écriture d’Alice Ferney que par le récit de la vie de cette élégante femme nommée Valentine. Autant l’écriture travaillée et subtile me fascinait, autant l’histoire de cette femme qui perd son mari et d’autres êtres chers m’a laissée de marbre. Un marbre vraiment très froid, glacial…



Et puis, comme par miracle, la magie a opéré … non, non, le mari n’a pas ressuscité ! Non, je parle d’un effet sur ma personne. Dès que l’on a abordé le destin des nombreux enfants de Valentine et surtout de son fils Henri avec la belle Mathilde, j’ai savouré chaque phrase, chaque mot du récit jusqu’à la toute fin du roman. Un véritable bonheur de lecture malgré la dureté des propos et des vies endurées.



Loin de mes lectures habituelles, j’ai retrouvé l’émotion suscitée par ces sagas familiales bouleversantes comme le splendide « Soleil des Scorta» de Laurent Gaudé ou dans une moindre mesure le poétique «Contre l'art » de Tomas Espedal.



Pour terminer, au-delà de l’histoire émouvante de cette famille, ce roman m’a fait imaginer, comme par procuration d’une certaine manière, la vie incroyable qu’a pu endurer ma grand-mère qui a enfanté douze fois en une vie, douze combats pour donner la vie, perdant malheureusement son mari par la suite, tout cela avec des revenus beaucoup moins confortables que pour la famille bourgeoise du roman.



Rien que pour ce voyage (personnel) émouvant dans le passé, je dis merci à Alice Ferney pour ce court mais sublime roman. A découvrir absolument…





PS : Un petit coucou à ma grand-mère qui me lit peut-être là haut, qui sait !

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L'Intimité

Les premières pages me rappellent combien l’écriture de Alice Ferney est structurée et belle. Au point que je me laisse emporter par ce drame de naissance, puis m’attache à cette voisine libraire, féministe, libre, aux idées intéressantes. Dommage qu’elle soit éclipsée partiellement ! Ensuite, j’ai du mal à comprendre comment un mari accepte le contrat que lui impose sa femme, rencontrée sur site de rencontres. Envie de secouer cet homme qui se laisse dominer par cette tordue qui passe son temps à regarder sur internet tout ce qui est lié à la grossesse et en particulier sur les mères porteuses, considérées comme des matrices. Un présent et futur qui fait peur où ceux qui ont de l’argent et mettent en esclavage les autres. Toujours ce siècle ou l’avoir est plus important que les êtres humains. Dernière page, je me dis : Tout ça pour ça ? Reste que c’est bien documenté et qu’il est important de dénoncer certaines pratiques. N’est pas sans rappeler « Le chœur des femmes » de Martin Winckler. Je l’ai ouvert sans connaître le sujet, seulement pour la belle plume de l’auteur.
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L'élégance des veuves

"Les pensées les plus délicates ne trouvent pas facilement la configuration de mots pour se dire avec délicatesse"...

Et pourtant, Alice Ferney a tout à fait réussi, elle, à décrire ce monde féminin du début du 20e siècle, ce monde où les femmes enfantent, aiment et assistent impuissantes à la mort de ceux qu'elles aiment, mari ou enfants, pour ensuite mourir dans la douleur des couches innombrables ou dans la solitude de la vieillesse.

Quelle humanité chez cette auteure ! Quelle symbiose avec cette vie dévouée entièrement aux autres qu'ont connue les mères de cette époque !

Moi-même suis incapable de trouver cette configuration de mots pour dire la délicatesse inscrite à chaque page; je ne peux que balbutier mon admiration, ma compassion, mon bouleversement face à cette chronique de femmes courageuses qui m'ont profondément marquée. Les trop nombreux enfants qu'elles mettaient au monde, les maris et les fils qui partaient à la guerre (les 2 guerres), les filles qui allaient s'enterrer au Carmel...Quel courage ont-elle dû avoir pour subir toutes ces épreuves !

Et je pense à mes ancêtres, à nos ancêtres féminines qui ont porté sur leur épaule, qui ont tenu dans le creux de leur coeur notre monde.

Pour cette écriture ciselée, pour cet écrin de douceur niché dans la Vie, je remercie Alice Ferney qui me donne la fierté d'être une femme.
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Le Règne du vivant

Cet été. Le hasard d'une lecture fait que j'ai commencé ce roman le jour où je découvris une photo de l'organisation Sea Shepherd montrant la vente promotionnelle d'un requin-renard sur les étals d'un grand supermarché où des mousquetaires jouent de l'épée. Une espèce protégée, il va de soi, qu'il est donc interdit de pêcher mais visiblement pas interdit de vendre si elle a été pêchée par « erreur ». Et ne serait-ce pas là le véritable problème que, à travers cette société pourrie par l'appât du gain, l’entreprise ne s’offusque pas d’afficher de tels étals sauf s'il y a quelques remous médiatiques…



Mais je m’égare, et gare mon regard vers l’autre rive, l’océan est si grand, qu’il me faut revenir au bouquin, et lui rendre hommage. Parce que je ne connaissais pas l’écriture d’Alice Ferney, mais le sujet m’a depuis longtemps intéressé, ayant notamment suivi les frasques et flibusteries de Paul Watson, fondateur de cette ONG. Parce qu’à travers ce roman, il s’agit bien évidemment d’un hommage au courage et à la détermination de cet homme qui à la barre de vieux rafiots n’hésite pas à se mettre en travers de l’économie mondiale, de la toute-puissance des états, et de ces impunis de la mer.



Comme il est si bien écrit, la sauvagerie envers des animaux terrestres est maintenant souvent réprimandée (même s’il reste toujours des progrès à faire, notamment dans l’élevage intensif), mais en mer, les lois semblent être tout autre. La raison en est presque basique : les poissons ne parlent pas, les requins ne crient pas, les baleines ne hurlent pas. Leurs morts se font dans un silence assourdissant, sans que personne ne bouge ou presque (je me mets bien évidemment dans ce silence et cette inaction, puisque apparemment mon seul militantisme est de m’abstenir d’acheter certaines boites de thon parce que leurs pêches non sélectives ramassent dans leur filet, aussi bien des thons que des requins…). Et des images fortes, le roman n’épargne pas mon œil de lecteur avisé. Du sang qui coule, des amas de chair et de graisses qui s’écoulent, l’œil d’un requin qui pleure, ce silence lourd si lourd si lourd si lourd qu’il ne m’en est plus supportable. Rien que pour ces sensations, ce livre est indispensable, histoire de ne pas oublier que les enjeux de la survie de notre écosystème et de notre planète se jouent aussi loin de nos terres, à l’abri des regards, dans les eaux froides et inhospitalières de l’océan. Dans des eaux silencieuses.



Je reconnais, avec une certaine honte, autre époque autre mœurs, que, gamin, il m’était souvent arrivé de prendre une soupe aux ailerons de requin dans les restaurants asiatiques d’antan. J'ai donc contribué à ce massacre. Je reconnais, avec cette même honte, que si j’ai peur des requins, c’est uniquement dû au film de Spielberg, « les Dents de la Mer », qui à l’insu de son réalisateur a tant œuvré pour l’extinction de toutes les espèces de requins. Mais voilà, je ne suis qu’un bison silencieux, lui aussi – ouf – en voie d’extinction, ma voix compte si peu dans cette société-là que j’admire celle de Magnus Wallace ou de Paul Watson. Mais que ne donnerai-je pas pour plonger au milieu des requins ou pour m’approcher dans le silence d’un kayak ces majestueuses baleines et ainsi me sentir si petit face à la beauté de ce monde, le règne du vivant.
Lien : https://www.seashepherd.fr/
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Paradis Conjugal

Déployer une histoire à travers le déroulement d'un film est un procédé peu facile et intéressant. Ferney a entrepris cette tâche, racontant une aventure conjugale actuelle, à travers un film de Mankiewicz datant de 1949 que la protagoniste du roman visionne en boucle depuis trois mois, délaissant le mari. le mari pas content annonce qu'il se barre….

Voilà le scénario de départ du livre d'Alice Ferney.

Avant d'entamer la suite de l'histoire j'ai voulu visionner moi-même le film de Mankiewicz ( disponible sur YouTube ), « Lettre à trois épouses »( titre v.o.), une comédie fabuleuse . Il débute avec Addie Ross , la femme fatale qui envoie la lettre du titre aux trois épouses, et qu'on n'entendra qu'en voix off durant tout le film. Suivent tour à tour trois femmes très différentes, l'Enfant, l'Independante, la Fatale . La lettre perverse annonce aux trois que la dite Addie déguerpit avec un des maris, mais lequel ? Trois types divers de relations de couples, pourtant le doute et la peur d'être quittée saisit les conjointes au même degré, de même qu'elle saisit Elsa, l'ex-danseuse aux quatre enfants, l'héroïne de l'histoire de Ferney.

Elsa qui subit la tragédie du mariage dû à sa longévité , semble chercher les réponses , du moins le réconfort dans cette comédie fabuleuse qui a une dynamique incroyable. le génie de Mankiewicz est d'exposer cette institution sous toutes ses coutures avec vitalité sans jamais tomber dans le mélo et c'est probablement pour cette raison qu'elle le regarde en boucle, « Le film réveille en elle l'énergie primordiale. Elle pense que la sophistication d'une oeuvre insuffle une force vitale à celui qui la contemple. ». Une façon de se rassurer, de se trouver un refuge dans cette vie où tout est éphémère et condamné à disparaître, « Le film produit en elle un tel apaisement qu'il devient un parfait bonheur. Par une alchimie dont elle ne démêle pas les composants, le film remédie à son chancellement intérieur. » Suite à la menace de désertion de son mari , elle s'y enfonce encore plus dans cette dernière nuit pendant laquelle on visionne le film avec elle. La séparation d'un homme et une femme a-t-il forcément une logique comme on le croit ??? Pourrait-il être une erreur, un accident, une folie soudaine sans fondement ?

Entraînée dans la rêverie de ses trois copines du film ( désormais, vu qu'elle les fréquente depuis trois mois 😊) elle s'auto- psychanalyse : que ressent , « à quoi pense une épouse qui craint d'avoir été délaissée ? ». Quand à ses questions sur la nécessité du mariage et les réponses qu'elle en tire , je les ai trouvé, banales , sans intérêt, comme son analyse concernant le personnage de Lora Mae qui perso m'a beaucoup plue chez Mankiewicz.

L'étrange morale du film qui déteint sur le livre est que l'amour a besoin d'être titillé par la menace de la séparation, la perte du conjoint ( du moins ici, peut-être aussi de la conjointe, non ?).J'ai trouvé la fin du film excellent , celle du livre longue et sans intérêt. J'attendais mieux .



Ferney est futée car elle a vraiment déniché un très bon film simple d'apparence , complexe de fond pour y calquer son histoire et lui donner une consistance . Pour moi il a été préférable de voir le film avant et lire le livre après même si dans cette ordre j'ai fait une overdose car Ferney raconte le film en entier jusqu'à ses tout-petits détails, si bien qu'il compose les trois quarts du livre et on perd Elsa dans ses dédales. Si Mankiewicz était encore en vie Ferney aurait été obligé de lui payer une chic somme pour le copyright 😁!

Le style fouillée de « La conversation amoureuse », qui décortiquait avec brio les pensées et les émois d'une relation naissante entraînant à travers des questionnements l'analyse de ses personnages , qui m'avait beaucoup plue, ici m'a lassée, bref avis mitigé.

Un grand merci à Oneeeee, même si le livre ne m'a pas emballée; j'ai adoré le film , que j'ai finalement visionné deux fois , la seconde en lisant le livre 😁!





« Tromper le public est à la base d'une bonne comédie . »

( Ici qui trompe qui ch'uis pas sûr 😁)



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Les Bourgeois

Les Bourgeois, une famille suivie sur plusieurs générations de la fin du XIXe siècle à nos jours, ont les caractéristiques de leur nom. Les plus anciens vont connaître les deux guerres mondiales, certains y mourir prématurément, d'autres les pleurer. Tous auront à coeur de perpétuer la tradition : une manière de vivre avec naturel ce qui est culturel et hérité.



Ces Bourgeois bourgeois, catholiques, de droite, qui pensent qu'il vaut mieux accepter qui l'on est plutôt que prétendre se créer, Alice Ferney les décrit comme : " les représentants d'une époque et d'un milieu typiquement bourgeois, parisien, catholique, très " Action française " comme on le dit maintenant, avec la sévérité de ceux qui viennent après et n'ont guère de mérite, puisqu'ils savent où mènent certaines idées et que l'Histoire a jugé. " Alice Ferney le dit et le répète, il faut se garder de juger les gens qui ont vécu dans un autre temps : « Le présent est lourd et opaque, la teneur des jours n’est pas historique. »



Une famille (la sienne ?) dont l'histoire indissociable de l'Histoire inspire à Alice Ferney de belles et justes phrases sur la mort, la maternité, la transmission des valeurs bourgeoises. Mais elles ne doivent pas cacher le revers de la médaille, ce que ne fait pas Alice Ferney avec une certaine honnêteté, car si elle évoque longuement les aspects positifs de la bourgeoisie, justifie ses choix, comprend ses erreurs, parfois aussi elle se demande dans quelle mesure ce milieu est fermé, obtus, non progressiste.
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Le Règne du vivant

Ni tout à fait la même ni tout à fait une autre, Alice Ferney continue de me surprendre par la diversité des thèmes qu'elle choisit d'aborder dans ses oeuvres. Après « L'élégance des veuves », « Grâce et dénuement », ou « Cherchez la femme » que j'avais adoré, elle nous immerge ici dans une chronique écologiste passionnante.



J'ai différé pourtant plusieurs fois cette lecture, appréhendant un côté documentaire qui ne m'attirait pas plus que ça. Mal vu Lolo, car même s'il est amplement inspiré du réel, « Le Règne du vivant » est bien un roman et se dévore comme tel.



C'est en suivant le regard d'un reporter venu filmer les opérations en cours que l'on embarque à bord du navire Arrowhead. Son irréductible capitaine rappelle sans équivoque l'activiste Paul Watson, co-fondateur controversé de Greenpeace puis de Sea Shepherd, réputé pour sa détermination et ses offensives spectaculaires en faveur de la protection des mammifères marins (« Entre la lâcheté et la violence, je choisis la violence » … pour situer un peu le gars). Les événements que l'on suivra depuis le pont de l'Arrowhead relèvent donc de ce même esprit un tantinet subversif – quoi que légitime à mes yeux – et l'on précisera aux natures émotives ou sujettes à naupathie qu'il est encore temps de rester à quai.



Sans négliger l'approche psychologique dans laquelle elle excelle, ni se départir de son écriture élégante et limpide, Alice Ferney raconte la mission, la cause écolo, l'engagement activiste et ses risques bien réels. Mais en phrases puissantes et particulièrement inspirées, c'est à la poésie farouche des océans qu'elle rend avant tout un hommage universel.



L'épopée se métamorphose ainsi naturellement en un bouleversant plaidoyer pour la défense du monde marin contre la course au profit poussée toujours plus loin.



Récit édifiant et à mon avis essentiel.









Une parfaite synthèse de ce livre, en images et en musique,

à retrouver par ici -> https://www.youtube.com/watch?v=9sN9zRV5sGI






Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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L'élégance des veuves

Avec l’élégance des veuves, me voici à mon troisième titre d’Alice Fernay.



Après quelques hésitations quant au thème, je me suis laissée aller tranquillement à cette lecture.



Au début, tout allait très vite fiançailles, mariages, naissances, mortalité infantile, enchainement des grossesses… le mot qui convient c’est expéditif, pour la suite aussi en quelque sorte ! Je me suis interrogée sur ce que ce rythme effréné allait donner mais l’auteur est rentrée plus précisément dans le sujet.



Dans un contexte de vie en pleines mutations, de guerre aussi, Alice Fernay nous parle majoritairement de deux destins issus de la Bourgeoise qui édictait les règles de vie à la lumière du Catholicisme et qui offrait peu de liberté aux époux de mener leur vie avec indépendance. Les parents arrangeaient les unions.



« Croissez, multipliez-vous, ne vous privez pas l’un de l’autre dit la Bible ».



Alors, les femmes enchainent les grossesses telles des poules pondeuses, elles n’envisagent pas autre chose malgré la mort de certains enfants, elles relèvent la tête pour leur nichée, leur mari.



Une femme ne vacille pas, elle pleure en cachette, mais est vite rattrapée par sa tribu et cet époux qui est un véritable étalon !



Cela conduit immanquablement à l’épuisement de ces mères qui n’ont pas de répit, morts et vies s’alternent souvent et c’est dramatique. Elles aiment leurs enfants mais ont si peu de temps pour chacun.



Le contrôle des naissances n’est pas encore intégré dans les habitudes, alors on se résigne et se révèle encore plus déterminée. Cette mort qui entraîne un sursaut de vie pour soi et ceux qui restent.

C’est là que se niche l’élégance des veuves.



La femme quoique soumise est le pilier de la famille.



Je ne suis pas allée dans les détails de ce récit, car il a été très bien mené par d’autres ami(e)s Babélio.



La fin de cette histoire est heureuse, l’amour est là, dans un couple où chacun respecte son passé et permet d’envisager une destinée commune avec résilience.

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Dans la guerre

La guerre c'est moche.

Et pis ça tue.

Et moi je dis que si chacun lisait ce roman terrible et magnifique, des guerres il n'y en aurait plus.



Qu'il s'agisse de sonder les consciences ou d'évoquer les mochetés contemporaines, la merveilleuse écriture d'Alice Ferney me transporte toujours.



"Dans la guerre" n'a pas dérogé à la règle, et pourtant l'effroyable quotidien des poilus de 14-18 et le sort douloureux de leurs proches consignés à l'arrière n'incitent pas forcément à la jovialité là tout de suite.



« Tout ce qu'ils avaient vécu ! L'oublieraient-ils jamais ? Quels hommes ces souvenirs sanglants forgeraient-ils ? Des brutes ou des sages ? »



Voilà de puissantes et mémorables pages, entre horreur, tendresse et compassion, pour illustrer ces questions et rêver que plus jamais on ait à les poser.




Lien : https://minimalyks.tumblr.com/
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