Aline Richard Zivohlava

« Manipuler des gènes pour soigner les humains, qui pourrait en contester l’utilité ? Mais d’autres applications des nouveaux outils de la génétique sont, on s’en doute, plus problématiques.
Citons celle, par exemple, visant à éradiquer certains moustiques vecteurs de maladies. Pour s’en débarrasser, les chercheurs ont peaufiné une véritable arme fatale.

Grâce au système CRISPR, ils ont construit un dispositif de « forçage génétique » : il s’agit de faire en sorte qu’un gène se transmette à coup sûr à la descendance, de faire passer en force une mutation génétique pour qu’elle s’inscrive dans l’hérédité. L’idée est de transmettre aux espèces dont on souhaite se débarrasser un gène délétère qui signe leur arrêt de mort… ».

Ils s'inquiètent de leur dissémination possible dans l'environnement via le pollen ou les semences, et donc du risque de contaminer les cultures non-OGM ; ils pointent les inévitables résistances aux herbicides et aux insectes qui se développeront chez les mauvaises herbes puisque, tôt ou tard, les organismes s'adaptent ; ils relèvent également la réduction du nombre de variétés disponibles dans le catalogue des semenciers - un problème sérieux quand il s'agit de plantes nourricière, toujours susceptibles d'être attaquées par un pathogène.
Ils contestent en fin l'appropriation du vivant des brevets : les semences OGM sont en effet protégées par des titres de propriété qui génèrent des royalties, et qui font basculer le rapport de force du côté des agrochimiques au détriment des agriculteurs... Autant de critiques que l'on peut discuter, mais qui sont solidement étayées. Ce n'est pas le cas de l'hypothèse d'une dangerosité des OGM pour la santé humaine. Aujourd'hui, rien ne laisse supposer que leur ingestion pourrait être néfaste, même si, en science, l'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence.
Et pourtant le public français y a cru, à cause d'une affaire qui éclate à la mi-septembre 2012...

Cest certain : CRISPR va changer nos vies. Aux Etats-Unis, en Asie et en Europe, des décideurs politiques se sont emparés du sujet. Mais le grand public, notamment en France, reste encore globalement indifférent. Ce n' est pas si étonnant: notre pays a un rapport compliqué à la chose scientifique. Le chercheur a beau être une figure respectable, ses méthodes de travail, son activité, ses résultats et les limites de ces derniers passent au-dessus de la tête d'une majorité de nos concitoyens. L'exemple de l'ADN, au coeur de notre sujet, est frappant. Icône de science autant que de culture populaire, la double hélice est accommodée à toutes les sauces dans la pub, les médias et les discours. Mais combien de Français seraient capables d'en don- ner une définition simple, mais précise? Dans ces conditions, aborder CRISPR et ses énigmes n est pas une mince affaire..

Parasité, un organisme hôte développe des moyens de défense. Son attaquant fait de même. C'est une course aux armements perpétuelle : les scientifiques parlent de pressions de sélection. Le parasitisme fonctionne partout là où il y a du vivant : il semble être un levier important de l'évolution. (212-213)

Le but d'un scientifique est en effet... de faire de la science, c'est-à-dire de se poser des questions et de mettre en oeuvre des expériences pour y répondre (méme partiellement), d'accumuler des connaissances d'explorer en profondeur un domaine...