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Citations de Alvaro Mutis (123)


Alvaro Mutis
Sonata (2)

Por los árboles quemados después de la tormenta.
Por las lodosas aguas del delta.
Por lo que hay de persistente en cada día.
Por el alba de las oraciones.
Por lo que tienen ciertas hojas
en sus venas color de agua
profunda y en sombra.
Por el recuerdo de esa breve felicidad
ya olvidada
y que fuera alimento de tantos años sin nombre.
Por tu voz de ronca madreperla.
Por tus noches por las que pasa la vida
en un galope de sangre y sueño
Por lo que eres ahora para mí.
Por lo que serás en el desorden de la muerte.
Por eso te guardo a mi lado
como la sombra de una ilusoria esperanza.

Pour les arbres brûlés après la tourmente.
Pour les eaux boueuses du delta.
Pour ce qui demeure de chaque jour.
Pour le petit matin des prières.
Pour ce que recèlent certaines feuilles
dans leurs veines couleur d'eau
profonde et sombre.
Pour le souvenir de ce bonheur bref
et déjà oublié
qui fut mon aliment de tant d'années sans nom.
Pour ta voix de nacre rauque.
Pour tes nuits où transite la vie
en un galop de sang et de rêve.
Pour ce que tu es aujourd'hui pour moi.
Pour ce que tu seras dans le tumulte de la mort.
Pour cela je te garde à mon côté
comme l'ombre d'un illusoire espoir.

Álvaro Mutis, Los trabajos perdidos, Era Mexico, 1965.
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Elle regardait son interlocuteur dans les yeux mais ce n’était pas lui qu’elle fixait. En fait, elle semblait chercher avec une astuce patiente et secrète, cet autre être qui nous accompagne toujours et ne monte à la surface que lorsque nous sommes seuls, pour transmettre certains messages, effacer des certitudes fragiles et nous laisser en proie à d’inavouables perplexités.
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Elle avait la rare vertu de transmettre le bonheur, de le faire éclore à chaque instant, comme ça, gratuitement, sans aucune raison, parce qu’il était en elle, dans ses gestes, dans son rire, dans son amour des gens, des animaux, des couchers de soleil sous les tropiques, des occupations et préoccupations des hommes qui étaient toujours inexplicables et enfantines pour elle.
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Nous entrions de plain-pied dans le ton normal de nos relations, fait d'un humour qui pouvait arriver à être macabre, de la constatation allègre des liens qui nous unissaient, et de sautes d'humeur qui, sans nous séparer, finissaient toujours par nous mettre sur des voies opposées.
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SONATE

Pour les arbres brûlés après la tourmente.
Pour les eaux boueuses du delta.
Pour ce qui demeure de chaque jour.
Pour le petit matin des prières.
Pour ce que recèlent certaines feuilles
dans leurs veines couleur d'eau
profonde et sombre.
Pour le souvenir de ce bonheur bref
et déjà oublié
qui fut mon aliment de tant d'années sans nom.
Pour ta voix de nacre rauque.
Pour tes nuits où transite la vie
en un galop de sang et de rêve.
Pour ce que tu es aujourd'hui pour moi.
Pour ce que tu seras dans le tumulte de la mort.
Pour cela je te garde à mon côté
comme l'ombre d'un illusoire espoir.
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CHANSON DE L'EST

A l'angle de la rue
un ange invisible t'attend;
brume confuse, fantôme vague
il te dira quelques mots du passé.
Comme l'eau du ruisseau, le temps
creuse en toi lentement son lit
de jours et de semaines,
d'années sans nom et sans mémoire.
A l'angle de la rue
continuera de t'attendre en vain
celui que tu n'as pas été, celui qui est mort
d'être tellement ce que tu es.
Pas le moindre indice
ni l'ombre la plus légère
pour t'indiquer ce qu'aurait pu être
cette rencontre. Et pourtant,
c'est là qu'était la clef
de ton bref bonheur sur la terre.
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Une bande de perroquets passe dans le ciel en émettant un charabia joyeux qui se perd dans le lointain, telle une promesse de bonheur et de disponibilité sans limites.
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(...)ces instants de la vie où nous nous disons que le coin de la rue que nous n’avons jamais tourné, la femme que nous ne sommes jamais revenus chercher, le chemin que nous avons quitté pour en prendre un autre, le livre que nous n’avons jamais terminé, tout cela s’accumule pour finir par former une vie parallèle à la nôtre et qui, d’une certaine manière, nous appartient aussi. Eh bien, c’est une bonne partie de cette existence laissée de côté qui est remontée d’un coup, dès que j’ai eu Jamil près de moi. À ce moment-là, ce courant parallèle est venu se confondre avec celui de la vie réelle. Et quand, ensuite, il a repris son cours antérieur, il m’a laissé défait et désorienté.
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Irréfléchie, toujours à contre-courant, toujours nuisible, toujours étrangère à ma véritable vocation, mon errance est sans remède.
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Alvaro Mutis
A. M. — Le boom est une invention de journalistes, comme le « réalisme magique »… l’exotisme est la pire des choses ! Il y a eu bien sûr des livres géniaux : Cent ans de solitude qui est une parabole sur l’Amérique latine plus qu’un roman, Conversation dans la cathédrale, qui, par parenthèse, n’a pas servi à son auteur, puisqu’il montre magnifiquement la misère de la politique, il y a Borges que j’admire comme « écrivain pour écrivains », etc., mais quel sens cela a-t-il de joindre Carpentier qui a 80 ans, à Vargas Llosa qui en a 36, Donoso à Cortazar qui est très anglo-saxon… D’autre part, je continue de lire Maria de Jorge Isaac, qui est bien supérieur pas mal de romans du boom ! De plus, je crois que les grands écrivains d’Amérique latine ce sont plutôt les Brésiliens : Machado de Assis, Drummond de Andrade, Graciliano Ramos, surtout Graciliano Ramos.
(Entretien pour Etonnants voyageurs)
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- Fais gaffe à la dynamite mon garçon. C'est comme les femmes. On ne sait jamais quand ni pourquoi elles explosent.
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Sur les mines de Cocora :

Et moi qui suis un homme de la mer, pour qui les ports n'étaient que prétexte transitoire à d'éphémères amours et à bagarres de bordels ; moi dont la chair est encore bercée par le tangage du hunier tout en haut duquel je grimpais pour scruter l'horizon et annoncer les tempêtes, l'approche de la terre, les troupeaux de baleines et les bancs de poissons vertigineux qui venaient à nous comme un peuple ivre ; moi, je suis demeuré ici pour m'enfouir dans la fraîche obscurité de ces labyrinthes où circule un air souvent tiède et humide qui apporte des voix, des lamentations, d'interminables et opiniâtres travaux d'insectes, des battements d'ailes d'obscurs papillons, le cri d'un oiseau égaré au fond des galeries.
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Je m'assieds à l'avant, les jambes pendant au-dessus de l'eau qui m'éclabousse et m'apporte une sensation de fraîcheur qu'en d'autres circonstances j'aurais appréciée plus pleinement. Je pense aux factories et à la mauvaise surprise qu'elles occultent, que je pressens et à propos de laquelle personne n'a voulu me fournir de détails. Je pense à Flor Estevez, à son argent sur le point d'être précipité dans une aventure lourde de mauvais présages, je pense à mon habituelle maladresse pour aller de l'avant dans ce genre d'entreprise, et soudain je me rends compte que tout cela ne m'intéresse plus depuis bien longtemps. Penser à cela me procure un ennui combiné à la culpabilité paralysante de qui sait ne plus être concerné par l'affaire et cherche uniquement la façon de se libérer d'un engagement qui empoisonne chaque minute de sa vie. Cet état d'âme m'est plus que familier. Je sais très bien comment fausser compagnie à l'anxiété et au sentiment d'être en faute qui m'empêchent de profiter de ce que la vie m'offre chaque jour en récompense précaire de mon entêtement à demeurer auprès d'elle.
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Tournent, tournent
les faucons
et dans le ciel immense
montent au vent de leurs ailes.
Tu lèves ton visage,
tu suis leur vol
et sur ton cou
naît un delta bleu infini.
Ô lointaine
toujours absente.
Tourne, faucon, tourne;
tant que durera ton vol
durera ce rêve d'une autre vie.
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Libéré de l'angoisse infinie de son existence et de l'uniforme toujours trop grand qui le faisait paraître plus misérable encore, il révélait dans la nudité de son cadavre comme un témoignage secret de son être qu'il n'avait plu transmettre durant sa vie et qu'il avait souvent cherché à exprimer par les chemins de l'héroïne où il s'était irrémédiablement perdu. La bouche était demeurée entrouverte dans un mouvement semblable à celui des asthmatiques qui cherchent péniblement de l'air ; mais en la regardant de plus près, on voyait qu'un pli de la lèvre supérieure découvrait en partie les dents. Un mélange de sourire et de sanglot semblable au spasme du plaisir. Il portait sur le côté gauche une blessure aux lèvres épaisses d'où gouttait encore un filet de sang noir qui avait la consistance de l'asphalte.
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Nous nous embrassâmes puis, sans dire un mot, nous allâmes nous asseoir au petit bar qu'il y avait dans le jardin, protégé par une marquise envahie de vigne vierge. Elle commanda deux vodka-tonic. Elle me regarda pendant un moment qui me sembla interminable. Puis elle me dit sur un ton ou s'était glissée une inquiétude presque compatissante :
- Je vois. Les choses ne vont pas bien, n'est ce pas ? Non, ne me raconte rien maintenant. Nous avons tout le temps du monde pour en parler. Ce qui m'inquiète c'est de te rencontrer à l'endroit précis ou tu n'aurais jamais dû échouer. Ici, il faut être de passage, c'est tout. Seulement de passage. Mais, dis moi, là, au-dedans, tu sais ce que je veux dire, là, au fond, ou tu gardes tes secrets, comment ça va ?
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Je lui répondis que, comme tant d'autres fois au cours de notre vie et chez tous les êtres humains, la réponse et la solution que nous cherchions pour sortir de l'impasse nous viendraient du hasard, des carrefours insoupçonnés et imprévisibles du temps.
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Les hommes, pensais-je, changent si peu, continuent d'être tellement eux-mêmes, qu'il n'existe qu'une seule histoire d'amour depuis la nuit des temps, qui se répète à l'infini, sans perdre sa terrible simplicité, son irrémédiable infortune.
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Je pense aux cercueils, à leur odeur pénétrante de pin vert hâtivement façonné, à leur charge flasque et laiteuse de sucs en décomposition, et aux éclatements du bois frais qui se répercutent dans la nuit des caveaux comme les coups de feu d'un chasseur ivre.
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Tandis qu'il suivait le lit du torrent, une sourde inquiétude envahissait Maqroll. La présence d'un danger indéfinissable bien que manifeste le replongea dans cet état d'esprit qui lui était si familier, cet abattement, cette monotone lassitude qui lui donnait envie de s'avouer vaincu, d'arrêter là la course de ses jours, tous immanquablement marqués du sceau de ces entreprises où c'étaient toujours les autres qui menaient la danse et y trouvaient leur profit en le faisant passer, lui, pour l'innocent instrument au service des projets d'autrui.
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