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Citations de André Ourednik (28)


Des siècles ont coulé sous les ponts de la Tamise. On a tellement parlé d’utopie qu’elle a cessé d’être une île. Entrée dans le langage courant, l’utopie évoque surtout le futur, maintenant, un futur possible et idéal dont on rêve et où l’on souhaiterait vivre. Le mot « utopie » sous-entend aussi que ce futur n’adviendra jamais.
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Chaque humain porte en soi une question récurrente qui l’engage dans la rencontre de réponses inattendues. Même l’improbable méritait considération. L’instant présent seul peut cristalliser en adéquation ou se ridiculiser dans le décalage.
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L’impossible réalisation de l’utopie du moment présent est devenue plus apparente encore avec l’avènement des téléphones portables. Lorsque vous êtes en face de quelqu’un qui pianote sur un tel appareil, vous savez qu’il n’est pas complètement avec vous ; ce qui n’est pas tragique ; de fait, il ne l’a jamais été. Mais là, ça devient visible et son pianotage met fin à l’utopie de la contemplation, c’est-à-dire à l’idée d’une réunion parfaite d’un groupe d’humains dans le même temple, en train de regarder le même objet, dans une union parfaite de l’entre-soi.
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Plus personne ne lit de livres et le taux de personnes capables de lire tout court diminue chaque jour.
Les étudiants présents dans la salle lisaient pour la plupart et ils se sentirent exceptionnels à ce titre ; ils eurent tort.
De fait, il faut être fou pour continuer à lire, poursuivit Turmdijk. Il existe d’autres moyens que les livres pour conserver la pensée, et ceux-là ont surtout perdu l’avantage de la vitesse d’apprentissage depuis un siècle. 
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De loin, tu entends Thot annoncer l'invention de l'écriture au roi :
– Cette science rendra les Égyptiens plus savants et soulagera leur mémoire !
Mais Amon dit : [...]
– Ton moyen ne sert pas la mémoire, mais la simple réminiscence : tu n'offres à tes disciples que le nom d'une aptitude sans sa réalité. Car, lorsqu'ils auront lu beaucoup de choses sans maître, ils croiront posséder de nombreuses connaissances, et cette présomption les rendra insupportables dans le commerce de la vie.
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C’est aussi ça, l’hypertopie : l’ici et maintenant superlatif, qui ne laisse plus d’espace pour devenir quelqu’un d’autre, trop plein de ses ailleurs, trop plein de ses passés ; un trou noir où le futur s’effondre. Il faut retrouver un moyen de fabriquer le temps !
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Le temple de l’hypertopie s’appelle Internet. Il est le non-lieu de l’ubiquité ; l’utopie de la suppression des distances. En lui, il n’y a plus de lieu : il n’y a qu’un seul, immense « partout ».
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Un mot d’ordre émanant du marketing qui traverse aujourd’hui les institutions publiques et les grands médias, veut que l’on suppose un déficit cognitif chronique chez ceux à qui l’on s’adresse. Le « grand public » serait incapable de s’abstraire de son quotidien pour se figurer une réalité radicalement différente. Tel l’enfant, on devrait le guider à travers les platitudes des références admises pour l’introduire à quelconque chose. A force, ce public devient bel et bien cet enfant, pour qui le scientifique incarne un savant fou et l’artiste une créature hors-sol arrosée aux hallucinogènes.
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Un jour, songea-t-il, le monde entier finira dans l'Omniscience.
Les bureaux se rempliront de gestionnaires qui passeront le reste de l'éternité à définir des processus de remémoration. On ne vivra plus rien, il n'y aura plus d'expériences. on se contentera de patauger dans l'image du monde.
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J’appelle hypertopie l’instant où l’utopie bascule dans le fantasme du lieu total ; dans le fantasme de nous trouver tous dans le même lieu. Pas seulement nous, ici, mais avec la planète entière. Si l’utopie est une réalité songée, possible, souvent imprécise dans ses détails, à savoir sous-déterminée, l’hypertopie est une utopie absolue, surdéterminée, et devenue réalité.
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Si l’Utopie de Thomas More est un lieu géographique précis et qu’elle désigne depuis lors un genre littéraire, ce qui me mène à écrire sur le sujet est la conviction que n’importe quel lieu géographique, comme la Suisse ou l’Europe, est une utopie. Par là, je n’entends pas que ce sont forcément des « non-lieux » mais des lieux fictifs, des lieux qui n’existent que dans une fiction collective.
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L’utopie est […] d’abord un non-lieu, d’où le fait qu’on la regrettera toujours un peu, car elle n’existe pas, ou plus. Thomas [More] conclut à son sujet : « je la souhaite plus que je ne l’espère ».
Mais il y a d’autres lectures possibles du terme utopie. En considérant sa prononciation en anglais – le u se dit comme « you » -, le mot pourrait s’écrire aussi bien utopia que eutopia, orthographe que Thomas utilise d’ailleurs dans l’une de ses éditions. Le u- privatif devient alors le préfixe mélioratif eu- (bien) comme dans les mots eulogy (eulogie) […] et qui veut dire « la belle parole » et euphory (euphorie) qui […] signifie « bien se porter », « être bien portant ». L’utopie désigne donc aussi « le bon lieu », « le lieu où il fait bon être ».
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Metaphoroi signifie aussi « transport en commun ».
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L’Omniscience s’infiltrait quand même un peu par la jointure du scaphandre, il la sentait, la coquine. Ça lui coulait sur la nuque. Renvoyait des flashs de sa sœur assise dans une chambre blanche, ses yeux noir vert rivés sur lui. Coupable de quelque chose, la sœur, de quoi ne lui revenait plus ; l’image flashait seulement en boucle : ce regard et la chambre blanche. Il suivait le fil. La voix de l’opératrice grésillait dans l’oreillette avec le ton d’un flash info d’outre-tombe.
– Et alors, cet E#26 ?
– Ça avance Laje Com, je suis le fil.
Il était conscient qu’elle enregistrait. Surtout pas évoquer la faille ; se donner le temps d’en apprendre davantage. Il les savait capables d’organiser une commission de recadrage pour lui tout seul s’ils en prenaient connaissance et même de le muter. On n’aimait guère les contacts entre l’Omniscience et les plongeurs, dans l’OfMem.
– Votre scaphandre, ça va Goan Si ?
– Oui, ça va.
– Rapportez tout contact avec le Médium. Vous savez que les instances regardent.
– Il en est ainsi.
– Je sais que vous le savez, dit-elle.
Goan Si savait.
Goan Si ne s’appelait pas Goan Si mais Ancel Gombo, du Services des immersions. On avait fabriqué son nom de fonction à partir des premières lettres de son vrai nom et de celui de son unité. On appelait ça un uanid, en d’autres mots un unique anonymous identifier pour les initiés mais ouanid pour l’écrasante majorité de ceux qui oubliaient le sens de l’acronyme. Dans les anciennes bases de données, on numérotait ainsi les lignes des tableaux et ça permettait de retrouver de l’information contenue dans ces lignes. Grâce à son uanid, un humain devenait un sachet de données servile et prêt à s’ouvrir sur demande. Certains appréciaient pour peu que ça les déresponsabilise de leur propre contenu. Tout le monde recevait maintenant ces uanid dans l’Office de la Mémoire.
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- Ton moyen ne sert pas la mémoire, mais la simple réminiscence : tu n’offres à tes disciples que le nom d’une aptitude dans sa réalité. Car, lorsqu’ils auront lu beaucoup de choses sans maître, ils croiront posséder de nombreuses connaissances sans connaître, et cette présomption les rendra insupportables dans le commerce de la vie. 
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L'Art nouveau... [...] Je pense que ça a fait éclore le quotidien. Le quotiden moderne, je veux dire. Les matériaux sériels de l'industrie devenaient vivants, organiques. On retrouvait la vie. Je pense que c'était... une sorte de paix.
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Mais il existe de nombreuses formes d’intelligence artificielle ; de nombreuses façons de matérialiser une manière de voir le monde dans la parole, dans l’écriture ou dans un système de lois. Le monde est traversé de pensées contradictoires, incarnées en autant d’agencements symboliques et machinels.
– Les machines, écrit David Dunn, ne sont pas des objets neutres, mais des vestiges de pensée auxquels la force de l’intention donne une puissance.
Nos intelligences artificielles de la nature sont plurielles. Elles s’affrontent en permanence.
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Renaturer l’intelligence
La loi est un programme exécuté par l’appareil judiciaire d’une société. Comme un code informatique, une loi cherche à régler un maximum de situations effectives tout en demeurant aussi concise que possible.
Mais une loi est toujours dogmatique, car limitée à imposer ses décrets sans prouver leur justesse. Le sens de la loi et sa raison d’être ne sont pas contenus dans la loi, mais proviennent d’un raisonnement mené en amont ; souvent d’une simple tradition dont on a oublié l’origine ou du caprice fiévreux d’un roi. Aucun appareil judiciaire ne contient une loi qui se fonde elle-même. Aucune loi n’est sa propre créatrice. Aucune loi ne naît d’elle-même. Aucune loi ne contient une vie propre. La loi n’est pas physis. La loi n’est pas natura. Toute loi est un artifice. Il n’y a pas de lois naturelles.
Comment, alors, réinjecter de la vie dans une pensée déclinée en préceptes ? Comment faire en sorte que nos mots continuent à porter la vie qui nous a menés à les prononcer, lorsqu’il ne restera d’eux plus que des rayures sur une surface lisse ? Quel shem trouver pour notre golem, c’est-à-dire pour notre informe, pour notre inachevée pensée ? Comment retrouver la nature dans l’artifice de la loi ?
Faut-il commencer en créant une pensée capable de démonter ses propres dogmes ?
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Les deux mélodies fondamentales
Si nous essayions de percevoir le siècle en cours – notre siècle – avec nos oreilles… si nous essayions d’entendre ce siècle, nous entendrions un bourdonnement assourdissant, composé du tambourinage de cent milliards de doigts sur dix milliards d’écrans tactiles ; le cliquetis de leurs ongles, la succion de leurs doigts humides qui se détachent de l’écran. Nous entendrions cette friction des rumeurs propagées à travers les réseaux sociaux, ponctués d’explosions plus ou moins éloignées, du vrombissement des forêts en feu, des eaux de rivières déchaînées et du craquement des banquises. Et dans les fréquences basses, nous entendrions les serveurs informatiques s’essayer à fredonner la syllabe sacrée om̐ dans les alvéoles des datavernes.
À la première écoute, une telle symphonie du siècle sonnerait comme une cacophonie désordonnée. Mais cela fait plus de vingt ans qu’on l’écoute, et deux thèmes musicaux majeurs, deux mélodies fondamentales commencent à s’en dégager : celle de la dégradation de l’environnement naturel, et celle de l’émergence des intelligences artificielles. Si tout va mal, ces deux processus culmineront dans un désastre stéréophonique. Cela pourrait se passer ainsi, par exemple :
L’automatisation des processus de production, de distribution et de vente des produits mènera à la suppression de plus de deux tiers des emplois, y compris dans le secteur tertiaire. La baisse des charges salariales réduira les coûts de production, sans pour autant diminuer les prix. Le capital se concentrera de manière exponentielle dans les mains de quelques individus. Lorsque les masses de consommateurs ne pourront plus payer leurs dettes, elles seront réduites en esclavage et deviendront les jouets sexuels des puissants. Nous vivrons les 120 jours de Sodome à l’échelle planétaire. La planète dévastée par l’extractivisme ne sera plus que terre-morte-eau-morte, à l’exception de quelques jardins paradisiaques habités par les gagnants du processus. Jeff Bezos et Travis Kalanick, les maîtres d’Amazon et d’Uber, entourés de leurs plus proches concepteurs de systèmes et entraîneurs de robots, allongés sur des poufs géants, au milieu d’une ménagerie de paons et d’antilopes transgéniques ; Jeff et Travis assisteront pas écran interposé à un jeu de gladiateurs avec cent mille protagonistes habillés en costard-cravate. Des drones filmeront les détails des combats pour les transmettre en direct. Les plus chanceux des esclaves, parmi nous, s’occuperont de la régie vidéo…
Nous ne sommes bien sûr pas obligés d’en arriver là.
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Depuis les temps immémoriaux,nous cherchons les moyens de nous prouver nous-même que notre pensée n'est pas un artifice.
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