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Les Cordes écarlates de Andréa Deslacs
Dans le corridor, l’effervescence n’était pas propice à la concentration. Acrobates aux bras chargés de vaisselle sale et de bouteilles vides, les serviteurs s’interpellaient en passant la porte de service. L’écho des commandes et des exigences des hauts seigneurs se répercutait tout le long du couloir où les domestiques s’affairaient. Conducteurs de chariots fous, dont les somptueuses cloches métalliques masquaient de mystérieuses victuailles aux fumets pourtant si délicats et suaves, de jeunes marmitons enthousiastes slalomaient entre les hoquets des gens bousculés puis ralentissaient quand le majordome regardait dans leur direction. Soudain débouchèrent de la porte menant à la salle de banquet des danseuses riantes aux corsets indécents et aux parures ensoleillées de paillettes d’or et d’argent. L’une d’entre elles poussa un cri affolé, car le froufrou de sa course joyeuse avait attiré l’attention d’un ours noir. L’animal se leva brutalement, à la grande surprise de son dresseur qui eut du mal à en reprendre le contrôle. Le mouvement de panique des filles aux piaillements de moineaux apeurés se perdit dans le vacarme de deux chariots de viandes se percutant. Le chaos s’empara du couloir de service générant un brouhaha insoutenable. Artzel plaqua contre son cœur son violon blanc. Il aurait aimé se mettre à l’abri de cette confusion, de ce peuple étouffant, de ces gens gesticulant en tout sens, de cette cacophonie. + Lire la suite |