Silvio Berlusconi, homme d'affaires italien, entrepreneur des médias, politicien et ancien propriétaire du club de football Milan AC Silvio Berlusconi est mort ce lundi 12 juin à l'âge de 86 ans.
Surnommé "Il Cavaliere", Silvio Berlusconi a été au coeur de nombreux scandales sexuels et de nombreux déboires judiciaires. Son empreinte est et sera durable tant il incarne les succès et les outrances de l'Italie paillettes.
Pour en parler Guillaume Erner reçoit :
Marc Lazar, professeur émérite à Science Po.
Andréa Marcolongo, journaliste et écrivaine italienne.
Enrico Letta, président de l'Institut Jacques Delors et ancien Président du Conseil des ministres italiens.
#berlusconi #italie #politique
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Difficile de penser sans le temps, mais le temps n'existe pas ; ce qui existe c'est une fin pour chaque commencement, et un commencement pour chaque fin. Les paysans et les marins le savent : on moissonne pour semer et récolter de nouveau, on accoste au port pour lever l'ancre, traverser la mer et accoster de nouveau. Difficile de voir, pour nous qui regardons toujours notre montre, notre agenda, de calendrier, en décomposant l'organisation de notre vie dans le temps, que tout change et qu'en même temps tout reste : "je reste" et "je t'attends" ont la même racine dans les verbe grecs μένω et μίμνω.
Difficile pour nous, mais non pour le grec ancien, cette langue qui percevait non le temps mais le processus, et qui, grâce à l'aspect du verbe, exprimait la qualité des choses qui semblent toujours nous échapper - quand, la question que nous nous posons toujours, sans jamais percevoir comment.
Il s’est fait tard, trop tard, pour nous, linguistiquement, il s'est écoulé trop de temps, et désormais nous ne percevons plus l'aspect des choses et nous ne savons plus l’exprimer grammaticalement dans notre langue. Nous devons donc nous efforcer de trouver une autre façon de dire ce sens particulier de satisfaction ou de réalisation, de manque ou de désir, qui nous protège du pouvoir destructeur ou conservateur du temps.
Telle cette petite fleur, le myosotis, encore appelée "ne m’oubliez pas".
Voir mon premier livre traduit en français est pour moi un pur émerveillement. Parce que La langue géniale est le récit d'une langue, le grec ancien, qui n'a jamais cessé de séduire les hommes et les femmes de toutes les époques et de toute provenance, par sa grâce, son élégance, et surtout son étrangeté.
Traduire signifie, selon le latin, prendre le lecteur par la main, l'accompagner au-delà de sa façon de penser par le biais d'une langue inconnue afin de dévoiler la magie, lever le voile sur le sortilège des mots et les faire devenir une réalité surprenante, une passion.
C'est pourquoi voir mes propres mots nés dans une langue, l'italien, pour raconter une autre langue - ce grec que Virginia Woolf appelait en 1905 The magic Language -, accoster dans un nouveau port, celui de la langue française, tient pour moi de la véritable magie !
« Le grec ancien se préoccupait peu, voire pas du tout, du temps. Les Grecs s’exprimaient en prenant en considération l’effet des actions sur le locuteur. Eux, qui étaient libres, se demandaient toujours comment. Nous, qui sommes prisonniers, nous nous demandons toujours quand. »

En bonne originaire du Chianti, je voudrais parler du vin dans la Grèce antique.
Appelé Nectar des dieux, Sang de Dionysos ou Ambroisie de l’Olympe, il avait, nous l’avons déjà dit, un degré d’alcool très élevé : cela était dû au soleil brulant de la Grèce associé à des vendanges très tardives, lorsque les feuilles des vignes étaient déjà tombées.
La consommation de cette boisson remonte à l’époque mycénienne, vers la fin du IIe millénaire avant J.-C., comme le prouve la découverte de cruches dans lesquelles les analyses chimiques ont confirmé la présence de vin.
[…] On dit aussi qu’il était d’usage de le boire coupé d’eau, non seulement, pour d’évidentes raisons d’ordre public, mais aussi pour une question d’identité : les Grecs étaient horrifiés par les barbares qui, eux, buvaient le vin tel quel, pur. Par exemple, au chant XI de l’Iliade, Nestor offre au médecin Machaon du « vin de Pramnée » (c’est-à-dire en provenance d’Icarie et considère ainsi comme le premier « vin AOC » de l’histoire) « mélangé à de la farine blanche et à du fromage râpé ». Un délice, en somme : les héros d’Homère dégustaient cette mixture quand le moment était délicat, lorsqu’ils étaient blessés ou après des combats exténuants. Elle portait même un nom, cette pâtée : on l’appelait cycéon (ϰυϰεών)
En écrivant, je me suis rendu compte que la fracture du sens entre les Grecs et nous se trouve entièrement là, à l’époque hellénistique et celle de la chonia — et pas dans les salles d’un quelconque lycée classique d'aujourd’hui. Ce qui a été oublié durant cette phase de l’histoire du grec, est, ironie du sort, exactement ce dont j’ai tâché de ranimer la mémoire en écrivant ce livre. Peut-être que le grec ancien est mort au moment même où les Grecs ont arrêté de penser comme des Grecs anciens. Ou peut-être qu’il a commencé à mourir à ce moment-là; bien que, autre ironie du sort, le verbe grec thneskô, "mourir", n’admette que l’antique aspect du présent, parce que ou l'on est vivant ou on ne l’est plus.
Ce qui est certain, c’est que lorsqu’une langue devient la langue de tous, elle devient en réalité la langue de personne.
Pourquoi exercer une profession signifie-t-il faire quelque chose pour vivre et non faire quelque chose pour se ruiner la vie en angoisses et en soucis au nom d’un travail et d’une perfection établie par d’autres ?
Quelle différence y a-t-il entre être connectés et être unis ? [...]
Sommes-nous à l’époque de la connexion infinie ou bien de l’interruption perpétuelle ?
L’un des maux les plus graves de notre époque, dont dépendent beaucoup de nos tristesses et de nos apathies, est le fait que nous ne croyons plus à grand-chose, comme le disait déjà Jean d’Ormesson. Que personne ne croit plus à rien sauf, paroxysme de la solitude, à lui-même. L’avenir a cessé d’être une invitation et une surprise et la vie est devenue une lente marche sans ancrage intérieur jusqu’au dernier de nos jours.
mais je ne suis pas certaine que la plus grande menace contre l'Antiquité vienne un jour de la terre qui l'a produite ; je crains plutôt que l'incurie des hommes qui en ont hérité produise l'ultime tremblement de terre transformant les vestiges de la Grèce antique en décombres.
À force de détruire, nous serons nous-mêmes devenus des ruines.
Juger quelqu'un sur l'intention que l'on attribue à ses actes, et non sur ses actes réels : la justice des tribunaux ne s'accorde pas le luxe de faire le procès de l'intention, et moins encore la mémoire de tout un peuple. Mais c'est un luxe que s'attribue parfois le tribunal de la conscience humaine.