Does magic require painstakingly memorized spells, or candles and herbs? Is it powered by nature, by gods, by the wielder's own life energy? There are as many kinds of magical systems as there are books that feature magic. In this event, you'll hear about how these fantasy authors developed magic systems for their books.
Featuring Evan Winter, Andrea Stewart, M. A. Carrick, and Gareth Hanrahan
— Tu voulais me voir ?
La voix de Phalue retentit au-dessus de sa tête.
Ranami posa son livre et se leva pour passer les bras autour du cou de Phalue. Elle sentait légèrement le savon et la sueur. Elle avait dû courir pour venir la rejoindre.
Phalue serra brièvement Ranami contre elle avant de reculer. C’était comme ça chaque fois qu’elles s’enlaçaient, depuis quelque temps, aussi fugace que la visite d’une abeille à une fleur.
— J’ai quelque chose à te demander, dit Ranami.
Phalue croisa les bras.
— Tu ne crois pas que tu m’en as déjà demandé assez ?
Ranami ne connaissait que trop bien ce ton. Elles allaient se disputer. Phalue fonçait déjà dans cette direction-là et, une fois qu’elle était lancée, rien ou presque ne pouvait l’arrêter.
Ranami tenta malgré tout.
— Est-ce que j’ai fait quelque chose qui t’a mise en colère ?
— Ce n’est pas aussi simple que ça. Il ne s’agit pas de ce que tu as fait, ou même de ce que j’ai fait, moi. Évidemment, que je suis en colère, mais essaie de voir les choses de mon point de vue. Je t’aime. Je déplacerais des montagnes pour toi et, apparemment, j’irais jusqu’à trahir l’empire.
Ce que je ne voulais pas admettre, c'était à quel point mes actes avaient répandu la souffrance. Pour ça, il a fallu que j'examine mes convictions. On se raconte tous des histoires ; on croit savoir qui on est ... dans ma tête j'étais toujours l'héroïne. Sauf que non. En vrai je n'étais pas l'héroïne que j'aurais dû.
La réalité était une cruelle maîtresse, mais personne ne pouvait rien lui refuser.
𝑼𝒏𝒆 𝒗𝒊𝒆 𝒅𝒆 𝒑𝒍𝒖𝒔. 𝑪𝒆 𝒏'𝒆́𝒕𝒂𝒊𝒕 𝒑𝒂𝒔 𝒈𝒓𝒂𝒏𝒅 𝒄𝒉𝒐𝒔𝒆, 𝒋𝒖𝒔𝒕𝒆 𝒖𝒏𝒆 𝒗𝒊𝒆 𝒎𝒊𝒏𝒖𝒔𝒄𝒖𝒍𝒆 𝒇𝒂𝒄𝒆 𝒂̀ 𝒕𝒐𝒖𝒕𝒆𝒔 𝒄𝒆𝒍𝒍𝒆𝒔 𝒒𝒖𝒊 𝒂𝒗𝒂𝒊𝒆𝒏𝒕 𝒆́𝒕𝒆́ 𝒑𝒆𝒓𝒅𝒖𝒆𝒔, 𝒎𝒂𝒊𝒔 𝒄'𝒆́𝒕𝒂𝒊𝒕 𝒅𝒆́𝒋𝒂̀ 𝒄̧𝒂. 𝑼𝒏𝒆 𝒗𝒊𝒆 𝒄̧𝒂 𝒇𝒂𝒊𝒔𝒂𝒊𝒕 𝒖𝒏𝒆 𝒔𝒂𝒄𝒓𝒆́𝒆 𝒅𝒊𝒇𝒇𝒆́𝒓𝒆𝒏𝒄𝒆 𝒂̀ 𝒄𝒆𝒍𝒖𝒊 𝒐𝒖̀ 𝒄𝒆𝒍𝒍𝒆 𝒒𝒖𝒊 𝒍'𝒂 𝒗𝒊𝒗𝒂𝒊𝒕.
— L’empire a été fondé pour sauver ce même peuple de l’emprise des Alanga. À présent les sans-éclat veulent l’affranchir de la mainmise de l’empire. Qui, ensuite, sauvera le peuple des sans-éclat ?
— Les Alanga ne reviendront pas, quoi qu’en dise l’empereur. Ses concepts sont des jouets pour lui, pas une armée. Ce n’est pas un protecteur bienveillant ; c’est un bricoleur, et c’est avec nos vies qu’il bricole.
J’étais jeune mais je voyais bien qu’elle l’était encore plus. Elle avait toujours l’énergie de croire en ses idéaux.
— Qu’est-ce que la rébellion compte faire de tout ce peuple une fois qu’elle l’aura libéré ? S’il n’y a plus d’empereur, qui nous dirigera ?
Elle leva le menton.
— Nous nous dirigerons nous-mêmes, par une assemblée d’élus représentant toutes les îles.
Je n’en demandai pas plus. Je savais reconnaître du prosélytisme quand j’y étais confronté.
Une fois satisfaite, je me mis à graver les symboles dans l'os. Ce n'était qu'un concept rudimentaire, que mon père aurait estimé de troisième niveau, au mieux. Cependant même ses concepts de troisième rang savaient en réparer d'autres. J'avais oublié la joie que j'éprouvais à me consacrer à cette tâche et à trouver une solution comme on assemble les pièces d'un puzzle. J'y voyais une logique et une simplicité qui manquaient à la politique. Je ne pourrais jamais satisfaire tous mes sujets, quels que soient mes efforts. Là, en revanche, j'avais soumis ce problème à ma volonté. Je comprenais un peu mieux pourquoi mon père s'était enfermé avec ses expériences, laissant à ses concepts le soin de gouverner l'empire. Les gens étaient compliqués, inconstants, déloyaux. Ils mentaient et trahissaient.
J’observai l’effroi sur ses traits. Avait-elle vu la même chose sur mon visage quand j’avais découvert que ma pierrevive avait disparu ? Soudain, sans plus y réfléchir, je jetai Philine et la lance par-dessus bord, juste avant de franchir la digue. C’était aussi facile que de remettre un poisson à la mer.
Aussitôt cette force étrange me déserta. Je m’effondrai sur le pont du bateau, le souffle court, la gorge en feu et les yeux rivés sur mes voiles tandis que le vent nous entraînait vers le large.
Mephi s’approcha doucement. Il posa les deux pattes sur mon genou avec un air très solennel sur son petit museau moustachu. À son menton sa fourrure était tachée de sang.
— Pas bon, couina-t-il d’une voix gutturale en tapotant ma jambe. Pas bon. Une sévère correction aux mains des Ioph Carn, je pouvais le supporter. Me faire chasser du port comme un malpropre et perdre mes dernières poignées de pierrevive, ça restait encore dans mes cordes. Ça, en revanche ?
Quelque chose avait changé entre le souvenir et sa chute, même si elle ne savait pas exactement quoi. C’était un peu comme si elle avait tiré le rideau et qu’elle voyait enfin le palais. Le monde ne se limitait pas à l’intérieur du palanquin.
À mi-chemin du village, là où le sentier bifurquait juste au-dessus de l’océan, Sable s’arrêta un instant. Les embruns déposèrent des baisers sur son visage tandis qu’elle sondait l’horizon. Les récifs acérés qui entouraient Maila surgissaient de l’eau çà et là, comme la crête de quelque animal étrange. Au-delà, c’était la mer Sans Fin qui guettait. Alors Sable fut frappée par une idée qui lui coupa le souffle aussi violemment que sa chute.
Que faisait-elle sur cette île ? Pourquoi personne ne cherchait jamais à en partir ?
Mon père régnait sur l’empire par procuration. Son pouvoir et ses ordres étaient répartis entre ses quatre concepts les plus complexes : Ilith, haut-concept espion ; Uphilia, haut-concept marchand ; Mauga, haut-concept bureaucrate ; et Tirang, haut-concept guerrier. C’était sûrement pour ça qu’il gardait si jalousement le secret de sa magie.
Si je me montrais assez futée, assez prudente et assez soigneuse, je pourrais modifier les ordres inscrits sur les éclats d’os qui animaient ces quatre concepts. Alors ils m’obéiraient, à moi. Mon père estimait que je n’étais pas à la hauteur, que ma mémoire était défectueuse. Mais moi, je savais qui j’étais. J’étais Lin, la fille de l’empereur.
J’allais lui montrer que même des filles détraquées peuvent prendre le pouvoir.
L’amour m’avait endommagé le cœur, y laissant une douleur lancinante qui ne s’effacerait jamais. Je n’imaginais pas ce que serait ma vie sans l’espoir de la retrouver, mais j’allais le découvrir. Il le fallait bien - Jovis