Seul Harald, le fils du premier mariage de Magda, a survécu. Le 28 avril, trois jours avant de se donner la mort, sa mère lui écrivit une lettre qu'elle confia à l'aviatrice Hanna Reitsch. Miraculeusement, et après bien des péripéties, Harald la reçut dans sa prison anglaise:
" (...) Tout être humain doit mourir un jour. N'est-il pas plus beau, plus honorable, et plus courageux d'avoir une vie brève, que de vivre longtemps dans des conditions ignominieuses? (...)"
Elle a placé sa foi dans une chimère, le national-socialisme, qui a été utilisée pour bâtir un régime inhumain et barbare. Elle prend conscience des crimes de ce régime, à l'approche de sa chute, surtout parce qu'elle craint la vengeance des vainqueurs. Elle considère surtout ces crimes avec l'oeil des vainqueurs. Mais cette prise de conscience s'accompagne d'un dilemne intérieur impossible à résoudre. Les crimes et l'inhumanité du régime et de ses acteurs - dont Goebbels et Hitler- lui sont évidents, mais elle n'arrive pas à rejeter les idéaux auxquels elle a cru, à créer une rupture émotionnelle. (...) Pour échapper à ce conflit intérieur, Magda se drape dans une posture idéaliste: le sacrifice.
A l'automne 1934, les soupçons de Magda vont se confirmer. Par hasard, elle va découvrir qu'il la trompe, et qu'en plus il amène ses petites amies sous leur toit.
Il est toujours difficile d'imaginer Goebbels comme un homme exerçant une attraction érotique sur les femmes, Goebbels avec sa petite taille, chétif, boiteux, sa grosse tête avec un long nez, ses lèvres minces et son visage ridé. Rajoutons qu'il est toujours habillé de façon étriquée.
Avec Goebbels, la vie lui semble pleine de promesses, de rebondissements.
Accepter le mariage avec Quandt met fin à toutes ses incertitudes, et lui permet d'accéder à un milieu social qu'elle ne pouvait qu'envier jusque là.
Le rôle de Magda en tant que mère et femme, ainsi que son comportement, doivent évidemment être analysés à la lumière de la situation sociale des femmes de cette époque. Sa dépendance sociale ou psychologique à l'égard de son époux ne constitue pas une exception. il est toutefois surprenant qu'une femme de son intelligence ait, à ce point, laissé d'autres personnes diriger sa propre vie.
Prendre conscience de la barbarie qui l'entoure équivaudrait à remettre en question le nazisme, et donc à perdre ses repères ainsi que le soutien de Hanke ou de Hitler. Tous ses liens avec un passé plus humain ont été coupés. Il lui est à présent plus facile, pour demeurer en compagnie des puissants, de fermer son cœur et son esprit aux questions sensibles.
Magda termine en expliquant que tout a été prévu pour la mort des enfants. Elle essaye de se réconforter en disant:
"...Je crois en la réincarnation. Ils ne mourront pas vraiment, aucun de nous ne meurt vraiment...nous traversons juste une porte apparemment sombre par laquelle nous accédons à notre prochaine vie".
Elle prend conscience des crimes de ce régime, à l'approche de sa chute, surtout parce qu'elle craint la vengeance des vainqueurs.
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En cas de victoire de ce même Reich, elle n'aurait vraisemblablement rien remis en question, en dépit des atrocités. L'effondrement du régime et son propre désappointement ne change rien au fait qu'elle se sente toujours liée au troisième Reich. Elle participait de ce monde, auquel elle a servi d'icône, et l'idée de vivre dans une autre société lui est impensable.