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3.76/5 (sur 83 notes)

Nationalité : Italie
Né(e) à : Rome , le 13/06/1914
Mort(e) à : Rapallo , le 9/03/1998
Biographie :

Anna Maria Ortese est une romancière, essayiste, journaliste, nouvelliste et poétesse italienne.

Il est peu d’écrivains italiens contemporains dont la destinée ait été aussi singulière que celle d’Anna Maria Ortese, née à Rome le 13 juin 1914, morte à Rapallo, près de Gênes, le 9 mars 1998. Parfois célébrée comme la plus grande romancière de la péninsule après Elsa Morante, dont elle partagea bien des obsessions et des colères, elle fut périodiquement oubliée, périodiquement redécouverte. Avant l’éclatant succès critique et public de ses derniers livres, qui ne fut peut-être qu’une autre forme de malentendu, elle pouvait légitimement se considérer comme une étrangère dans son propre pays. Étrangère, d’abord, parce que venue d’un Sud pauvre et méprisé, celui des lieux de son enfance et de son adolescence : la Libye et surtout Naples, « Tolède » imaginaire, ville synonyme de misère mais aussi de puissance vitale, que son extrême sensualité ne rend pas moins surréelle. Dans le quartier du port, la jeune fille, cinquième enfant d’une famille partageant une pièce unique, découvrira les œuvres qui la façonneront durablement : les romantiques anglais, Poe et Katherine Mansfield. En 1933, à la mort de son frère Manuel (premier d’une longue suite de deuils) son désir d'écrire se réalisera et Massimo Bontempelli, maître du « réalisme magique », l’aidera quatre ans plus tard à publier un recueil de nouvelles totalement incompris, Angelici dolori (Douleurs angéliques).
On pourrait lui trouver des sœurs chez Sylvia Plath, Emily Brontë, Alejandra Pizarnik ou encore Silvina Ocampo.
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Citations et extraits (48) Voir plus Ajouter une citation
Créer, c’est une forme de maternité : cela éduque, rend heureux et adulte dans le bon sens. Ne pas créer, c’est mourir et, d’abord, vieillir irrémédiablement.
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Il y a des doigts, c'est-à-dire des cheminées, et il y a des yeux et des oreilles, et les yeux et les oreilles ce sont les gentilles-jaunes fenêtres de Paris, dans le soir d'août, à l'écoute de toute chose, pleines d'un regard de passion pour toute chose. Et de la tête aux pieds de ces maisons-magiciennes, de ces maisons de l'autre monde -- le monde humain partout disparu --, crient, résonnent, chantent toutes les couleurs de l'écharpe d'Iris, toutes les couleurs qui sont dans l'arc-en-ciel de Paris. La plus forte en est la jaune ; comme il sied en l'honneur du gris, mais le rouge se montre à son tour à l'improviste aux rideaux des fenêtres et des magasins d'un immeuble-palais, un rouge laque, un rouge rubis, et soudain, d'un autre endroit de la rue -- de la place, du pont ou du bois --, des troupes de turquoises font mouvement à l'assaut du téméraire, épaulées par des verts et des violets qui se confondent, à la faveur de l'ombre avec le vert du fleuve. Depuis le lointain, depuis le fleuve, s'avancent des roses et des blancs, et bientôt la bataille des couleurs fait rage sur le Paris du crépuscule. C'est à ce moment-là qu'apparaissent ses réverbères de perle noire. p 34
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Ta bestialité, ton néant substantiel, m’ont soustrait à toutes les merveilles et à toutes les joies auxquelles j’étais voué de par ma naissance, beauté, génie, distinction. Je me suis perdu avec toi, qui ne possèdes rien.
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En quantité désormais apocalyptique, ils voyagent sur toute la terre dans des wagons plombés où ils perdent connaissance, pleurent ou meurent comme, autrefois, les prisonniers de guerre ; puis, s’ils parviennent à rejoindre les abattoirs, ils sont introduits dans des machines à tuer d’où ils sortent déjà prêts pour les restaurants de luxe ou les sandwicheries. Notre ventre, le ventre de cette génération occupée à la satisfaction la plus complète possible de sa propre liberté physique — et ceci d’un continent à l’autre —, se nourrit et se satisfait délicieusement de l’horreur subie par les animaux. Combien d’animaux ? On ne peut plus les compter.
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Je n'ai pas vu beaucoup d'oeuvres du Greco, mais je suppose que c'est d'un de ses tableaux qu'était descendu, l'autre jour, le couple de jeunes hommes assis à quelques mètres de moi, sous les miroirs.
(...) Des voix comme des joyaux secs et purs dans la poussière. Ensuite la beauté. Les jumeaux sont grands, noirs de partout sauf de peau, laquelle a des nuances grises et vertes. Les figures sont latines, mais émaciées, allongées, avec des yeux, des nez et des bouches d'une ligne pure, mais dans une immobilité byzantine, à l'intérieur d'une fureur glacée ; grands, calmes et tristes ; non plus des figures : des pensées. Ils sont calmes et beaux ; grands, calmes et tristes. Ils discutent, quoique dans un chuchotement. Ils ont des regards comme chez Picasso : taillés en deux ou trois facettes d'attention, de sévérité, de silence. p 57
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«Non… ce n’est pas de ça que tu dois avoir peur », poursuivit-il en plissant le front à cause du léger effort qu’il devait faire, de temps en temps, pour se rappeler, comme pour prendre acte de ces changements, et distinguer entre ces superpositions continues de réel et d’irréel, « pas de ça, Ilario, mais de ton esprit même, comme moi du mien. Il y a quelque chose que nous ignorons, que nous ne voulons pas savoir, il y a quelqu’un de caché, qui nous empêche de regarder… Il y a une tromperie au détriment de personnes faibles… Il y a, dans notre éducation, quelque erreur de base, qui coûte du tourment à beaucoup, et c’est ce que j’entends assainir. »
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Mille jeunes filles dansent au Kremlin

"Elle est longue, l'histoire russe, dis-je.
-Longue et obscure, répondit Alexandra.
-Vous avez eu beaucoup de victimes.
-De toute sorte. de la faim, de la tristesse, du sommeil. Il n'y avait que la neige, alors, et sur la neige l'image du Christ.
-Vous détestez le Christ, à présent ?
-Ce n'est pas ça, dit alexandra. Nous cherchons seulement à être meilleurs : plus actifs, plus honnêtes, plus rigoureux, heureux aussi; nous cherchons à ressusciter une image , qui était détruite. Notre image de femmes, d'hommes. ce n'est pas facile. Mais nous n'avons pas d'autre devoir que celui-là; vous aussi en occident, je suppose.
-Oui ", dis-je. et il me sembla qu'il aurait dû en être ainsi, même si je savais que chez nous cette conception était absolument impossible.
Inquiète, je voulus me lever. tandis que je causais avec Alexandra, mon regard était toujours là-bas, sur ce jeune peuple qui se mouvait avec la grâce indicible des colombes. Il y avait une profonde barrière entre ces jeunes filles et moi, un mur invisible entre ces jeunes existences et la mienne, entre cette image merveilleuse et notre Occident; pourtant il me semblait savoir qu'il devait y avoir un moyen pour ouvrir un soupirail sur ce monde, pour le comprendre, entendre ses raisons. Pour savoir si, finalement, il ressemblait à notre monde.

(p. 122)
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Ce n’était pas tant la peur du silence, de la nuit lointaine qui la dominait que cette peur de soi impossible à affronter.
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Comme toutes nos journées, c’est-à-dire la vie, la sombre mer qui nous entoure change même de substance, dit-il, au point de se transformer, c’est le cas de le dire, en air trépidant. Et seulement parce que la pensée a entrevu la part manquante de soi, beauté ou monstre, n’importe. Oui, il y a du vrai dans ce que tu affirmais toi, il y a un instant, Daddo, sur l’inexistence d’une véritable ligne de démarcation entre réel et irréel. Chaque chose, fût-elle à peine pensée, est aussitôt réelle. Ce dont nous avons besoin, voilà ce qui est réel; et pour cela nous pouvons même mourir, ou permettre à d’autres de mourir. Notre mort, ou celle d’autrui, n’a plus d’importance.
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Réfléchis, pensif Lecteur, à l’étroitesse mentale particulière du jeune architecte, où cependant se niche une générosité que lui-même, avant de débarquer sur cette île douloureuse, ignorait. Ensuite, tourne ta tranquille raison, toi qui es sauf, vers l’effrayante vérité de l’âme, qui est ici, partout, et nulle part, et cela tandis qu’un jeune corps avance, prend une certaine direction, une autre, où le mènent les nouvelles questions de son esprit. Mais qu’est-ce qu’un corps devant ce qui le conduit et que ce corps, ces mains, ces yeux ont le simple devoir d’exprimer ? Et qu’est-ce que le temps, où de tels actes, de telles pensées se démêlent ? qu’est ce que l’espace, sinon une convention ingénue ? et une île, une ville, le monde même avec ses tumultueuses capitales, que sont-ils d’autre sinon le théâtre où le cœur, frappé de remords, pose ses ardentes énigmes ? Alors, ne t’étonne pas, Lecteur, si la maladie (ainsi pouvons-nous appeler la pensée), qui depuis longtemps menaçait notre comte, mort vivant dans sa classe, a explosé sous les formes terribles que tu vois, en révélant la souterraine mélancolie, la cruelle exigence du réel. C’est pourquoi, du pré et du bois, de la salle et du puits, de la tempête et du beau temps, des rapides nuages d’avril et de la clôture de novembre, qui ainsi se confondent à la fin de notre histoire, ne cherche pas la cause, et reconnais en eux, plutôt, le cheminement résolu, et seul vrai, de l’âme, d’entre les choses qui ont pris son apparence jusqu’ici, et pleines de trouble et de peur, l’imitent.
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