Les souvenirs, on apprend ça en psychiatrie, sont des éléments fascinants. Ils sont partiels et partiaux, évoluent avec le temps, et il est difficile de savoir pourquoi on se souvient d'un point plutôt que d'un autre.

L’enfant : Je veux voir ma mère.
Dr Schreiber : Nous en avons déjà parlé. Il est encore un peu tôt pour voir tes parents. Tu sais pourquoi ?
L’enfant : Parce qu’ils ne veulent pas me voir.
Dr Schreiber : Et pourquoi est‐ce qu’ils ne voudraient pas te voir ?
L’enfant : Je ne sais pas.
Dr Schreiber : Réfléchis, je suis sûr que tu as une idée.
L’enfant : Non. Je ne sais pas. Je veux un bonbon.
Dr Schreiber : Tu ne peux pas avoir de bonbon pour le moment, nous n’avons pas terminé. J’aimerais que tu me dises pourquoi, à ton avis, tes parents n’ont pas envie de venir te voir.
Note : L’enfant lève enfin les yeux et sourit.
L’enfant: Parce qu’ils ont peur de moi.
Note : L’enfant ne parle pas davantage et reprend son dessin.
Note : Depuis son arrivée, l’enfant dessine uniquement des personnages décédés de mort violente.
Cf. dessins référencés en annexe au dossier.
Note : La séance est arrêtée à 11 h 07.
(Prologue, extrait du premier compte-rendu du psychiatre)
Si tu savais ce qu'ils me pompent l'air, avec leurs bouquins de bien-être : la recette du bien-être, c'est de bien manger, bien boire et bien rire. Le reste , c'est du flan !"
"- Je l'ai lu dan un livre.
- A la maison ? Je ne me souviens pas qu'on ait des livres sur les légendes bretonnes...
- Chez Papi et Mamie. Dans la bibliothèque. Première étagère, deuxième rangée à partir du bas ou quatrième rangée à partir du haut. Douzième livre à partir de la gauche ou vingt-troisième livre à partir de la droite. La légende des morts, Anatole Le Braz. Ça s'écrit L-E espace B-R-A-Z. Chapitre 2.
- OK, OK. Lucas, qu'est-ce que je t'avais dit à propos des livres dans la bibliothèque de Papi et Mamie ?"
Lucas baisse les yeux et ne répond rien.
Quand nous avons emménagé à Perros-Guirec, j'avais six ans. J'étais horrifiée de quitter Sète, mon école, mes amis, ma prof de danse, tout ça pour habiter dans une vieille maison à retaper qui faisait de l'oeil à mon père quand on venait voir sa famille en Bretagne. Juste avant ma rentrée au CE1, Papa nous a annoncé qu'il avait trouvé un nouveau job vers Saint-Brieuc, qu'il commençait tout de suite, qu'on partait à l'autre bout de la France et qu'on allait vivre dans les travaux pendant quelques mois. Je l'ai haÏ pendant des semaines. Je détestais la campagne, je détestais devoir aller à l'école en bus et je détestais vivre en mode camping dans la maison le temps que tout soit désinfecté, consolidé et repeint.
- Ces dessins ne sont pas forcément l'œuvre d'un tueur en série, en théorie. Mais de quelqu'un qui n'est pas capable de ressentir du remords, de la culpabilité ou de l'anxiété à l'idée de transgresser les règles, très certainement.
Elle m’a expliqué calmement – froidement – que Paloma était avec ses petites camarades, qu’elle s’était bien occupé d’elle et que je n’avais pas à m’en faire. Elle a ajouté qu’au moins Paloma était heureuse, maintenant. Ses « petites camarades » : j’en aurais vomi.
"Protège ton petit, Alice. Ne le quitte pas trop longtemps des yeux. Les loups les plus dangereux sont eux qui attaquent près de leur tanière."
Une salle de classe des années 1950 ou 1960 reproduite à l’identique et en détail. Mais dès que j’allume la torche de mon portable, l’horreur me fige sur place.
dansez, fillettes du village,
chantez vos doux refrains d'amour
trop vite, hélas ! un ciel d'orage
vient obscurcir le plus beau jour.