Dès la naissance nous sommes confronté à la séparation, puis viendra la séparation du seuvrage, la crèche ou la nounou, les premiers pas, et plus tard viendra une autre séparation, quand nos mots et nos pensées permettent de prendre du recul par rapport à ceux qui auront été nos premiers modèles. Mais ce sont toutes ces séparations qui nous permettent de gagner en autonomie et de devenir des individus uniques. le livre d?Annick Simon «
Accompagner le développement du petit enfant » est un regard porté sur l?enfant, sur nos propres enfances, une invitation à chercher à comprendre ce qui se passe en chacun de nous, adultes et enfants.
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Elle pleure ; pleure son bébé mort, pleure Nadia, pleure sa mère, son père, pleure tous ces morts. Pour moi, c'était le jour de trop, le drame de trop. J'ai senti les larmes qui roulaient sur mes joues, toutes ces larmes gardées en moi pendant ces vingt années. Trop tard. Je n'était plus "La dame qui vient dire bonjour aux bébé". Juste moi. Moi infiniment triste.
Donc, ils sont nés, et cette naissance a privé leurs mamans de ce temps à la fois long et tendre, de leur fin de grossesse. Ils sont nés, alors que leurs papas étaient bien loin de se sentir pères. Et, les voilà, visibles derrière la vitre indiscrète de leur couveuse. [...] Ils ont perdu leur ventre-maman, pour se trouver dans un bocal-ventre où les mains des infirmières, où les mains des médecins, où des mains mille-pattes, toujours différentes, vont les toucher, les bousculer, percer leur peau, pénétrer en eux par divers sondes, par des tuyaux intrusifs.
- Ça y est ! Tu sais que c'est ta maman qui est venue te voir ! Attends, elle va te caresser la main tu la reconnaîtras. Timidement, la jeune mère ouvrait la petite fenêtre de plexiglas, glissait une main dans la couveuse, allongeant un bras au creux de la paume du bébé. Lui, refermait son poing sur ce doigt. (...). J'avais l'impression d'avoir réussi le plus délicat, le plus précieux des "branchements": j'avais favorisé leur rencontre.
Si nous travaillons là, dans ces lieux de vie et de mort, c'est bien parce que quelque chose de notre histoire personnelle nous y a conduit.
Je me suis adressée à ce bébé-là, qui pleurait sa colère, ou sa peur, ou juste un malaise venu, il ne savait d'où.
- Oh la la ! Comme tu es en colère ! Oui, on vous laisse un peu tomber de nos pensées parce que nous avons une si grande peine, un si grand chagrin : un bébé est mort ce soir !... Mais toi, tu nous rappelle que tu es vivant, et que tu as besoin que nous prenions soin de toi. Oui, oui tu as raison. Merci, merci pour ta colère.
Parce que, oui, c'était bien cela la crainte et la culpabilité de la maman : être une mauvaise mère, un mauvais donneur, avoir abîmé le bébé qu'ils avaient attendu avec tant d'impatience, un bébé qui aurait réparé leurs propres enfances. Et, tout au contraire, elle avait le sentiment que son douloureux passé avait endommagé leur enfant.
(...) C'est à nouveau le père qui prend la parole :
- Dites, vous ne croyez pas qu'elle serait un peu mongolienne ?
Un coup d'oeil à Laure, une petite Laure aux yeux bridés, au visage incontestablement d'une petite fille porteuse de trisomie 21, un coup d'oeil à ses deux parents qui me fixent avec insistance. Je choisis de reprendre leurs mots :
- Un peu mongolienne.... Oui. ....je crois bien.
- Mais.... c'est la nôtre ! On a bien le droit de l'aimer, non ?
- Mais Laure, elle est surtout votre petite fille à vous, et je vois bien combien vous l'aimez !
- Ah ben voilà elle est mongolienne ! Ils auraient pu le dire, au lieu de tous leurs chichis. C'est qu'ils nous en ont dit, qu'elle est trisomique, qu'elle marchera tard, (...) mais qu'elle aimera la musique.
Ce qui nous apprend notre métier, c'est, pour une petite part seulement, nos études de psychologie. Pour une autre bonne part, si nous en avons fait le choix, c'est notre psychanalyse personnelle ; je t'ai dit que mon analyste appartenait à l'école de Mélanie Klein ; après, c'était comme une langue maternelle et, du coup, j'ai choisi de travailler essentiellement avec des psychanalystes kleiniens. Mais, j'ajoute que mon outil préféré, c'est vraiment ma formation à l'Observation du Nourrisson selon Esther Bick. C'est là que j'ai appris à ne pas me mettre en avant, à ne pas juger, ni même à donner des conseils ; appris à me mettre en creux, pour recevoir ce que mon patient aurait à déposer en moi.
C'est l'heure où "les filles" ont du temps pour parler aux bébés, pour distribuer des câlins. Parfois, en pleine nuit, la visite d'un papa qui "fait équipe". À d'autres moments, un bébé se réveille en pleurant, et puis le téléphone sonne. Il y a toujours une puéricultrice pour m'expliquer :
- C'est sa maman : elle a dû se lever pour tirer son lait et, lui, il l'a senti.
La maman appelle, demande des nouvelles d'une petite voix inquiète (...).
On a longtemps cru et on croit parfois encore qu’un bébé n’a pas besoin qu’on lui parle puisqu’il ne répond pas. Mais s’il ne parle pas, un nourrisson témoigne son intérêt par d’autres moyens. Il est donc primordial qu’il sente une présence et entende quelqu’un lui parler