Dans le cadre de la rentrée littéraire de printemps, Occitanie Livre & Lecture reçoit des auteurs et autrices pour présenter leur récente parution. Aujourd'hui, nous vous partageons l'interview de Annie Agopian autour de son recueil de poèmes "Juste le ciel et nous" paru aux éditions le port a jauni.
Modération Eunice Charasse.
Merci à la librairie Sauramps pour son accueil.
" Monsieur d'Issy ignore madame D'Laba. Il ne sait rien de son amour rêveur."
Ma chambre devient le théâtre d'exploits affolants, où complote toute une société secrète.
Des Moi ingénieux, un peu poètes, un peu fous.
Prêts à tout...
Avant de grandir, on passe tous par cette hésitation.
Comme si ce qu'on voulait, on le voulait pas vraiment.
Comme si ce qu'on faisait, on le savait pas encore.
Comme si d'un coup, on se retrouvait entre deux nous-mêmes.
Un nous qu'on connaît déjà trop et un autre qu'on ne connaît pas vraiment encore.
Il s'en va toujours nageant, voyageur au fil des courants, vers la mer douce-amère, bleutée, qui lui a tant manqué. Vagues, écume, cris des oiseaux, algues marines, sable, rouleaux, crabes aux aguets, lents paquebots... Petit poisson libre vraiment prend le large, vif et pimpant.
Les requins du trottoir sont cruels,
et ils adorent la géométrie.
N'importe quelle ligne droite
les excite, et ils guettent
chaque fois qu'il y en a une.
Les requins du trottoir sont terribles,
et surtout terriblement patients.
Ils attendent tranquillement qu'on dépasse,
qu'on mette le pied où il ne faut pas.
Alors, quand, me^me un tout petit peu,
même sans faire exprès, on mord sur la ligne
ils nous mangent. Un point c'est tout.
Les requins du trottoir sont invisibles,
leurs ailerons ne dépassent jamais, eux.
Avant, on était nous et le chien. C'était bien.
Puis, il y a eu le jour de la catastrophe. Papa s'est séparé de son côté et maman aussi. Moi et le chien, on est restés entre les deux.
Bali-balot bouleversé, happé, filtré, lessivé ! Un tourbillon hurlant le prend ! C'est la station d'épuration, comme une grosse machine à laver qui nettoie les eaux souillées.
C'est le silence de la ville, le royaume du tout-à-l'égout... Un royaume d'eaux usées, de bulles de lessive ammoniaquée, de crottes, et de rats, gros comme des chats...
(...) on a souvent rêvé d'une machine à-attraper-les-bisous-volants. Une machine... une belle mécanique parfaite pour les conditionner sagement comme des cornichons.
Mais on n'y est jamais parvenu.
Les bisous volants ne supportent pas les conservateurs.
Ils perdent tout leur croquant, leur marrant, leur vivant.
Et ils fondent en chaudes larmes horribles.
On se dit que ça pourrait être pire et on voit la vie sous un jour meilleur,
un jour nouveau, un jour si beau.