ALPHONSE : Qu'on m'amène mon fils. Que mon âme est émue !
Quel sera le succès d'une si triste vue ?
Si, toujours inflexible, il brave encor mes lois,
Je vais donc voir mon fils pour la dernière fois.
N'ai-je par tant de vœux obtenu sa naissance,
N'ai-je avec tant de soins élevé son enfance,
Et, formé sur mes pas au mépris du repos,
Ne l'ai-je vu si tôt égaler les héros
Que pour avoir à perdre une tête plus chère !
N'était-il donc, ô ciel, qu'un don de ta colère !
Seul, tu me consolais, mon fils ; et sans chagrin
Je sentais de mes jours le rapide déclin.
Dans un digne héritier je me voyais renaître ;
Je croyais à mon peuple élever un bon maître,
Et de ton règne heureux présageant tout l'honneur,
D'avance je goûtais ta gloire et leur bonheur.
Que devient désormais cette douce espérance ?
Tu n'es plus que l'objet d'une juste vengeance.
Ton père et tes sujets vont te perdre à la fois :
Ta mort est aujourd'hui le bien que je leur dois.
Ta mort ! Et cet arrêt sortirait de ma bouche !
La nature frémit d'un devoir si farouche.
Je dois te condamner ; mais mon cœur combattu
Ressent l'horreur du crime, en suivant la vertu.
Je ne sais quelle voix crie au fond de mon âme,
Te justifie encor par l'excès de ta flamme,
Me dit, pour excuser tes attentats cruels,
Que les plus furieux sont les moins criminels.
J'ai du moins reconnu que, malgré ton ivresse,
Tu n'as point pour ton père étouffé ta tendresse ;
J'ai vu qu'au désespoir de me désobéir,
Tu mourais de douleur, sans pouvoir me haïr.
Acte IV, Scène 1
Ne vous y trompez pas ; toute chose à deux faces ;
Moitié défauts et moitié grâces.
Que cet objet est beau ! Vous en êtes tenté.
Qu’il sera laid, s’il devient vôtre !
Ce qu’on souhaite est vu du bon côté ;
Ce qu’on possède est vu de l’autre.
D’une sirène un homme était amoureux fou.
Il venait sans cesse au rivage
Offrir à sa Vénus le plus ardent hommage ;
Se tenait là, soupirait tout son soûl.
La nuit l’en arrachait à peine,
Les soucis avoient pris la place du sommeil ;
Et la nuit se passait à presser le soleil
De revenir lui montrer sa sirène.
Quels yeux ! Quels traits ! Et quel corps fait au tour !
S’écriait-il : quelle voix ravissante !
Le ciel n’enferme pas de beauté si touchante.
Il languit, sèche, meurt d’amour.
Neptune en eut pitié. Ça, lui dit-il un jour,
La sirène est à toi ; je l’accorde à ta flamme.
L’hymen se fait ; il est au comble de ses vœux ;
Mais dès le lendemain le pauvre malheureux
Trouve un monstre au lieu d’une femme.
Pauvre homme ! Autant l’avaient travaillé ses transports,
Autant le dégoût le travaille.
Le désirant ne vit que la tête et le corps ;
Le jouissant ne vit que la queue et l’écaille.
Ils étaient quatre amis qu'assortit la fortune ;
Gens de goûts et d'esprit divers.
L'un était pour la blonde, et l'autre pour la brune ;
Un autre aimait la prose, et celui-là les vers.
L'un prenait-il l'endroit ? L'autre prenait l'envers.
(...)
C'est un grand agrément que la diversité.
(...)
L'ennui naquit un jour de l’uniformité.
L'ennui naquit un jour de l'uniformité .
L'ennui naquit un jour de l'uniformité.
Fables, Les amis trop d'accord.
Alphonse, parlant de son fils
Je prévis qu'il ferait ce qu'autrefois je fis, et me privai de vaincre en faveur de mon fils. Il a, grâce au ciel, passé mon espérance ; des Africains domptés implorant ma clémence, la moitié suit son char, et gémit dans nos fers ; le reste tremble encore au fond de ses déserts.