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Citations de Antoine Volodine (313)


Antoine Volodine
C'est là. Va en cercles. Tu aimes ces rues. De toute façon, tes vaticinations amoureuses sont assez fortes pour sécréter à chaque instant de nouvelles racines, de nouvelles raisons de continuer l'amour.
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Fuir notre collectivité, c'est se jeter dans la gueule du loup. C'est affronter tout seul de terribles moments de peur et de douleur, comme s' il n'y en avait pas assez déjà quand nous sommes ensemble. L'évasion n'a aucun avenir. On , aura beau dire et gloser, rien ne peut remplacer le camp, rien n'est aussi nécessaire et salutaire que le camp.
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Enervées par la perspective de la fin de l'humanité, les populations avaient perdu toute loyauté envers le collectivisme, et se laissaient tenter par n'importe quelle monstruosité politique, pour peu que celle-ci contrariât leur maussade présent. p.225
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elle préférait concentrer dans ses cordes vocales toute la magie du moment - dans ses cordes vocales et sa respiration.... La scène sur laquelle elle se produisait était presque circulaire, on aurait pu la comparer à la bouche refermée d'un cratère. En son centre, la mudang se lamentait et créait sans cesse de la beauté, quelque chose d'éphémère et fondamental que seuls les morts ou leurs semblables pouvaient entendre
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L’avion a commencé son épandage de napalm en haut du village. Je ne sais à quelle civilisation modèle il appartenait ni en quel charabia le pilote conversait avec sa base et les donneurs d’ordre. Une langue d’assassins, forcément, mais peut-être pas de l’américain militaire basique. La coalition compte toutes sortes de tueurs et de nations tueuses et de partisans d’un nettoyage ethnique sans frontières, et les transfuges ne manquent pas. Alors, peut-être, quand il a appuyé sur le bouton qui déclenchait l’ouverture des déversoirs, le type aux commandes a-t-il bramé une formule enthousiaste dans un idiome qui ressemblait à ma langue maternelle. De l’américain militaire basique, mais avec un accent de plouc des hauts plateaux. Et d’ailleurs, qu’est-ce que ça peut faire, la vilaine ou l’impeccable prononciation des assassins, à l’instant où ils lâchent sur nous des tonnes de bombes incendiaires ? Ça ne change pas grand-chose, pour nous, qu’ils soient les ennemis de toujours ou des traîtres récemment ralliés. Maintenant que le liquide enflammé bouche l’horizon et se dirige vers nous à la vitesse d’un tsunami de cauchemar, ça ne change pas grand-chose.
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Je me suis réveillée en sursaut. La lune tremblait à travers le grillage qui obture la fenêtre, elle était ronde et petite, d'un ivoire sordide, elle avait la fièvre, elle ne cessait de frissonner bizarrement.

p.198
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Tu exhales un deuxième soupir de chagrin et d'angoisse, tu ne sais plus si tu as atteint un rêve sans retour ou si tu avances une fois de plus dans un exécrable univers parallèle, ou dans une exécrable réalité, ou si tu es déjà morte et en train de passer en revue tes ultimes souvenirs.
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Accablant était d'avoir hérité des valeurs sacrées de la révolution mondiale ,alors que le monde existant s'était ratatiné jusqu'à n'être plus qu'un asile de fous, une minuscule poche sur la carte du globe.
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Trouvé dans l'Incotidien de mardi 6 avril 2021.

Sacré par le prix Médicis en 2014, Terminus Radieux a prouvé superbement que la production romanesque française ne se limitait au néo-réalisme paresseux des autofictions et des « romans-dossiers » qui gangrènent la scène littéraire dans le sillage paresseux de Houellebecq et consorts. Il y a encore une place en France pour un imaginaire radical, pour le romanesque au sens pur du terme, et Terminus Radieux en est la preuve la plus salutaire. Depuis ses débuts dans la science-fiction avec une poignée de romans d’anticipation surréalistes publiés par Présence du Futur dans les années 80, Antoine Volodine s’exerce depuis maintenant près de 30 ans à imposer son univers, le « post-exotisme », un monde apocalyptique qui ressemblerait à ce que Max Ernst appelait joliment « L’Europe après la pluie ». Il y a quelque chose de radicalement visuel chez Volodine, qui s’inspire autant du Stalker de Tarkovski que des planches d’Enki Bilal pour façonner une sorte d’uchronie fatale, un monde ravagé par la catastrophe nucléaire et par une légendaire Deuxième Union Soviétique dont on ne saura jamais si elle est encore en place ou en cendres depuis des décennies. Singeant les dédoublements de personnalité d’un Pessoa, Volodine pense son œuvre en démiurge et joue à s’auto-citer en cumulant les hétéronymes qui lui permettent de voyager à travers sa propre production littéraire, d’inventer toute une foule d’auteurs et de fictions dans la fiction – dont certaines seront peut-être écrites par lui – ou peut-être pas.

Dans Terminus Radieux, Volodine nous fait voyager à travers une Sibérie rétro-futuriste, hantée par les spectres du communisme (qui sont de vrais spectres), par des soldats en déshérence et par des gourous qui règnent en maître sur des kolkhozes dégarnis. Difficile d’en dire plus sur l’intrigue sans dévoiler la formidable poétique mise en place par le romancier, qui s’attache aux pas de plusieurs personnages dont chacun tirera le roman vers un style différent, vers une réalité alternative. Il y a là une interpénétration tout à fait jouissive de l’auteur et de son œuvre, une ambition panoptique quasi-inédite en France – si l’on excepte l’œuvre de Jacques Abeille ou de Serge Brussolo. Car bien qu’il s’en défende – sans doute pour toucher un public plus large – Volodine fait bien de la science-fiction dans tout ce qu’elle a de plus noble et de plus exigeant : construit avec une application quasi-gématrique (le nombre de chapitres renvoie aux nombre de pages et au nombre de paragraphes pour constituer une sorte d’ensemble parfaitement symétrique qui pourrait se lire dans tous les sens), Terminus Radieux n’est pas un bloc d’imaginaire monolithique mais une formidable machine à rêver, une sorte de jouet mécanique où toutes les pièces coulisseraient parfaitement les unes par rapport aux autres, traversées par des fulgurances stylistiques et des exercices de style qui laissent pantois. Volodine s’amuse à inventer des centaines de noms de plantes, dresse des inventaires poétiques, convoque les ombres du primitivisme chamanique et rappelle que l’Europe, avant d’être la terre des Lumières, fut une terre obscure et brutale, parcourue par des esprits sauvages et des forces telluriques qui renvoient à une sorte de panthéisme de l’aube des temps. A lire d’urgence : une fois rentré dans le Volodine-verse, pas sûr qu’on ait envie d’en revenir, surtout si c’est pour se taper le dernier Aurélien Bellanger.



Par Marc Obregon



Terminus Radieux, d’Antoine Volodine
560 pages, Points Poche
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Quand les visiteurs sont partis, je parle aux bêtes. Elles ont peur de la mort, de la captivité. Elles aimeraient être ailleurs. Elles aimeraient ne pas avoir à mourir pour être ailleurs. Elles frissonnent dans un coin pendant des heures, sans arrêt. J’attends le crépuscule, je m’installe près d’elles et je leur parle. Les bêtes m’écoutent. Elles m’écoutent toute la nuit à travers la nuit, avec les oreilles et le museau. J’essaie de leur parler jusqu’à ce que leur peur diminue.
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- Le clown travaillait dans un cirque. Le cirque Schmühl. Tu connais ?
- Non.
- Il s'est suicidé, dit Freek. On l'a apporté au zoopark une heure après la fermeture des grilles. Après le départ des visiteurs, des enfants. Ils font ça. Une société d'entraide lamaïste. Il faut s'inscrire. Le clown en était membre, je suppose. C'est un service spécial. Ils obtiennent une autorisation de la municipalité... Ils entrent dans la volière avec le corps. Les funérailles célestes, ils appellent ça. Les funérailles célestes.
- Ils donnent le corps à manger aux oiseaux ? demande Yasar.
- Oh, pas en entier, précise Freek aussitôt. Ou sinon ils devraient attendre des jours en présence des vautours, des aigles, des condors. Ils ne restent pas longtemps. Les gardiens du zoopark disent que c'est surtout symbolique. Ils découpent quelques morceaux de chair sur le cadavre et ils les jettent devant les vautours. Des languettes, des tranches petites. Trois fois rien. Les rapaces ont peur. Ils ne s'approchent pas. Ils ne mangent pas n'importe quelle viande dans n'importe quelles conditions... Ils repartent avec le corps pour l'incinérer. Ils s'en vont, mais les odeurs de clown mort continuent à traîner de cage en cage. Elles sont puissantes dans la grande volière, mais pas seulement. Elles rôdent dans le zoopark pendant des heures, ça fiche la frousse à tout le monde. Si personne ne vient pour leur parler, les bêtes tremblent de peur tout la nuit ...
p. 209
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... et quand il eut ainsi longuement fouillé la terre très-basse et ses mucosités charogneuses, il se redressa et rouvrit les yeux, du moins ceux qu'il avait fermés ...

p. 101
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Au cœur des ténèbres, un compagnon qui n'agresse pas est un ami
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Depuis leur perchoir du garde-manger, les cafards l'observaient sans mot dire. Lui-même ne leur adressait pas la parole. Il restait recroquevillé dans le bac à douche.

p. 366
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Les classes dirigeantes se sont gangstérisées , les pauvres obéissent .
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Antoine Volodine
Sur la grisaille hostile du ciel
les barbelés dessinent
une touche d'humanité

Soudain pendant l'appel
je pense au jour où plus personne
ne criera mon nom

(cité dans "Le Petit Livre des Haïkus")
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Antoine Volodine
Comme dans nos ténèbres nous n’avions aucun meilleur repère matériel autre que la parole, chacun de nous, à son tour, avait proféré un discours. L’idée était d’inventer des récits, des narrats, de mettre en scène quelques personnages issus de presque nulle part ou de nos très vagues souvenirs et, surtout, de voir si nous pouvions boucler notre histoire et donc contredire la théorie de l’inaboutissement que Myriam, notre petite sœur, continuait à défendre. Or, tout à fait indépendamment de notre volonté, nos histoires s’interrompaient brusquement et comme sans raison, et il était impossible de les reprendre. Quand nous tentions de les poursuivre, elles étaient déjà déchirées, noircies et insaisissables.
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Le surnarrateur imagine une diffusion à l’extérieur des murs, son romance développe la notion d’exil du texte. Les narrateurs savent qu’une manipulation du texte aura lieu ailleurs que dans le quartier de haute sécurité, et que des mains et des esprits s’en empareront, dont certains seront dépourvus de bienveillance. C’est pourquoi le discours littéraire du post-exotisme suit les sinuosités et les ruptures d’un interrogatoire de police. Des précautions sont prises, en particulier le cryptage des noms et des actions, ainsi qu’une esquive narrative consistant à ne pas raconter ce qu’exigerait la logique fictionnelle, à bavarder d’une façon fallacieuse, à parler beaucoup, uniquement pour gagner du temps, à parler d’autre chose.
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" — Tout homme épris de liberté, chanta Schliffko Armanadji en guise de prologue, et toute femme pareillement éprise, poursuivit-il, doit avoir en tête l’idéal incomparable du camp, son absolu resplendissant, et ne pas s’arrêter à ce qui en général repousse dans le concret du camp, la pouillerie organisée, les conditions sanitaires déplorables, la promiscuité terrible nuit et jour, l’arbitraire des chefs de camp, la sauvagerie primitive des gardes, la violence entre détenus, les leçons des chiens que diffusent en permanence les haut-parleurs des chiens.
La guimbarde de Julius Togböd se mit alors à produire une aride mélodie. Il était trop tôt. Matthias Boyol laissa Julius Togböd faire de son mieux, sur deux notes, pendant deux longues minutes. Puis, lorsque le musicien hésitant se découragea, il lui fit un signe approbateur.
(…) — Qu’on choisisse une approche globale ou au contraire très détaillée pour l’analyser, le camp ne présente que des avantages pour la population qui s’y trouve rassemblée, et c’est pourquoi une large majorité des malheureux qui vivent encore à l’extérieur du camp essaie à tout prix d’y accéder, rêve en permanence du camp et jalouse ceux et celles qui ont pu y entrer avant eux. Rares sont les adversaires du camp à l’intérieur du camp, et décousue reste leur argumentation en faveur des modes d’existence qui à l’extérieur des barbelés stagnent ou dégénèrent dans la barbarie inégalitaire. En nombre infime sont les théoriciens du camp qui appellent à quitter le camp, qui dénigrent le camp ou songent à une abolition du système des camps, ou qui préconisent une ouverture plus grande sur l’au-delà des barbelés et recommandent la fusion du camp avec les territoires de l’extérieur. Tenus depuis les fenêtres des établissements psychiatriques, leurs discours sont écoutés, mais ne suscitent aucune adhésion. Si des applaudissements éclatent, c’est le plus souvent pour saluer l’humour dont ils ont fait preuve et leurs grimaces comiques. Il faudrait en effet avoir l’esprit aussi dérangé qu’eux pour apprécier sur le fond leurs divagations d’insanes. En résumé, dans le camp, nul individu doué de raison ne remet en cause la supériorité humaniste de la société qui s’épanouit en deçà des clôtures, et nul ne s’aventure à nier des siècles d’acquis carcéraux et d’améliorations incessantes dans les aménagements, dans la philosophie et dans la logique intime et fondamentale du camp. C’est comme ça." Antoine Volodine. Terminus Radieux, chap. 13.
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On est tous ni morts, ni vivants à "Terminus radieux". On est tous des morceaux de rêve de Solovieï. On est tous des espèces de bouts de rêves ou de poèmes dans son crâne.Ce qu'on lui fait, ça compte pas pour lui.(...) Ça compte pour du beurre. c'est rien. Ça va s'effacer.
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