La batterie d'urinoirs plus généralement favorise les discussions. Rien de tel chez les femmes, elles ne discutent pas d'une cabine à l'autre. La figure de deux types urinant l'un à côté de l'autre est indémodable.
L'ordinaire au cinéma ne saurait être le décalque de celui que nous expérimentons quotidiennement. Aussi en marge des films qui l'ignorent, et de ceux qui le distordent, il existe des films qui, en modifiant notre regard et en nous apprenant à voir l'ordinaire autrement, révèlent la dimension poétique de celui-ci, rendue communément invisible jusque-là en raison de l'habitude.
Le repas de groupe à l'écran existe la plupart du temps par un filmage et un montage reposant sur l'échange des regards, lequel peut se substituer à l'échange des mots, le redoubler ou le contrarier. Regards noirs ou bienveillants, regards de connivence ou de défiance. Regards multiples qui tissent le réseau des rapports entre les convives.
Petite curiosité que je livre au lecteur, il existe au moins un film contenant au moins une occurrence de chacune des douze figures du quotidien retenues dans ce livre : Ma saison préférée (1993) d'André Téchiné.
Toute stylisation épure le réel et nous le fait éprouver comme neuf. Ce que nous voyons tous les jours apparaît alors comme nettoyé.
Il existe une façon de dire les choses importantes sans avoir l'air de rien, à partir de menus événements.
Le quotidien n'est pas si familier qu'il en a l'air.