Arnaud-Louis Chevallier

L'éphémère est la seule aventure réellement révolutionnaire car elle ne sert à rien.

Maxwell est plus à l'aise. Il s'est trouvé dans ce genre de situation toute sa vie. Un éclair d'effroi me traverse l'esprit : si ça se trouve, il est recherché depuis longtemps et je vais être non seulement condamné pour complicité de vol avec violence, mais également soupçonné pour tout un tas d'agressions, de cambriolages, de braquages, voire pour association de malfaiteurs, pour lesquels il faudra que je prouve péniblement mon innocence.

Maxwell remet, comme nous tous, une carte d'identité au chef policier et s'adresse à lui calmement :
"Ecoutez, monsieur l'inspecteur, nous allons tout vous expliquer. Comme vous pouvez le voir, nous ne sommes pas des gens méchants. Nous sommes de simples militants du Front national. Et tous ces petits jeunes qui viennent ici, vous savez ce qu'ils viennent faire. Ils viennent pour acheter de la drogue. Nous ne sommes pas méchants, mais ce que nous voulons, c'est que la jeunesse de notre pays soit une jeunesse saine. Alors ce qu'on faisait simplement, c'est donner une bonne leçon !"

Le chef policier tend nos papiers à l'un de ses collègues restés dans la voiture. La vérification terminée, il rend sa carte à la victime, tremblante, qui s'enfuit sans demander son reste, puis à nous trois. Il répond à Maxwell :
"On est peut-être du même bord... Mais la prochaine fois, attendez qu'on ait terminé notre ronde..."

Nous sommes à la veille d'une éléction législative dont on pressent qu'elle mènera au pouvoir des partisants du retour à l'ordre et à la discipline. C'est un travers masochiste et épidermique du peuple français. On devine déjà la revanche des petits chefs qui se préparent depuis quelques mois à imposer, triomphants, leur vision du monde.

J'entends un morceau de Cure puis d'Indochine. Décidément, le temps n'existe pas.



Il n'a jamais existé. C'est une invention pour renforcer le pouvoir de ceux qui nous dirigent. L'argument ultime du matérialisme, qui permet d'assujettir une vie entière au travail, au rythme d'horaires, d'heures supplémentaires, de début et de fins de semaines, d'années d'études, de trimestres comptant pour la retraite. Ceux à qui ce concept vide de sens profite vont même jusqu'à exiger qu'on chronomètre la durée d'une tâche élémentaire pour améliorer le rendement des chaînes de production, ou qu'on établisse des plannings pour s'assurer des retours sur investissement encore plus élevés. Toute cette agitation autour des minutes qui passent n'a qu'un seul but : mieux contrôler nos vies et réfréner nos envies.



L'éphémère est la seule aventure réellement révolutionnaire car elle ne sert à rien.

Les gens qui s’apprêtent à rentrer en discothèque, s’apprêtent à faire la fête. C’est comme quand on fait un voyage, pour beaucoup, il est encore mieux quand on rentre dans l’avion. Parce que tout est à écrire. A l’entrée d’une boîte de nuit, la magie de la soirée est à écrire. Les gens sont joyeux et portent sur leur visage ce qu’ils vont être dans la soirée. C’est très intéressant d’un point de vue purement sociologique. Mais je n’étais pas le seul à le faire, Fabrice Emaer était lui aussi souvent à l’entrée au Privilège et au Palace. Bon, ça sert aussi à voir s’il y a du monde, si les gens sont énervés ou pas. Je me définis comme un sculpteur de public. Dans les années 80, j’allais dans les fêtes et les vernissages et je donnais des invitations pour une personne pour mes discothèques, de façon ciblée. Quand je voyais quelqu’un d’intéressant, qui pouvait apporter quelque chose ou qui savait s’amuser, je donnais une invitation. A l’intérieur de mes boîtes, ça donnait un mélange un peu détonnant avec des gens qui ne se seraient pas forcément rencontrés à l’extérieur. Quand on va faire la fête, c’est pour boire des coups, draguer, danser, mais ce qu’on ne se dit pas, qui est pourtant essentiel, c’est qu’on attend un événement extraordinaire. Et ça ne peut arriver qu’avec des gens qu’on ne voit pas ailleurs. Donc, j’essayais de faire un mélange de public. Je trouve qu’on perd cette diversité aujourd’hui.

Interview pour Brain Magazine, novembre 2020

Sophie est d'autant plus fascinée par sa petite virée avec ses amies de fraîche date qu'elle ne soupçonnait pas qu'il y ait des règles aussi strictes pour devenir repris de justice.

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