AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Attica Locke (71)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Bluebird, Bluebird

Voilà un roman que j'ai abordé voici quelques jours et dans lequel je n'ai pu tout de suite " me sentir à l'aise " . N'étant pas trop du genre " patient " , j'ai décidé de l'abandonner aprés quelques pages et de me diriger vers autre chose plus en rapport avec mon humeur du moment . Et puis , le revoilà , me revoilà et nous deux , ça c'est mis " à coller " et parfaitement , du reste ,comme vous le constatez à travers ma note .

Désormais, c'est ma règle, pas d'acharnement , je " remets à plus tard " et j'avoue que cette façon de faire me convient plutôt bien . Inutile de se perdre en " mais pourquoi ? " , inutile de culpabiliser alors que la PAL regorge de trésors qui ne demandent qu'à sortir de l'anonymat .

Donc , j'ai lu " Bluebird , bluebird " et , pour ne pas me " perdre " une nouvelle fois , j'ai scrupuleusement noté les noms des différents personnages afin de bien me situer . A partir de là , tout est devenu limpide et j'ai pu rejoindre le Texas et plus précisément le bourg de Lark où vient d'arriver le Ranger Warren Matthews : deux cadavres viennent d'y être retrouvés, celui d'un homme noir et celui d'une femme blanche .Le shérif local semble " sûr de lui " en bouclant rapidement l' enquête : motif , le vol. Pourtant , Darren, lui , semble plus circonspect , s'attirant les foudres d'une population qui aimerait bien le voir rejoindre ses " pénates "...C'est que dans ces fins- fonds du Texas , Noirs et Blancs cohabitent difficilement , les tensions raciales sont vives et le passé continue à raviver en permanence des plaies déjà béantes. Pour sortir de tout ça , l'omerta est de mise mais Darren, lui même toujours en quête de vérité et en proie à certains démons personnels , fera preuve d'une opiniâtreté bien malvenue et irritante . Au Texas , on a l'habitude de bafouer certaines règles et de " laver son linge en famille ".

L'ambiance est pesante du début à la fin et les éléments s'emboîtent les uns, les autres , avec force , mais lenteur , pour notre plus grand plaisir. C'est que les hypothèses sont plurielles dans cet État cher au Ranger obstiné.

Les personnages , assez nombreux , cachent habilement leur véritable personnalité au point que si aucun n'apparaît vraiment sympathique ( à mon point de vue ) , certains se " dissimulent " pour maintenir en place un système bien en place , un système dont l'agencement est seul garant de la paix .

J'ai beaucoup aimé " avancer " avec Darren dans les eaux troubles des bayous , accompagnés des rythmes du blues , et m'enfoncer dans les racines profondes des protagonistes .

Et puis , quelle fin , mes amis et amies , pas " violente " , non , mais " subtile , très subtile " . Allez , je ne résiste pas , je vous la raconte ...Alors Darren...Comment ça, ça ne se fait pas ? Bon , et bien ce sera pour une autre fois , tant pis - ou tant mieux - pour vous . Restons- en là.

Je quitte le Texas , je me dirige maintenant vers l'Islande . Je vous enverrai bientôt des nouvelles . En attendant , allez - donc boire une bière au café de Geneva Sweet à Lark , au bord du bayou Attayoc . Ce serait bien étonnant que vous vous y ennuyiiez ....
Commenter  J’apprécie          606
Bluebird, Bluebird

Dans les bayous du Texas de l'est, il y les blancs, les afro-américains, la musique, la haine et l'amour. Des petits villages frappés d'omerta parce que les convenances, l'histoire, les traditions, la peur dictent les façons de vivre, de survivre, d'aimer et d'haïr.

Dans un de ces petits villages, non disons plutôt un hameau, Lark, se rend un Ranger Texas -la force policière la plus respectée au pays- Darren Matthews, afin d'enquêter sur la mort d'un noir de Chicago retrouvé dans le bayou. Et dans la même semaine, on retrouve également le corps d'une fille blanche de Lark. Notre Ranger, Darren, spécialiste des crimes de haine et qui tente de pourchasser les Fraternités Aryennes, se fait presque imposer cette enquête par un de ses amis du FBI. Lui qui a déjà des soucis administratifs, lui qui a déjà des soucis matrimoniaux, lui qui a déjà des soucis d'alcool, devra tenter de résoudre ces meurtres . Une enquête qui ébranlera ses convictions. En se disant que la réalité n'est pas toujours celle que l'on croit , bien sûr. En faisant admettre que ces meurtres sont des crimes raciaux, ce que personne ne veut avouer mais qu'aussi , au Texas, le rôle déterminant de la race créait des liens familiaux imprévus. Que l'amour et la haine sont liés, toujours.

L'écriture d'Attica Locke nous fait sentir tout le long de cette lecture l'infinie violence de la question raciale. Bluebird, bluebird, c'est plusieurs histoires d'amour, certaines belles et lumineuses d'autres poisseuses, puantes vécues dans une ambiance lourde , étouffante, d'autant plus effroyable que contemporaine. Les Texans d'Attica Locke sont indéniablement, tristement empoisonnés par leur passé et cela nous donne un récit triste, mais brillant, élevé et prenant comme un air de blues...comme John Lee Hooker et son Bluebird.
Commenter  J’apprécie          550
Bluebird, Bluebird

Dans l’échelle du respect voire de la vénération des Texans, le Ranger est au plus haut. Il s’impose aux équipes des shérifs locaux. Il est mieux accueilli que n’importe quel Fed exogène, dans un État où l’identité n’est pas un concept d’intello mais une mémoire transmise de génération en génération.



Mais au Texas, et encore plus à Lark, 178 habitants dans le comté de Shelby, cette identité texane s’arrête à la couleur de la peau, et les suprémacistes blancs qui composent les troupes de la Fraternité Aryenne du Texas n’ont pas l’intention de partager la leur avec leurs voisins noirs.



Alors dans ce bourg à deux vitesses, quand un noir et une blanche sont retrouvés morts dans le bayou et que Darren, Ranger noir débarque pour enquêter, la tension monte immédiatement d’un cran : les portes se ferment, les bouches se taisent, les couteaux et les battes sortent de leurs étuis… Et le passé refait peu à peu surface.



Bluebird, bluebird, de Attica Locke – traduit par Anne Rabinovitch – est un polar efficace et sans temps mort, construit sur une intrigue classique mais solide, qui prend toute sa force dans le travail des personnages, particulièrement réussis. De Darren le Ranger à Geneva la patronne de bar, de Wally le potentat blanc local à Randie la jolie veuve éplorée, sans oublier le shérif Van Horn ou Faith la jeune serveuse, c’est toute la richesse et la complexité de la culture texane que Locke parvient à transmettre dans ces portraits creusés.



Et dans un ensemble dont j’ai parfois trouvé le style un peu lourd, ce fut bien vite oublié à chaque fois que la plume de Locke s’attardait à décrire l’atmosphère et les fabuleux paysages de cet état décidément à part. On ferme les yeux, et on y est : un bar en bord de route, un bourbon devant soi, et une Gibson Les Paul qui accompagne le blues de John Lee Hooker. Bluebird, bluebird, please, do this for me…
Commenter  J’apprécie          312
Bluebird, Bluebird

Bluebird est un roman poisseux, de ceux qui collent aux doigts. Pas poisseux de sucre, mais poisseux de sang, de haine, de racisme.



Au Texas, dans la petite ville de Lark, il y a une frontière entre les Blancs et les Noirs, une ligne de démarcation qu’il vaut mieux éviter de franchir, surtout si vous êtes Noir et que vous décidez d’aller dans le bar des Blancs à tendances nazies.



Y’en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes…



Dans le bayou, on vient de retrouver successivement deux cadavres : celui d’un homme Noir en premier et ensuite celui d’une femme Blanche. Le Ranger Darren Mathews trouve cela bizarre aussi, d’habitude, c’est le contraire.



Voilà un roman fort sombre qu’il vaut mieux commencer en ayant du temps devant soi, car il ne se lit pas d’une seule traite. L’ambiance est pesante, lourde, sombre et donne l’impression que l’on suffoque.



Nageant en eaux plus que troubles, Darren Mathews va avoir bien du mal à rassembler les indices (déjà qu’il ne sait pas vraiment s’il est viré dans Rangers ou pas) car les habitants ne se bousculeront pas au portillon pour l’aider dans son enquête et que personne ne semble sympathique, tout le monde dissimulant quelque chose.



Darren Mathews est un Ranger tenace, sorte de pitt-bull qui ne lâche pas sa piste, même s’il a trouvé un os qui semble prometteur. Englués dans les ennuis administratifs avec son boulot, pataugeant dans les soucis matrimoniaux, tenté de téter à la bouteille afin d’oublier ses emmerdes, il devra faire face avec de l’animosité des deux côtés et le fait que personne ne veuille entendre prononcer le fait que ce sont des crimes raciaux.



Il devra aussi se débrouiller pour ne pas se faire péter la gueule (ou pire) par les nazis nostalgiques de la Fraternité Aryenne du Texas, faire face à un shérif qui semble vouloir ménager plus la chèvre nazie plus que les choux afro-américains et faire péter les secrets que tout le monde tait.



Roman noir poisseux, il se lit lentement afin de bien s’imprégner des lieux, des histoires de chacun, de la peur qui règne à Lark, des secrets enfouis, de la ségrégation qui a toujours cours et des non-dits qui va falloir déterrer.



Une intrigue qui semble classique, mais qui ne l’est pas, un scénario qui semble banal au départ qui va se révéler bien plus riche qu’on ne le pense, des personnages bien campés, réalistes, profonds, qui se dévoileront au fur et à mesure de la lecture.



Des atmosphères pesantes, qui ne donnent pas envie de s’arrêter boire un verre de bourbon dans la ville de Lark, 178 habitants (comté de Shelby) tant la tension est à couper au couteau.



Le final est d’une grande subtilité, même s’il est vache, il est à applaudir tant il est retors et machiavélique.



Il ne m’aura manqué que l’attachement aux personnages et les émotions fortes que j’aurais aimé ressentir. Ce sera mon seul bémol.


Lien : https://thecanniballecteur.w..
Commenter  J’apprécie          290
Pleasantville

Couronné outre Atlantique du prestigieux prix Harper Lee for legal fiction., « Pleasantville » est le troisième roman d’Attica Locke paru chez Série Noire, et le deuxième mettant en scène l’avocat Jay Porter, après « Marée noire ».



Le récit nous plonge dans les arcanes d’élections municipales à Houston, capitale du Texas. et visiblement l'auteur sait de quoi elle parle, son paternel ayant trainé dans le milieu de la politique du coin, et ses coulisses d'élections locales sentent assurément le criant de vérité et le réalisme à tout va.



"

De manipulations aux intimidations les plus diverses, de chausses trappes au trahisons les plus terribles, ces élections nous livrent la part la plus sombre et retorse de l'être humain prêtes à tout pour gagner, et on se dit que cela nous rappelle des choses géographiquement plus proche de nous. même si "Pleasantville" offre un bel instantané aux spécificités de la société texane, aux particularismes évidents.



Ces coulisses peu reluisantes d'élections touchent par leur justesse mais donnent sans doute parfois une petite impression de déjà vu tant ce marigot politique est connu de tous ceux qui s'intéressent au sujet : heureusement l'intéret de ce Baron noir américain et littéraire ne vacille pas tout du long de la lecture, bien aidé par le personnage principal, ce Jay Porter, ,ancien militant des droits civiques devenu avocat aussi attachant qu'imprévisible...



Captivant et bien écrit, de la belle ouvrage! ..
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          280
Au paradis je demeure

Sacrée responsabilité pour Daren Mattews, un ranger noir du Texas qui doit enquêter sur la disparition d un enfant de neuf ans. Un garçonnet issu de la communauté redneck.



Des blancs pauvres et racistes qui survivent dans des caravanes sur les terres de Leroy Page, un descendant d'esclaves affranchis.



Nous sommes au lendemain de l'élection de Donald Trump, dans les États du Sud, les suprémacistes blancs nostalgiques redressent la tête, un des leurs est aux commandes du pays.



Un enfant blanc a disparu, un enfant qui a été surpris à mettre le feu à un lieu de culte indien et à taguer " macaque paresseux, nègre " sur la maison de Leroy Page.



Dans cette région en perpétuelle ébullition, un propriétaire noir peut-être lui aussi coupable de crime haine.



Un vrai bon polar, noir et moite. De son écriture sèche et directe, Attica Locke dresse un constat sans concession de l'Amérique d'aujourd'hui.



Après "Bluebird,Bluebird" lu l'an passé et de très heureuse mémoire, "Au paradis je demeure" confirme qu'elle est une romanciere de premier plan à lire toutes affaires cessantes.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          270
Bluebird, Bluebird



Bayou Attoyac, comté de Shelby, racisme ordinaire et quotidien le long de la rivière. Le ranger noir Darren Mathews, qui à enlevé son insigne pour enquêter discrètement sur un double meurtre, se rend très bien compte qu' il n' est pas le bienvenu dans ce coin du Texas.

Dans ce repère de suprémacistes, une enquête pour crime de haine est très mal vue.

Michael Wright, un avocat noir de Chicago et une serveuse blanche d'un bar très très blanc ont été retrouvés noyés dans le bayou.

L'accident est peu probable car la FAT, la Fraternité Aryenne du Texas, est très active dans ce village reculé.

Non , Michael Wright, il ne fallait pas rentrer dans le Jeff's Juice House au bord de la route 59 et Missy Dale la serveuse n' aurait jamais dû t' adresser la parole.

Les meilleurs bayous de la Louisiane | Vacances Fabuleuses

Il y a des choses à ne pas oublier lorsque l' on franchit la ligne Mason-Dixon cette démarcation formelle entre le Nord et le Sud du pays.

Oui, Michael Wright, en rapportant la guitare mythique "Gibson Les Paul" 1955 dans le petit village de Lark, tu as réveillé bien des souvenirs.

"Bluebird, " la complainte triste de John Lee Hooker sera ton requiem.Pour ce tout premier polar sorti en 2021, on a affaire à un vrai polar d' atmosphère qui nous plonge dans l'Amérique d' aujourd'hui.



Attica Locke écrit moite et passionné. La romancière décrit très précisemment un pays partagé en deux, une Amérique d' un apartheid qui ne dit pas son nom dans des États difficiles à gérer.

Son roman est un brûlot coup de poing qui parle d' amour et de haine dans l' Amérique qui a élu Donald Trump il y a quatre ans.

Une Amérique dangereuse si l' on ne s' en occupe pas.

Un constat implacable, assurément un grand polar !!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          232
Dernière récolte

Vous aviez connu "Tara" et Scarlett sous la plume de Margaret Mitchell, Attica Locke va vous faire découvrir "Belle Vie" et Caren. Un point commun : ce sont deux plantations de Louisiane mais cette auteure noire-américaine nous en présente une version beaucoup plus réaliste qui débute en 2009.

Caren est revenue, un peu malgré elle à Belle-Vie où sa mère était autrefois employée par le père du propriétaire actuel et où ses ancêtres étaient esclaves. La jeune fille y dirige le musée à ciel ouvert que la plantation est devenue, y élevant seule sa fille de 9 ans. La découverte du cadavre d'une employée de l'exploitation de canne à sucre voisine va bouleverser le calme apparent et réveiller les fantômes d'autrefois.



Même si j'ai trouvé le début du roman un peu chaotique, j'ai très vite été emportée par cette histoire dont l'intensité va crescendo jusqu'au dénouement plein d'émotions. On va découvrir que les destins de la famille de Caren et des Clancy, les propriétaires sont en fait mêlés depuis la nuit des temps. Les personnages actuels sont très bien construits mais dans cette propriété ouverte désormais aux touristes et où des comédiens rejouent chaque soir un passé édulcoré, l'esprit des esclaves qui l'ont habité plane toujours. Attica Locke nous parle aussi de cette Louisiane d'aujourd'hui où certes les choses ont évolué mais où les travailleurs clandestins sont les nouveaux exploités, où la justice est plus encline à trouver un coupable parmi la population noire et où le gentil blanc s'auto-satisfait d'avoir été bon pour ses employés de couleur. L'auteure a réussi à reconstituer magistralement cette ambiance du Sud, la magnifique plantation s'étalait sous nos yeux, les fleurs embaumaient, les odeurs s'échappaient de la cuisine mais l'orage grondait dans le lointain pour que, sans doute, on n'oublie pas que tout cela était bâti sur une terre imprégnée de sang.



Un grand merci à Babelio pour cette Masse Critique et aux Editions Gallimard pour cette belle découverte ! 16/20
Commenter  J’apprécie          200
Au paradis je demeure

Darren Mathews, Ranger texan encore sur la sellette après une affaire étrange dans laquelle il semble plus impliqué qu'il ne veut le laisser paraître, est sommé d'aller enquêter sur la disparition de Levy King, 9 ans, à Hopetown, ancienne ville à la frontière de la Louisiane créée par des esclaves noirs affranchis, rejoints par des indiens Caddos, et bien plus tard, par des caravanes de blancs pauvres, appartenant potentiellement à la Fraternité Aryenne du Texas. L'on comprend vite, alors que Trump vient d'être élu président, et que les agressions contre les noirs sont en augmentation, que la situation risque d'y être explosive puisque Levy est justement le fils de Bill, membre de la Fraternité et en prison depuis un certain temps, et que le terrain sur lequel vit tout ce petit monde appartient toujours à la communauté noire qui s'y est installée, en la présence de Leroy Page. Au milieu de tout ce maelström, où peut bien être passé le jeune garçon ?



Malgré la longueur de ce que je viens de raconter, je ne dis, finalement, que peu de choses sur l'intrigue même de ce roman noir qui est, plus qu'un véritable polar, un roman d'ambiance, un roman social, un roman qui laisse la part belle aux états d'âme et indécisions de son protagoniste, qui doit faire des choix, tant pour réussir à retrouver Levy, que pour se (re)trouver lui-même face à ses divers démons. Et c'est à travers lui un regard clairvoyant posé sur les propres démons des États-Unis qui se fait jour.



Un roman que j'ai apprécié lire, notamment par tout ce qu'il met en jeu derrière une enquête policière malgré tout un peu trop prétexte.
Commenter  J’apprécie          180
Pleasantville

Auteur peu prolixe mais dont on commence à attendre avec curiosité les nouveaux romans, Attica Locke revient chez nous après quatre ans d’absence. Et elle n’est pas seule puisqu’elle a la bonne idée d’être accompagnée dans Pleasantville par Jay Porter, avocat à Houston et ancien militant des droits civiques, qui était le héros de son premier roman, Marée noire.

Quinze ans après les événements contés dans ce premier livre, on retrouve donc Porter à la veille des élections municipales de 1996. L’avocat qui, sans jamais avoir été vraiment flamboyant, est au moins resté quelqu’un d’admiré du fait de son investissement auprès de la population du quartier de Pleasantville et grâce aux combats qu’il a engagés contre quelques firmes multinationales n’est presque plus que l’ombre de lui-même. Veuf depuis peu, dépassé par la gestion de sa vie de famille, embourbé dans d’interminables tractations avec les dirigeants d’une entreprise responsable d’un accident industriel qui a touché Pleasantville, Jay Porter est sur le fil, pas loin de jeter l’éponge. Et si on lui montre encore du respect, il fait peu de doutes que les clients qu’il représente et pour lesquels il tente d’obtenir une indemnisation honorable sont près de le lâcher.

La disparition dans le quartier d’une jeune fille, bénévole pour une équipe électorale, puis l’accusation portée contre le directeur de campagne de l’un des candidats à la mairie originaire de Pleasantville vont bousculer l’avocat, le pousser dans ses retranchements, et le pousser à sortir la tête de l’eau pour tenter d’obtenir un semblant de justice.

Estampillé thriller, Pleasantville tient en fait bien plus du roman noir social et politique et du procedural que du roman censé faire frissonner le lecteur et le pousser à tourner frénétiquement les pages. Les adeptes de cliffhangers haletants passeront donc leur chemin. Ceux qui, par contre, aiment les romans qui prennent le temps d’installer intrigue et personnages et qui cherchent à démonter minutieusement les rouages d’une société trop belle pour être vraie devraient par contre y trouver leur compte.

Car s’il y a Jay, il y aussi et surtout Pleasantville. Enclave de la classe moyenne noire de Houston peu à peu investie par la population latina, le quartier tient de la communauté un peu trop lisse et qui, par ailleurs, abandonne peu à peu ses idéaux. Fondée par des noirs pour des noirs au moment de la lutte en faveur des droits civiques, Pleasantville est aussi la création d’un homme, Sam Athorne, bienfaiteur omniprésent et presque omniscient qui tient de plus en plus du seigneur féodal, dispensant ses largesses aux fidèles, enfonçant si besoin ceux qui le déçoivent. Il est aussi le père du premier candidat noir en passe de remporter les élections et le grand-père du directeur de campagne accusé de l’enlèvement de la jeune Alicia Nowell. Enfin, Pleasantville, quartier engagé, est donc devenu peu à peu une enclave dont les habitants ont laissé derrière eux leurs anciens idéaux et ne cherchent plus que le calme auquel ils estiment avoir droit.

C’est de cette communauté figée, un peu craintive face à son envahissement par une autre classe moyenne, hispanique celle-ci, qu’Attica Locke fait à travers ce roman le portrait grinçant et parfois même mordant. Partagée entre une réelle empathie et un non moins réel questionnement sur l’évolution de cette population passée peu à peu de la révolte des années 1960-1970 à l’embourgeoisement et à la recherche de la meilleure manière de garder ses privilèges, Attica Locke bouscule un peu les clichés et pointe les petites lâchetés et renoncements dont Jay Porter n’est pas la moindre des incarnation même si, au fond, il est sans doute celui qui cède le moins à ce mouvement, tout simplement parce que son travail qui est aussi sa vie dépend de la solidarité dont doit faire preuve sa communauté.

Et puis il y a aussi, bien entendu, toute la description d’un système électoral où tous les coups bas semblent permis, dont certains préfigurent de l’avis d’Attica Locke l’élection présidentielle de 2000 et l’arrivée au pouvoir de George W. Bush. La collusion entre entreprises, notables et politiques, accentuée encore ici par le fait que les deux gros candidats à la mairie sont l’ancien chef de la police et le procureur, est ainsi mise en relief par le récit d’Attica Locke qui, pour montrer tout cela, ne sacrifie toutefois en rien à l’efficacité et à la construction de son intrigue. Prenante en tous points – de l’enquête de Jay Porter à la mise en place du procès en passant par les aspects de la vie personnelle agitée du héros – celle-ci se découvre avec une certaine délectation, sans grands effets de manche, en prenant son temps et, surtout, toujours avec intelligence. Un roman stimulant.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
Commenter  J’apprécie          140
Bluebird, Bluebird

Le titre "Bluebird, Bluebird" donne sa tonalité musicale à ce polar de Attica Locke : il se réfère au morceau "Bluebird" de John Lee Hooker, guitariste et chanteur de blues américain, dans son album de 1952.



C'est tout le talent d'Attica Locke (accessoirement scénariste, notamment sur un projet de la chaîne HBO, sur le mouvement des droits civiques) de nous entraîner dans un Texas que l'on croirait encore engoncé dans les années 1950-60. Et pourtant, l'action se joue bien de nos jours, à l'est du Texas, dans le comté de Shelby.

Darren Mathews, Texas Ranger autant dans l'uniforme que dans l'âme, traverse une période difficile, professionnellement mais aussi dans sa vie privée. Car Darren est un homme de couleur. Et au Texas, malgré la très respectée étoile de sheriff épinglée à son uniforme, la couleur peut très vite s'avérer être un problème.

Par loyauté, Darren est intervenu, en dehors de son cadre professionnel, dans un conflit opposant un vieil ami, lui aussi de couleur, et un homme blanc ne faisant pas mystère de sa haine des Noirs. Ce dernier étant ultérieurement retrouvé mort, le doute plane sur le témoignage de Darren, dont la probité sera examinée par ses supérieurs et qui joue donc son avenir au sein des Texas Ranger. Son épouse, qui réprouve le choix de cette profession bien trop dangereuse, voit là l'occasion de ramener Darren à une vie de famille plus sereine.

C'est sans compter sur sa fibre de justicier texan quand se présente l'occasion d'élucider officieusement un double meurtre dans la petite ville de Lark. À quelques jours d'intervalle seront découverts les corps d'une femme blanche et d'un homme noir. Si les autorités locales sont pressées d'enterrer autant les corps que l'affaire, quitte à évoquer un motif fallacieux, Darren voit immédiatement un lien entre ces deux homicides.

Ce faisant, il va "souffler le feu" sur des braises qui couvent toujours dans le Texas profond. Personne ne veut entendre parler de crime de race, au risque d'exciter une haine ancestrale, dans une région où le Klux Klux Klan a cédé sa place à la non moins raciste FAT: Fraternité Aryenne du Texas. D'autant plus par un homme détenteur de l'autorité qui n'est pas un local, et de surcroît noir !

Attica Locke nous fait plonger en apnée dans le bayou Attoyac, dans ses eaux putrides, qui rendront le corps d'une des victimes, Mickaël. Elle pousse pour nous la porte du café "Geneva Sweet", où la patronne noire, femme courage et taiseuse, fait office de pilier pour sa communauté en offrant un lieu où se restaurer dans une société où il ne fait pas bon se mélanger.

Tout y est, la canette de Dr Pepper, le poisson chat frit, les tubes de blues. On se croirait dans Twin Peaks, version Etats du Sud.

L'auteur nous pousse aussi à l'arrière des cafés prisés des suprématistes, leurs tatouages, l'arme à la ceinture et le trafic de Cristal méth...

A travers ces deux établissements, elle souligne d'autant plus deux mondes qui semblent n'avoir plus rien en commun, tellement irréconciliables que même la loi est impuissante. Attica Locke pointe la haine aveuglée, l'endoctrinement, la violence, un environnement où vous n'êtes jamais en sécurité, où la couleur de votre peau peut vous coûter la vie.

Si Bluebird Bluebird est un polar poisseux, à mon sens très réussi, par l'atmosphère qu'il instille, j'ai tout de même eu quelques difficultés à rentrer dans l'histoire, à m'approprier les personnages, trop seulement ébauchés pour certains. Quand il y a trop de monde sur scène, on ne sait plus où porter le regard. Et si la description de ce Texas moite, étouffant, avec ses nuits d'encre et ses titres de blues m'ont séduite, j'ai buté sur un style parfois lourd, manquant de fluidité (la traduction peut-être ?) qui ont rendu ma lecture pénible. Le rythme se "décoince" un peu et s'accélère dans le dernier tiers du récit, compensant ce commencement difficile. J'aurai aimé m'attacher plus au Ranger Mathews, mais il manque à tous les personnages ce "petit supplément d'âme" qui, lorsque vous fermez votre roman, vous donne l'impression de quitter un ami. C'est donc pour moi un roman noir à l'atmosphère moite et sombre mais pas assez abouti. Il a tout de même le mérite d'exhumer cette ligne Mason- Dixon, ligne historique de démarcation entre les États abolitionnistes du Nord et les États esclavagistes du Sud, que l'on aurait pu croire passée d'actualité...
Commenter  J’apprécie          133
Dernière récolte

Marée Noire, premier roman remarqué d’Attica Locke, laissait entrevoir de belles qualités chez cette jeune auteure – en particulier dans ses évocations de la lutte en faveur des droits civiques des Noirs aux États-Unis – mais souffrait par ailleurs de défauts patents, notamment une intrigue pour le moins confuse. C’est donc avec curiosité que l’on attendait ce deuxième livre, histoire de meurtre dans une plantation de Louisiane devenue musée et dans laquelle, une fois encore, Attica Locke entend faire entrer le présent en résonnance avec le passé.



En effet, Caren Gray, héroïne de cette Dernière récolte, descendante d’esclaves attachés à la plantation Belle Vie revenue en ces lieux afin de les gérer pour la famille Clancy, se trouve confrontée au meurtre d’une immigrée clandestine employée dans les champs de canne à sucre loués par une grande entreprise sucrière autour de Belle Vie. Alors que la police cherche le coupable idéal, Caren soulève peu à peu un voile derrière lequel se bousculent bien des souvenirs enfouis et une histoire beaucoup moins lisse que celle que présente la troupe d’acteurs de la plantation dans son spectacle destiné aux touristes.



La réussite d’Attica Locke tient avant tout à cela. À cette façon de montrer, à travers les comportements de chacun des employés et habitants de Belle Vie, que tous portent la marque, malgré les décennies et générations qui sont passées depuis la création de la plantation, d’un conditionnement social profondément ancré en eux. Les employés noirs issus des environs mais qui ne sont pas liés directement à Belle Vie se considèrent encore par bien des aspects comme des esclaves et expriment une rancœur qui ne semble pas près de s’effacer ; Caren oscille entre l’attachement aux lieux, la reconnaissance envers les Clancy qui ont pris soin de sa famille mais, ce faisant, tend à se placer comme un de ces « oncle Tom », plus vraiment noirs mais loin d’être blancs, tandis que les Clancy jouent de leur réputation progressiste sans bien voir combien elle dissimule mal un paternalisme pesant, voire odieux. Dans ce lieu isolé et comme coupé du monde, ceux qui viennent de l’extérieur, qu’il s’agisse d’Eric, l’ex-mari de Caren, ou du journaliste Owens, ne font que tendre à Caren un miroir cruel dans lequel elle refuse obstinément de regarder jusqu’à ce que les événements ne l’y forcent.

Grâce à cette dramaturgie bien maîtrisée et à ces personnages bourrés de contradictions, Attica Locke parvient à faire de Dernière récolte un roman prenant et ingénieux qui s’appuie par ailleurs sur une première partie particulièrement tendue dans laquelle les comportements de Caren et de Morgan, sa fille, que l’on sent l’une comme l’autre aux limites de la schizophrénie, intensifient l’atmosphère de mystère qui plane sur Belle Vie.



Pour cela mais pour cette peinture des mœurs politiques d’un État encore par bien des aspects tributaire d’un histoire mal digérée et de comptes jamais vraiment soldés, on pardonnera à l’auteure une certaine tendance à trop vouloir jouer parfois une partition par trop fleur bleue qui n’apporte pas toujours grand-chose au roman. Voilà en tout cas de quoi passer un agréable moment de lecture.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
Commenter  J’apprécie          130
Marée noire

Je termine à l'instant ce livre, et je reste sur une impression mitigée.



Comme indiqué par d'autres contributeurs, l'affirmation sur la 4ème de la couverture "l'arrivée fracassante d'un nouveau talent" semble exagérée.



L'histoire est assez intéressante, quelque chose qui pourrait se rapprocher d'autres ouvrages plus aboutis comme l'affaire pélican par exemple, c'est à dire une histoire bâtie autour du pétrole dans le sud des Etats Unis en même temps que la lente progression des droits des Noirs.



Jay Porter, au passé un peu lourd, est confronté à un problème complexe qui peut le mettre en danger ainsi que sa femme sur le point d'accoucher.



Le style assez direct est un peu déconcertant. Il n'est pas vraiment désagréable mais laisse une impression d'inachevé. Peut-être une traduction un peu bâclée, n'en voulons pas à l'auteur, ce ne serait pas la première fois.



En fait, sans malice, ou si peu, le plus intéressant est certainement la post-face où l'auteur nous explique le lien avec son histoire personnelle. Si on ne doit lire qu'un extrait, ce sont ces 4 pages !
Commenter  J’apprécie          120
Bluebird, Bluebird

Un coup de cœur pour ce roman qui nous entraîne dans la chaleur du Texas, avec ses rednecks à l'esprit limité, ses odeurs nauséabondes de racisme, le bayou comme symbole, vivant mais putride.

Deux corps y ont été retrouvés à quelques jours d'intervalles, un homme noir puis une femme blanche.

C'est un ranger noir, Darren Matthews, qui va mener l'enquête, déterminé à établir la justice dans cet état qu'il n'a jamais voulu quitter, cet état qui est aussi le sien.

J'ai adoré le style de l'autrice, qui nous donne le sentiment que chaque mot a été pesé et réfléchi, qui clairement ne donne pas dans le remplissage des pages. C'est dense, puissant, prenant, étouffant aussi parfois mais une excellente lecture.
Commenter  J’apprécie          100
Pleasantville

Bof bof...

l'histoire tout d'abord... Assassinat de 3 filles pendant les élections municipales à Houston. On a un coupable, et même que ce n'est pas le bon coupable.

On découvre, c'est y pas Dieu possible, qu'il y a des magouilles et des basses manœuvres dans les élections... et même des retourneurs de veste!

Le style maintenant ... c'est aussi bien écrit qu'un rapport de police tapé à deux doigts. C'est aussi palpitant qu'un épisode de Josephine Ange gardien et il y a autant de placement de produit que de pub lors d'un prime sur TF1.



Bref, il y a quand même bien mieux à lire sur le marché.
Commenter  J’apprécie          100
Bluebird, Bluebird

Lorsque le ranger noir Darren Mathews est dépêché de Chicago dans une petite localité du Texas pour enquêter sur deux morts suspectes - un avocat noir de passage , une jeune serveuse blanche du coin - , il n'est pas accueilli à bras ouvert par les autorités locales promptes à tenter d'étouffer ce dossier brûlant. Nous sommes en 2016 , et pourtant, à Lark , semble perdurer un apartheid qui ne dit pas son nom , un espace-temps figé dans les années soixante. Ainsi , considérant les deux bars locaux : l'un est tenu par Geneva ,noire, veuve d'un guitariste de blues et fréquenté par une clientèle afro-américaine ; l'autre, géré par un membre de la FAT ( Fraternité Aryenne du Texas ) , est le QG de la population blanche locale. On écoute du blues dans le premier et de la country dans le second. Beaucoup de suspense et de tension dans ce récit addictif avec une bande son blues , à l'instar de son titre qui est aussi celui d'une chanson du légendaire John Lee Hooker .
Commenter  J’apprécie          100
Bluebird, Bluebird

Avec des mouvements sociaux tels que Black Lives Matter, jamais la question sur le sujet des discriminations raciales n'avait pris autant d'ampleur depuis bien des années aux Etats-unis, où l'actualité des violences policières ne fait que raviver les tensions d'un pays qui n'a jamais réglé les problèmes de racisme systémique envers la communauté afro-américaine et qui semble désormais en payer l'addition. Il va de soi que le sujet de cette discrimination latente a été abondamment traité dans le domaine de la littérature noire où les crimes de haine, comme on les définit aujourd'hui dans le pays, deviennent un thème important que de nombreux auteurs ont abordé à l'instar de Kris Nelscott évoquant l'histoire du mouvement afro-américain des droits civiques des années 60, de Colson Whitehead, récipiendaire de deux prix Pulitzer en 2017 et 2020, de Chester Himes et de son emblématique roman, La Reine Des Pommes ou de Joe R. Lansdale qui traitait le sujet de la ségrégation au Texas avec des romans comme Les Marécages ou Sur La Ligne Noire. Du Texas il est encore question avec Attica Locke qui nous présente avec Bluebird, Bluebird, un portrait inquiétant du "Lone Star" où elle vit, avec des relents de ségrégations qui semblent toujours présents dans certaines régions reculées de cet état du sud.



Le Texas Ranger noir Darren Mathews est en sale posture depuis qu'il est sous le coup d'une enquête du grand jury pour une affaire de meurtre commis par un des employés de sa famille. Accusé d'avoir couvert les agissements de l'accusé agissant en état de légitime défense, le policier risque d'être renvoyé de l'institution policière pour parjure. Mais une autre affaire le préoccupe avec la découverte du corps d'un homme noir au bord du bayou Attoyac. La victime a été molestée avant d'être noyée et pour la police locale il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un vol en dépit du fait que l'on a retrouvé son portefeuille sur lui. Pour le Ranger Darren Mathews il s'agit plutôt d'un crime de haine, ceci d'autant plus que sévit un groupuscule de suprémacistes blancs dans la région. L'affaire se corse lorsque l'on retrouve également le cadavre d'une jeune femme blanche ravivant les tensions sous-jacentes qui règnent dans une bourgade où blancs et noirs ne fréquentent pas les mêmes bars. En lutte avec les autorités locales, Darren Mathews va enquêter envers et contre tous pour déterrer les secrets que bon nombre d'habitants ne souhaitent pas voir resurgir.



Avec trois romans policiers à son actif, tous publié dans la collection Série Noire, Attica Locke n'a rien d'un romancière débutante lorsqu'elle intègre les éditions Liana Levi, avec Bluebird, Bluebird qui a été couronné du prix Edgard-Allan-Poe lors de sa parution originale en 2018. On comprendra dès lors l'aisance de cette romancière nous proposant, avec ce roman complexe, de découvrir les enchevêtrements d'intrigues multiples mettant en scène le Texas Ranger noir Darren Mathews qui doit faire face à une enquête du grand jury tout en menant des investigations sur des meurtres à caractères raciaux dans un comté reculé de l'est du Texas, à la frontière avec la Louisiane. On découvre un personnage nuancé, se révélant bien plus ambivalent qu'il n'y paraît, notamment dans ses rapports avec une mère alcoolique qu'il supporte difficilement préférant se tourner vers ses oncles qui ont pris en charge son éducation. L'autre aspect de Darren Mathews réside dans le fait qu'il a longtemps enquêter dans le cadre des agissements de la Fraternité Aryenne du Texas qui vont influencer son comportement et ses réflexions dans le contexte de meurtres sur lesquels il doit désormais mener ses investigations. C'est l'occasion pour Attica Locke de dépeindre l'atmosphère poisseuse de cette bourgade nichée au bord du bayou Attoyac avec une galerie de portraits où s'opposent membres de la communauté afro-américaine et membre de la communauté blanche qui cohabitent dans un climat de tension flirtant avec le contexte d'une ségrégation qui semble toujours d'actualité à l'instar du Geneva Sweet's Sweets, café réservé aux noirs tandis que les blancs fréquentent le Jeff's Juice House. Représentatifs de ces tensions raciales, les deux établissements publics nous permettent d'appréhender la complexité des rapports entre les deux communautés qui recèlent quelques secrets qu'Attica Locke prend soin de révéler avec une belle virtuosité en nous éclairant sur l'ensemble d'une bourgade qui rechigne à dévoiler les rapports qui peuvent s'instaurer entre les différents membres de la localité. Outre Darren Mathews, on appréciera les portraits de femmes de caractère telles que Geneva, la tenancière du café portant son nom ou de Randie Winston, une jeune veuve, citadine, bien décidée à faire la lumière sur les circonstances du meurtre de son mari et sur les raisons qui l'on conduit à se rendre dans le comté de Shelby.



Ainsi, au gré d'un bande sonore agrémentée des grands standards du blues, Attica Locke distille avec Bluebird, Bluebird un récit policier âpre et passionnant, sur fond de tensions raciales qui vont révéler les accointances entre les différents membres d'une communauté d'un Texas méconnu que l'on découvre avec une grande délectation.







Attica Locke : Bluebird, Bluebird (Bluebird, Bluebird). Editions Liana Levi 2021. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Anne Rabinovitch.



A lire en écoutant : Bluebird de John Lee Hokker. Album : The best of John Lee Hooker. 1994 Geffen Records.
Lien : https://monromannoiretbiense..
Commenter  J’apprécie          100
Marée noire

« Marée noire » est un roman lucide, douloureux et captivant. C’est un premier roman d’une auteure noire américaine née au début des années 70. Elle entraîne le lecteur dans la société américaine des années 80. Les années Reagan où le monde politique et économique s’acoquinent dans une stratégie pour la course à l’influence mondiale. Les hydrocarbures sont le nerf de la guerre contre les pays du golfe et l’organisation de l’OPEP. Dans ce roman se pose aussi la question des conditions sociales et économiques de la communauté noire. Cette position est incarnée par Jay Porter, avocat de droit civil, ancien étudiant activiste des droits civiques et bientôt père. Les évènements se déroulent à Houston, Texas, dont la maire Cynthia Maddox est une ancienne militante des droits civiques et ancienne copine de Jay. Houston est la patrie des grosses industries pétrolières qui voient d’un mauvais œil la grève que préparent les dockers noirs. Ils sont frustrés des écarts de salaire et de l’absence de promotions hiérarchiques dont ils sont victimes.

Le roman s’ouvre sur la scène d’une croisière au clair de lune, dans le bayou. Jay pensait offrir à sa femme enceinte de huit mois une sortie nocturne romantique avec gâteau au chocolat, ballons de baudruche et musique. Rien de chic car les temps sont durs. Le bateau longe une étendue mal éclairée vers l’ouest de la ville lorsqu’un cri et des coups de feu s’invitent à la fête. Jay fait arrêter le vieux rafiot et récupère une jeune femme blanche : Elise Linsey. Sur la terre ferme, Jay et sa femme déposent Elise devant le poste de police et filent chez eux. Et les ennuis commencent et vont crescendos. Jay est menacé, rossé par un homme conduisant une Ford LTD noire. Jay pourrait laisser tomber. La peur et l’humiliation se rappellent sans cesse à sa mémoire, le hantent. Son parcours d’étudiant militant est raconté et expliquent son comportement actuel. Dans un coin de sa tête, il sent encore l’étreinte du gouvernement sur lui.

Et pourtant, une force semble le porter, encouragé par sa femme Bernie, simple, sincère, à l’aise avec ses sentiments et un père qu’il n’a jamais connu, assassiné par des blancs avant sa naissance. La graine est semée. Il va se battre et vivre afin de pouvoir influer sur le devenir historique de sa communauté mais aussi de la société américaine.

Dans ce roman, Attica Locke dépeint le statut social et politique des Etats-Unis. Elle invite à réfléchir sur la nature humaine et sur ses désordres. Il est toujours tentant de penser qu’en France l’herbe est plus verte mais nous ne devons pas masquer malgré tout notre terrible et sinistre « héritage » esclavagiste et le communautarisme.

Commenter  J’apprécie          80
Pleasantville

Déception et ennui. Le livre pourrait être captivant, il est plutôt assommant

PLEASANTVILLE d’Attica LOCKE n’a rien d’une ville plaisante, on y trouve des méchants, des loosers et des adolescentes tuées !

A l'instar du film de Gary Ross voici un petit monde figé, englué, bocalisé où évoluent des personnages qui semblent condamnés à un destin fermé : des « familles noires huppées », des candidats aux élections municipales représentatifs d’une certaine modernité, une femme district attorney, Sandy Walcott, un notable noir, ancien directeur de la police, Axel Hathorne et bien sûr une jeune fille tuée.

On suit l’enquête à travers les yeux de Jay Porter, avocat noir, qui se fait attaquer, voler, bastonner tout au long du récit.

Il y a un suspect que tout semble accuser et des faux-semblants, des belles paroles et des coups bas des deux camps électoraux pour récupérer l’affaire du meurtre.

Pour nous attraper Attica Locke nous abreuve de descriptions vestimentaire jusqu'à la nausée littéraire. On cherche ce que nous apporte qu’untel soit habillé d’« un Levi’s taille basse et un tee-shirt BIG EASY BLUES FEST » ou qu’une autre soit « vêtue d’un pantalon marron discret et d’un chemisier à fleurs » mais on s'aperçoit que cela ne nous rapporte rien.

Idem pour des énumérations censées démontrer de façon implacable une thèse avec les très scolaires « primo, secundo, tertio, quarto » qui s’égrènent comme au tribunal mais n’ont ni l’impact ni l'éclat d'une révélation. Le coupable sera en fait celui que l’on ne peut pas soupçonner, comme toujours, un lieu commun, sans surprise pour la fin du livre.



Commenter  J’apprécie          81
Pleasantville

C'est un bon polar au sens où vous vous retrouvez bien accroché à l'intrigue aux trois-quarts du bouquin, à tourner les pages le plus vite possible pour découvrir la suite. Attica Locke réussit à faire monter la pression jusqu'à la scène du procès où défilent les témoins de l'accusation et de la défense et où la lumière se fait.



Mais malgré cela j'avoue que je suis un peu resté sur ma faim. J'ai eu du mal à rentrer totalement dans cette histoire qui fait la part trop belle aux aspects juridiques du système américain (ce qui personnellement, ne me passionne plus guère après avoir vu cela chez Grisham). Je n'ai pas eu non plus le coup de foudre pour le personnage principal, l'avocat Jay Porter. On devine assez vite que l'homme un peu dépressif depuis le décès de son épouse, tourmenté par son passé de militant et ses difficultés à faire aboutir ses combats juridiques, va surmonter ce spleen, retrouver son allant et faire triompher la vérité.



La peinture sociale de Houston avec ses minorités raciales et ses grandes fortunes pétrolières, est néanmoins intéressante.
Commenter  J’apprécie          80




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Attica Locke (264)Voir plus

Quiz Voir plus

Les prénoms des personnages de Harry Potter (+ noms dans la version originale)

Quel est le prénom de Hagrid ?

Hagrid est son prénom
Rubeus
Filius
Severus

17 questions
6043 lecteurs ont répondu
Thème : Harry Potter, tome 1 : Harry Potter à l'école des sorciers de J. K. RowlingCréer un quiz sur cet auteur

{* *}