Toujours très intéressantes ces Annales historiques de la Révolution française.
Dans ce numéro N° 412, j'ai particulièrement aimé les articles suivants :
- de Paris à Toulouse ; le magnétisme animal dans les échanges épistolaires de deux femmes (1779-1789)
Je suis toujours intriguée par le mesmérisme et son engouement au XVIIIe siècle. Il s'agit d'une méthode thérapeutique introduite en France en 1778 par Mesmer, un médecin réputé en conflit avec la Faculté de médecine de Vienne. Selon sa doctrine, les maladies résultent des altérations de la circulation dans le corps humain d'un fluide impondérable répandu dans tout l'univers. Il prétend rétablir cette circulation en rassemblant des patients autour d'un baquet rempli d'eau, de limaille, de verre pilé et de bouteilles qui emmagasinent le fluide transmis par des verges de fer appliquées sur les parties malades.
Ici, sont dépouillées les correspondances de deux femmes dont une est une adepte de ces pratiques et l'autre sceptique. Toutes deux sont représentatives de la société éclairée du XVIIIe siècle, avide de connaissances nouvelles et de nouveautés scientifiques.
- le projet de fuite de Louis XVI à Rouen en juillet 1792.
Je ne connaissais pas ce projet et cet article vraiment brillant de Jean-Charles DAUMY, nous rappelle le contexte historique (après la tentative de fuite en juin 1791 et l'arrestation de la famille royale à Varennes), les rumeurs dénoncées au Club des Jacobins, la division des monarchistes et leurs différentes tendances.
Ce ne fut pas qu'une rumeur, car Talleyrand en parle à Madame de Staël dans une correspondance en octobre 1793, et les "organisateurs" (Molleville, La Rochefoucault…) demandent le remboursement de leurs prêts consentis au roi, à la Restauration !
L'échec de ce projet est dû aux divergences des différents courants royalistes ("Noirs" qui voulaient un rétablissement des règles de l'Ancien régime et les "Constitutionnels" attachés aux principes de 1789).
C'est d'ailleurs, la reine qui refusa le projet, par animosité envers Liancourt (un Constitutionnel) et influencée par la Cour…
- Un partisan de la Gironde ? Charles Louis Antiboul, député de la Convention.
Un article très constructif sur ce député, mais surtout qui décrypte les notions de "partis" qui n'existent pas en cette période historique.
Le modèle tripartite généralement retenu pour la période de la Révolution française, Montagne, Marais ou Plaine, et Girondins, souffre d'un schéma simpliste, pour l'auteur ; cette répartition des députés propose un classement figé qui ne tient pas compte de l'évolution possible des positionnements politiques de chacun, de leur leurs nuances et de leurs paradoxes. Cette argumentation m'a rappelé celle de Jean-Clément Martin dans son ouvrage "L'exécution du roi".
- enfin, un article très novateur sur la notion de logistique militaire :
On décrit souvent les batailles de la Révolution, mais j'ai rarement lu des livres ou des articles sur ce thème. Il est vrai que sans uniformes, armes, nourriture, la guerre n'est pas possible, et ne peut être gagnée.
Au début de la guerre, dès avril 1792, le tâtonnement logistique semble manifeste, relevant d'Entreprises contractuelles, de régies…
Après les premiers succès, la République centralise davantage son action en mettant en place des directoires (achats-habillement...)
Des Commissions dédies sont créées sous l'égide du Comité de Salut Public à l'été 1793, puis la disparition du ministère de la guerre en 1794 marque un tournant décisif.
J'ai été surprise d'apprendre que les volontaires et les gardes nationaux devaient s'équiper eux-mêmes, et à compter de septembre 1791, les directoires des départements sont chargés de l'habillement de ces hommes. Mais ces derniers devaient rembourser ces affaires par une retenue sur la solde !
Que ces hommes aimaient leur patrie pour ainsi s'engager ! Je le redis, ils étaient des géants !
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Avec ce livre, Aurélien Lignereux nous offre une analyse originale sur l'histoire du Premier empire basée sur un colossal travail sur les archives.
L'auteur a ajouté à l'immense bibliographie existante sur le Premier empire un ouvrage qui manquait : une histoire des départements réunis à l'Empire français.
De Rome à Hambourg, des millions de sujets sont devenus français.
Chaque Européen "réuni" à l'Empire français bénéficiait de la Constitution française et du Code civil.
A son sommet,en 1810, l'Empire français comportait 130 départements.
C'est sous la Révolution, en 1792, que commença cette politique de "réunion" à la France.
Après 1815 et la chute de l'Empire, de nombreux habitants de pays, principautés ou duchés "réunis" à la France, sous la Révolution ou le le Premier empire, demandèrent à conserver leur nationalité française.
La thèse d'Aurélien Lignereux comme quoi les guerres de la Révolution et du Premier empire ne sont pas simplement des guerres de conquête est ambitieuse et ne manque pas de fondement.
De plus, il écarte certaines idées reçues sur le Premier empire.
Une lecture passionnante.
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